Re: Dans un autre monde

-Quand tu veux j'te latte... disais-je la mâchoire serrée et une violente envie de le renvoyer à l'usine pour une réfection intégrale.

Moi ? Jaloux ? C'est pas vraiment mon style, mais j'hésitais à lui expliquer de se mêler de ses boulons avant de vouloir interférer dans ma vie privée. Et c'était pas franchement le bon moment pour se taper dessus, je serais désavantagé avec la démonstration du point de croix que j'ai sur le bide...

Un sourire pincé, je n'ai pas accouru, j'ai profité de l'occasion en or pour ne pas me farcir de la paperasse et la visite de Fafnir pour sa première mission "au nom de la res publica"... Réellement, si, j'ai accouru, et la boule que j'ai dans le ventre, depuis qu'Henrir m'a dit qu'elle était dans un lit d'hôpital, n'a pas disparu. Ç'aurait été mieux si je n'avais rien su, mais je m'en serais voulu tout autant de ne pas m'être intéressé à son cas si jamais elle décidait de tout lâcher.

En l'observant je sus à quel point elle devait douter d'elle-même. On ne se refait pas. Jeune ou un peu moins jeune on se pose tous des questions et il y a cette limite que l'on franchit sans le vouloir et qui nous hurle "stop!". La frontière qui indique en gros et rouge derrière nos yeux "il serait temps d'arrêter les frais". Ce serait tellement mieux de l'autre côté sans plus aucun souci, sans plus aucune question. Fini l'incertitude et la douleur, il n'y aurait pour ainsi dire plus rien. Le choix le plus dur est de se décider à revenir, non pas parce qu'on aime vivre, mais parce que dans ce contexte où on est aveugle à tout espoir, il faut s'armer de courage et se répéter jusqu'à s'en convaincre : C'est pas encore le moment de lâcher prise.

J'ai sursauté, je n'avais pas entendu entrer ... Le quatrième maitre.

-On attendait plus que toi pour la réunion...

J'ironisais mais en même temps "envoyer un message" le seul capable de le faire et ayant le matériel sur soi pour ce genre d'amusement c'est Neythen. L'index pointé dans sa direction je n'ai pas quitté Hilde des yeux.

Un sourire en coin se déposa au coin des lèvres de monsieur Haine. Ouep, il pouvait pas mieux dire, quand il voulait. Il connaissait un peu l'énergumène pour avoir entendu pas mal de ragots à son sujet, à commencer par aller se mettre entre un Tauracle et un mur. Il fallait être un poil suicidaire quand-même... et si ça n'avait été que la première fois encore. Ce qui l'étonnait, c'était son incroyable résistance. Et en même temps, son côté grand malade forçait l'admiration. Alors oui, quand il voulait. C'était presque un honneur, et ce serait sans le moindre doute un défouloir sans égal. Ça faisait trop longtemps que Neythen se battait avec des notes de service. Un peu de sable, beaucoup de sang, ça lui ferait du bien aux neurones. C'était ça ou tourner dingue dans son bureau. Déjà que... Au moins il avait réussi à en énerver un, c'était toujours ça de pris.

Et puis la porte s'ouvrit. Et ben celui-là il ne se prenait pas la tête à frapper en attendant qu'on l'invite. Le regard bleu du maître se leva à peine sur le nouveau venu et lui arracha une grimace. Lui ! Qu'est-ce qu'il foutait là cet abruti ? Ah oui, c'était lui qui l'avait fait venir. Ça lui réussissait pas les nuits blanches après la cuite... Il consentit à se décoller du mur contre lequel il avait avachi son corps trop lourd pour lui, avec une envie irrésistible d'envoyer des vannes à K'ien jusqu'à plus soif. Apparemment ça lui avait pas suffit le coup du rendez-vous mystère sur les remparts. Non. Monsieur aimait se jeter dans la gueule du loup et répondre aux messages anonymes. Trop facile. Et en même temps, Hilde répondait à un appel à l'aide. Tout haineux qu'il soit, Neythen n'allait pas le chambrer pour ça... pas tout de suite en tous les cas. Mais chaque chose en son temps. D'abord Aliénor... et si elle s'en sortait, il promettait de l'engueuler pour lui avait fait faire un truc aussi dingue que provoquer mister Ulsarys au combat et se coller K'ien dans les pattes dans la même matinée...

