Vagabondages [pv Abysse]

J'ai terminé mon travail ! Bien sûr que j'ai répondu à toutes les demandes du jour, que j'ai préparé les questions qui seront abordées à la prochaine réunion inter-services, que j'ai signé tous les actes et bidules qui ont été posé plus ou moins subtilement sur mon bureau par l'un des quatre secrétaires qui veut bien travailler ici... Mais quand y en a plus, y en a encore.
Pour éviter de crouler sous l'effort, et aussi pour justifier le salaire conséquent de mes collaborateurs, j'avais en quelque sorte mis les voiles.
Déguisé en vagabond, bonnet sur le crâne, manteau rapiécé et bottes crasseuses, je m'étais fais jeté de Tchen par ma propre garde qui pensait que j'étais un véritable vagabond... Et dieu soit loué, ils se rendront compte de leur erreur trop tard, c'est-à-dire quand j'aurais déjà mis assez de distance entre moi et ces vautours.

Furtivement glissé dans ce qui m'avait servit jadis de vêtement de voyage, ça avait été facile de convaincre la sécurité que j'étais "perdu"... Quelques cris de guerre, des revendications à coucher dehors :

-Tous ! Ils tomberont tous ! Oiseaux de malheur qui jetez sur vos enfants les immondices de vos mensonges ! LUI ! Tout puissant vous punira ! La fin du monde arrive ! (extrait, en gros, de mes déboires de ninja en mission)

Et voilà qu'on me lance littéralement dans la cours avec la somation de vider les lieux au plus vite. Avec plaisir, messieurs ! Lancé à toutes jambes droit dans le zeppelin qui descend jusqu'à la ville, j'optais pour un décollage dans les règles pour brouiller les pistes.
Finalement, plutôt que de me retrouver dans le quartier d'atterrissage, je fonçais vers Magna, quelques minutes suffirent à vol d'oiseau pour m'y rendre, je posais pieds sur le pavé vieillit avec la satisfaction d'une chose bien faite. Ils viendront me chercher, bientôt, avant ça j'allais suivre l'odeur alléchante qui frôlait mon nez.

Avisant, une poubelle débordante, j'y laissais mes vieux vêtements, ils serviront à un clochard qui en aura bien plus besoin que moi à présent -surtout qu'ils ont déjà dû capté la ruse sur Tchen- le reste des opérations consistaient à trouver l'endroit d'où provenait cette bonne odeur de viande et d'épices.
Mains dans les poches, yeux fermés, je déambulais un coup à droite, un coup à gauche, suivant à la trace le fumet appétissant, un vague sourire aux lèvres...

Abysse soupira. Toute cette paperasse commençait sérieusement à lui sortir par les narines, les yeux et j’en passe…Elle jeta un regard hasardeux à travers la fenêtre de son bureau. Il faisait beau dehors. Le ciel était clair et lumineux. Nul doute qu’il faisait bon vivre de se promener en ce début de matinée dans l’Entre-Monde. Hélas, la jeune Valkyrie était condamnée à remplir toute sorte de formulaire et paperasse en tout genre. Ce genre de tâche l’avait toujours exacerbée. La jeune femme n’avait pas fait construire ce navire et n’avait pas formé un équipage pour s’occuper simplement de papiers et accords administratifs. Elle rêvait d’aventure et le Fenrir n’était qu’un moyen de l’atteindre pour elle.

Elle en avait plus qu’assez de se contenter de vulgaires transports de marchandises pour arrondir les fins de mois. Il était temps de passer à l’action et d’entrer dans l’aventure, la vraie. L’Entre-Monde ne signifiait pour elle qu’un ramassis de paperasse et d’ennuis en tout genre. Elle voulait voguer sur les flots, fendre les cieux et explorer les fons marins. Abysse laissa tomber sa plume dans un grognement. Elle se leva d’un coup et sortit en trombe de sa cabine après s’être saisie de son arme. Elle la cala entre ses homoplates, réajusta sa chemise et savoura la brise qui caressait son visage. Décidément, elle était faite pour le grand air et non pour rester cloîtrée dans son bureau. Ca, c’était un travail pour les fonctionnaires et non pour les capitaines d’un navire d’exploration.

Elle héla son second d’équipage et lui adressa la parole sur un ton sans appel lorsqu’il fut à sa portée.

