Pulsions sous le soleil

Un poc plus tard et deux beaux garçons apparaissaient au milieu du souk de Dun. On entendait des gens appeler les acheteurs, ça sentait le poisson fris et le bois vernis. Du désert on sentait l'odeur de la cendre des brulis à l'Est de la ville.
Le port aussi amenait ses propres odeurs et ça sentait l'algue chaude si on reniflait à plein poumons.

-Atterrissage réussi !

Je regardais les rues qui s'ouvraient entre les étales, avec l'heure et la position de notre ami soleil, j'indiquais le nord.

-C'est à quelques kilomètres plein nord, le lutin m'a dit qu'on tomberait dessus facilement.

Il me l'a dit avant que je ne l'assomme et ne l'enferme dans un réduit dont il n'échappera pas avant un long moment. Ce qui nous laisse le temps d'exploiter ses informations avant qu'il ne se rende compte qu'il a été trop bavard. Au travail !
Plus vite il sera terminé, plus vite on pourra s'essayer à d'autres activités en équipe... je me comprends.

Mais on changera de village, il fait trop chaud ici.

Premier réflexe, je m'éloignais de lui. Mieux vaut prévenir que guérir et sa parole ne me rassurait pas le moins du monde. Avant qu'il ne s'engage pour sortir de la ville, je le retins.

-D'abord je préviens Aya, attend-moi là.

Je me dirigeais vers un post de Santuaris et de quelques miliciens volontaires. L'un des hommes se porta volontaire pour aller livrer mon message dès que je sortis mon porte-feuille de ma poche, le sanctuari fut très bavard alors que je rédigeais la note à destination d'Aya.
Quand je le questionnais sur les tauracles il ne sut par contre rien me dire dessus si ce n'est que le groupe devait passer au nord de la ville pendant leur pseudo migration de l'Est vers l'Ouest. Habitude prise dès la venue de la saison des pluies dans la région. On avait vu les bêtes partir depuis les montagnes et la moitié d'entre elles ne sont pas arrivées à l'orée de la forêt Ing.
La moitié signifie dans notre cas, 4 ou 5 bêtes tout au plus, d'où la nécessité de les retrouver et de se charger de ce qui les a empêché de migrer... Mon mot remit, je mémorisais le nom du sanctuari et lui indiquait que je parlerai de lui à Ez si mon message était bien remis à son destinataire. L'homme fut ravi quand un rayon d'espoir de quitter cette contrée plutôt hostile apparu subitement sous ses yeux.

Une minute après je retrouvais Fafnir.

-On commence par ton artéfact volé, et après tu m'aideras à retrouver les tauracles.

Et c'était parti pour sortir de la ville.

Ayamé ? Mais il n'a nullement besoin de savoir où on est, ça ne l'intéressera pas ! À moins qu'il veuille participer et les elfes, ça ne m'a jamais attiré plus que ça, les borgnes non plus. À part moi, mais dur de faire des folies tout seul.

Le silence de la marche ne me disait rien de bon. Wu était crispé, plus que d'ordinaire, et je suais sous le soleil... Je l'invite à Atlantis après, ou à Termer, ou n'importe où loin du désert et de ses environs proches.

-C'est quoi ces tauracles ?

Parler fais passer le temps, s'il se déride un peu.

Tauracle. Ça ressemble à Taureau mais à Entre-Monde on évite de se fier à ce qui y ressemble. Quand on m'a parlé de vers à soie, je pensais à une petit serre pleine de vers... Je suis tombé sur un lombric de 8m de long à ma dernière visite. Il y a aussi les taupes, celles qui pourraient vous manger un homme par erreur !
Il faut remarquer qu'à Entre-Monde, on voit souvent des bestioles plus grosses que ce qu'on aimerait, qui a dit que l'humain était un prédateur universel ? Le vers à soie se classe très bien lui aussi.

-Des taureaux. Légèrement plus robustes que ceux qu'on connait, ils ont 4 cornes au lieu de deux et une plaque osseuse entre les yeux qui remonte sur le crâne. Ils sont armé pour te foncer dessus, t'embrocher et t'aplatir.

Un sourire naquît sur mon visage.

