Visite inattendue

Lilou eut un sourire tremblotant lorsque Meliel lui demanda où était l’atelier, c’était le première endroit où il s’était rendu en arrivant sur les lieux, mais visiblement il avait déjà oublié, ça promettait d’être une visite épique. Elle n’eut pas le temps de lui répondre, Richye étant revenu vers eux.

Ils se rendirent à la bibliothèque pour démarrer la visite. Lilou retint sa respiration espérant que Richye ne remarque pas la disparition de certains de ses ouvrages qui avaient immigrés dans la chambre de la fillette, elle en potassait quelque uns en douce, ceux qui portaient principalement sur les propriétés des plantes, elle ne comprenait pas un mot sur 3 mais ils étaient constituer de jolies illustrations scientifiques. Lilou se fit donc toute petite pour se début de visite.

Elle écouta Richye expliquer, avec une passion immodérée, la tradition des alchimistes qui se perpétuaient de génération en génération. Un sentiment de fierté naquit dans le coeur de la fillette, celui d’avoir un papa qui faisait de grandes choses.

N’oubliant pas malgré tout son espièglerie, elle essaya d’accélérer la visite en demandant à voir le laboratoire / atelier. Elle était pressée de voir la surprise que Meliel avait préparée.

- On pourrait lui montrer l’expérience qu’on était en train de faire au laboratoire ?

La visite avait finalement commencé, l'alchimiste m'emmenant en premier lieu jusqu'à la bibliothèque, m'expliquant qu'il espère pouvoir rajouter sa petite touche personnelle au milieu de tous ces ouvrages.

- Ah ouais, c'est pas une mauvaise idée, mais euh.... Avant de pouvoir rajouter ton propre truc personnel, faut peut-être lire tous les livres qu'il y a ici non? Histoire d'être sûr de pas écrire un truc qui existe déjà, parce-que ça servirai à rien en fait. Du coup tu as déjà tout lu ici? Non parce-que y'a beaucoup de livres quand même, ou alors tu lis vraiment très vite. Moi j'aime pas lire.

Mais c'était sans compter sur la petite Lilou qui semblait s'impatienter de voir quel genre de surprise je pouvais avoir réservé dans l'atelier de ce cher alchimiste. Elle demandait que l'on se dirige directement vers le laboratoire, prétextant vouloir me montrer une expérience.

- Déjà le laboratoire? Y'a rien d'autre à voir avant? Moi ça me dérange pas hein au contraire, de toute façon je vais vous suivre, parce-que je serai capable de me perdre... Dans tous les cas, allez-y, je reste derrière vous !

Meliel me fit une remarque pleine de bon sens, à laquelle je cogitais déjà depuis un certain temps:

- Oui, c'est vrai. Je comptais requérir l'aide de Mlle Eva Carine pour l'archivage de tous les ouvrages ici présent. Je suis sûr que des copies de ces livres au sein de la tour du savoir seraient une bénédiction pour tout Entre-Monde. Et il se peut même qu'elle possède déjà une archive complète, et plus compacte. Il y a ici beaucoup de livre, et je ne crois pas avoir assez d'une seule vie pour tous les lire.

Et, à peine la discussion terminée, je constatais l'empressement de ma fille pour retourner au labo, et en faire la visite, ainsi que la démonstration du cercle alchimique dessiné plus tôt. Peut-être mon enseignement portais ses fruits...

- Mis à part le comptoir de vente, situé après l'atrium, et la serre, dont le seul accès se fait par le labo, il ne reste que les dépendances privées. Et ce n'est pas du plus grand intérêt. Donc retournons au labo, et Lilou pourra faire la démonstration du cours que je lui ai appris ce matin.

Redescendant au rez-de-chaussée, et en retraversant le salon, nous atteignîmes le comptoir, et la porte qui mène au labo.

-Et voici le cœur de la maison... la cuisi... euh... le labo !