- Je m’échappe un peu de mes obligations de capitaine pour un moment. J’en ai assez de remplir tous ces torchons que l’on nomme papiers administratifs. Si un client ou quelqu’un me demande, tu n’auras qu’à leur expliquer que le capitaine est de sortie et qu’en son absence, tu as les pleins pouvoirs sur ce navire.

Son compagnon acquiesça, un sourire en coin. Urlik était le genre d’homme silencieux et téméraire qu’Abysse appréciait. Bien qu’il n’en dise rien, il n’en pensait pas moins et son sourire trahissait l’amusement que lui provoquait le comportement de la jeune Valkyrie. Elle voulait partir, soit, il serait toujours là à son retour, prête à lui venir en aide. Le second d’équipage devait sans doute être l’une des rares personnes en ce monde dans laquelle Abysse pouvait avoir une pleine et entière confiance. Elle avait toujours été d’un tempérament méfiant et n’accordait sa confiance qu’à très peu de personne. Il s’agissait donc d’un véritable exploit qu’Abysse puisse avoir une confiance aussi aveugle envers son second. Il était à la fois son bras droit mais aussi son ami et confident le plus fidèle.

Quittant le navire avec précipitation, Abysse se trouva aussitôt jetée au milieu de la foule qui bondait les quais du Magna. Elle jeta quelques regards curieux autour d’elle puis se fondit dans la masse. Elle vagabonda ainsi durant une heure ou deux en s’amusant à observer les gens, leur apparence et leur comportement. L’Entre-Monde était véritablement le carrefour de civilisations et de créatures en tout genre. Il était toujours divertissant de les observer.
Ce fut la faim qui commençait à tirailler le ventre de la jeune femme qui l’obligea à cesser ses vagabondage pour obéir à une des lois les plus primaires et instinctives qu’il soit : manger. Quelques effluves de viandes rôties lui parvinrent alors et renforcèrent son appétit. Elle passa une main sur son ventre pour le faire taire et se dirigea vers l’origine d’une si bonne odeur de cuisine.

Abysse ferma les yeux et se laissa guider par l’odeur. Elle évitait souplement et habilement les gens qui se trouvaient sur son passage grâce à ses autres sens aiguisés. La jeune Valkyrie laissa donc son corps et son esprit emporter par quelques doux effluves de nourriture. C’est alors qu’elle percuta durement quelqu’un. Elle grogna, surprise et rouvrit les yeux. Elle avisa alors qu’elle s’était cognée à un homme légèrement plus petit qu’elle. Elle ne se sentait pas d’humeur à se quereller et avait bien trop faim pour penser à blâmer l’inconnu. Elle s’excusa alors rapidement et voulu continuer son chemin mais il l’interpela.

-Hé! ma p'tit'dame faut regarder devant vous quand vous marchez !

L'homme, jouflue comme deux ours prêts à hibernés, gras comme trois autres ours se retourna vivement sur la grande blonde qui l'avait bousculé. À ses yeux, les excuses grognées par la jeune femme ne suffisaient pas, il était bien décidé à montrer qu'à Magna, le moindre prétexte était bon pour soulever le couvercle de la marmite et faire littéralement déborder toute tension.
Depuis l'autre trottoir, je m'étais arrêté brusquement de marcher les yeux fermés. Non pas que j'ai moi aussi bousculé quelqu'un, quand on fait ma carrure, on ne bouscule personne, car on me voit de loin et qu'on m'évite de loin aussi. De plus, j'avais perdu le fil de l'odeur, à droite, à gauche, tout droit ou de l'autre côté de la rue, je ne savais plus où aller et mon estomac grondait de mécontentement frustré.

*Ma 'ptit'dame ? Il fait une tête de moins qu'elle sérieusement !*

J'observais le spectacle, comme la plupart des passants qui s'étaient soudainement arrêter de parler de vagabonder pour se divertir. Comment allait réagir cette jolie guerrière assez couverte de cuir et de métal pour montrer à qui veut bien la regarder qu'il ne faut pas lui marcher sur les pieds.
En fait, je pourrais interpeller les sanctuaris ou battre un peu des ailes, dégainer mon écusson et promettre à cet empêcheur de bousculer en rond des années de tortures en prison s'il ne passait pas son chemin, mais ça n'aurait pas été aussi drôle que maintenant. Tout ce jouait sur le coup décisif, le buteur avait le jouer entre un lancé franc ou une sortie honorable... et risquée.