-Ne te gêne pas pour en croiser un !

Et le divin silence revint. Amen.

Des yeux nous cherchions sur le sol des traces d'activité humaine. On a bien trouvé un morceau de filet qui brûlait sous le soleil depuis très longtemps déjà. On a même trouvé un pneu sous une souche cuite... Mais pas de trace particulière et ça continua jusqu'en milieu d'après midi.
J'avais abandonné ma veste près d'un arbre, le seul de visible à des kilomètres, un foulard et mon col de chemise me protégeaient la nuque et la tête du soleil. Travailler à cette heure ci dans un tel endroit... On suait à chaque pas et on ne voyait pas grand chose si ce n'est la ville s'éloigner jusqu'à disparaitre.

Puis on trouva de vieilles traces de pneus. Un véhicule plutôt léger et rapide mais ici le vent ne souffle pas souvent et les traces ne devaient pas avoir plus d'une journée. À partir de là, on s'est mis à les suivre.

S'il n'y a que ça pour te faire plaisir, je le note, mais avant que je ne meure, il faut payer...
Sauf qu'il ne paie pas, surtout sous une telle chaleur. C'est bien, moi non plus. Le nuque raide et le dos douloureux, je levais parfois les yeux au ciel pour m'étirer.

Accord tacite de ne pas enquêter en ville, on préférait chercher nous même discrètement, aucun droit à l'erreur n'était permis, alors nous devions trouver leur cachette sans nous faire remarquer. Ce qui passait par une chasse dans les herbes sèches.

Les traces remontaient sur de nombreux kilomètres droit vers le Nord. Et c'était vraiment amusant car on ne voyait toujours pas d'arbre sauf la cime du vieux gommier rouge. Arbre de zone aride, il n'en aimait pas moins l'eau. On pouvait penser qu'il y en avait en sous-sol. Pas d'arbres à perte de vue et de l'eau sous terre. Je trouve ça plutôt étrange.

Les traces s'effacèrent peu à peu, elles avaient été piétinées récemment par un troupeau d'ongulés.

-On sait qu'ils partaient vers le Nord. C'est pas vraiment le chemin idéal pour des commerçant.

On restait là, à chercher de la logique dans tout ça.

Passant une main sur ma nuque je la retirais trempée. Et sans gourdes nous ne tiendront pas beaucoup plus longtemps sous cette chaleur. Enfin, moi si, lui le rat des villes aurait peut-être besoin qu'on retourne à Dun pour la nuit.

-C'est pour ça que je pense qu'il s'agit de notre homme. Les gens ne prennent pas cette direction quand ils quittent Dun. Les marchands vont soit vers l'ouest vers Lazareth ou vers le Nord-Ouest vers Entre-Monde ou pour contourner le désert avant de rejoindre Sierra. Donc, ils sont forcément dans le coin. Plus au Nord ou sous notre nez.

Sous notre nez semblait être une bonne solution. Le sol trembla légèrement, juste assez pour attirer notre attention.

Fragilisé par une voiture, fragilisé par une armées de buffles, une fissures se dessina de Fafnir à moi, et continua jusqu'à un rocher posé là. Le sol trembla à nouveau et s'effondra.

J'ouvris les yeux le premier, une véritable habitude avec lui, on était entouré de gravats et ce qui me semblait être les vestiges d'un vieux réseau d'égouts à moitié effondré.

*Va savoir pourquoi on finit toujours dans des cavernes humides quand on traine ensemble...*

Du sang me coulait dans le cou, c'était bien un bon début pour une aventure, des contusions sur les bras, je me sentais plutôt en bon état.
Il n'était pas tombé bien loin et nos armes étaient écrasées par la poussière à quelques mètres de là. J'attirais mon épée à moi. La sangle déchiré, j'ajustais le fourreau abîmé pour la fixer à ma ceinture.

Un peu d'eau de ma gourde percée sur le visage de Wergeld, je tapotais ses joues, écoutais son souffle.

-Réveilles-toi bel au bois dormant, c'est pas un endroit pour piquer un somme.

Un bruit régulier de frottement et de pas. Des lueurs vacillantes apparurent dans l'un des conduits qui s'ouvraient devant moi. Des gens venaient par là voir ce qui avait provoqué tout ce boucan. Mauvais signe pour nous.