« Ouai, moi. »

Il désigna Aliénor d'un hochement de tête.

« T'es un esprit nan ? Tu peux entrer dans c'lui des autres ? »

Un coup d'œil vers Eönwë pour confirmer... ou pas. Il n'avait pas vraiment l'intention de passer sa journée à regarder une comateuse baver en se tournant les pouces. Encore moins supporter les jérémiades d'un maître décoloré et l'électricité statique déployée par l'autre brute épaisse. Et lui qui culpabilisait presque d'avoir reçu la guérisseuse comme une merde la dernière fois qu'elle était montée lui présenter son projet. Pour un peu, il aurait été content de pas être le pire niveau relations sociales déplorables. Pour un peu. Mais fallait pas charrier quand-même. Envoyer chier les gens c'était une chose, les cogner jusqu'à pu soif, une autre.

La facilité... Ce serait si simple, ce serait tellement moins difficile. De ne plus rien ressentir, plus de douleur, plus de prise de tête rien... Juste ce silence, ce silence et ce noir qui pourtant ne m'effraie pas. Je me sens comme flottée dans quelque chose de différent de ma propre existence.
J'ai mal, mais cette fois, il semble que ce soit uniquement ma douleur, mais c'est pas physique... J'entend des voix en plus... Il me semble presque les reconnaître, je ne suis pas sûr. Peut être devrai-je ouvrir les yeux?

L'effort que je fait est immense et quand je les ouvre, c'est... Étrange... J'ai la sensation que quelque chose est différent, moi sans doute...
Je suis surprise... J'ai l'air d'être dans une pièce... Une des chambres du Sanctuaire, j'en reconnais les murs et les couleurs, mais ce que je trouve bizarre, c'est la présence, là, d'Eönwë et face à lui, de l'autre côté du lit, il y a Wergeld et en tournant la tête, je peux voir Neythen et... Une autre personne que je ne connais pas... Je l'ai pourtant déjà vu non? Je ne sais pas...

Pourquoi cette sensation et puis... Regardant de nouveau autour de moi, j'entend une personne qui pleure... C'est vraiment... Et j'entend une autre personne qui émet des sons qui ressemble à des grognements...

Je vois les lèvres des maîtres présents bougés, mais je n'entend pas ce qu'ils disent, je voudrai leur dire que je suis là aussi, mais il semble que...

Eönwë se décale et c'est alors que je me vois, là, allongé dans ce lit, le visage aussi pâle que possible, mes cheveux accentuant cette pâleur, une perfusion est relié à mon bras et Wergeld me regarde... Et le visage d'Eönwë est si fatigué... Je fais un pas en arrière... Alors cette fois c'est aller plus loin, je me suis perdue en cours de route et pour le coup, je ne suis pas certaine de vouloir revenir...

Je ne ressens plus que ma douleur, ma douleur physique mais aussi celle que toutes ces douleurs ressentis répercute en moi, sur mon esprit. Et de nouveaux ces pleurs et ces grognements...

Et si s'était moi la lâche finalement?

Je voudrai tellement pouvoir être tranquille l'espace d'un petit moment, plus rien ressentir, plus rien désiré... Je ferme les yeux, je frissonne...

Ces pleurs, c'est ma douleur....
Ces grognements c'est ma souffrance...

L'une et l'autre si lié à moi... Toujours prêt de moi, ce livrant un combat dont je ressors finalement, jamais indemne.
Je n'ai jamais eu le choix...

Et pourtant là, je serai capable de faire celui simple de tout abandonné... Ici et maintenant...

Je préfère ne pas relever, ils font bien ce qu'ils veulent, en toute franchise je m'en fiche un peu, c'est le cadet de mes soucis, enfin, je jette un regard à Wergeld, allez savoir comment ça va se terminer, et si Neythen était plus fort que lui sur ce coup là hein? Ben le maître de K'ouen serait encore bon pour un petit séjour parmi nous, à la plus grande joie du personnel féminin mais surement pas à celle d'Ayamé.
Je secoue la tête et mes yeux observent la silhouette allongée, comme ces trois derniers jours. Je la veille comme si elle était ma propre fille. Elle a prit, sans le savoir je pense, une tel place au sein de mon existence que je ne m'imagine pas la perdre elle aussi.

