Vous avez dit croâ ? [Quête Kal/Ambre/Vaïna]

« Je constate/observe qu’ils sont bien pressés/hâtifs ! »

La remarque de Vaïna n’était pas fausse quand on prenait un instant pour observer Tern. Comme toutes les capitales postindustrielles de tous les mondes avancés technologiquement, il y régnait une activité bourdonnante. Des taxis antigrav passaient en tous ses, les ascenseurs magnétiques montaient et descendaient comme des bouliers frappés de démence, les signaux lumineux et publicitaires clignotaient, les trains de véhicules suivaient les invisibles lignes de guidage, les passants pressés employaient des tapis roulants ou des hâte-pas pour aller plus vite…

Vous avez dit croâ ? [Quête Kal/Ambre/Vaïna] 100902083848878808

Dans cette fourmilière clignotante, se dirigeaient péniblement un Chertan, un Oiseau, un Rêve et un Cristal. Difficile de trouver une équipe plus disparate. Mais il semblerait que tous quatre s’entendent déjà bien : il a semblé à Vaïna que Têk a déjà failli se poser à deux reprises sur sa partie supérieure. Mais c’est quelque chose qu’aucun cristal n’apprécie beaucoup, aussi pour l’instant s’est-il amusé à décourager l’oiseau en le délogeant à chaque fois d’un faisceau de tentacules de lumière.

Chacun a sa façon de se déplacer dans la foule. Devant, Kalistrad est en train de fendre les rangs de ses larges épaules. Ambre doit probablement flotter quelque part, mais de toute façon ce n’est pas la foule qui empêchera un petit rêve de passer. Par contre, le pauvre Vaïna ramait un peu. Non seulement on le bousculait sans vergogne en le prenant pour un … un … enfin n’importe quoi sauf un brave et honnête passant ; mais encore ses sens étaient un peu perturbés par la multitude d’énergies et de vibrations qui passaient dans l’air.

Tant bien que mal, il suivait ses deux compagnons, mais ce qui devait arriver arriva. Il finit par les perdre de vue une seconde et se planter de rue. Quand il sortit enfin de la foule, catastrophe : ni le Chertan ni ses deux autres compagnons n’étaient là. Dans l’espoir de les rattraper, il enfila en vitesse deux ou trois passages, faillit débarquer dans le vide au-dessus d’un puits d’accès aux générateurs de quartier et s’arrêta en grognant. Complètement perdu, il finit par errer quelques minutes dans les rues.

« Kallistrad Rusia !! Têk !! ….. Chose rouge qui n’existe pas!! »

Peine perdue. Dans le quartier où il se retrouva, il n’y avait plus grand monde. En fait, autour de lui, il n’y avait plus que deux personnes appuyées à une balustrade, en train de regarder un panorama sur l’un des quartiers inférieurs de l’immense mégapole. En désespoir de cause, il se dirigea dans leur direction.

« Excuses/Pardon » claironna-t-il gentiment. « Pourriez-vous m’indiquer la direction/itinéraire du Zoo ? »

Les deux individus qui se retournent pour examiner le Cristal n’ont rien de très rassurant. L’un est … un peu comme Kallistrad, mais en différent : moins grand, moins solide, il semble aussi plus souple et plus clair de poil. Il arbore plusieurs d’anneaux d’argent, et l’un de ses yeux est tout blanc, comme aveugle. Il est vêtu d’habits de cuir et une ceinture cloutée pend à l’une de ses mains. Quand à l’autre, il est très grand, très maigre pour un humain, vêtu d'un simple jean, d'un T-shirt sans manches et d'un brassard d'argent aux motifs complexes. Ses cheveux d’un noir d’ébène descendent jusqu’en bas de son dos. Dans un visage de cire, ses deux immenses yeux sont complètements noirs. Et ils ne reflètent pas la lumière qui vient de Vaïna.

