Reconnaissable au premier coup d'oeil !

Mes dernières interventions de sanctuari ont été particulièrement virulentes et longues. Cela m’a permis de me rendre compte d’une chose, je n’utilise que des armes de jet. Je retrouve trop rapidement à court d’armes et presque sans défense. Mon habilité avec le pistolet de service n’est plus à prouver, je suis nulle au tir… Je suis bien plus à l’aise avec des armes plus conventionnelles telles qu’une épée ou une dague. Les armes que m’a vendues Ayren me donnent pleine satisfaction, j’ai donc décidé de faire appel à lui pour me fabriquer une arme unique.

Pour une fois, j’ai embarquée Hazuki avec moi pour que l’on puisse avancer sur la préparation de la prochaine formation des équipes. Préparer une formation régulière des équipes m’incombe depuis que je suis devenue Prétorienne mais le faire sans que les équipes n’y fourrent leur nez, c’est autre chose. Les sorties comme celle-ci sont parfaites pour échanger avec Hazuki à ce sujet. Le projet semble en bonne voie. Le lieu est réservé, les enseignements presque tous déterminés. Cela devrait plaire aux équipes.

Comme d’habitude, la boutique est parfaitement rangée et une odeur agréable flotte dans l’air. Je file directement au comptoir sans faire de détour par les présentoirs d’armes et d’armures et fat tinter la clochette. J’hèle l’artisan certainement occupé dans son atelier au cas où il n’aurait pas entendu la clochette.

Ayren ?

Le forgeron ne tarde pas à faire son apparition derrière son comptoir. Ayren me salue rapidement et me demande l’autorisation de me tutoyer, chose que je fais déjà. Avec un grand sourire, je lui réponds :

Bien sûr, je préfère même, cela est plus agréable pour tout le monde. Je vais bien, beaucoup de travail depuis ma nomination au poste de prétorienne mais je survie. Et toi comment vas-tu, les affaires tournent bien ?

J’apprécie de discuter avec les artisans de la ville, on en apprend beaucoup sur leur activité et sur d’éventuels problèmes en ville. Hazuki ne me laisse pas beaucoup de temps pour continuer à le faire, il faudra que j’en parle avec elle. Cela ne peut pas faire de mal qu’on voit un peu plus les sanctuaris dans les rues. Après un grand sourire à Hazuki, Ayren me questionne sur ma chasse au gros gibier que j’avis évoqué lors de mes derniers achats et si j’en suis toujours satisfaite. Je sens une petite pointe d’inquiétude dans sa voix, peut-être pense-t-il que je viens me plaindre du matériel.

La chasse se passe bien. Les aiguilles sont comme neuves malgré leur utilisation intensive. La qualité de ton travail n’est pas à remettre en doute, bien au contraire ! D’ailleurs, Ayren, je te présente Hazuki. Elle est mon assistante à la caserne.

Hazuki fait une rapide révérence au forgeron et bafouille un « bonjour » timide. C’est la première fois que je la vois ainsi. Habituellement, elle est plutôt du genre à secouer son interlocuteur… Je me promets de taquiner la dragonne plus tard. Entrant dans le vif du sujet, Ayren nous questionne sur le but de notre visite. Je souris à l’homme.

Je viens pour une petite commande. Je n’ai que des armes de jets actuellement. Elles me donnent entière satisfaction mais je me suis rendue compte que pour de longues missions, je ne suis pas suffisamment équipée. J’aimerai que tu me fabriques une arme pour le combat rapproché.

Je tire de ma poche une page de magazine. La caserne reçoit régulièrement des documents de publicités de fabricants d’armes. Généralement, on préfère faire affaire avec des artisans, ils sont plus à l’écoute de nos besoins et de nos envies. J’étale l’image sur le comptoir pour présenter le design que j’aimerai avoir.

Voilà une idée de ce que je voudrai. Chez ce fabriquant, la lame est dotée d’une technologie particulière pour la renforcer ce qui la fait briller. En soit, je préfère que la lame soit directement de bonne qualité plutôt que de m’appuyer sur une technologie incertaine. Par contre, j’aime bien la couleur, elle se rapproche de celle de mes yeux. Tu penses que c’est possible ?

A côté de moi, Hazuki lève les yeux au ciel. On a déjà eu cette discussion toutes les deux à ce sujet et comme elle le dit : « quel intérêt ? ». Ce à quoi, j’avais répondu « le même que pour ton rouge à lèvre ! ». Chacune sa façon d’être coquette.

Après avoir étudié la photographie, Ayren semble plutôt enthousiaste. J’avais un peu peur qu’il m’envoie sur les roses parce que le design n’était pas de lui. J’aurai bien entendu compris mais il reste hors de question de faire appel à la société qui commercialise l’arme du catalogue. Je n’ai aucune confiance dans la qualité de leur travail et la fiabilité de leur fameuse technologie « de réduction de masse active ». Une bonne lame forgée comme il faut par un forgeron d’expérience, voilà ce qu’il me faut. Ma demande concernant la couleur de la lame semble l’intriguer un peu, on ne doit pas lui faire souvent des demandes comme celle-ci. Je lui fais un grand sourire lorsqu’il m’annonce que cela devrait être possible tandis qu’Hazuki soupire. Je viens de gagner notre pari, elle paiera le repas ce midi. Je me doutais bien que Ayren serait capable de cette prouesse donc j’avais parier sans craintes contre mon assistante.