Je n'ai pas connu sa mère, mais souvent Arthur me parlait d'elle, je pense pouvoir dire qu'elle a hérité d'elle sa beauté et cette fragilité qui émane d'elle quand elle perd le contrôle. Par contre, pas photos sur son côté têtu, c'est du 100% Arthur. Quand il avait une idée en tête lui, impossible de l'en dissuader, même si cette idée était pure folie. Pour preuve, je n'ai pu empêcher qu'il s'en aille, qu'il se plonge dans cet espèce de trafic, j'ai essayé à l'époque de le sortir de là mais...

C'est en partit pour ça que je ne veux pas qu'elle aille à Trinity, je ne veux pas qu'elle rencontre ces personnes qui lui apprendrait qu'en réalité son père n'est pas celui qu'elle pense. Tout ça est lointain, inutile de remuer le couteau dans la plaie... Sauf que je comprends aussi son désir de savoir si il est encore en vie où pas, sa volonté de comprendre ce qui s'est passé, sauf que c'est au-delà de ce à quoi elle s'attend.

Pendant un bref instant, je compare sa situation à la mienne, on veut tout deux comprendre. Elle pour son père et ces frères, moi pour ma famille. Je n'ai pas oublié, je ne démordrai pas et même si Ez ne veut pas bouger son arrière train. Je comprendrai, même si au jour d'aujourd'hui, cela reste flou. La seule donne concrète que j'ai, c'est le fait qu'Essaidel ne soit plus revenue travailler et n'ait plus donner de nouvelles depuis... Je secoue la tête, ce n'est ni le lieu ni le moment de penser à ça.
Saisissant une de ces mains pâles, je la place dans ma paume et la sert légèrement comme pour lui montrer qu'elle n'est pas seul et l'entrée d'une personne me fais relever la tête.

Pour le coup, je ne réagis pas, un autre maître?! Je reste quelques secondes à me demander ce qu'il fait là et quand Neythen prend la parole, je me tourne vers lui surpris. Et bien... C'est surprenant de voir que chacun cherche une solution mais là c'est...
Reposant la main d'Aliénor sur le lit, je me lève pour accueillir le nouveau venu:

"Bonjour Hilde."

Pour le coup, je ne sais pas quoi dire de plus, les paroles de Neythen m'ont fort surpris. Un esprit, entrer dans celui des autres? Je fronce les yeux, c'est un peu ce qu'avait fait Al la dernière fois, à sa façon du moins. Je jette un regard à Wergeld, puis repose mes yeux sur Hilde et ajoute:

"La dernière perte de contrôle qu'elle a eut, c'est Al qui l'a aidé. C'était l'ancien aubergiste, je ne sais pas trop comment il s'y est pris, mais elle était revenu et il semblait avoir compris quelque chose qui à l'époque m'a échappé."

Si il pouvait faire quelque chose et bien, qu'il le fasse, je crois que là, à ce stade, la simple médecine que ce soit elfique où humaine ne suffira pas à la faire revenir. De nouveau j'ai un regard pour ce visage si pâle entouré de ces cheveux couleur neige, pour le coup, j'aurai aimé qu'Ez puisse expliqué comment tout cela était arrivé...

"Quand vous l'avez vu pour la dernière fois, l'un et l'autre..." J'ai un regard pour Wergeld et Neythen." ... Comment vous a t'elle paru être?"

Y avait-il eu des signes annonciateur? Occupé dans nos travaux respectifs, j'avoue ne pas avoir eu l'occasion de trop faire attention ces derniers jours...

Spoiler:

Cette jeune femme qui était allongée sur le lit semblait comme morte. Son corps et son esprit ne paraissaient émettre le moindre signe de vitalité quelconque. Qu'avait-elle ? Cette pensée fut certainement égoïste, mais l'esprit n'envia pas sa place et sembla même soulagé que les rôles ne soient pas inversés. Après tout, s'il en était là aujourd'hui c'était afin de fuir comme le faisait la nuit lorsque le soleil surgissait, la mort. Que ce fut son âme, son corps ou son esprit, tous répulsaient cet inconnu. Ce froid, ce néant, cet oublie était inimaginable pour Hilde. A la seule pensée de tout cela, son corps de cuir trembla le temps d'une seconde. Déjà, Neythen l'agressait de nouveau. Il sortit une telle absurdité que le maître ne lui accorda pas même un regard, encore moins un mot.

