Y a du soleil, y a des nanas [ PV Feryl ]

Le soleil brillait et une petite brise marine courait le long de la plage.
Dans le petit village de pêcheur, c'était l'heure pour les barques de sortir en mer, non loin des côtes, et de récupérer les cages posées au fond de l'eau. Quand ils tireraient sur leurs cordes, les pêcheurs remontreraient des crevettes, des homards, des poulpes, des crabes, des oursins, des étoiles de mer et parfois même des petits poissons. Ici on était loin du continent, ici on était loin de la ville, ici on était loin de la civilisation occidentale de Tern, loin des ruelles froides de Ordae, loin de tout.
Ici c'était un petit coin de paradis qui parfois voyait arriver une créature qui était là par hasard. Elle séjournait sur l'île et le plus souvent repartait, mémorisant l'endroit où elle avait atterrit mais ne révélant l'emplacement de l'île à personne.
La foret qui recouvrait la plupart des terres émergées était plutôt tropicale. A une extrémité de l'île, une très haute montagne au sommet usé par les vents dominait les arbres. Il devait surement s'agir d'un ancien volcan, éteint depuis de nombreux siècles.
Les oiseaux au plumage coloré ne manquaient pas et l'eau était d'un bleu pur. Le ciel limpide enrobait un soleil doré qui chauffait agréablement les lieux.

Sélène s'était trouvé une petite crique déserte. Il n'y avait déjà pas grand monde sur l'île mais alors dans ce coin secret, pas de risque de voir quelqu'un. Enfin normalement.
La jeune fille avait atterrit ici de façon très étrange. Elle savait qu'il y avait des îles dans ce coin de mer entouré en rouge sur sa carte. Elle voulait aller prendre le soleil. Elle avait fait sa valise, dit au revoir à ses parents et sauté sur le premier dragon venu. Moyennant un salaire satisfaisant, la créature reptilienne avait accepté de transporté sa petite passagère jusqu'à ce coin ensoleillé. Le dragon lui avait remit avant de partir un petit sifflet assez étrange. Il fallait que la démone souffle dedans pour voir le lendemain arriver son taxi volant.
Cela faisait trois jours que la jeune femme était là. Elle s'était trouvé une cabanette abandonnée non loin du village et avait emménagé. C'était propre et en très bon état. Au village on lui avait appris qu'il en existait plusieurs et qu'elles étaient destinées aux visiteurs de passage. Elle avait donc bien fait de s'installer. Les deux premiers jours, la démone avait travaillé un peu pour se faire de l'argent car le peu qu'elle avait sur elle ne lui servait à rien ici. Ce n'était pas la monnaie locale. Ici on payait avec de petits coquillages assez rare et plus ils étaient blancs, plus ils avaient de la valeur.

Aujourd'hui c'était jour de repos. Sélène avait sauté dans son deux pièces bleu marine, prit sa serviette sous le bras, ses lunettes de soleil sur le nez et un bon pique-nique avant de se poser sur le sable. Elle avait prit soin d'emmener un livre avec elle, histoire de pas trop s'ennuyer.
Elle était donc là, allongée, prenant doucement une couleur pain d'épice. Elle ne craignait pas vraiment les coups de soleil, elle avait surtout peur d'avoir des marques de bronzage à cause de ses lunettes. Elle les avait donc enlevés et s'était tournée sur le ventre. En trois minutes elle s'était endormie.
Le monde pouvait bien exploser, elle ne s'en rendrait même pas compte. Sa dernière pensée avant de sombrer avait été:

*Mon dieu ce qu'on est bien ici, loin du bruit. Enfin un peu de tranquillité. J'adore faire la touriste.*

Et maintenant ce qu'on pouvait entendre c'était quelque chose comme : "Roooooooooooon...pfffffff..."
Pas très délicat mais quand on dors, on ne se rend pas compte de grand chose. Heureusement Sélène gardait un brin de dignité: elle ne bavait pas.

