Re: Pulsions sous morphine

Je me suis mise d'autorité à l'écart, enfin, on m'y a mise, et le regard que m'a lancé Eönwë me suffit à comprendre que si je m'approche ça aidera pas.
Je le vois s'énerver, je le vois envoyé valser Ayamé contre le mur, et puis... Tout ce calme... Je suis là, debout, machinalement je me baisse pour relever la machine, je crois qu'elle va être bonne a remplacer. Puis je reste en arrière alors que j'entend la voix d'Eönwë s'élever:

"Maintenant que tout est bon, laisse moi t'expliquer. Tu es au Sanctuaire, tu reviens de trois jours de coma et de deux arrêts. Je ne te hurlerai pas dessus car la peur d'avoir manquer d'assister à tes obsèques est encore bien présente. Tu es blessé et pas qu'un peu, alors tout ce que je te demande, c'est de rester calme, enfin, autant que possible."

Je suis limite à me tordre les doigts dans tout les sens, je ne sais pas si je dois m'approcher où non, peut être veut il pas me voir. Je suis quand même soulager, aller savoir pourquoi en fait. Je ressens sa douleur, nette et puissante, sa gorge en feu, ces membres douloureux... Je m'approche d'une table ou une carafe d'eau est présente, je sers le liquide dans un verre et hésitante, je m'approche.
Eö s'écarte, me laisse passer et sans un mot, sans un sourire, j'amène le verre à ces lèvres pour qu'il boive un peu, ça apaisera.
Une fois fais, je tend le verre à Ayamé pour qu'il le repose, avant de saisir un baume de soin, celui avec lequel je l'ai massé ces trois derniers jours et toujours sans un mot, je m’assois sur le lit, je me chauffe les mains et entreprend de le masser, membre après membre, muscle après muscle.

"Tu as eu le tauracle."

Inutile que je lui dise combien il était stupide, j'en avait pas envie. Je déglutis et reprend tout en massant délicatement:

"Et ta... Situation délicate ne devrait pas tarder à revenir."

J'entend un léger bruit, la surprise d'Eö sans doute, cependant je ne lui accorde aucun regard et il reprend:

"Quand tu seras mieux, je pourrais finir de m'occuper de tes blessures."

Et j'ai eu le coma aussi, je m'en sors pas si mal pour une chasse suicidaire. Mais quand elle en vient à "la situation difficile" je mets un moment avant de comprendre qu'elle parlait de Fafnir. Je n'ai compris qu'en voyant Ayame froncer les sourcils et me regarder l'air de lui avoir foutu la peur de sa vie et en même temps que j'en verrais des pires s'il me tombait dessus.

Un paternel de substitution... demi-elfe et archer, je trouve le mélange trop risqué pour moi. Et je rougis. Je rougis assez pour que cela se démarque de mes bleus.
Je lui avais pourtant dit que c'était compliqué, alors je ne comprends pas le reproche dans sa voix.

J'ai essayé de parler mais ma voix faisait défaut. L'eau n'avait pas aidé grand chose, ça reviendra. Alors je hoche du menton pour Eönwë. Les blessures ça peut attendre..
J'essaye de parler à nouveau.
Mais je ne sais plus quoi dire. C'était quoi la question ?

Je fais le lien, assez vite. Hôpital. Fafnir. Fafnir. Hôpital. Et Aliénor. Oui, il n'avait pas dû la ménager.

-Désolé.

Ma voix est rauque mais elle s'entend.Je ne sais pas quoi dire de plus. Au départ je pensais qu'elle avait compris, c'est tout, qu'elle ne regrettait rien comme elle me l'avait affirmer. Mais les filles sont compliquées, toujours.

Dites, je viens de sortir du coma, les prises de têtes vous pourriez voir ça plus tard, non ?

Je sais ce qu'il me faut. Un autre tauracle apeuré.

"T'excuse pas, on s'est fait aucune promesse il me semble."

Je n'ai vraiment pas envie de sourire, alors je me contente de baisser la tête et de reprendre les massages, après les bras, je passe aux jambes, toujours délicatement, avant de lui remettre les couvertures, cependant, je ne peux m'empêcher, en reposant le pot de baume sur la table de chevet, de me pencher vers lui et de lui murmurer:

"Ne me refais plus jamais peur comme ça, je pourrai pas m'en remettre. Tes muscles sont ankylosés, ça devrait passé avec du repos et cette crème."