Il y a un instant de silence un peu gêné. Puis, alors que l’homme-animal hausse les épaules sans bouger, son compagnon s’approche, visiblement très intéressé. L’expression « se faire dévisager sous le nez » n’a pas de sens pour Vaïna, mais c’est à peu près l’impression que cela lui laissa. Puis, paresseusement, l’homme noir avança la main maigre, comme une araignée blanche, en direction du Cristal. Vaïna constata avec stupéfaction que plus l’homme approchait la paume de sa surface, moins il parvenait à produire de lumière. Il ne sentait ni douleur, ni agression, et pourtant, il… s’éteignait. Son contrôle sur les infrarouges et les autres longueurs d’ondes restait intact, mais la lumière visible semblait littéralement avalée par cet inconnu.

Assis sur la balustrade, l’autre étranger jouait avec une pièce de monnaie, qu’il lançait et rattrapait sans même la regarder, son œil normal fermé. Mais il devait surveiller la scène d’une manière ou d’une autre, car il finit par intervenir, d’une voix assez proche d’un grondement agacé.

« Je vous conseille d’arrêter ça. N’avons-nous déjà pas assez d’ennuis dans cet endroit sans que vous alertiez tous les gardes de cet endroit ? »

« Mais cette créature est curieuse » murmure l’homme aux cheveux noirs d’un ton de regret. « tellement … curieuse… »

Curieux !! Très vexé, Vaïna émit un accord harmonique dépourvue de politesse (il avait mis au point d’excellentes imitations sonores de flatulences) et se remit en route aussi vite qu’il le pouvait. Les deux étrangers ne le suivirent pas, et il ne lui fallut que quelques minutes pour trouver un terminal d’information. Sauvé !

Pardon ? Oui, absolument, Vaïna sait manipuler un ordinateur. Les Grands Cristaux manipulent toute forme d’énergie vibrante, et l’électricité n’est jamais qu’une ondulation d’électrons, n’est-ce pas ? En fait, il était plus facile pour lui de traduire une danse de signaux électriques sur un terminal informatique, que d’interpréter la plupart des émotions humaines. Une fois saisi le sens des séquences d’ondes, il formula sa requête sous la forme d’une question.

OU - EST - LE - ZOO

On ne s’adresse pas aux ordinateurs en leur posant des questions. Par chance, le terminal avait été doté d’un module de recherche NeoGoogle.Inc. version 2.0, et le résultat fut à peu près le même. L’écran afficha un plan de la ville en trois dimensions et calcula pour Vaïna l’itinéraire le plus direct.

Satisfait, le Cristal mémorisa le schéma 3D, remercia l’ordinateur d’une symphonie de trilles (ce qui ne fit ni chaud ni froid à la machine) et fila dans la direction indiquée. Cette fois, il lévita directement au-dessus de la foule, remonta de cinq étages en suivant un ascenseur découvert, en régalant les passagers d’un festival de lumières de toutes les couleurs. Lorsqu’une vieille dame lui intima de « dégager sale robot et d’aller retrouver tes maîtres capitalistes qui grillent les cerveaux des enfants avec les publicités ineptes », Vaïna se propulsa le long du faisceau magnétique et arriva rapidement droit à sa destination : en plein milieu de l’esplanade du Zoo de Tern. Zoo qui n’était pas un enclos de plein air, mais un building de soixante étages …

Espérant être arrivé avant ses trois compagnons, Vaïna alla se percher sur la fontaine centrale. Hélas, il y avait tellement de monde … il ne retrouverait pas les autres facilement. Eux pourraient peut-être le retrouver, s’il était suffisamment voyant ? D’ailleurs – tiens !! A ce sujet, une excellente idée lui revenait à l’esprit. Les véhicules des Animés-Gardes avaient un moyen très efficace de se faire remarquer pour qu’on vienne admirer leurs uniformes ! Quoi de plus efficace ? Oui, c’était une excellente idée.

