Un étrange village

Septembre avait ouvert un portail grâce à son insigne de Sanctuari. La mission fournissait un Perçant à usage unique pour Trinity mais elle devait avouer qu'éviter une longue traversé en bateau ne la déplaisait pas.

Ils arrivèrent en bordure de Saïmiri afin de ne pas éveiller les soupçons, Septembre pu alors ranger son insigne dans un coin tranquille et passer pour une personne normale... Enfin normal pour un robot de dernière génération.

Ils prirent ensuite la direction du mystérieux village en traversant les vergers qui entourait la cité. Un vent frais caressait le visage de Lyh à travers son masque brisé.Cela lui faisait du bien, dans son monde il n'y avait surtout que de la pollution ambiante.

Ils arrivèrent enfin au village dont parlé la mission. Un joli petit hameau au premier coup d'oeil. Des vergers toujours présent entourait la bourgade dont les maisons, mélange de bois et de métal brillant sous le soleil des iles, donnaient une ambiance apaisante.

- Bien, il est temps de commencer l'enquête, chuchota-t-elle à Septembre

Sur la place du village se trouvait une auberge dont les installations de distillerie semblaient faire partie intégrante du bâtiment.

- J'vais à la chasse aux indice Lyh, dit Sar en filant vers l'entrée de l'auberge

Instinctivement elle essaya de le rattraper mais sa main se referma sur du vide. Evidemment il n'était réel que pour elle. Sentant des regards interrogateurs posé sur elle suite à ce geste irréfléchi elle lança à Septembre.

- Tiens chéri et si nous entrions ici ? Il parait qu'ils y servent le meilleur breuvage de toute l'île

Et commença à avancer en marmonnant des "Imbécile" à l'encontre de Sar.

Saïmiri. J'en avais un souvenir presque identique à la ville se déployant sous mes yeux, des éléments du décor avaient changés, s'étaient usés pour certains. Mon inspection de la place fut vite interrompue par Lyh.

-Chéri...

On ne m'appelle pas comme ça souvent, voire jamais. Je la suis surpris, tellement que j'ai les capteurs optiques qui se prennent pour des guirlandes de noël. Un bon coup bien placé en coin de la tempe et voilà qu'ils se calment.

L'auberge dans laquelle elle entre fleure bon le vinaigre de pomme et la tarte encore chaude. J'analyse quelques odeurs éparses de sueurs, de suie et de divers parfums. Rien ne m'intrigue alors que m'assoie à une table.

Une serveuse humaine et bardée de taches de rousseurs vient nous dire bonjour :

-Vous désirez ?

Je la regarde avec l'air idiot de celui qui n'a pas compris la question. Le truc c'est que je ne bois pas, j'ai bien un truc qui me permet d'évacuer ce que j'ingurgite mais d'ordinaire elle me sert à détruire les échantillons que j'analyse avec les captures linguales.
Notons que mon processeur m'affiche depuis trois secondes et sept dixièmes que la question s'adresse surtout à Lyh.
Je me tourne vers elle et lui rend ce regard idiot car, moi, je n'ai rien de mieux à faire sinon écouter et enregistrer ce qui se dit dans l'auberge.

L'intérieur du bâtiment est tout aussi joli que de l'extérieur. Quelques clients étaient déjà assis au bar et parlaient, fort pour certain. Ils parlaient essentiellement de la cueillette des pommes qui étaient florissante cette année.

Et dire qu'avant la fermeture des Mirroirs il n'y avait surement que de la végétation avant le développement de cette dimension pensa Lyh.

Une serveuse vint prendre notre commande. Septembre la dévisagea avec un air un peu benêt.

- Ce que vous avez de meilleur en cidre, lui lança-t-elle d'une voix enjouée.

Elle acquiesça et parti chercher les verres. Lyh se pencha alors vers Septembre et lui chuchota.

- Pouvez vous analyser cette boisson ? C'est peut être un moyen pour donner de la drogue aux habitants.

Sar était calme pour une fois, il ne s'était pas montré depuis qu'il avait foncé tête baissé dans l'auberge. La serveuse rouquine revint avec un bol et une carafe de cidre maison et reparti en souhaitant une bonne dégustation.

Du cidre, logique, ils ne doivent d'ailleurs servir que cette boisson sur toute cette portion de l'île. J'en connais au moins un que ça déprimerait. Dès que la serveuse fut partie, j'écoutais attentivement les instruction de Lyh.