Enfin une pâle lueur reflétant avec difficulté les lueurs du soleil s'évapora dans les pupilles de la jeune femme.

Eönwë prit la parole et expliqua la situation assez brièvement à Hilde. Il ne demanda pas explicitement, mais il réclamait l'aide de celui-ci. Ken avait-il dit quelque chose de censé ? Il le regarda de haut en bas, ne cachant pas qu'il le jugeait d'un simple coup d'œil. Impossible, c'était impossible de penser que cet être insignifiant était supposé humain. S'il se foutait bien de quelque chose, c'était des autres et les sentiments de peur face à la mort était contraire à lui. C'était peut-être pour cela qu'une telle haine repoussait Hilde.

Il répondit comme si l'idée provenait de Eönwë.

-Je peux essayer de l'aider. Mais je tiens tout de même à préciser, que je ne risquerai rien qui puisse me nuire pour la sauver. C'est déplorant, mais si elle doit mourir, ce sera une expérience qu'elle fera seule.

Bien que ce ne fut pas prononcé avec méchanceté ni même avec dédain, il rajouta.

-Mais je ferai tout ce que je peux pour cette femme.

Après tout, qui méritait la mort ?

Il prit place sur le lit tout prêt d'elle et réfléchit tout en regardant son corps. Elle était si pâle. Cette image rappela celle qu'il avait observé dans un miroir quelques années plus tôt. Mais ses réflexions n'étaient pas là, l'esprit savait qu'il pouvait diviser son esprit pour créer un double, totalement dépendant du maître, cela dit. C'est à dire qu'il restait tel qu'il était, mais que Hilde pouvait contrôler un second corps. Se pouvait-il qu'il puisse, au contraire, quitter son corps et contrôler son esprit ? Le temps passa, l'esprit ignora involontairement les visiteurs de la chambre. Des idées fusaient de tout part, mais la seule hypothèse possible s'imposa à lui.

L'idée ne lui réjouissait pas. Il avait mis tant de temps à vivre dans ce corps idéal, le quitter ne serait-ce que quelques secondes le dégoûtait. Cependant il avait promis d'aider cette pauvre femme, perdue dans la vie... la mort ? Néanmoins, il jura lui-même qu'il ne risquerai rien, quitte à ce que cette femme soit perdue. Sans rien annoncer, il débuta cette expérience.

Progressivement son esprit quittait son cocon chaud. C'était tellement difficile, comme si la volonté de l'esprit le retenait. Il faisait tout de même attention à laisser une partie dans ce corps, afin que le retour soit possible. Mais désormais, son esprit flottait au dessus de la jeune femme et d'un regard omniprésent, il vit son corps chéri tomber sur la jeune femme allongé. C'était comme une couverture de plus qui la protégeait du froid. C'était là, une toute nouvelle liberté, comme invisible il était connecté au monde entier. Seulement, le seul point qui l'effraya fut cette transparence. Comme un fantôme qui errait désespérément dans le monde des vivants. Prit de panique, il se réfugia aussitôt dans le corps de la malade.

Il sentait qu'il violait là une loi. Il pénétrait son esprit afin de faire qu'un avec elle. Il imposait ses pensées sans même laisser le choix. C'était un viol.

Neythen soupira en rangeant son PDA dans sa poche. C'était pratique ce truc, faudrait qu'il pense à remercier Bri. Quoi que... fallait pas charrier. Toute façon c'était une cyborg, qu'il la remercie ou pas c'était du pareil au même... autant ne pas le faire. On ne savait jamais, ça risquait d'être contagieux, tout ça. Bref.

Il regarda Eönwë d'un air vague, réfléchissant à moitié. S'il vous plaît, on ne se moque pas. Le cerveau est toujours humain, c'est le principe même du Mechanima de base. Quelle était la question déjà ? Ah oui. Comment Aliénor lui avait-elle paru, la dernière fois qu'il l'avait vu ? Euh... La dernière fois elle carburait à la Vodka et elle lui avait paru avoir quelques soucis de digestion. Avant ça ben ma foi, elle n'avait pas eu besoin de l'invitation de Neythen pour se mettre quelques verres dans le nez. Lui, il l'avait juste repêchée au vol, mais à la base, elle avait quand-même bien décidée de finir la soirée dans son vomit toute seule. Fallait pas l'oublier ça non-plus, avant de lui balancer toutes les pierres. Et puis bon, quoi d'autre ? Du peu qu'ils avaient pu discuter avant d'être trop bourrés pour aligner trois mots correctement, elle avait évoqué « une journée de mouise ». Rien qui puisse intéresser K'an, sauf s'il avait envie de savoir qu'il était la dernière personne qu'elle ait eu envie de le voir ce soir là. Un truc à propos de réflexions profondes sur le sens des responsabilités auxquelles ils avaient d'ailleurs fini par avoir droit, à y repenser...