Deux minutes plus tard, quelques passants éberluées s’arrêtaient pour contempler un caillou géant, perché sur la tête du Coordonnateur Jordan Nelesteban (bienfaiteur de Tern en l’an IV de l’Entre Monde), et occupé à clignoter comme un gyrophare de police en émettant un son de sirène particulièrement réussi.

« Pin ! Pon ! Pin ! Pon ! Pin ! Pon ! Pin ! Pon ! Pin ! »

Spoiler:

Kallistrat n'en croyait pas ses mirettes : comment pouvait-on entasser autant de monde au mètre carré ? Même sa forêt remplie d'arbre aurait semblé vide en comparaison de ces rues qu'il arpentait. Les oreilles plaquées en arrière, il tentait tant bien que mal de se protéger de l'agitation ambiante. C'est qu'en plus d'être nombreux, ils étaient bruyants. Des klaxons aux sirènes en passant par les apostrophes criardes des haut-parleurs grésillant au-dessus de tout ce raffut, notre pauvre chaton en était quitte pour une belle migraine. À la rigueur, il préférait les marais puants... Tout était relatif, mais les marécages sentaient toujours meilleur que cette ville polluée. Les narines pincées en une moue dégoûtée qui lui donnait un air un peu effrayant, il se frayait un chemin parmi la foule en jouant de ses larges épaules. Et tant pis pour la politesse, toute cette agitation l'agaçait. À tel point même, qu'il en oublia complètement les « personnes » qui l'accompagnait, pensant naïvement qu'elles le suivait. L'enseigne aux néons fluorescent d'un disquaire le fit fermer les yeux... manquait plus qu'on agresse ses rétines maintenant ! Mince, il n'était décidément pas fait pour la ville. Têk non-plus visiblement, puisqu'elle s'était éclipsée quelques heures plus tôt, effrayée par le ton menaçant d'un automobiliste bloqué à un carrefour. Dans l'esprit du Chertan, ne subsistait plus qu'un seul objectif : le zoo ! Là-bas sans aucun doute, il se retrouverait un peu dans on élément... Mais voilà, avant d'arriver, il fallait encore demander sa route. Et parmi cette foule surexcitée, ce n'était pas chose facile d'arrêter un passant. À moins de savoir manier le lasso ?

L'une des grosses paluches du chaton se posa sur l'épaule d'un vieillard qui – il l'aurait juré – faillit en mourir d'une syncope. Il demanda la direction du zoo, et se retourna pour rassurer ses deux compagnons de route lorsqu'il remarqua que ni Vaïna, ni Ambre n'étaient plus là ! Il les avaient perdus en cours de route. Devait-il faire demi-tour ? Non. On lui avait appris à ne jamais rebrousser chemin, c'était s'éparpiller et se perdre pour rien. Le mieux restait encore de trouver le point de ralliement... et ainsi Kallistrat reprit-il sa route, le moral dans les chaussettes – qu'il ne portait pas – et une envie furieuse de devenir sourd le temps de quelques heures... C'était insupportable, tout ce bruit. C'était comme si chacun s'évertuait à faire plus de bruit que son voisin ! Bon sang que c'était pénible. Il accéléra l'allure à la vue du zoo, et s'y engouffra comme si sa vie en dépendait. Ouf, sauvé. Ou presque... car ici aussi, un petit malin s'amusait à faire un tintamarre de tout les diables.

« Pin ! Pon ! Pin ! Pon ! Pin ! Pon ! Pin ! Pon ! Pin ! »

Et il clignotait avec ça ! Tiens, d'ailleurs, son chapeau étrange ressemblait beaucoup à Vaïna...

Apparemment, elle s’était un peu évadée. Pourtant elle aurait juré suivre les pas du fauve. Mais faut croire que l’histoire me dit que non, alors improvisons. Je promettrais de ne plus trop rêvasser lorsque je vous narre l’histoire de petit rêve. Lorsqu’on marche au milieu de la foule, que nous tentons de l’ignorer, il y a un petit quelque chose qui fait que vous suivez sans difficulté votre collègue en face. Les yeux fixés sur le dos qu’il vous présente, et le pas se voulant rapide. Ainsi, autour de vous, tout se floute comme lorsqu’on s’amuse dans un tourniquet (la différence c’est que le tourniquet vous donne mal au cœur).