Je m'adossais au mur derrière moi, un sourire pour saluer la ménagère accoudée à la rambarde de sa fenêtre de cuisine pour faire comme tout le monde : satisfaire une malsaine curiosité.
J'étais partagé. Je pouvais me montrer sous ma belle façade et faire mon boulot, ou rester là. "Rester là" me convenait parfaitement. Ce type ne méritait pas que je me salisse les mains ou que je gaspille ma salive et son adversaire aux charmes féminins saurait parfaitement le remettre à sa place.
Patience, pour regarder un bon film rien ne vaut un bon pop-corn... Sauf que le pop corn ça pousse pas sur les lampadaires. Faut que j'arrête je me fais du mal, j'ai une faim de loup... Si je puis dire.

Abysse se retourna d’un bloc, une ombre dangereuse dansant dans son regard. L’homme qu’elle venait de bousculer l’avait interpelé d’un ton bien peu courtois. Elle se redressa de son haut et le toisa d’un air sévère. Il s’agissait d’un petit homme rondouillard et tout ce qu’il y a de plus vilain. Il dardait sur elle un regard courroucé et hautain. Qui était-il pour oser refuser ses excuses et la défier ainsi ? En tout cas, il ne manquait pas d’arrogance.

Les habitants de Magna étaient des gens bien étrange. En tout cas, ils n’avaient pas peur de grand-chose. La jeune Valkyrie était particulièrement affamée et n’avait pas le temps pour chercher querelle à une aussi insignifiante personne. Tout cela était d’un ennui à ses yeux. Il valait mieux faire visage humble et se retirer rapidement. Elle ne pu tout de même empêcher un sourire narquois se dessiner sur son visage. Elle posa sur son interlocuteur un regard farouche.

- Qui es-tu, humble personnage, pour refuser mes excuses ? Jugerais-tu que tu mérites mieux ?

On sentait dans son ton une menace à peine voilée. Elle cherchait juste à intimider le personnage afin qu’il s’en retourne paisiblement et qu’elle puisse continuer sa quête de nourriture.

Un rapide coup d’œil circulaire permis à la jeune femme de constater que la scène venait d’attirer quelques curieux. Elle en repéra un dans un coin, adossé contre un mur qui les observait fixement. Sous ses habits de manants, Abysse devina qu’il ne s’agissait pas d’un simple roturier. Oh non, il était bien trop propre sur lui pour n’être qu’un simple fils du peuple. Peut-être s’agissait-il d’un noble en quête de divertissement. Dans tous les cas, la scène semblait bien l’amuser pour le moment.

Abysse détourna son regard pour le poser sur le petit homme qui la fixait toujours, une lueur de défis dans le regard. Il ne se démontait pas et répondit avec hargne à la jeune femme.

- Bien sûr, j’exige dédommagement. Il ne se fait point de porter ainsi atteinte au Marchand Buck.

Plissant les yeux, la jeune Valkyrie approcha son visage de celui qui la défiait. Il émanait de lui une odeur nauséabonde d’arnaques en tout genre. Elle siffla entre ses dents.

- Et en quel honneur un escroc dans ton genre vient chercher querelle au Capitaine du Fenrir ?

Décidément, ce Buck avait su mettre en colère la jeune femme. Un sourire carnassier se dessina sur son visage tandis qu’elle lisait la stupéfaction dans le regard de son interlocuteur. Elle avait faim, très faim mais son courroux semblait surpasser de loin son appétit. Cet homme méritait une correction à ses yeux. Restait donc à savoir comment elle allait lui faire payer son audace et son manque de courtoisie.

Quand certains préfèrent se chercher des poux, dans d'autres quartiers de l'Entre-Monde le reste du monde essaye de survivre. Les récentes catastrophes qui se sont abattues sur la ville ont fait tant de victime que les compter ne sert plus à rien, à peine les autorités sont elles en mesure d'apporter assez d'aide alimentaire, assez de bras, assez de matériaux pour tenter de sauver des vies et de reconstruire sur les vestiges.
Des gens prient pour leur salut, et implorent tous les dieux qui ont un jour existé dans l'Univers de bien vouloir les épargner, de bien vouloir garder hors des remparts ces catastrophes qui pourraient sévir à nouveau.