Et du coup, il ne répondit pas.

Il fit couler son regard sur Hilde qui lui non-plus ne répondait pas à sa question. Oui ? Non ? C'était pas dur pourtant, il y avait que deux choix ? Neythen esquissa un sourire carrément jaune. Finalement, K'ien avait pris le parti de répondre à Eönwë. Cet espèce de nase ferait-il son boudin après l'épisode de la bulle spatiale, à Cerclon ? Peu importait. Il se contenta de croiser les bras. Ses lèvres tressaillirent sur la réflexion qui le démangeait de balancer... ne rien risquer qui pourrait lui nuire...? Rien à foutre de sa petite personne gazeuse. S'il ramenait pas Aliénor, c'est lui, Haine, qui allait lui nuire ! Il cligna des yeux et s'efforça de respirer calmement, observant, ruminant toutes les idées tordues qui lui venaient pour trucider K'ien d'une part et aider la guérisseuse de l'autre. Et il ne put retenir un frisson de dégoût en voyant le cuir tomber au sol, vide comme une serpillère essorée, et la forme vaporeuse disparaître complètement en se déposant sur le corps de la jeune femme. À noter dans ses dernières volontés : s'il lui arrive la même chose, ne jamais laisser K'ien s'approcher de son propre corps. Plutôt crever que d'avoir ce truc en lui...

« Et t'avise pas d'rev'nir sans elle ! »

Spoiler:

Pour le coup, visiblement je n'ai pas mon mot à dire et puis franchement, si ça peut l'aider... Je lève les yeux lorsqu'une nouvelle fois, la porte s'ouvre et je suis surpris de voir la personne s'approcher de moi. C'est une des trois secrétaires qui travaille avec Aliénor en temps normal, je fronce un peu les yeux, surpris, surtout quand elle se penche vers moi pour me dire:

"Pardonnez moi de vous dérangez, Maître Eönwë."

Elle a un regard pour le corps de cuire qui vient de tomber au sol, puis pour la silhouette d'Aliénor, sa chef, étendu sur ce lit, je note qu'elle fronce les yeux, comme ennuyée de la situation.

"Que ce passe t-il?"

Elle reporte son regard sur moi et elle pousse un soupir, elle semble gênée ce qui m'intrigue.

"Et bien, la directrice avait quatre entretiens d'embauche, j'ai pu en reporter trois, mais pas le quatrième, pourriez vous venir l'assurer? Je suis vraiment désolé de demander ça mais..."

Je lève une main, fatigué. J'aurai dû me douté qu'on me demande d'assurer quelque chose durant son absence. Mais dans un sens, ils avaient raison, la vie continuait...
J'aurai aimé resté, j'aurai aimé continué de lui tenir la main, mais, je dois me résoudre, il n'y a rien que je puisse faire d'autre ici. Alors, je me lève...
Je n'ose me pencher sur elle mais je sers sa main que je tenais dans une des miennes. Je lance un regard à Wergeld, en espérant qu'il comprenne que je voulais être prévenu au moindre changement. Puis je me tourne vers Neythen, si Hilde arrive à nous la ramener, je lui devrai une fière chandelle. Je hoche simplement la tête en sa direction avant de suivre la secrétaire, non sans un dernier regard vers la silhouette étendu sur ce lit...

Je me suis assise au sol, continuant de les regarder, essayant d'occulter ces grognements et ces gémissements, toujours aussi présent.
Je ne sais plus trop où j'en suis en fait, j'essaie de me souvenir de comment tout cela a t-il pu se produire et en fait, une fois que je me souviens, je voudrai pouvoir... De nouveau oublier. Ces mots que j'ai dis et que je ne pensais pas...
Comment ai-je pu en arriver là? Comment en suis-je arrivé au point de tout vouloir oublier?