Puis le bruit s’estompa, les cris, les plaintes, les jacassements… le tout resta en arrière plan. Là, un son sortit du lot. – Gloup…. Gloup ! – des goûtes d’eau ! S’ajouta à ça le frottement des ailes d’une mouche et même, la poussière qu’elle pousse de ses fines pattes ventousées en marchant sur un mur. Alors, quelques voix d’hommes très éloignés, trop même, prirent le déçus sur les goûtes d’eau ainsi que sur la mouche. Un chien se mit à aboyer, sa voix se mit à son tour en premier plan, le chien semblait se battre contre un autre, le bruit de la poussière qu’ils faisaient autour d’eux anima le tout.

Puis… plus rien, rien d‘autre que la normalité sonore. Elle paraissait presque effacée après cet assourdissement. Petit rêve n’avait pas peur, petit rêve aimait ces phénomènes anormaux. C’était l’une des seules choses qui lui rappelait son monde. Il lui manquait d’ailleurs, loin de son créateur, il fallait avouer qu’elle était sujette à un manque de nouveautées, d’émotions. Plus rien ne lui était communiqué et Ambre n’était pas capable d’imaginer. Un jour peut-être, mais pour l’heure, elle se contentait de ce que son créateur lui avait légué jusqu’à leur séparation. Ou était-elle déjà ?

Il y avait un raffut pas possible plus loin, impossible de l’ignorer, c’était carrément gênant pour ses petites oreilles. Elle posa alors ses mains sur chacune d’elles en espérant ne plus entendre cette alarme qui raisonnait dans les rues piétonnes. Mais ça n’y faisait pas grand-chose alors Ambre abandonna et préféra rester à la curiosité. Oui, là voilà qui cherchait la source de ce bruit immonde. Oui, elle était déjà ailleurs, à côté de la plaque. Certains suivaient normalement, d’autres rêvassaient.

En marchant d’un pas pressé, elle croisa deux gars un peu louches. Ils avaient ce regard énervé, certainement par le bruit qui sonnait, il était probablement entendu dans toute cette fichue mégalopole, qui sait ?! Ses pas glissaient sur le sol, le tissu rouge lapait tout ce qui était à proximité, comme des tentacules aveugles surfant sur la moindre surface qui s’offre à elles. Le vent glissa sous sa capuche, la gonflant légèrement, elle s’écrasa par la suite lorsque l’air s’échappa du gouffre. Il y avait des tas de choses à voir autour d’elle, s’il n’y avait pas ce bruit, c’est certain, Ambre serait totalement emprise par le pouvoir du monde qui l’entour.. Les couleurs, les objets, les vendeurs, les passants, les fils électriques… y’avait tellement de choses à voir ici !

Mais non, il fallait à tout prix comprendre d’où vient cette alarme étourdissante. Et là, en face… la fontaine. Il y avait un machin qui scintillait comme pas possible, d’ailleurs c’était justement ce machin-là qui faisait tout ce remue-ménage ! Mieux encore… c’était le cristal qu’elle était sensé suivre avec… oh mais voilà, elle se rendait compte qu’elle était vraiment seule. Peut-être qu’ils l’appelaient pour lui filer une bonne correction ? Zut… la prochaine fois elle ne rêvassera pas. Ambre s’empressa donc de rejoindre le caillou géant digne d’un figurant de cirque ! Elle ne vit pourtant pas le grand poilu…

Bof… lui doit savoir.

" - Qu’est-ce donc ? " Furent les mots qu’elle sortit de sa bouche lorsqu’elle fut à portée de Vaïna.