Un cortège traverse alors la rue de Magna. Sortant des tunnels effondrés des Fumeroles, des soldats vêtus assez solidement pour se protéger, assez légèrement pour supporter les heures à creuser, à chercher, à se tuer à la tâche pour en sauver d'autres. Ces hommes, la tête basse et les épaules voûtées portaient dans leurs dos des civières en grand nombre. Elles étaient recouvertes de linges blancs, ternis de poussière, des corps se dissimulaient sous les formes des draps et quand une femme vit la main dépassant d'une des civières, reconnaissant la bague de mariage qui la liait à l'homme à présent mort, son cri déchirant transforma le pesant silence en une pesante crainte.

Qui sait ceux qui dorment sous les draps. Les passants qui jusque là s'étaient divertis autour de la propriétaire du Fenrir et de ce marchand qui ne faisait fleurir ses affaires que depuis peu, se serraient et se réconfortaient les uns les autres dans le plus parfait silence, dans le respect que l'on doit aux morts. Combien d'autres encore les soldats sortiront-ils de sous les décombres ?

(petite intervention si vous permettez, bon jeu à vous deux !)

Capitaine du Fenrir, le hasard fait bien les choses... Même si pour cet escroc le hasard l'a plutôt mal fait. Il pâlit presque immédiatement, Abysse était connue pour son caractère implacable. Les gens qui s'y connaissent un peu en divinités des autres mondes l'appellent la Valkyrie. Je salue l'effort, c'est qu'il faut avoir pas mal de réserves de sang froid pour se retenir face à un pareil bonhomme. Le marchand recule d'un pas quand une corne résonne dans le quartier, signe qu'il faut vider les rues et céder le passage.

De quoi plomber l'ambiance et nous coller à tous un arrière goût de peur et de tristesse. Une femme en pleure, de nouveaux orphelins, on avait oublié l'espace d'un instant les affres de la ville, mais qui pourrait ignorer cette aura douloureuse qui nous recouvre depuis des jours. Mon sourire s'est envolé avec le son de la corne, et les soldats passent, les volontaires et bénévoles à leur suite, portant un trop grand nombre de morts, pas assez de blessés. Le cortège s'efface peu à peu, plus personne n'est d'humeur joyeux ou curieuse, le silence qui règne sur la rue est si dense et si compacte qu'il nous solidifiait l'âme et le coeur.

Je déployais mes ailes et passais au dessus de la foule, de ceux qui réconfortaient la veuve, de ceux qui observaient et les autres qui reprenaient leur route en ayant à l'esprit qu'ils auraient préféré faire un détour plutôt que de voir ça.
Je me posais lentement entre le marchand et la jeune femme. (jeune est à présent un terme tout relatif... Elle doit être trois, voire quatre fois plus vieille que moi, elles sont plus ce qu'elles étaient les grand-mères !)

-Buck, tes sous-fifres sont en train de piller ton restaurant du Nord et tes courtisanes ont toutes démissionner il y a une heure. Puisque je leur ai donné du travail dans Magna, je suppose que tu as toi aussi ta part de boulot à faire si tu ne veux pas que la prochaine collecte d'impôt hypothèque tes bordels...

La menace fait mouche, et l'homme d'affaire me toise avec colère avant de filer comme un mal-propre. Je siffle d'appréciation, qui penserait que les affaires allaient si mal pour le grand, le tout-puissant Buck... Moi je le savais comme la quasi-totalité de Magna.

-Pas la peine de déclencher une émeute aujourd'hui capitaine, la ville mérite bien un peu de calme aujourd'hui, non ?

Je lui tends un sourire, une perche amicale, qu'elle la prenne ou non, quel différence cela ferait-il ?

Alors que l’atmosphère se faisait plus tendue à mesure que la jeune Valkyrie et le marchand se défiait du regard, un clairon sonna au loin. Il annonçait l’arrivée d’une compagnie de soldats. Abysse détourna alors son attention du marchand belliqueux pour s’écarter et laisser place aux soldats de Magna. Ils portaient sur leurs épaules de lourds fardeaux. Malgré qu’ils aient été dissimulés sous un drap immaculé, Abysse devinait ce qu’était que ces convois. En effet, bien qu’elle n’ait pas été là pendant les tragiques évènements, elle avait entendu parler de ce qui s’était passé dans l’Entre-Monde. Tout à coup, un cri de jeune femme perça le lourd voile de deuil et de silence qui s’était déposé sur la ruelle. Une main s’était mise à dépasser d’un des draps et la jeune femme avait cru reconnaître un proche. Du moins, c’est ce que conclut la jeune capitaine.