Et... Je craque, je lui fait un clin d'oeil, suivis d'un sourire, puis je me redresse en soupirant:

"Et je tamponne ta carte de fidélité t'inquiète."

Parce qu'au final, il ne m'avait rien promis, ça avait été clair dès le début, c'est moi qui me suis attachée plus que de raison, comme j'ai fâcheuse tendance à le faire.

"Je vous laisse, j'ai peu dormis depuis trois jours, je dois aller m'occuper de l'administration et demain je suis de garde à la caserne."

Maintenant qu'il était en vie et réveillé, je n'ai pas de raison de rester. J'offre un sourire à Ayamé, Eö me lance un de ces fameux regard qui veut tout dire et je lui répond:

"Ouiiii j'vais dormir!"

Et après un dernier regard vers Wergeld, je lui offre un sourire et m'éclipse de la chambre non sans avoir entendu Eö demandé:

"Un tauracle alors?"

Ayame se passe une main sur le visage. Je l'ai vu faire tellement de fois... Dès que je l'exaspère. Mais il a le sourire. Un beau sourire bien à lui qui crie sa joue "il est vivant, il est vivant". Un peu et je le verrais bien danser une danse. Comme l'ours dans ce dessin animé...
Il est ce genre de personne, sur lesquels la joie est naturelle.
Après la masse de coups que j'ai reçu la dernière fois que j'ai eu les yeux ouverts, ça me fait du bien de voir les deux elfes (de ma vie ?... eurk) à mon chevet.

-Ouep, un tauracle. Enorme et remonté contre Fafnir, on se demandait ce que l'autre lui avait fait.

Mauvaise idée de leur expliquer ça... Ayame perd un peu de son sourire. Ma façon de voir les choses comme une classe verte qui a mal tourné ça le met hors de lui. D'ailleurs, je vois l'ange de son arbalète déformer le dos de sa veste. Elle est sûrement déjà chargée et prête à tirer.

-On a vu un homme à moitié grenouille. Et un genre d'humanoïde bicéphale avec plus du requin que de l'humain dans ses 4 rangées de dents. je me suis fais mordre par un diable aussi.

Il a pas gardé les yeux ouverts longtemps le diable.

-Vous m'avez enlevé des organes pendant l'opération ?

Je tapotais l'épais pansement par sécurité. Ils aimaient bien garder des souvenirs au sanctuaire. Et je souris comme si de rien n'était.

Fafnir... Mon visage perd de ces couleurs, voilà bien longtemps que je n'ai entendu ce nom là... Depuis le jour où dans cette même pièce il m'en avait parlé. L'enquête oui je l'avais faite et ce que j'y avais appris me suffisait... Fafnir. On n'en a pas parlé, j'ignore même si Ayamé est au courant de ce que je sais et je me vois mal posé les questions qui me vienne aux lèvres là de suite...
Et je l'écoute parler de ça comme si c'était la dernière rencontre à la mode, ce besoin de chercher le danger, de chercher même au-delà du danger en est presque inquiétant et je pense que ce n'est pas Ayamé qui me dira le contraire.
Je croise les doigts et ne peut m'empêcher de sourire à sa dernière phrase. Pour le coup, j'en sais rien, je suis arrivée après la bataille. Je saisis le dossier placé au pied du lit et le parcours:

"Et non, tu as encore tous ce qui faut là où il faut. Si j'en suis ce qui est écrit et les bilans, les cornes n'ont pas fait de dégâts sur les organes vitaux. Alors t'inquiète c'est pas cette fois qu'on agrandira la galerie de tes organes blessés ici..."

Je lui offre un clin d'oeil et me tourne vers Ayamé:

"Tu veux pas aller te rafraîchir? Je veille sur lui t'inquiète pas."

Je voulais m'assurer d'une chose et je me voyais mal faire une quelconques boulettes devant lui. Parce que sans quoi, je suis pas certain que tout ce passe aussi calmement que possible. Je me tourne à nouveau vers Wergeld et reprend:

"Mordre par un diable? Tu ne cesseras jamais de m'étonner Wergeld."