-A moins d'aller boire du cidre dans toutes les distilleries de la ville, et mon système d'analyse risque d'avoir besoin d'un décrassage avant la fin des inspections, nous aurons bien de la chance si je détectais autre chose que de l'éthanol dans ta bolée.

Mon processeur me renvoya quelques données audio sans importance réelle mais dont la variance en comparaison des conversations des autres habitués, était suffisante pour alerter le module d'écoute active.

-Un couple en fond de salle, deux mâles si j'en juge par les voix, parlent bas et ne discutent ni du beau temps ni des pommes de la saison. Pendant que tu boiras en souriant, je vais continuer d'écouter.

Il y avait aussi d'autres idées qui effleuraient ma mémoire tampon avec insistance. Comme si mon supercalculateur me renvoyait encore et encore les mêmes idées jusqu'à ce que je daigne leur donner voix au chapitre.

-En fait, on doit d'abord commencer par faire parler les gens sur les disparitions d'animaux, c'est le seul fait établit que nous pouvons suivre. Ils nous aideront à comprendre ce qu'est cet étrange culte. Ensuite, nous devrons déterminer si c'est un culte, une pratique illégale ou bien une manipulation : chimique ou psychique. Et puisqu'on parle de bestioles disparues, nos deux amis ont l'air de marchander le prix de quelque chose.

L'androïde n'avait pas tort, il n'y avait pas que cette auberge dans les environs cela prendrais trop de temps pour une piste qui ne mènerait sûrement nul part.

Il mentionna un couple au fond de la salle qui parlait d'acheter quelque chose d'assez inhabituel pour que cela retienne l'attention de Septembre.

Et puis il y avait surtout cette histoire d'animaux disparus, est ce que les deux étaient lié ? Il fallait enquêter séparément pour le coup.

- Très bien, je vais me renseigner auprès de la serveuse pour cette histoire de disparition et toi va surveiller nos deux zigotos, je n'ai pas de sens aussi affûté que toi.

Puis elle se leva emportant son bolet et alla s'installer au bar. La serveuse rousse se trouvait justement derrière.

- Bonjour, fit-elle avec un sourire faux sous son masque, dit donc c'est quand même fou cette histoire d'animaux qui disparaissent.

- Oh la m'en parlez pas ma bonne dame, lui répondit-elle, presque la moitié des personnes qui viennent ici on perdu un animal.

Elle commença à me parler des habitués qui allaient et venaient. Tous avaient des professions différentes et aucun lien de parenté ou autre. Mais la méthode était la même. Le soir l'animal était toujours au domicile mais le lendemain plus personne. Aucunes traces d'effractions.

Apparemment certains c'étaient réveillé avec des courbatures ou des bleus venus sans aucune explication.

Puis dans un élan de folie après m'avoir longuement parlé elle sortie une photo de sens enfant de son soutien-gorge. Et elle continua de me parler mais plus du tout du sujet qui intéressait Lyh. Mais par politesse elle resta, hocha tout la tête de temps à autre et buva la boisson qu'elle avait commandé

J'aurais voulu l'attraper et lui demander de ne pas me laisser seul ici. J'étais aussi désemparé qu'un poisson hors de l'eau. Un vrai poisson, s'entend, les sirènes c'est autre chose... Ces dernières étant souvent plus habiles que moi dans la vie à la surface. C'est dire ! Sans oublier les écailles. Ma carosserie n'a définitivement rien à envier aux poissons.
Pourquoi ai-je pensé aux poissons déjà ?

Alerte dans mon champs droit, je remarque que l'un des hommes que je surveillais s'apprêtait à se lever de son siège. Depuis quelques minutes l'enregistrement se faisait tout seul. Je n'avais pas même remarqué le jeune homme qui avait prit la place de Lyh. Il me parlait à toute vitesse et quand je le notais sa présence, mon processeur me gratifia d'une retranscription accélérée des échanges que nous avions eu. Pour ma part je m'étais contenté de hocher sobrement de la tête à chaque question, émerveillant un peu plus l'adolescent.

-On ne voit pas souvent des androïdes comme vous par ici.
-Je m'en doute, je suis un modèle plutôt rare.

