Désillusions et turpitudes du destin d'une petite nekothrope

Sur le bord d'un trottoir, les pieds pendant au-dessus de l'eau une jeune femme vêtue d'une jupe mi-longue bordeaux, d'un chemisier blanc, un rancho marron sur les épaules, et à la chevelure rose, d'où dépassaient deux oreilles de chat beige et auxquelles venaient s'ajouter une queue de même couleur qui formait un arc de cercle sur le sol juste à côté d'elle, fixait la surface de l'eau parfois troublée par les remous dus aux va-et-vient incessants des gondoles d'un air mélancolique et contrarié à la fois.
La matinée venait à peine de s'achever et la journée s'annonçait déjà comme l'une des pires qu'elle ait jamais connu... Et pour cause, une bonne partie de ses espoirs venaient d'être réduits à néant en l'espace d'une brève entrevue de quelques minutes à peine avec un Sanctuaris. Dire que c'était la première fois qu'elle parvenait à mettre la patte sur l'un d'entre eux et à réussir à avoir un semblant de conversation véritable avec... Ils étaient toujours si pressés et occupés, et leur grade inspirait tant le respect qu'on hésitait souvent à les aborder... Oui bon, d'accord, c'était aussi du au fait qu'elle avait le sentiment qu'elle aurait gêné plus qu'autre chose en leur prenant de leur temps... Mais ce n'était pas faute de lutter contre ce sentiment et de parfois courir après certains d'entre eux. Enfin, qu'importe, après ces mois à remonter lentement la piste des rumeurs pour finir par apprendre que tout était pure réalité, voilà qu'on venait de lui faire comprendre qu'il n'y avait en plus rien qu'on puisse faire pour que la situation ne change...
Désespérée, la petite demoiselle soupira, plus abattue que jamais.

« Et comment vais-je pouvoir tenir ma promesse moi ?... Papa... je suis tellement désolée... »

Alors qu'elle luttait contre les larmes, son esprit lui intimant de se résigner, son coeur lui, hurlait de révolte et refusait de la laisser en rester là. Enfin, c'était aberrant... Si par le passé il avait été possible de circuler librement, pourquoi est-ce que ça ne serait plus le cas aujourd'hui ??? Pourquoi ???!!! Mâyâ avait besoin qu'on lui explique, besoin qu'on lui prouve qu'il n'y avait vraiment aucune solution. Mais pour cela... il fallait remonter encore bien plus haut...
Elle leva la tête et regarda en direction du ciel.

« La Republica res... Il faut que je me rende là-bas... par n'importe quel moyen... »

Oui mais comment ?
Son commerce était certes en plein essor, mais elle n'en n'était pas encore au point de faire des gros bénéfices, loin de là. Il fallait d'abord qu'elle finisse d'amortir le coût de l'achat de la boutique tout en continuant à approvisionner celle-ci en outils et en matières premières... Ce qui ne saurait tarder certes mais... Ce serait trop long... bien trop long... Et cela faisait déjà suffisamment longtemps qu'elle était partie...
Comment faire alors ?...
Alors qu'elle réfléchissait à la question, la nekothrope tentait de doucement reprendre espoir en se disant que tout n'était peut-être pas encore joué et qu'il y avait peut-être encore des solutions.

Nothrives, la magnifique ville de l'entre-monde se dévoilant dans toute sa splendeur à travers ses inextricables flots la parcourant de part en part. De nombreux poètes ont du s'inspirer de ce lieu avec la volonté de coucher sur papier toute sa splendeur. Ici tout est artistique même le simple pont décoré de figures, permettant de traverser les flots d'un bleu magnifique.

Mais à vrai dire Arcanta n'était pas vraiment là pour admirer la beauté du paysage même si il l'appréciait. Ses pas l'avaient amenés ici et il ne pensait pas rester, tout au plus il ferait une petite ballade de quelques heures pour se renseigner sur la géographie du lieu pour des missions futures. Il marchait donc à travers les rues de Nothrives, flânant tout en observant et enregistrant ce qui l'entourait. Il n'avait pas souvent l'occasion de se détendre en général et pensait donc en profiter.