Les minutes s'écoulaient et je recouvrais des forces, la morphines ne devaient plus faire beaucoup d'effets et puisque je ne me tordais pas de douleur, Lawaren avait dû s'épuiser sur mon cas pour m'éviter 6 mois d'hospitalisation et tout autant de rééducation et de régimes alimentaires.

-Je n'avais jamais croisé de diable, et de tauracle non plus.

En regardant ma main j'eus la ferme intention de ne plus en rencontrer. Ayame, évita mon regard, maintenant que la joie de me retrouver en vie était passée il me faisait... Payer quelques mois de mensonges et de vérités dissimulées. Et mes points de sutures n'étaient pas encore assez bien cicatrisés pour que je lui hurle dessus de vider son sac maintenant, qu'on en finisse, non ?
Les prises de tête c'est gonflant.

-Ils sont solides.

La porte se referma sur le capitaine. Mon sourire disparu. J'y étais passé de peu, et vu la quantité d'antibiotiques qu'on m'inoculait je n'étais pas encore sorti de l'hôpital.

-Ayame est au parfum maintenant et Aliénor aussi. Quelle journée à la con...

Un long soupir salua mon constat.
Je levais mon bras droit et le hissait sur mon visage en tirant au passage sur la perfusion. L'autre épaule était encore trop raide pour me mettre à la gymnastique.

"Ayamé est donc au courant et..."

Je fronce les yeux un brin perplexe, Aliénor au courant? Ils sont devenus si proche au point qu'il lui confit des détails de sa vie privée que moi et Ayamé avons mis des mois à savoir?
Non là définitivement y a un truc qui cloche, je prend la chaise sur laquelle était assis Ayamé quelques secondes plutôt et je prend place dessus, je tapote l'arête de mon nez et demande:

"Ayamé, je conçois, mais Aliénor? Que vient-elle faire là dedans?"

Ben oui, Aliénor a tendance à avoir l'amitié et l'attachement facile, donc la réaction qu'elle a eut vis à vis de lui tout à l'heure m'a pas plus surpris mais là j'avoue qu'à moins qu'il n'est partagé quelque chose que... Je reporte mon regard sur lui, je fronce les yeux, parce qu'une lumière c'est éclairé dans mon cerveau et que là, j'ai compris.

"Et tu n'avais sans doute pas croiser de guérisseuse non plus. Wergeld, t'es suicidaire où complètement imbécile?"

Rhaaaa, j'ai pas envie de l’engueuler, j'ai pas envie de lui prendre la tête dans l'état dans lequel il est, mais là, vive le triangle! Et pour peut que... Non j'ose pas penser aux éventuelles conséquences, parce que là, on allait devant de gros problèmes, énorme même...

"Et lui est au courant pour elle?"

Suicidaire ET imbécile, deux réponses justes, t'as gagné le gros lot. Moi aussi, tiens. Sur la porte une petite vitre, je tourne la tête, une infirmière qui regarde et s'en va.

-Mon fan club progresse de jour en jour dans cet hôpital...

Il y en a beaucoup qui serait sûrement ravi d'être la coqueluche de la gente féminine du sanctuaire, moi... Pas du tout. Elles sont gentilles la plupart du temps, et là où sa coince c'est lorsque Fafnir l'apprendra. S'il perd la raison une seule seconde il y aura au moins un mort.

-Tu sais, je viens de me réveiller, je ne sais pas où est parti Fafnir et je ne sais pas ce qu'ils se sont raconté pendant ma petite virée en solitaire. Pose donc la question à Ayame et croise les doigt pour que Fafnir ne sache rien. Rien du tout.

C'est un malade, mais un malade intelligent. Il te chasserait une fourmi dans la jungle, alors Aliénor... C'était pas bien compliqué à comprendre, elle cache très mal ses émotions et Ayame ne sait pas dissimuler sa colère non plus. Si on imbrique le tout...
Mon bras glissa, je cherchais à me redresser sur mes coussins sans succès, j'étais allongé bien à l'horizontal et avec le plaid qu'ils m'ont cousu sur le bide je resterai dans cette position encore longtemps.