Sans pouvoir s’en empêcher, Abysse détourna légèrement le regard lorsque le convoi de soldat arriva à sa portée. Cela faisait un moment qu’elle ne parvenait plus à supporter le regard de la mort. Elle n’avait été que son outil, il y a des années de cela et ne pouvait s’empêcher d’y repenser. Autrefois, elle semait carnage et mort pour son simple plaisir. A présent, elle regrettait ses actes passés, la monstruosité et l’inhumanité dont elle avait fait preuve. Même ici, dans l’Entre-Monde, peu après son exil, elle n’avait pu s’empêcher de causer à nouveau carnage et désolation sur son passage. Elle était née pour guerroyer et côtoyer la mort mais ne pouvait désormais plus assumer ce fardeau. A présent, Abysse n’était plus qu’une Valkyrie bannie des siens, une rejetée et surtout, un monstre. Elle se considérait comme tel pour tous les massacres qu’elle avait pu causer.

Tandis que le convoi continua sa route, inlassable, la jeune capitaine s’était retrouvée plongée dans un état second. Une lueur mélancolique brillait dans son regard tandis qu’elle paraissait vaguement absente. Un battement d’aile l’extirpa alors de sa léthargie. Le vagabond qui n’en était pas vraiment un venait de rejoindre la jeune femme et le marchand. Il toisa sévèrement le dénommé Buck et le menaça afin de le faire déguerpir. Dans un premier temps, le marchand parut légèrement surpris et décontenancé. Lorsqu’il eu enfin reconnu la personne qui s’adressait à lui, il écarquilla les yeux et se confondit en excuse avant de se retirer, sans demander son reste, l’échine courbée. Le nouvel intervenant s’était adressé à lui d’un ton autoritaire et sûr de lui. Pour le moment, Abysse n’avait pas pu vraiment voir le visage de l’inconnu mais elle doutait fortement qu’il ne s’agisse que d’un simple habitant de Magna pour posséder autant d’autorité sur le vieux marchand.

Avec un sourire mélancolique, elle remercia à voix basse le jeune homme de son intervention. Il venait de la sortir d’un mauvais pas. Elle n’était pas spécialement d’humeur à chercher querelle, surtout après le passage funeste des soldats. Il était venu lui rappeler la dureté de ce monde et les horreurs qu’elle avait commise par le passé. Le temps n’avait pas su effacer sa douleur et ses remords.

Légèrement pensive, Abysse posa un regard absent sur son nouvel interlocuteur tandis qu’il lui posait une question. Tout sourire, même mélancolique, s’effaça alors de son visage. Elle fronça légèrement les sourcils. Une indéfinissable peine et douleur envahissait désormais l’esprit de la jeune Valkyrie. Elle avait perdu tout appétit et toute envie d’observer la ville s’agiter sous ses yeux. Tout ce qu’elle souhaitait, désormais, c’était fuir le spectacle de débauche et de misère auquel s’offrait cette ville pour rejoindre son vaisseau et partir fendre les cieux, loin d’ici et de cette réalité. Cela avait toujours été sa façon de fuir ses remords et son passé.

- Vous avez raison…

Elle s’était exprimée sur un ton songeur alors que son regard dérivait au dessus de l’épaule de son interlocuteur, au loin. C’est alors que quelque chose attira son attention et la sortit de ses rêveries. L’inconnu venait justement de l’appeler par son titre, enfin pour ce qu’il valait. Haussant un sourcil, Abysse posa un regard plus attentif sur l’inconnu. Il était vêtu de façon banale pour un simple vagabond. Et pourtant, quelque chose d’étrange émanait de lui et lui intimait qu’il n’était pas un simple vagabond. Il était trop soigné sur lui et il se dégageait une aura bien trop imposante pour n’être qu’un simple manant, un homme banal. Plus la jeune femme examinait l’inconnu plus elle finissait par se persuader qu’il n’avait pas grand-chose d’humain. Et puis, après tout, ne s’était-il pas interposé entre elle et le marchand en volant? Il lui avait bien semblé entendre un battement d’ailes avant son interruption.

Tandis que la ville reprenait peu à peu son activité habituelle, l’attention d’Abysse se trouvait attirer par ce nouvel arrivant qui ne semblait pas si anodin que ça. Il était d’ailleurs à noter l’autorité dont il avait su faire preuve face au belliqueux marchand. D’ailleurs, depuis son intervention, la plupart des gens qui croisaient son chemin semblaient l’éviter soigneusement et lui jeter des regards inquiets. Une lueur étrange illumina le regard de la jeune femme tandis qu’elle s’adressait à lui sur un ton légèrement amusé.