Alors qu'il traversait un pont pour rejoindre la rive en face de lui, quelqu'un chose où plutôt quelqu'un attira son regard. Au bord de l'eau une étrange demoiselle à l'allure mi-féline mi-humaine semblait perdu dans ses pensées, celle-ci arborait une chevelure rose et portait une mini-jupe mise en valeur par son chemisier blanc.

*C'est bien la première fois que je rencontre une telle personne, pourtant j'ai vu beaucoup de choses à travers l'entre-monde.*

Arcanta s'était arrêté un instant pour observer la demoiselle qui l'intriguait beaucoup même si son visage ne trahissait aucun étonnement. Elle paraissait triste et il se demandait bien qu'elle en était la raison. Malgré tout il savait que ce n'était pas ses affaire et qu'il valait mieux qu'elle ne se rende pas compte qu'il l'observait. Savait-on jamais certaines personnes pouvait le prendre mal. Il détourna alors les yeux, s'apprêtant à reprendre son chemin, la curiosité était un vilain défaut et il ne voulait pas embêter cette personne par sa présence.

Marchant dans les rues comme à son habitude, forme humaine, un air blasé sur le visage, le jeune chien était à la recherche de quelque chose. Mais il ne savait pas exactement quoi. Peut-être une source d’amusement pour la journée ? Tu parles, au niveau de l’amusement il avait déjà son grand frère, sa grande sœur et bien entendu Neohart. D’ailleurs, c’était étrange qu’il ne l’ait pas suivi. Mais passons. Le plus important c’était de … Ben, il ne savait pas trop finalement. Se grattant l’oreille gauche de sa patte droite, le jeune chien semblait bien être embêté.

La journée promettait d’être longue…

Continuant sa marche qui était vide d’intérêt au final, Roxas tomba sur une scène peu habituelle. Une jeune féline qui semblait être triste et un homme qui l’observait au loin. Que faire ? Allez voir la demoiselle pour lui demander qu’elle est la source de ses ennuis où d’aller aboyer contre l’homme qui semblait louche sur le pont … ? Soupirant devant ce choix à faire, le jeune homme préféra donc aller aborder la jeune demoiselle, prenant donc place juste à côté de la féline, ce dernier ne dit qu’une phrase.

« Est-ce que vous allez bien ? »

Alors qu'elle était toute entière plongée dans ses réflexions qui la tourmentaient, la jeune nekothrope avait baissé sa garde et son attention s'était relâchée, c'est pourquoi elle sursauta avec une force telle qu'elle manqua de tomber à l'eau lorsque quelqu'un l'interpella. Fort heureusement, elle se rattrapa de justesse en plantant ses griffes dans les aspérités de la pierre qui s'était effritée par endroits.

« ... »

Après quoi, elle reprit son souffle, tentant de calmer son petit coeur affolé qui battait à vive allure dans sa poitrine. C'était qu'il lui avait vraiment fait peur ce... ! Euh... ne lui dites pas que c'était un... ?

« Un chien ! »

Et Mâyâ de bondir sur ses jambes promptement d'un air effrayé, prête à fuir si jamais la situation l'exigeait. Une réaction vieille comme le monde mais qui ne devrait plus avoir cours chez deux espèces d'apparence civilisée me direz-vous ? Oui sauf que, les habitudes avaient la peau dure, alors un protocole de plusieurs millénaires...
Néanmoins, la neko n'était pas genre à juger livre sur sa couverture alors, autant essayer d'ouvrir le dialogue malgré tout ? Chose qu'il paraissait enclin à faire d'ailleurs. C'était déjà une chose rassurante...