À la pensée d’un archivage long et ennuyant Lilou se mit à bailler, elle se promit intérieurement de tout faire pour ne pas être dans les parages le jour de l’archivage, sa tendance naturel à proposer son aide causerais certainement sa perte et elle se retrouverait ainsi à classer et dépoussiérer de vieux grimoires des jours durant…

Voyant que Meliel ne semblait pas décidé à faire accélérer la visite pour en arriver à la « surprise », elle enfonça ses mains dans ses poches et suivit Richye à travers la bâtisse d’un pas trainant. Elle profita du rapide passage dans la serre pour caresser Higor, qui de nouveau en pleine forme, s’évertua à suivre la petite troupe jusqu’au laboratoire.

Devant la porte la fillette sautillait et trépignait. Qu’avait donc préparé le maître de K’ien grand illusioniste ? Elle due prendre sur elle pour ne pas sonder son esprit de son empathie, elle souhaitez conserver la spontanéité de cet événement.

Finalement, nous étions arrivé plus vite que prévu devant la porte du labo, j'aurai préféré qu'on reste assez loin pour un peu plus d'effet de surprise, mais soit. En avant pour le spectacle.

Alors qu'on s'approche lentement mais sûrement de la dite salle, un vacarme assourdissant se fait entendre dans la tour, du verre qui se brise et des meubles qui tombent. Tout ce bruit semble provenir de la pièce face à nous. Un voleur se serait introduit dans la tour pendant qu'on avait le dos tourné? Difficile à dire. Il n'y a qu'une seule façon de le savoir après tout.

Je me décide alors à passer devant, prenant timidement la poignée de la porte dans ma main, observant avec frayeur mes deux camarades. Lentement, je tourne la poignée, pour essayer de faire le moins de bruit possible puis ouvre la porte pour finalement constater les dégâts.

En plein milieu de la salle, entre les débris de ce qu'il peut bien rester, se trouve une silhouette étrange, la fumée dégagée par les différents mélange de produits n'aide pas à distinguer correctement ce qui se trouve face à nous. Seuls quelques bruits distinctifs de respirations peuvent faire penser à un animal effrayé.

Sans plus attendre, je me dirige vers la fenêtre pour l'ouvrir, mais celle-ci était déjà brisée en milles morceaux. Je me retourne, lentement, pour découvrir finalement la source de tous ces dégâts.

La silhouette n'était autre qu'une licorne, d'un blanc cristallin, seule sa crinière et sa queue étaient de couleur arc-en-ciel. Sur les murs en lambeaux, des dessins de fleurs étaient étalés partout.

Plus rien n'était en état de fonctionner, plus une seule fiole qui n'était pas fissurée ou brisée.

- Mon labo ! Il est en ruines !

Il n'en restait rien. Déjà qu'avec la tornade Kaïl, j'avais frôlé la catastrophe (avec un bras dans le plâtre), mais là... Je commence à comprendre pourquoi le poste d'Alchimiste a autant de turnover.

Je ne pouvais que constater l'ampleur des dégâts : toute la verrerie brisée, l'alambic perforé, le tableau fracassé, les tabourets déformés et renversés, les étagères vidées de leur contenu, éparpillé sur le dallage.

Et au milieu de ce joyeux bazar, une licorne blanche au crin arc-en-ciel se braque dans un coin, visiblement effrayée par les dégâts qu'elle a provoqué. Là, dans l'instant, si elle devrait avoir peur de quelque chose, c'est de moi : j'ai une méchante envie de me faire un blouson en cuir... de licorne.

Contenant la colère qui se manifestait en moi :

- Ahem... vous aviez dit plus tôt que si j'avais un souci, je pouvais vous contacter ? Ça tombe bien. À cause d'une catastrophe de type chevaline, l'intégralité de mon labo est en miettes. J'aurais bien besoin de l'aide du maître du quartier pour m'appuyer financièrement, ce afin de reconstituer le matériel d'Elantra.