-Jusqu'à maintenant il s'est plutôt bien comporté. Il m'a dit qu'il n'a fait de mal à personne depuis... Depuis ma mise à pied. Je ne pense pas qu'il mente.

"Tu as toujours eu ce fan club, c'est une habitude pour nous ici, qui du personnel ne connais pas au moins une partie de ton anatomie?"

Je lui offre un petit clin d'oeil avant de poser mes mains sur les cuisse et de pousser un soupir. Arriver bien après, je ne peu dire exactement ce qui a été dis ou pas, Aliénor était déjà dans tout ces état et contrôlant difficilement sa sensibilité qui chez elle était du genre très naturelle.

"Je suis arrivée alors que tu faisais ton premier arrêt, c'est d'ailleurs elle qui t'a ramené et ce à deux reprises parmi nous. Ayamé était déjà là, mais Fafnir lui non, je pense qu'il a du partir avant que je n'arrive."

Je pousse un soupir et secoue la tête:

"Mais au vu des allusions que je comprends d'ailleurs maintenant, je pense qu'il doit être au courant."

En le voyant essayer de se redresser, je me lève de la chaise et m'approche du lit afin de lui tendre une petite manette:

"Pour surelevé un peu le haut du lit, je pensais qu'après tes maints séjours tu la connaitrai cette astuce."

Je redresse un peu, mais pas trop non plus, la position assise n'est pas recommandé, je tiens pas à ce que le travail de Lawanen soit réduit à néant.

"Et t'a t-il donné des raisons de le croire? Es-tu au quotidien avec lui pour savoir ce qu'il fait?"

C'était étrange, je ne désirai pas lui faire la moral, non parce que là, on avait vraiment cru le perdre et que franchement, toute grave que cette histoire soit, dans l'immédiat s'était pas non plus mon soucis premier.

"Tu es assez grand pour assumer la conséquence de tes actes Wergeld, fais juste attention à toi et à ceux qui t'entoure. Ce n'est pas un enfant de choeur, tu le sais, je le sais, Ayamé le sais... Mais pas Aliénor..."

Mi-moralisateur, mi-inquiet... Je récupère la télécommande qui contrôle le lit et je joue avec pour ajuster. Ça a le mérite de m'occuper les mains et de me détendre.

-Je sais qu'il ne ment pas. J'ai surveillé la presse ces derniers mois, pas de mort suspecte ni supposée être de son fait. Pour le moment, tout plaide en sa faveur. Pour un peu que quoique ce soit puisse l'avantager dans sa situation.

Mon père m'avait parlé d'un grand homme dans son monde, qui a vécu il y a plus de 2000 ans. Et cet homme disait "il faut garder ses amis près de soi, et ses ennemis encore plus près", enfin quelque chose dans ce goût là. J'obéis.

-S'il touche à Aliénor, il est mort. Il le sait. Je le sais. On a pas besoin de s'expliquer pour comprendre les règles qui régissent nos rapports.

J'y pense. Il me doit la vie.

-Il a une dette envers moi maintenant.

Ayame est revenu, il passe devant la vitre et s'éloigne. Il attend que Eönwë sorte, sûrement pour lui parler, lui demander comment je vais, car à lui je ne dis rien. En fait, je pourrais lui parler c'est lui qui n'a pas envie de m'entendre.

-Quel bordel. Je vais devoir m'occuper d'un demi-elfe inquiet en rentrant... Démissionner me ferait du bien. Ne plus venir en ville, reprendre la route au quotidien et aller au devant de tout ce qui a des cornes/crocs/griffes. J'aimerai que mon père soit encore là.

Je ne demandais jamais après mon père adoptif. Jamais. Il m'avait élevé pour survivre dans la zone du dehors, je connaissais les règles de la chasse, les règles du silence dans les contrées les plus sauvages. Mais les gens, ça... Il a totalement oublié de m'apprendre à faire avec.
J'ai besoin d'une claque derrière la tête et de l'entendre m'appeler trois pas devant moi "Dépêche gamin, l'ombre te rattrape..." avec un sourire énigmatique.