Un léger soupir s'échappe de mes lèvres, lorsque je ressens quelque chose d'étrange, comme une sorte d'intrusion, c'est... Pas franchement agréable!
Je regarde autour de moi, je voudrai me lever mais pour le coup, je n'y arrive pas, j'ai la sensation que... Qu'il s'est passé quelque chose dans mon propre corps.
Tournant la tête en direction du lit, je vois un corps de cuir tombé au sol, alors que je semble m'arquer face à quelque chose... Un ressentis... Une présence...

Je regarde autour de moi, j'essaie encore de me lever mais je n'y arrive pas. Pourtant, j'ai pas la sensation d'être seule...
Les grognements s'accentue et les pleur redouble, je grimace face à un mal de crâne qui s'insinue en moi et fronce les yeux. C'est quoi ce délire? Je ne comprends pas...

"Qui est là?"

Ma voix résonne comme un écho, j'ai une sensation très désagréable, vraiment et je veux la comprendre... Est-ce que cela signifie que pour moi c'est bientôt la fin?

Une voix s'éleva. Elle semblait provenir de Hilde et à la fois, cela paraissait lointain. C'était vraiment étrange, il sentait qu'il était lui-même, mais en même temps il ressentait comme une présence. Mais à bien réfléchir, c'était plutôt lui la présence, car il se douta que la voix était celle de la comateuse. Malgré qu'il avait en quelque sorte prit possession de son corps, il ne ressentait pas ses douleurs, ne voyait pas ce qu'elle pouvait apercevoir, il était comme enfermé en elle. Il répondit alors.

-Je suis Hilde.

Il sentait que cette réponse était fortement légère. La pauvre devait sentir un esprit en elle, sans comprendre ce qu'il pouvait bien se passer. Étant en droit de connaître celui qui la violé, l'esprit enchaîna.

-Des amis à vous m'ont appelé. Vous semblez avoir besoin d'aide.

Cette situation lui rappela la mort. Pourquoi ? Car dans les situations douloureuses, dès qu'il y avait un blessé ou un mourant, la personne qui devait s'occuper d'elle avait le devoir de lui parler afin que le mutilé reste conscient. Cela signifiait alors que la jeune femme était parfaitement consciente, mais qu'une force la retenait. Sinon, même ses pensées seraient confuses. Comprenant que l'esprit concluait bien trop rapidement, il chercha à en savoir plus. D'ailleurs il s'en voulut de ne pas avoir demandé à son entourage avant de plonger dans la gueule du loup.

-Que c'est-il passé ?

Lui ne pouvait pas ressentir ses émotions, mais cela signifiait-il aussi qu'elle était dans la même situation que lui ? Après tout, c'était cette femme la maîtresse de ces lieux, donc il était probable qu'elle ressente toute émotion provenant de l'intrus. Cette pensée l'effraya.

C'était le noir absolu, les ténèbres. Vivait-elle depuis peu dans cet atmosphère étouffant ? Était-ce cela la mort ? Prit au vif, une panique certaine s'empara de l'esprit. C'était impossible ! Il ne pouvait voir la mort, même au travers d'une mortelle ! Lui, il était immunisé face à ces horreurs ! Il était enfermé, il ne savait comment quitter ce corps, malgré les promesses qu'il avait faites plus tôt l'idée l'effleurait. Il était incapable de bouger, ni même d'étendre sa pensée, il était prisonnier. Même s'il ne connaissait strictement rien à la mort, il l'identifiait à cette enfer.

C'était étrange, si étrange cette présence et j'avais beau regarder autour de moi, rien, pas l'ombre d'une autre silhouette et cela m' faisait malgré tout, peur.
Hilde... Ce nom me disait quelque chose, je cherche où je l'ai déjà entendu, c'est si confus... J'ai un mal fou à me concentrer, j'ai vraiment mal partout, je voudrai que tout cela cesse pour de bon, qu'on me laisse tout oublier et partir loin de tout ça. Pourtant, je tique quand il dit que des amis l'ont appelés.
Des amis? Je regarde les silhouette dans la chambre, Eönwë vient de se lever et est partis, il ne reste plus que Neythen et Wergeld et cette infirmière qui vient me refaire ma perfusion... C'est si étrange, je suis comme spectatrice, sauf que je suis impuissante, je ne peux même plus bouger.