Un sourire immense glissa sur ses lèvres, quelques rires qui s’étouffèrent dans le vent en forment quelques échos. Ici, c’était le jour, c’était dehors avec du monde. Ici, ce rire était un simple rire. Imaginez vous seul, dans une vieille baraque abandonnée, quelques peluches abandonnée sur le parqué poussiéreux. Imaginez un escalier à votre droite et l’écho de se rire qui vient de là-haut. Moins rassurant n’est-il pas ? Ce petit exercice pour vous imaginer le rire de la petite, ni plus ni moins… j’espère seulement que vous me lirez de jour la prochaine fois, lorsque la nuit sera tombée sur l’Entre-Monde.

" - Mal aux oreilles cailloux ! "

Spoiler:

" - Mal aux oreilles cailloux ! "

Une voix qui sort de nulle part. Un rire qui résonne dans les airs. Invisible. Personne n'a parlé, pourtant. La curiosité de Constantine s'éveille et elle passe sous ce géant portail où l'on peut lire "Zoo de Tern" en alphabet local. Elle qui se promenait avec son nouveau compagnon, son disparu, son ami de toujours, dans les rues presque ensoleillées de Tern en errant sans but précis, la voilà embarquée dans une drôle d'affaire.

Elle se retrouve face à un genre de chat - encore un ? - bipède, large d'épaule et plutôt costaud dont le poil gris ne manque cependant pas de vitalité, et un cristal lumineux, dans des teintes de violet. En plus de dix ans, l'androïde n'a jamais rencontré de cristal comme celui-là. Et qui sait combien elle a vu de créatures différentes dans ces rues ! Elle s'approche, donc, curieuse de savoir ce qu'est ce cristal. Est-ce un être comme elle, artificiel ? Est-ce une entité magique comme ces arbres qui parfois chantent ? Ou bien une simple décoration dans le zoo ?

"Excusez-moi, brave félidé." apostrophe-t-elle le grand chat. "Est-ce ce cristal qui vient d'émettre cette voix ? J'ai entendu parler, puis un rire enregistré comme peu rassurant, et je doute que votre stature puisse produire un son au timbre si aigu."

L'androïde regarde le cristal et le chat à tour de rôle. Minan lui bippe qu'il y a une autre présence ici, sans qu'elle soit physique. Apparemment, il y a un genre d'activité paranormale autour.

Spoiler:

Kallisrat se retourna d'un seul bloc en s'entendant appelé « brave félidé ». Il bomba alors aussitôt le torse, tout fier de lui. Oui, il était brave. Si brave même que n'importe qui pouvait s'en rendre compte et donc lui en faire la remarque, et tout heureux d'être ainsi caressé dans le sens du poil – c'était le cas de le dire – il émit un bref ronronnement. Apparemment, son interlocuteur avait confondu sa voix avec celle de Ambre, mais lorsque notre chaton voulu expliquer, le rêve rouge n'était plus derrière lui. Envolé comme s'envolent les rêves, ce qui le fit grimacer. Sa mission ne commençait pas très bien. Après s'être perdus dans Tern, une ville trop bruyante et trop clignotante à son goût, sans parler des odeurs infectes, voilà que ses compagnons de route se volatilisaient. Il planta ses iris verts sur le nouveau venu, faisant palpiter doucement ses narines. Mais à part une odeur d'huile et de dégrippant, il ne détecta rien de bien utile. Robot, donc.

Vous avez dit croâ ? [Quête Kal/Ambre/Vaïna] Kallistratdial

« Non, ce n'était pas la mienne. » Répondit-il de son timbre profond et grave.

La sirène de Vaïna s'était interrompue et pour cause, lui aussi avait disparu. Il se passait parfois de drôles de phénomènes dans l'Entre-Monde... Toujours était-il qu'en attendant, Kallistrat se retrouvait seul sur sa mission, et que ça l'ennuyait un peu. Peut-être que le robot accepterait de l'aider ?