Lyh m'ayant abandonné j'avais même accepté un verre plein d'un cidre sombre comme la nuit. Il trônait fièrement devant moi et je ne l'avais toujours pas touché. C'est que... Ma "fiancée" m'a laissée tomber pour parler avec la barmaid et me voilà à écouter un adolescent paumé tout en essayant de ne pas me faire remarquer par mes cibles.
Ce pouvait être un pet dans l'eau comme une piste brûlante. L'enregistrement n'était pas fameux et les quelques événements dans la salle avaient brouillé une partie des sons de manière à les rendre irrécupérable. Mais pour le peu que j'en avais entendu, cela donnait une rencontre peu avant le levé du soleil. Un marché allait se faire, de quoi c'est une bonne question bien que j'ai des doutes.

-Excuse-moi...
-Henry.
-Henry, je dois retrouver ma compagne. Merci de m'avoir accueilli. Je craignais que ce voyage ne soit ennuyant mais je saurais où te trouver si j'ai besoin d'un guide.
-Comptez sur moi, je serai dans le quartier cette semaine.

Je le saluais d'un hochement de tête et allais retrouver Lyh.

-Comment trouves-tu la ville ?

J'espérais qu'elle ne serait pas trop précise dans ses retranscription afin de ne pas alerter ses voisins du bar. Malgré tout, je me penchais vers elle pour lui murmurer rapidement ce que j'avais appris.
Sous la forme d'une connivence intime, ce serait le genre de messe basse que personne ne trouverait anormale. N'est-ce pas ?

Lyh était contente que Septembre arrive. La barmaid n'avait pas arrêter de parler. Et Sar ne s'était toujours pas montré ce qui inquiété Lyh de plus en plus.

Il lui murmura ce qu'il avait appris. Il y aurait donc un marché peu avant l'aube ? C'était intéressant même si cela ne pouvait être rien du tout. Il fallait s'y rendre.

- Oh oui j'adore c'est si pittoresque et puis les gens sont sympathiques, elle montra la serveuse d'une main et puis ce cidre est exquis

Elle regarda rapidement la salle. Les gens continuaient de parler et les deux hommes que surveillé le Sanctuari se dirigeaient vers la sortie. Elle attendit qu'ils soient partis tout les deux de l'auberge.

- Bon on ne va pas rester ici toute la journée, je veux visiter la ville moi dit-elle d'un air "coquin"

Puis se pencha vers Septembre et lui murmura qu'ils devaient se trouver un coin tranquille pour planifier la suite de l’enquête.

Puis commença à sortir de l'auberge et se concentra pour faire apparaître ses fichiers sources sur son casque afin de vérifier l’état de Sar.

Sous son masque son air était devenu plus dur et inquiet.

Je nous éloignais de l'auberge. Calculant une vitesse de marche juste assez rapide pour gagner de précieuses secondes, juste assez lente pour n'inquiéter personne. Nous devions jouer les touristes. Nous faire remarquer serait le pire qui puisse nous arriver à ce stade de nos investigations.

Après plusieurs minutes où Lyh ne pipa mot, je nous fis ralentir près d'un square. Faisant mine de lorgner la mare aux canards, supportant les maladresses des oisillons.

-Qu'as-tu découvert avec cette serveuse ?

Ainsi donc, la moitié des gens de l'auberge avaient perdu un compagnon. Je soulevais un sourcil assez haut pour marquer mon incompréhension.

-Chasseraient-ils dans les auberges ? Je veux dire que dès lors que les gens sortent boire un verre, ils ne sont pas chez eux à surveiller leurs animaux. Tu vois ?

Nous savions comment les animaux disparaissaient à présent. Ou plutôt, nous en avions une idée plutôt intéressante. Facile à mettre en œuvre et efficace pourvu que l'équipe contienne au moins deux personnes.
Mais nous ne savions toujours pas pourquoi ces animaux disparaissent.

-Il semble évident selon nos informations, un culte est célébré dans le coin. Eva n'aurait pas suggéré ça sur sa fiche de mission si personne n'avait relevé des indices pertinents allant dans ce sens, j'imagine qu'un Commissaire de K'ouen a découvert deux trois choses...

Mon processeur s'emballait alors je continuais sur ma lancée.

- Les animaux pourraient servir de sacrifice ou pire encore. Et si nous tentions une seconde taverne ? Répétons le schéma. On entre, on vérifie que personne de commun à notre précédente visite ne soit dans l'auberge. Au cas où, on mémorise les visages qui étaient à la fois dans la précédente taverne et dans la nouvelle.

Je m'interrompis brutalement.