« Je... ah... vous m'avez fait peur... Oui ça va... Ca va très bien même... Je... réfléchissais... Simplement... Voilà oui, je réfléchissais. On a bien droit de flâner non ? »

Doucement mais surement, Mâyâ reprenait un peu d'aplomb et d'assurance, arborant même presque un petit air bravache comme pour chercher à prouver à l'homme-chien qu'elle n'avait pas peur de lui, même si forcément, c'était l'inverse...
Quand soudain, elle remarqua la présence d'une autre personne qui paraissait les épier. Rabattant ses oreilles en arrière d'un air suspicieux et de nouveau pas franchement rassuré, elle pointa l'individu en question du doigt et se contenta de demander d'un ton autoritaire :

« Et lui ? Il est avec vous ?... »

Adieu aplomb et assurance, la pauvre demoiselle se sentait atrocement mal à l'aise dans ce rôle de l'épiée, comme la proie qu'on était en train d'encercler...

Alors que j'observais toujours l'étrange demoiselle, un nouvel arrivant avait fait irruption. c'était visiblement un jeune homme qui s''était empressé d'aller la voir, afin de vérifier si tout allait bien pour elle. Mais au vu de la réaction de la femme mi-chat mi-humaine, on se doutait qu'elle n'était pas rassurée pas la présence de celui-ci. Étrange, était-elle timide et apeurée à ce point là, me demandais-je.

Je continuais donc de poser mon regard sur les deux personnes, intrigué par la situation. Décidément ma curiosité me perdrait un jour, mais après tout c'était cette même curiosité qui me poussait à toujours m'informer sur tout ce qui m'entourait et m'avait parfois sauvé la vie. De plus je ne pensais pas risquer tout de même un quelconque danger juste en regardant deux passants.

Je m'apprêtais à rebrousser chemin, avisant que ce n'était pas mes affaires quand je vis la demoiselle me pointer du doigt, questionnant apparemment son interlocuteur sur ma présence. Je m'arrêtais alors, la regardant froidement (enfin plus mon regard habituel d'un bleu glacial). Je devais m'avouer trouver cela très malpolie, on ne pointait pas du doigt les gens comme ça. J'avais beau les avoir observé, je ne pensais pas l'avoir fait de manière indiscrète et appuyée.

Ce n'était pas mes affaires mais je m'approchais des deux personnes avec la volonté de mettre fin à l'inquiétude de la jeune femme et aussi lui dire quelque mot sur son geste.

-"Excusez moi, mais je trouve que pointer les gens du doigt est assez malpolie ..."

Je jetais un furtif regard vers le jeune homme qui ne paraissait pas totalement humain bizarrement.

-"Mon but n'était pas de vous faire peur alors, excusez moi de ma trop grande curiosité, je ne faisais que vous observer, mais je ne vais pas vous déranger plus longtemps."

J'avais déjà le dos tourné m'apprêtant à m'éloigner, je n'avais que trop tardé ici et discuter avec les gens n'était pas vraiment un de mes passes temps favoris.

La féline sembla prendre peur quand elle s’était rendu compte que l’homme qui se tenait à côté d’elle était tout simplement un chien. C’était normal en un sens, même si Roxas ne portait pas véritablement de rancune où de haine envers les chats. C’est donc avec amusement que le canin fit un sourire à la féline. Prenant donc sa forme Umbro, ça ne servirait à rien de cacher son identité plus longtemps. Et, il se sentait largement plus à l’aise sous cette forme. L’homme se changea donc en chien, des oreilles droites, une petite queue toute mignonne, un museau… et tout ça mélangé dans des tons sombres.

Souriant doucement une nouvelle fois, il était heureux de retrouver cette forme qu’il n’avait pas prise depuis longtemps.

« Oui, on a le droit d’être dans ses esprits, je m’inquiétais juste de voir cette petite mine. »

Dans un sourire franc, le chien répondit à la prochaine question de la féline, un air un peu plus anxieux fit son apparition.