« Je suis venu chercher un perroquet pour l'emmener sur une île. Vous voulez venir avec moi ? Et joignant le geste à la parole, il tendit l'une de ses énormes paluches griffues comme on le lui avait appris pour saluer. Kallistrat Rusia. »

Spoiler:

Il s'en passe, des chose, sur ce Nouveau Monde. Des choses qui disparaissent, d'un coup, sans prévenir, sans raisons ... Ce n'est pas ce genre de chose qui se passait dans l'Ancien monde. Les gens partaient en prévenant, ou bien sans prévenir mais sans vraiment partir non plus. Peut-être ce cristal n'était pas vraiment là, lui non plus...

Quoi qu'il en soit, ce chat ne doit pas se faire attendre. C'est une coutume humaine qu'on lui avait programmé. L'intérêt n'a jamais paru évident à Constantine, mais ça existe, alors faisons avec. L'androïde saisit la grosse ... patte, de l'animal dont la voix, effectivement, est loin d'être fluette.

"Bien le bonsoir, Kallistrat Rusia." répond-elle au susnommé chat. "Vous êtes donc en quête d'un oiseau dans ce zoo, que vous allez donc voler ? pour l'emmener sur une île ? Et vous voulez que je vous accompagne ? C'est une manœuvre de séduction bancale, un moyen de me frauder mon compte, ou bien vous vous attendez sérieusement à ce que je vous suive dans une aventure dont je ne connais rien ? Parlez moi un peu de vos intentions, cher félin, que je décide si Minan et moi avons du temps à vous consacrer."

Constantine a montré le robot blanc en forme de sac à dos stylisé qu'elle portait derrière elle quand elle a prononcé le nom de Minan. Elle sourit au grand chat en lui lâchant enfin la patte.

"Moi, c'est Constantine."

Kallistrat pencha la tête comme pour rassembler les mots qui s'étaient éparpillés dans sa cervelle de chaton. Le robot face à lui avait un débit impressionnant et lui... et bien lui il avait du mal à suivre, tout simplement. Il se concentra un petit moment afin d'être sûr de n'avoir rien raté et entreprit de renseigner la machine. Mâle ou femelle ? De son avis, il n'y avait ni l'un ni l'autre chez les robots et comme il n'était pas très familier des prénoms et de leurs consonances...

« Je ne suis pas un voleur ! S'indigna-t-il avec une moue boudeuse. Il s'agit d'une mission. Le propriétaire du zoo doit me confier son perroquet et je dois l'escorter jusqu'à l'île aux Perroquets. Je n'ai pas le droit de le manger en route. » Expliqua-t-il avec autant de patience que de naïveté.

Un poil vexé sur les bords – après tout, Kallistrat n'était qu'un grand chat trop fier de lui – il se mit en route et se dirigea vers l'accueil du zoo où une ribambelle d'enfants le prirent pour l'une de ces grosses peluches à l'intérieure de laquelle se glisse un homme pour amuser la galerie. Du coup, il en fut quitte pour se faire sauter dessus et récolter une quantité non négligeable de bisous affectueux qui le firent ronronner... Et lorsqu'il parvint enfin à se débarrasser de ses admirateurs, il se planta devant un guichet pour demander à voir le directeur du zoo et son fameux perroquet.

Spoiler:

Après ce spectacle plus ou moins étonnant de ces dizaines d'enfants se sont massés autour du grand chat gris, Constantine demande à Minan s'il avait du temps à perdre. Après tout, cet animal semble intéressant à observer, ses réactions sont parfois absurdes et prendre quelques temps en sa compagnie serait fructueux pour les connaissances de Constantine. Le robot blanc n'ayant aucune activité en cours, et Constantine n'ayant aucun linge à mettre au sec, les deux êtres électroniques rejoignent le chat au guichet.

L'humaine derrière le comptoir raccroche juste le téléphone. "Le directeur va vous recevoir. Si vous voulez bien patienter un instant dans cette pièce." dit-elle en tendant son doigt vers une porte en tôle, métal trop lourd pour faire une porte de l'avis de l'androïde.

Constantine et son compagnon d'enfance se dirigent de suite vers la porte, espérant que ce travail ne sera pas trop long - l'énergie de Minan est presque épuisée.