Et cette présence... Il me faut quelques minutes de réflexion en plus pour découvrir qu'elle vient de moi... Elle est en moi et...Je cligne plusieurs fois des yeux, je sens une vague de peur, mêlée à ma souffrance et c'est pas des plus agréable.
Et puis, je me souviens, Hilde... Le maître de K'ien, c'est le dernier venu au sein des maître. Oui, j'en ai entendu parlé, par Eö et puis par les journaux et la télé aussi.

"Le maître de K'ien."

J'ai plus soufflé ça en affirmation qu'en question. Je me sens fatiguée, j'arrive au gré d'un puissant effort à fermer les yeux, mais je les rouvre brutalement quand le grognement ce fais plus intense, plus profond et de ce fait plus douloureux.

"Des amis?"

C'est étrange de penser que ces personne me voit de la sorte. Eö encore, oui, je le comprend, mais Wergeld et Neythen... Pour l'un je fut pour l'espace d'une après-midi bien plus qu'une amie et pour l'autre, il doit avoir de souvenir de moi, qu'une beuverie à la vodka dont j'ai des souvenirs par bribes et de mon comportements plus que ridicule à Ken devant cette bestiole qui s'est retrouvé dans mes cheveux. Alors suis-je vraiment une amie pour eux?
Quand à avoir besoin d'aide, je ne suis même pas certaine de le vouloir. Je sais même plus ce que je veux, à part que cela s'arrête.

"De l'aide... Comment aidez une personne qui ne sait même pas si elle désire vraiment en avoir?"

Mes yeux parcours la pièce, l'infirmière est partie, et je sens la présence plus accrue en moi de ce Hilde. Comment il a fait, cela est un mystère, mais il est en moi, il partage mon corps, mes pensées peut être aussi et... Le reste? Allez savoir.

"Vous êtes en moi?"

Présence inconnue, mais qui dans un sens, me rattachait encore un peu à cette vie, comme si mon corps acceptait une aide dont mon esprit n'était pas certaine de vouloir.
Je tourne la tête assez difficilement et la silhouette blanche qui pleur ce dessine devant moi, elle était petite, comme un enfant, et baissait la tête. Ses yeux noirs tremblaient sans cesse et des larmes en coulaient, mais disparaissaient le long de ses joues creuses. On aurait dit une petite fille qui venait de faire un cauchemar. Sauf que tout en elle exprimait une sensation bien plus intense.

"Elle est aussi frêle que moi, aussi fragile. Elle a mal et souffre de tout ça... C'est ma peur."

Puis, aussi difficilement que c'est possible, je tourne la tête dans le sens inverse et une silhouette noir ce dessine à présent. Elle ressemblait à une femme dans un déguisement de gamine. Ses membres longs et minces ne semblaient composés que de peau et d'os, tant ces derniers étaient visibles. Des chaines cloutées pendaient de ses bras, et son corps semblait couvert de cicatrices. Seul son visage semblait ne pas avoir été altéré, mais une sensation d'agressivité régnait dans ses traits. Ses yeux d'un rouge vif ressortaient sous ses sourcils froncés

"Elle est mesquine, elle ne veut pas qu'on l’oublie. Elle ne m’oublie jamais et me tient en éveil. C'est ma souffrance... Où plus précisément la souffrance des autres, la mienne se mélange juste à elle et devient encore plus incontrôlable."

Ce qu'il sait passé? Bonne question... Des images défile dans ma tête, ces instants avec Wergeld, la douleur de mon corps par la suite, mes activités que j'ai continué envers et contre tout, la peur que j'ai eu pour Kouen quand il est revenu blessé, ces jours qui ce sont écoulés ces migraine et cette fatigue ressentie ainsi que la douleur ressentie, et parmi elle, la mienne qui me faisait encore plus ressentir celle des autres, cette visite habituelle à la caserne, mon vol plané contre le mur poussé, où devrai-je dire éjectée par Ez, mes mots, mon incapacité à me relevé, ma douleur, le trou noir...

"Un enchaînement de choses... Mais je crois que j'ai encore perdu le contrôle de mon don."

Pas certaine que cela soit l'entier résultat de tout. J'ai un peu de mal à présent, parce que j'ai réfléchis, beaucoup et que ce souvenir fais mal, très mal. Il y a tant de choses que je voudrai oublié.

"Vois êtes en moi? Vous pouvez tout ressentir?"

Peut être ainsi, au moins une personne pourrait comprendre...