Et avant même d'avoir une réponse de K'ien, je me tournais vers la coupable du carnage, à pas légers, mais pas assez. Ses hennissements apeurés ne me mettent pas en confiance, mais je dois sortir cette bête avant qu'elle ne fasse plus de dommages.

- Toi, ma belle, si tu obtempères, je te promets que ce ne sera pas douloureux... enfin pas trop.

Lilou fut épatée par le jeu d’acteur affolé de Meliel. Il mimait la peur et la surprise à merveille.
*il devrait peut être s’essayer au théâtre* se dit-elle.

Lilou trépignait de voir le spectacle mijoté par leur invité. Elle sautillait sur place tel un marsupilami. Elle eut bien du mal à feindre des expressions d’affolement, ses sentiments étant beaucoup plus fort, elle ne put que montrer un visage ébahi et émerveillé. Derrière la porte un petit nuage de fumée, dissimulé une silhouette chevaline surmonté d’une corne.

- Ouaaaah une licorne !

La licorne, frottait le sol de son sabot émettant le bruit caractéristique d’un cheval. La note final et de loin sa touche préférée, c’était les murs recouvert de graffitis floraux, elle aimait beaucoup la nouvelle déco, elle aurait aimé que ceux-ci ne soit pas éphémères, mais elle doutait que Richye la laisse refaire la déco de son atelier dans cet esprit….

Lilou se rappelant que tout ceci n’était qu’une mise en scène, interpella Richye pour donner encore un peu plus de crédit à toute cette facétie

- Richye, on a une chance infinie ! Une licorne, j’en avais encore jamais vu ! Elle est magnifique regarde ces couleurs !!! On peut la garder dis ? hein dis ? steuuuuplaiiit ! C'est moi qui m'en occuperait je lui donnerait à manger, je la laverais et tout tout, promis tu ne remarqueras même pas sa présence !

Puis voyant l’expression de colère maîtrisée sur le visage de son père adoptif, elle se calma un peu… Cette expression lui rappela sa première leçon d’alchimie, celle ou Richye et Kaïl avait manqué de se battre à coup de blob et de massue gigantesque… Elle n’aimait pas tellement cette expression… Elle regretta presque cette idée de blague et s’apprêtait à avouer, mais un coup d’œil rapide au maître de K’ien lui permit de se ressaisir, après tout ce n’était qu’une plaisanterie…

Comme je l'attendais, j'avais deux réactions complètement différentes. D'un côté l'alchimiste qui arrivait tout de même à garder un certain sang froid devant la situation, venant me demander alors directement mon soutien en tant que maître de Northrive pour aider à la reconstruction du laboratoire.

De l'autre côté, la petite Lilou était toute contente du résultat de sa demande, s'émerveillant devant le spectacle et les petites décorations sur les murs. Elle poussa même la supercherie un peu plus loin, demandant alors à Richye si ils pourraient adopter la magnifique licorne et qu'elle s'en occuperai avec grand soin.

- Et bien monsieur Richye, au vu de l'ampleur des dégats, je pense que la reconstruction de cette pièce risque de prendre un bon moment. Et étant donné le risque que pourraient provoquer les effusions des mélanges de produits, je vais vous fournir un toit pendant le temps nécessaire aux réparations. Ou alors....

Je me retourne pour faire face à Richye avec un énorme sourire sur les lèvres. Je prend un petit moment pour bien faire comprendre à l'alchimiste que, visiblement, pour moi tout va très bien et qu'il n'y a aucun problème.

Un simple claquement de doigt accompagné d'un clin d'oeil pour l'alchimiste et tout semble s'arrêter, la licorne ne bouge plus d'un cheveux et tout commence lentement à disparaître. L'illusion alors installée s'évapore dans une nuée d'étincelles dorées pour laisser place à ce qui a toujours été là à la base, le laboratoire, sans la moindre trace d’égratignure.