« Non, je ne le connais pas vraiment. Et je l’ai aussi remarqué… »

Cependant, l’homme qui les observait sur le pont arriva vers eux, en tenant des propos… stupide ? Oui c’était le mot. Commençant à grogner par instinct naturel et parce que chez eux, on ne piquait pas la mouche à cause d’un doigt pointé, Roxas ne put s’empêcher de lui répondre, même si l’homme faisait déjà demi-tour pour repartir.

« Oui oui, et vous, à observer cette jeune femme, vous trouvez ça peut-être poli ? Et si vous me répondez que c’est de l’inquiétude, vous devriez vous tenir à ma place là. »

La connerie était l’une des seuls choses qui pouvait mettre le jeune chien hors de lui.

Mâyâ vit l'homme prendre une tout autre forme les yeux ronds devant se phénomène qu'elle ne connaissait que trop bien. Oui, elle ne s'y était pas trompé, il s'agissait bien d'un chien ! L'odeur ne trompait jamais !

Toujours sur ses gardes, les sourcils froncés, la petite nekothrope écouta attentivement les réponses de l'homme-chien. Alors, il ne connaissait pas cet homme ? Chose qui fut confirmée par l'arrivée du concerné, drôle d'odeur que la sienne d'ailleurs... Elle lui rappellerait presque une odeur de... volaille... Ah mais... est-ce qu'il était en train de lui faire la morale ??? Mâyâ en fut un instant partagée, une expression mi-contrariée mi-embarrassée sur le visage. Oui d'accord, ça n'avait rien de poli de montrer quelqu'un du doigt... heureusement qu'elle le savait... elle n'avait pas été élevée chez les Butathropes tout de même ! Mais... c'était sa faute à lui aussi ! A rester à l'observer comme il l'avait fait, ce n'était pas très courtois non plus ! Normal qu'il passe alors pour louche ! Le chien paraissait partager son avis sur ce point et, bien qu'elle demeure quelque peu méfiante envers celui-ci également, elle fut rassurée de voir qu'on prenait sa défense à ce sujet.

Enfin, quelques explications et excuses partagées devraient suffire à dissiper tout malentendu. Oui... sauf si celui à qui l'on désirerait présenter des excuses vous tourne le dos et s'en aille sans même vous avoir laissé le temps de vous justifier... C'était... extrêmement énervant... Et ça dénotait d'un cruel manque de savoir-vivre... La communication et la diplomatie ne devaient pas être le fort de cet individu là... Cependant, avant qu'il ne prenne la clef des champs, Mâyâ était bien décidée à dire sa façon de penser à cet homme là. C'est pourquoi elle fila rapidement lui barrer la route et se tint devant lui dans une attitude autoritaire, les mains sur les hanches.

« Dites donc, vous pourriez au moins écouter ce que nous pourrions avoir à vous dire ! Nous l'avons bien fait de notre côté ! Et votre plainte à bien été prise en compte, mais si alors vous ne nous laissez pas le temps de le faire, comment voudriez-vous que l'on vous présente des excuses ? Oui, j'ai agit d'une façon extrêmement impolie en vous pointant sciemment du doigt comme je l'ai fait et je vous en demande humblement pardon. Mais vous ! Vos excuses ont eu pour moi un amer goût d'une répugnante ironie ! Une fois votre besoin de vous justifier assouvi, vous voilà fuyant, me laissant dans l'impossibilité de vous faire part de mon propre ressenti ! Quel égoïste ! Pas question de fuir. Ah ça non ! Vous allez rester et nous allons dissiper ce malentendu tous ensemble,non mais ! »

La petite demoiselle ne plaisantait pas. C'était qu'elle avait du caractère et un sens de la justice très développé alors pas question de laisser cette situation aboutir sur une fin aussi peu satisfaisante pour tous ! Dans le dos de la féline, sa queue d'un beige pâle s'agitait sèchement en de petits mouvements vifs de gauche à droite, signe de son agacement, et ses oreilles étaient légèrement rabattues vers l'arrière.