- Excusez moi de ma soudaine indiscrétion mais vous me semblez ne pas être qu’un simple vagabond, je me trompe ?

Je souris de toutes mes dents. Un vagabond... Pourtant, j'ai jeté mes vieilles frusques. Je baisse les yeux sur mes vêtements du jour, certes, sans dorures et broderies j'ai l'air d'un type somme toute normale. Quel dommage, les femmes aiment bien les hommes en uniformes, moi j'ai, du cuirs, et rien de bien intéressant sur ma mise. Un point pour elle, je suis propre, mais dans Magna, il n'y a pas que des pouilleux.

-Gwendal, non-vagabond à votre service.

Je lui tends une main amicale. Elle est calme et raisonnable, ça me suffit pour ne pas l'envoyer promener. En temps normal, m'immiscer dans une bagarre m'aurait valu des plumes en moins, mais ce capitaine semble savoir se contrôler, c'est rare de nos jours.

Je ne voyais pas la nécessité de me présenter comme Tchen, trop pédant et pas assez original à mon goût. Et si cette femme était aussi fûté que mâture, elle devrait comprendre bien rapidement pourquoi les rats qui vivent dans le coin me connaissent si bien.
Au loin j'entends le son du cor, Un autre cortège dévale une avenue à peine un kilomètre plus loin. C'en est triste à pleurer, mais que pouvions-nous faire pour les morts. Aujourd'hui nous devions réparer, consolider, abandonner l'espoir de trouver des vivants sous les décombres. Et pendant ce temps, les maitres se débattent dans leurs bureaux pour trouver le temps de se réunir, de décider quoi faire, comment agir, trouver une solution ou, au moins, une alternative pour que le nombre de morts n'augmentent pas les jours qui suivront.
Je n'ai pas conscience que mon regard s'est assombris au son du cor, mon sourire s'est un peu affaissé, et les mains dans les poches je me détourne comme hypnotisé. S'il n'y avait l'odeur suave de viande grillée planant de nouveau dans l'air, je serais encore rembrunis prêt à aller donner des coups de pieds dans le derrière des administrateurs qui ne se bougent pas pour que tout aille plus vite... Je fis volte face et à cette charmante blonde, je propose un sourire en guise d'excuse.

-Vous accepteriez de déjeuner avec moi ?

Abysse fronça légèrement les sourcils, déçue. La réponse que lui avait fourni l’inconnu était pour ainsi dire, très décevante. Par cette question anodine, la jeune Valkyrie avait voulu en savoir plus sur l’identité de son interlocuteur. En retour, elle n’avait reçu qu’un prénom et une négation. Pour la jeune capitaine, un prénom ne signifiait rien. Ce n’était pas lui qui définissait l’identité de quelqu’un. Elle aurait très bien pu ne pas le savoir que son opinion sur l’inconnu n’aurait pas changé. En bref, la réponse qu’il lui avait fournie ne l’avait guère satisfaite. La jeune femme ne voulu rien en montrer pour autant et feignit de ne pas avoir tout à fait compris ses propos. En tout cas, ce dont elle était sûre désormais c’était que le jeune homme ne tenait pas à divulguer sa véritable identité. Tant pis, Abysse s’efforcerait de l’apprendre par elle-même.

Au loin, un autre clairon sonna. Un convoi de militaires devait se déplaçait non loin de là. Une image vint alors se plaquer sur la rétine de la jeune femme. Elle se rappelait des carnages que provoquaient autrefois chacune de ses descentes dans le monde des mortels. Elle se souvenait à quel point elle avait pu détruire des vies et des destinées pour son simple divertissement. A présent, Abysse souhaitait se racheter comme elle le pouvait. Elle qui avait été bannie du royaume des immortelles, elle ne désirait plus que se comporter comme une mortelle et participer à l’avenir de ce monde.

La jeune capitaine reposa son regard sur son interlocuteur. Il semblait plongé dans ses pensées. Son sourire s’était éteint et son regard s’était fait absent. Il tournait presque le dos à la jeune femme. Apparemment, lui aussi, le son du cor lui avait évoqué de mauvais souvenirs. La jeune femme se demandait bien à quoi pouvait penser ce mystérieux inconnu qui l’avait sortit d’une bien mauvaise passe. En repensant à son intervention, elle se rendit compte qu’elle n’avait pas remercié le dénommé Gwendal.