J'ouvris les yeux sur un borgne et un disque de lumière au dessus de nous. Nous n'étions pas tombé de bien haut, trois ou quatre mètres à tout casser et c'était suffisant pour avoir mal partout. Mon épaule gauche me lançait et il y avait de quoi, Fafnir n'était pas le seul à perdre du sang.

Quand je remarquais aussi l'arrivée d'étranger je me levais et trottait chercher ma propre épée fichée dans le sol et rayonnant comme si tout cela n'était rien comparé à ce qu'elle pourrait faire. Je passais la main dans l'un des cercles et tirait pour la déloger du sol. Elle siffla à l'instant même où deux créatures pas très haute et plutôt maigres passait l'angle de la vieille canalisation.
De petites dents pointues et des couteaux dans les mains elles se jetèrent sur nous sans prévenir.

L'une d'elle se jeta sur moi, elle mordit à pleine dents dans mon épaule blessée. Je tombais la renverse mon épée toujours tenu par sa lame. De son bras libre elle chercha à me frapper de son coutelas. J'agrippais son poignet d'un côté et de l'autre j'appuyais mon épée contre son dos. Si ça avait été mes bras j'aurais pu l'aplatir contre moi, mais c'était une lame, bien aiguisée, qui s'enfonça dans un craquement sinistre dans son dos découpant avec la chemise et les pièces de cuir qui lui servait d'armure. Elle voulut crier, je basculais mon poids pour me retrouver au dessus d'elle et fichait mon bras entre ses dents pour l'empêcher d'émettre le moindre son.

Ses yeux s'éteignirent rempli d'une surprise sans mesure.

Bras tendu, j'avais lancé mon épée droit vers le crâne du malheureux qui espérait m'avoir. Ce qu'était ces gens, un genre de petit troll ou un nom dans ce goût là signifiant bien à l'oreille que ça ne vit pas en vendant des fleurs et que l'humidité ne doit pas trop déranger.
Un regard pour Wu couvert de sang.

-C'est toujours crade quand tu te bats... Boucher.

De bel au bois dormant on passe à Freedy, il y avait une certaine amélioration en terme de folie, ça c'était bien le Wu que je connaissais.

Mon arme émit un bruit de succion quand elle se détacha de la tête qui avait fiché le corps dans un mur. Comme idole aux yeux exorbités. Un flot de sang coula jusqu'à ses pieds, goûta et le mort finit sa course sur le sol.
On entre dans la phase de l'aventure déconseillée au moins de 13 ans.

-On prend par là.

Je lui montrais le tuyau d'où sortaient les deux morts et lui tendis la main pour l'aider à se relever.
Bon point pour lui, il est de la même odeur que les vieux égouts maintenant : indétectable...

Je déteins sur lui, il râle trop souvent. J'empoigne sa main pour me lever. J'ai du sang partout, de la terre et tout un tas de saletés diverses. Un voyage dans la savane...
Je penserai à mettre du neuf sur moi avant de rentrer ou Ayame fait une syncope.

Silencieux j'ai suivi Fafnir dans le tunnel. Ça devenait une habitude de le laisser ouvrir le chemin, mais cette fois j'avais récupéré la lampe à huile sur l'un des cadavre, j'éclairais derrière lui.

Après un bon moment à fouiller le tunnel.
Des éclats de voix. On se plaquait contre le mur et je couvris la lampe derrière moi. Il n'y avait qu'un seul chemin : tout droit. Aucun des autres tunnels empruntés ne prenaient la même direction -après en avoir essayé plusieurs- c'était soit leur tomber dessus d'un coup et risquer que l'un s'échappe, soit revenir avec du renfort et du matériel de guerre.

J'ai opté pour moins bruyant et plus immédiat. Tapotant l'épaule de Fafnir je tendis la main comme s'il ne pouvait pas désobéir.

-Donnes-moi tes gants.

Déjà je déchirais ma chemise pour en faire des masques pour nous deux. J'allais avoir froid jusqu'à ce qu'on sorte avec une dernière couche de tissus sur le dos.