Je n'avais même pas prêté attention aux paroles de l'homme-chien, j'avais été surpris par sa soudaine transformation mais ce n'était pas ça qui allait me perturber au point d'être touché par ses propos. Après tout oui que savait-il de moi ? Rien ... Et il se permettait de juger. Mon discours précédent avait beau être peu social, il en restait que même si je le voulais, je crois que je ne me rappellerais plus comment mener une discussion normale où on parlerait de tout et surtout de rien. Donc l'entendre parler d'inquiétude et me seriner comme ces jeunes personnes qui croyaient tout connaître et s'emportaient facilement m'énervait quelque peu.

De toute façons que voulait-il que je fasse ? A la base je n'avais même pas prévu de rester, c'était juste mon esprit observateur qui avait attiré mon regard sur cette étrange demoiselle qui paraissait triste. Ensuite il aurait voulu que je joue le bon samaritain ? Je dois avouer que même si parfois j'essaie, j'ai du mal, cette partie de moi ayant été sérieusement abîmé avec la perte de Tinuthiel. Je ne me sentais pas à l'aise avec les gens, j'étais resté trop de temps seul pour cela ....

Mais alors que je m'apprêtais à repartir, je vis la jeune femme mi-chat se mettre en travers de mon chemin. Mais que voulaient-il à la fin ? J'étais juste venu pour dissiper le malentendu, la réflexion sur le doigt je m'en moquais pas mal à vrai dire et je m'étais excusé c'est tout ce qui m'importait car je n'avais pas pour habitudes d'entamer une discussion. Je l'écoutais donc asséner son discours de réprobation à mon égard, si seulement elle savait que la personne qui parvenait à me faire la morale n'était plus de ce monde.

-"Amer goût ... Répugnante ironie ... ? Je suis déçu que je vous donne cette image. j'avoue que mon discours n'a peut être pas paru convainquant, mais c'est certainement du au faite que je n'ai pas l'habitude de ... discuter."

Je continuais toujours de soutenir son regard me demandant pourquoi je me justifiais ? Ces gens ne comprendraient jamais ma manière de penser, la raison de pourquoi j'ai l'air si froid. Je ne pouvais m'aveugler même moi je savais qu'avec le temps j'étais devenu trop froid et distant avec les gens qui m'entouraient.

-"Je suis désolé que vous ayez mal prit mes propos, le but n'était pas de vous vexer. Si vous tenez tant que ça à ce que je reste pour dissiper le malentendu soit, mais je vous avoue que pour c'était déjà fait après ma phrase. Par contre je vous prierais d'éviter de parler d'égoïsme et de besoins assouvi, pour cela il faudrait déjà que j'ai quelque chose à désirer."

Je me demandais comment elle allait prendre la dernière phrase, comment pouvait elle parler d'égoïsme cela faisait bien longtemps que j'avais tout perdu, alors que pouvais je bien espérer garder ? Mais voila que je me perdrais dans de sombres réminiscences, ce n'était pas vraiment le moment et puis de toute façons tout ça n'avait plus d'importance, c'était le passé. Malgré tout j'étais heureux d'avoir su garder mon visage impassible habituelle, je n'aimais pas qu'on puisse lire en moi.

Mâyâ manqua d'avaler de travers tant le discours de l'homme lui parut déplacé et grotesque en un sens.
Ben tiens, parce que jouer les hommes mystérieux comme il le faisait en se composant une sorte de rôle ce n'était pas narcissique peut-être ? Et quelque part le narcissisme étant de l'ordre du moi, il était donc bien question d'une forme d'égoïsme.
Oui enfin, force était de reconnaître que cet homme n'avait pas l'air particulièrement méchant. Un peu trop poli et sur la défensive à son goût par contre, mais, s'il était ainsi c'était qu'il y avait forcément une raison à cela. Sans doute avait-il connu des heures sombres. Mais non d'un chat, ce n'était pas une raison pour tourner le dos aux gens ! Ah il n'avait plus l'habitude de discuter hein ? Dommage pour lui, elle comptait bien parler pour quatre et ne pas le laisser s'enfuir si facilement !
Sourcils froncés, poings fermés, bras collés le long du corps et oreilles en arrière, le petit brin de chimère ne se démonta pas une seconde et répondit avec un aplomb très assuré à son interlocuteur.