- Je…j’ai oublié de vous remercier pour votre intervention. Vous m’avez sortie d’une bien mauvaise passe. Merci. Et puis, j’allais oublier, ne vous embêtez pas avec des titres comme Capitaine, appelez-moi donc Abysse.

Un sourire amical se dessina sur le visage de la jeune femme. Après tout, cet homme lui avait rendu un service non négligeable, elle pouvait bien se montrer agréable avec lui.

C’est alors qu’à sa grande surprise le jeune homme se retourna d’un bloc. D’un sourire légèrement mélancolique, il l’invita à déjeuner avec elle. Abysse ne pu contenir sa surprise. Elle haussa un sourcil. Elle ne s’attendait absolument pas à ce qu’il l’invite de la sorte après la réponse évasive qu’il lui avait fourni. L’évocation d’un repas rappela alors à l’ordre l’estomac et la faim de la jeune femme. Les derniers évènements avaient failli lui faire oublier la raison de sa venue en ce quartier. En temps normal, sans doute qu’Abysse aurait refusé une telle invitation de la part d’un inconnu. Cependant, il lui avait rendu service et elle avait très faim. De plus, ce jeune homme avait l’air de bien connaître les coins de cette ville, sans doute saurait-il lui trouver un endroit agréable pour se remplir son estomac qui criait famine.

Abysse plissa légèrement les yeux tout en s’approchant légèrement de son interlocuteur.

- A une seule condition Gwendal : je voudrais que tu me tutoies. Après tout nous allons manger ensemble alors autant éviter de se fixer des distances.

Amusée par la tournure que prenaient les évènements, Abysse accepta l’invitation. Il n’était guère conseillé de suivre un inconnu dans les quartiers de Magna surtout en pareille époque mais la jeune femme s’en fichait éperdument. Elle avait suffisamment confiance en ses capacités pour se sortir d’un éventuel danger. De plus, elle avait l’intime conviction que ce jeune homme ne lui voulait aucun mal. Elle ne lui faisait pas vraiment confiance mais elle n’avait pas non plus de raison de s’en méfier. Abysse fit donc signe à son interlocuteur qu’elle était prête à le suivre avec un sourire amusé.

[ je suis désolée, mon post est loin d'être terrible. J'ai même pas pris la peine de me relire tant je sais qu'il est nul. Je manque un peu d'inspi sur le coup xD ]

J'inclinais la tête, des remerciements bienvenus même si je n'en voyais pas l'utilité. Je ne l'avais pas vraiment fait pour elle, si je devais me justifier je dirais seulement que je n'ai pas besoin d'une bagarre stupide pour me donner un peu plus de travail, le dossier de Buck étant considérable, me le farcir... non merci !

-Heureux de te l'entendre dire, Abysse !

Elle n'avait pas l'air d'apprécier ma présentation, je la trouvais bien, moi... Les femmes sont d'un compliqué ! Je résistais à l'envie de me gratter la tête, j'aurais eu l'air encore plus suspect avec des tics nerveux.
Mon sourire est franc, parce que j'ai faim et que je vais pouvoir me remplir l'estomac sans plus attendre. Il y a, à l'angle de la rue, une boulangerie. Un endroit que je connais bien puisque j'y passe chaque matin avant d'aller sur Tchen, et derrière, un restaurant chinois avait fleurit pour le plus grand bonheur du quartier qui n'avait rien à offrir dans ces quelques ruelles si ce n'est de l'ombre et des brigands.
L'odeur de viande grillée, de légumes sautés et de sauces salées me mettait l'eau à la bouche.
Je nous emmenais vers ce petit restaurant, parce qu'il avait sûrement plus de qualités que j'appréciais en cet instant que toutes les bagarres du monde !

-Les affaires sont bonnes dans Magna ?

Puisqu'il fallait faire la conversation... Autant se lancer.

Vagabondages [pv Abysse]

Vagabondages [pv Abysse]

Re: Vagabondages [pv Abysse]

Re: Vagabondages [pv Abysse]

Re: Vagabondages [pv Abysse]

Re: Vagabondages [pv Abysse]

Re: Vagabondages [pv Abysse]

Re: Vagabondages [pv Abysse]

Re: Vagabondages [pv Abysse]

Re: Vagabondages [pv Abysse]

Re: Vagabondages [pv Abysse]

Re: Vagabondages [pv Abysse]