Le neuvième miroir - premier chapitre

Les convives ne tardèrent pas à pointer le bout de leur nez peu après les présentations de la chimère. Ainsi c’était un maître de miroir. Abysse fronça les sourcils. Elle devait avouer qu’elle était plutôt surprise qu’il s’agisse d’un personnage aussi lubrique. Si les gouvernements s’amusaient à élire de pareils maîtres de miroir, ca ne devait pas être de repos tous les jours. Abysse ne jugea pas nécessaire d’en faire la remarque. Par ailleurs, l’entrée venait de faire son arrivée. La valkyrie contint avec difficulté un désagréable gargouillis de la part de son ventre. Ca n’était pas vraiment le moment ou la circonstance.

Abysse huma la soupe avec suspicion. Elle porta lentement une cuillère à ses lèvres et en avala le contenu. Un sourire ravi éclaira alors le visage de la jeune femme. C’était carrément délicieux. Le goût était tout à fait surprenant et exotique à souhait. Cela faisait bien longtemps qu’Abysse n’avait pas goûté à quelque chose de cet acabit. Elle s’empressa d’avaler d’autres cuillerées avant de jeter un regard à Ulrik, son second. Ce dernier semblait posséder un tout autre avis sur la question. Un rapide tour de l’assemblée du regard permis à Abysse de constater qu’il n’y avait qu’Immacolata et elle pour apprécier la soupe. Le capitaine du Fenrir haussa les épaules. Ca en faisait plus pour elles.

Tandis qu’Abysse se resservait de la soupe, elle jeta un regard noir à Elantir. Ce dernier commençait à lui courir sur le haricot avec ses sautes d’humeurs. Heureusement, Wergeld eu la bonne idée de lui en faire la remarque. A ce rythme là, la valkyrie aurait pu être tentée de lui jeter son bol à la figure pour qu’il se taise.

C’est alors que ce fut au tour des deux garnements de se présenter. L’un d’eux commençait à devenir encore plus irritant qu’Elantir d’ailleurs. Pendant sa longue et gonflante tirade, Abysse attrapa au vol une tomate que lui lançait Caliope. Les derniers propos du petit blondinet finirent par irriter définitivement la jeune femme. Inconsciemment, elle serra les poings et broya la tomate dans une de ses mains. Un liquide rougeâtre coula alors de ses doigts tandis qu’elle dardait un regard terrifiant sur les deux gamins.

- Avant de voler, tu devrais apprendre petit gringalet que sur le sol ou dans les airs, la priorité est au plus lourd et encombrant. En circonstance, tu devais céder le passage au Fenrir. Par ailleurs, ce n’est guère une manière d’aborder un navire que de se jeter dessus puis de tirer avec des billes sur sa coque.

Le ton se faisait de plus en plus menaçant à mesure qu’Abysse s’exprimait. Elle s’était légèrement redressée, les deux mains posées sur la table. Son regard brillait d’une colère à peine contenue. Elle était vraiment de très mauvaise humeur aujourd’hui. Rien ne se passait comme elle le souhaitait et ca l’agaçait outrageusement.

Wergeld prit alors la parole. La valkyrie se calma légèrement et se rassit, enfonçant son dos dans le dossier de son fauteuil. Ces histoires lui avaient coupé l’appétit. Elle jeta un regard morne à l’assemblée, les bras croisés sur sa poitrine.

- Pour ce qui est des remboursements, j’en ai moi aussi à exiger. Or vous vous trouvez sur mon navire donc vous êtes sous mon autorité. Puisque vous êtes chiants à souhait tous les deux, vous serez de corvée nettoyage. Vous devrez récurer les sanitaires du navire ainsi que la salle des machines et ce jusqu’à ce que nous touchions terre. Je vous préviens qu’au moindre dérapage, je n’aurai aucun scrupule à vous balancer par-dessus bord. Je ne supporte pas les microbes dans votre genre.