- Ou alors c'est déjà réparé ! Héhé ! Vous avez eu peur hein? Ouais je sais. Mais y'a aucun soucis, Meliel est là! Rien n'a été cassé, rien du tout !

Alors que je n'étais pas rassuré d'avoir la licorne en face de moi, à mi-chemin entre la colère de voir mon labo saccagé, et la crainte que je devienne sa prochaine cible, j'entendis Lilou trépigner de joie à l'idée d'avoir un potentiel nouvel habitant à Elantra... Mes Dieux, la tour va finir en zoo, ou en extension de l'animalerie à ce rythme.

- Lilou, on en reparlera quand j'aurai réussi à faire sortir cet animal en furie de mon labo.

Tandis que je m'adressais à ma fille, je pouvais voir que le maître du miroir ne parti ni dans l'excitation de voir une licorne, ni dans la stupéfaction de voir une licorne dans un labo. Il se contentait d'afficher un grand sourire. Soit c'est un "original", soit quelque chose cloche. Et tandis qu'il répondait à ma demande de réparation...

D'un claquement de doigt, tout se figea, et commença à s'évaporer. Une illusion ! Meliel s'était joué de moi. Sous la fatigue et le stress du moment, je m'écroulais en arrière :

- Ah ah... Une illusion. Vous m'avez eu... Je crois qu'avec tout ça, j'ai perdu 10 ans d'epérance de vie.

Et tandis que je me relevais doucement :

- Dire que je viens tout juste d'être nommé alchimiste, j'aimerais voir mon labo autrement que graffité ou saccagé. Deux fois de suite en quelques semaines, je crois bien que c'était deux fois de trop pour mes nerfs.

En prenant le temps d'y réfléchir, j'en fini par me moquer de moi-même, et mon manque de discernement. C'est vrai quoi, on est en plein milieu de Northrives, quelles sont les probabilités de voir débouler une licorne. Et les graffitis ? On ne voit pas tous les jours une licorne, mais une licorne graffiteuse...

Et tandis que je riais à plein poumon de mon incroyable crédulité, et mon manque de self-control :

- Je me suis fit avoir comme un bleu !

Il était temps que la supercherie soit dévoilée Lilou n’y tenait plus et dieu qu'elle était mauvaise actrice, Richye aurait surement tout deviné s’il l’avait observé quelques minutes, tellement elle était mauvaise comédienne.

La fillette apprécia le spectacle de cet arrêt sur image qui s’effrita en transformant matière tangible en poussières d’étoiles. En bonne spectatrice, Lilou applaudie avec enthousiasme.

- C’était Magnifique M’sieur Meliel !

Higor qui jusque était relativement sage fut quelque peu réveillé par le claquement de main de sa propriétaire. Il se faufila dans la pièce joyeusement et commença à renifler les équipements.
Tandis que Richye riait nerveusement et que la pression retombait, Higor lui faisait sa vie. Ce petit saucisson sur pattes n’était pas très agile, mais lorsqu’il avait flairait quelque chose, il faisait preuve d’une redoutable ingéniosité, après mainte péripéties pour se hisser sur le plan de travaille, il atteignit enfin le saint Graal : un cookie. Posait sur le plan de travail de la fillette, le bougre lui faisait de l’œil depuis 10 minutes. Higor s’approcha la langue pendante. Il renifla le met si délicat. Ça ce n’était pas une illusion ! Il donna un coup de langue à l’objet de sa gourmandise, et le goba tout rond. L’explosion de sucres sur ses papilles le fit frissonnait et joyeux qu’il était il remua la queue… Une queue d’un mètre de long… sur un plan de travail alchimique… je vous laisse imaginer l’ampleur des dégâts….

Du verre brisait, bien réelle cette fois ci...

- Higooor ! ... viens ici petit polisson !

Se fichant royalement de l'autorité inexistante de Lilou, le petit Higor continua son chemin dans le laboratoire.