-Tu sais quoi, on va dans une nouvelle auberge et on tente l'expérience. Sauf le cidre. Ciel ! Je suis imperméable mais pas à un truc sucré avec des bulles. Dès qu'on a assez d'infos, on va tenter de retrouver le Commissaire ou la personne qui aurait ses infos au Miroir K'ouen. Un culte bizarre ça n'a rien d'illégal mais maltraiter les animaux et voler les gens, si. Je pense qu'on peut faire ça façon sanctuari sur la fin. Qu'en dis-tu ?

Après avoir marché un moment Septembre bifurqua vers une marre aux canard. Lyh n'avait toujours pas résolu son problème avec Sar, d'après ses fichiers interne il était toujours actif mais ne se montrait pas ce qui n'était pas dans ses habitudes.

Elle expliqua au sanctuari ce qu'elle avait découvert et ils décidèrent de répéter l'opération dans une nouvelle taverne. Il fallait découvrir qui faisait parti du culte qui enlevé les animaux.

- Très bien mais je compte sur toi pour repérer les visages similaires, mon casque a quelques soucis depuis mon arrivé dans ce monde et je ne suis pas très physionomiste.

Du coin de l'oeil elle voyait le programme Sar toujours actif et d'un rapide mouvement de la main sur l'icone en réalité augmenté elle força le programme à redémarrer. Cela allait prendre un peu de temps mais cela pourrait régler le problème.

Ils partirent à la recherche de la prochaine taverne. Et Lyh avait bien retenu qu'il ne fallait pas commander de cidre. Il allait falloir éviter d'être louche pour ne pas éveiller les soupçons.

En entrant elle dis à Septembre d'aller s'asseoir pendant qu'elle allait parler à la serveuse pour "commander" alors qu'elle avait plus l'intention de lui soutirait des infos comme à la précédente.

- A tes ordre, chérie.

En faisant mine de chercher un chargeur où je me branchais par pur principe, je balayais la salle du regard durant le trajet. La prise secteur était accessible et indiquée par des panneaux. Si bien qu'il m'était difficile d'insister sur le peu que je voyais. Quelques visages se trouvaient dans un mauvais angle ou bien dans des zones innaccessibles de ma position. Pour l'essentiel de la taverne il n'y avait aucun visage redondant sauf un. Je laissais mes routines fouiller mes stockages mémoire pour confirmer l'information.

Assit à une table sans consommation devant moi, je fus rapidement interrompu dans mes recherches par un garçon de service qui vint prendre ma commande. Il n'était pas très souriant mais eut l'amabilité de me désigner les quinze différents cidres qu'ils possédaient.

-Vous n'auriez pas autre chose que du cidre ?

Surprise, je le senti réfléchir puis avec le premier sourire de sa journée il me proposa une bière... De pommes.

-Va pour le cidre... Dites.

Lui qui allait passer ma commande auprès du bar s'arrêta à quelques pas.

-Vous mangez autre chose que des pommes ici ?

Il rajouta un sourire pour la forme et promis de m'apporter des appéritifs dans lesquels il n'y a pas de pommes sous aucune forme.

A son retour, je découvris avec stupeur des tartinades, du pain et le fameux cidre. Comment j'allais évacuer toutes ces cochonneries organiques avant qu'elles ne fermentent ? Bonne question ! Puisqu'il s'enquiérait de ma joie d'être dans l'établissement, je lui retournais aussitôt la question.

-Et vous, tout va bien ?

Avant qu'il ne se surprenne encore lui-même avec un sourire qui pourrait le tuer -il n'avait manifestement pas l'habitude de ça- je levais une main apaisante.

-Avec ma compagne nous avons été dans une autre auberge plus tôt. L'ambiance était à coupée au couteau. Voyez ? Vous-même m'avez paru tendu tout à l'heure alors... Voilà, je me demandais ce qui rendait les gens de cette ville sublime aussi malheureux. Je viens passer quelques vacances, en plus.

Le serveur me parla en long en large et en travers des animaux disparus, des communautés renfermées qui se créaient dans la ville. Un vrai climat de prohibition... Il me conseilla d'aller voir par moi-même, cette nuit. Près des bars qui restent ouvert après le coucher du soleil.

-Vous verrez, c'est encore moins charmant que vous ne l'imaginiez. En plus, ça l'est devenu très récemment. Avant, ce n'était pas comme ça. Pas plus tard que deux mois avant je sortais régulièrement, maintenant, je fais de mon mieux pour rentrer aussi vite que je le peux chez moi.