Patienter ? D'accord. Kallistrat n'était ni contrariant, ni pressé. Sauf lorsqu'il s'agissait de manger. Là, il était toujours pressé. Mais pas contrariant. Kallistrat mangeait n'importe quoi. Un véritable vide-ordures à lui tout seul. Il battit des cils en voyant Constantine lui passer devant, heureux malgré son faciès faussement contrarié. La compagnie, il aimait bien, et les robots émettaient un ronronnement de moteur très appréciable. En revanche, leur odeur n'était pas des plus agréables, mais on ne pouvait pas tout avoir. Chaton entra donc à la suite de l'androïde et son curieux sac-à-dos proche du koala accroché à son arbre. La pièce était sobre et n'était manifestement pas prévue pour faire salle d'attente, mais peu importait à notre Chertan. Quelques secondes à peine s'écoulèrent avant qu'un petit homme replet coiffé d'une tignasse blonde plus impressionnante que la crinière de Kallistrat ne fasse son entrée.

« Messieurs dames ! » Claironna-t-il en guise de salut.

Il examina brièvement les deux individus, s'attardant sur l'homme-lion. Sans-doute devait-il estimer imprudent de lui confier son précieux perroquet...

« Votre colis vous attends derrière la réserve des oiseaux exotiques. Nous vous ferons sortir par une porte de service afin que vous ne soyez pas dérangés par les visiteurs. S'agissant d'un grand spécimen, nous lui avons conçu un collier muni d'une laisse afin qu'il puisse marcher à vos côtés. N'oubliez pas : vous n'avez pas le droit de le manger ! » Insista-t-il en jetant un regard en travers à Kallistrat.

« Ne pas le manger. Ne pas l'abîmer. » Confirma l'intéressé.

Le directeur du zoo dodelina de la tête d'un air satisfait et invita ses deux missionnaires à le suivre, les conduisant aussitôt vers la fameuse réserve des oiseaux exotiques.

La température a soudainement augmenté lorsque Constantine est entrée dans la réserve. C'était prévisible, puisque la chaleur d'ici ne suffit pas à la survie de certains oiseaux exotiques des régions chaudes, justement. L'air est devenu lourd et chaud. Non pas que l'androïde en soit affectée de quelque façon, si ce n'est la faible dilatation de ses articulations qui effectivement se voient raidies et ses mouvements ralentis - de peu ; mais plutôt que Minan, lui, ne doive pas rester trop longtemps au dessus d'un certain seuil de température, auquel cas il relâcherait une substance gazeuse refroidissante malheureusement nocive pour certaines formes de vie. Heureusement qu'on n'atteint pas encore le plafond, mais c'est tout de même limite !

"Voilà le spécimen !" fanfaronne le petit blond. "Encore une fois, faîtes-y attention ! Ne le mangez pas, même s'il vous le demande, et ne le laissez pas non plus vous manger. Si j'apprends qu'il lui est arrivé quelque chose, vous aurez affaire à ma secrétaire, c'est moi qui vous le dit !"

Constantine et Minan, suivis par le grand chat qui parle, se retrouvent face à cet immense oiseau - immense car loin d'être aussi petit qu'une mésange ! L'animal doit bien faire la moitié de la taille de Constantine - à peu près aussi grand que Minan en mode éclaireur. Un grand Psittaciforme au corps rouge, ailé de bleu, colleté en jaune et coiffé de vert. Il a au sommet de son crâne trois grandes plumes blanches, contrastant étrangement avec toutes les autres couleurs. Son bec crochu est entièrement noir, cerclé à la base d'un rond de plumes bleues. Ce bleu-là étant différent du bleu des ailes dans la mesure où il est plus clair et plus complet, l'autre étant dans des valeurs sombres et une teinte tirant sur le mauve.

"C'est donc ça que l'on doit emmener sur une île inconnue ? On sait où elle est, cette île, d'ailleurs ?" s'enquit l'androïde.

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