A sa demande, je fixe mon regard dans le sien pour qu’il puisse bien étudier le bleu de mes yeux. Un peu gênée de le fixer ainsi, j’observe également ses yeux de couleur noisette. Une teinte un peu plus chaude que celle des yeux d’Hazuki et surtout un regard plus expressif et joyeux. Il griffonne quelques notes sur l’image, certainement des données par rapport à la couleur pour qu’il puisse s’en souvenir. J’étouffe maladroitement un rire lorsqu’il se rend compte qu’il a peut-être écrit sur un document que je voulais récupérer.

Pas du tout, on en a des dizaines à la caserne. Malgré que l’on n’achète pas chez eux, ils continuent de nous envoyer des dizaines de catalogues.

Rassuré, Ayren reporte son attention sur Hazuki qui attend patiemment à côté de moi. Mais c’est qu’il essaierait de faire du charme à la demoiselle le coquin ! J’observe en silence le spectacle du forgeron usant de son charme naturel sur Hazuki. Je connais assez bien mon assistante maintenant pour savoir qu’Ayren pourrait tout à fait correspondre à ses attentes. Un homme gentil, doux, un brin séducteur mais avec un peu de tempérament tout de même. Mais j’en sais trop peu sur le forgeron pour savoir s’il aurait la carrure pour supporter la dragonne… Hors de question de laisser Hazuki broyer le talentueux forgeron. Ce dernier questionne alors Hazuki sur son besoin, allant même jusqu’à lui proposer une lame couleur noisette. Je sourie intérieurement en imaginant la réponse de la dragonne. Dragonne dont je vois les pommettes légèrement rougir. Gène ou colère ? Difficile de le dire quand on parle d’Hazuki.

Mon cher Ayren, je vous remercie de votre proposition. Mais, voyez-vous, mes crocs et mes griffes me suffisent amplement.

Elle conclut sa réponse très mesurée par une petite révérence. Je me promets intérieurement de revenir seule pour chercher ma commande pour taquiner le forgeron. Ne laissant pas le temps à Hazuki d’essayer de tenter de séduire l’homme, j’interroge Ayren.

A ton avis, cela me coutera combien ?

Un artisan comme lui, cela se paye correctement mais cela ne sera pas un problème, je n’ai pas encore entamé ma prime de nomination.

Le forgeron évoque le cout d’un cimeterre, arme qui m’est totalement inconnue. Ayren griffonne ce qui ressemble à une liste de cout sur son papier faisant certainement un devis sur-mesure. Son calcul aboutit à une somme de cinquante pims à laquelle il faudrait ajouter cinq pims pour une gravure grâce à une promotion généreuse. Je réfléchis un instant, la lame me semble reconnaissable entre mille. Une gravure sera-t-elle intéressante concernant l’esthétique ?

Va pour cinquante pims. Pas de gravure, le style de l’épée est déjà magnifique comme cela. J’ai toute confiance en tes talents artistiques.

Je fais un petit sourire au forgeron qui se concentre sur l’image de l’arme. Il est vrai que cela représente certainement un défi autant artistique que technique. A l’évocation du numéro de téléphone du forgeron et son interrogation concernant les écouteurs, Hazuki essaye de cacher un rire nerveux. Rire qui n’échappe bien sûr à personne. Je m’apprête à répondre à Ayren lorsqu’elle décide de se moquer de moi :

Lin avec un baladeur subsonique… Comment dire, la demoiselle a un petit problème avec la technologie !

Je fusille du regard mon assistante. Je n’ai juste pas de chance avec tout ça… En particulier les ordinateurs. Je n’ai juste pas la fibre numérique. Fort heureusement, j’ai maintenant une assistante pour s’occuper de ces trucs à ma place.

Pas de soucis, Hazuki se chargera de t’appeler. Et aucune inquiétude pour entrer, j’ai tout ce qu’il faut pour ça. On pourra aussi discuter un peu plus, le devoir nous appelle aujourd’hui.

Je fais un grand sourire à la dragonne qui me regarde soupçonneuse. Je tends mon badge pims au forgeron pour régler ma commande en avance.

Après avoir réglé les tout derniers détails, j’active le miroir pour que l’on rentre rapidement à la caserne. Une réunion avec les chefs d’escadron des sanctuaris m’attend…

Pauvre Hazuki, elle n’avait pas imaginé le calvaire que cela serait de devoir me supporter toute la journée alors que je trépignais d’impatience de voir ce qu’Ayren arriverait à faire comme miracle. Excédée, elle essayait de contacter le forgeron depuis l’aube. A l’heure actuelle, son désir le plus profond était certainement de se débarrasser de moi au plus vite. La confirmation que ma commande est prête vint vers neuf heures lorsqu’Hazuki eut enfin Ayren au téléphone. Ni une ni deux, je fuis la caserne avec mon miroir direction la boutique du forgeron pour le plus grand plaisir de mon assistante.

Comme convenu avec le forgeron, j’actionne plusieurs fois la sonnette. Après quelques instants, je décide d’employer les grands moyens. Je suis peut-être un peu trop impatiente quand même… J’ouvre une première porte vers la caserne. Puis une seconde directement dans la boutique d’Ayren. Nos miroirs ont cette particularité un peu déroutante de nous permettre d’entrer dans n’importe quel bâtiment. En temps normal, on évite d’entrer chez les gens comme cela mais j’ai tellement hâte de voir ce qu’il a fabriqué que je n’ai pas la foi d’attendre. Je débarque dans la boutique en appelant le forgeron avec une joie non-dissimulée :

Ayren ! Je suis là !