« Oh mais si il est bien question d'égoïsme ! Qu'est-ce que c'est que ce mauvais esprit et cet état de victimisation dans lequel vous semblez vous complaire ? Rien à désirer ? Balivernes ! On espère tous quelque chose dans le fond, à notre manière et à notre mesure. Parfois même retrouver ce que l'on a perdu... Même si on sait cela impossible... »

D'un seul coup, le regard de la chimère se baissa et les traits de son visage se radoucirent considérablement alors que son expression paraissait plus mélancolique. Elle poursuivit alors d'un ton plus calme et doux. Dans sa voix, on pouvait sentir de la douleur, mais aussi une certaine forme de maturité.

« Mais ainsi va la vie avec ses hauts et ses bas et ses épreuves à surmonter, non ? Franchement, ce genre de phrases ne peut que vous attirer la pitié des gens. Mais peut-être est-ce là la façon dont vous désirez attirer l'attention sur vous, consciemment ou non ? En passant pour un sombre et triste héros. Hum. Ce n'est pas comme ça que vous vous entourerez de gens qui sauront vous comprendre. Quitte à être blessant, soyez-le, mais ne vous cachez pas derrière le masque d'une fausse modestie et d'une politesse forcée. C'était tout ce que j'avais à dire. Vous pouvez bien penser que je me mêle de ce qui ne me regarde pas, que je parle sans savoir, et bien c'est comme ça que je suis et l'on ne me changera pas alors je préfère être moi-même. »

Drôle de discours qu'elle venait de tenir là. Qui avait tout d'une leçon. Même si ce n'était pas sa volonté que de chercher à en donner. Elle cherchait juste à essayer de gratifier une personne qui semblait morose de quelques conseils. Bah, il prendrait bien le tout comme ça l'arrangerait, ainsi fonctionnaient les êtres mais, si malgré tout, elle aurait pu l'aider en quoi que ce soit tant mieux, sinon, tant pis. Elle espéra néanmoins que cette âme qui paraissait égarée retrouve son chemin le plus vite possible.
Trop d'émotions d'un coup c'était trop ! Et voilà Mâyâ qui s'agita de nouveau en levant les bras au ciel.

« Zut à la fin ! Les gens qui ne sont pas capables de prendre le temps de s'expliquer ça m'agace c'est tout ! Et puis si vous n'étiez pas si poli aussi ! Que vous étiez un peu plus vous-même ! Comme l'est ce chien là par exemple qui montre bien qu'il n'est plus vraiment intéressé par ce qui se dit ! Mais je vais me calmer, je vais me calmer et vous n'aurez plus à souffrir de m'entendre râler ni l'un ni l'autre. Voilà ! Pfiouuuuuuh... »

La féline expira et souffla profondément pour chercher à se calmer.
Epuisante, cette journée l'était et ça se ressentait au niveau de ses nerfs et de sa patience qui était vite mise à bout. Habituellement, elle ne s'énervait pas si rapidement. Allons allons Mâyâ du calme, on se reprend et on déééééécompresse.
Aaaah, surtout que ses problèmes étaient loin d'être réglés... Et il fallait encore qu'elle aille mettre la boutique en ordre, elle ne l'avait pas ouverte de la matinée, la laisser fermée l'après-midi également ne pourrait qu'engendrer un gros manque à gagner... Même si elle n'avait pas du tout la tête à penser commerce...
Bah, de toute façon, vu la scène qu'elle venait de faire, ces deux hommes ne resteraient certainement pas encore bien longtemps et chacun retournerait vaquer à ses occupations. Là, elle n'aurait guère d'autre choix que de s'en retourner à ses propres affaires. Quoi qu'il en soit, ça aurait été une bien curieuse rencontre...