[désolé pour la couleur bleue, erreur de manipulation ^^']

J’ouvris un œil, enfin j’essayais... Ma paupière retomba. Nouvelle tentative, cette fois-ci la deuxième répondit également et je pus enfin avoir un aperçu assez flou de mon environnement. Je remis le haut et le bas à leurs places respectives, repérant un ciel d’un bleu azur au dessus de moi et un sol chaud et sablonneux sous mes doigts. Ma tête me faisait affreusement mal et j’eus un vertige en me redressant. Je décidais donc de rester assis quelques minutes au milieu de ce qui semblait être une plage déserte, le temps de retrouver mes esprits.

Comment étais-je arrivé ici ? Tout ce dont je me rappelais, c’était d’avoir pris le bateau et... une tempête, oui, c’était bien ça. Je me souvenais du roulis des vagues sous la coque, du vent déchaîné et des puissantes gerbes d’eau qui léchaient inlassablement le pont, comme si elles voulaient absolument le débarrasser de tous ses parasites, pauvres voyageurs et matelots qui tentaient désespérément de s’y accrocher, de s’accrocher à leur vie... Puis c’était le trou noir. Une chance que je m’en sois sorti, soupirais-je intérieurement.

Puis un détail me revint à l’esprit... Maître Kehrlan ! Tout cela ne serait pas arrivé s’il ne m’avait envoyé en galère assouvir son petit caprice culinaire ! Il devait encore attendre dans la confortable petite chambre que nous avions louée dans un village côtier, où nous étions censés rencontrer l’une de ses « connaissances ».
Il m’avait soudain exposé son envie de manger du poulpe, l’air marin lui ayant soit disant ouvert l’appétit. Mais il ne s’agissait pas de n’importe quel poulpe, je devais aller le chercher dans un certain village dont c’était la spécialité, à deux heures de là en bateau. Il m’avait donc expédié sans plus de cérémonie, d’un geste autoritaire et l’air borné. C’était comme cela que je m’étais retrouvé embarqué sur ce navire au funeste destin. Et c’était ainsi que je me faisais mener en bateau - c’est le cas de le dire - par un maître excentrique depuis de nombreuses années...
A vrai dire, je me doutais qu’il voulait m’éloigner le temps de son rendez-vous, car il y avait encore beaucoup de choses qu’il me cachait. Mais le voyage anodin s’était transformé en naufrage ! Je ne pus m’empêcher de rougir de colère, puis me forçait au calme, ça ne servait à rien de pester tout seul. Il me fallait trouver de l’aide et un moyen de rentrer.

Mes vêtements mouillés me collaient à la peau et le sable qui s’y était infiltré m’irritait. Je me levais et décidais d’ôter au moins ma chemise, avant de m’éloigner du rivage. Je ne voyais Erwel nulle part et commençais à me faire du souci. Mais j’avais confiance en mon compagnon ailé, il s’en était certainement sorti et me retrouverait plus tard.

Je finis par atteindre une petite crique et repérais une forme étendue sur le sable. Je plissais les yeux et reconnus une femme, légèrement vêtue semblait-il. Je ne m’en étonnais guère plus, car je savais que bon nombre de personnes appréciaient de se reposer ainsi, et je fus plutôt rassuré de trouver aussi vite quelqu’un susceptible de m’aider. Je courus jusqu’à arriver à sa hauteur et découvris une jeune fille, endormie au vu de ses ronflements, à la peau joliment dorée par le soleil. Finalement j’étais quand même un peu embarrassé par sa tenue et préférais poser mon regard sur le paysage alentour, en profitant pour repérer les lieux au cas où. Je me décidais néanmoins à l’aborder :

- Bonjour ! lançais-je. Euh... Excusez-moi ! Sauriez-vous où nous sommes ?

Je m’accroupis non loin d’elle, attendant une réaction de sa part qui tardait à venir, lorsque mon ventre émit de longs gargouillis. Le message était on ne peut plus clair... Je posais mes yeux sur un sac d’où dépassait de la nourriture. La tentation fut trop grande et en deux temps trois mouvements je me retrouvais à dévorer avidement les provisions de la jeune fille, avalant de grosses bouchées. Tout en mangeant, je résolus de la remercier pour ce repas d’une façon ou d’une autre, en espérant qu’elle comprendrait qu’il était des besoins impérieux que la nature nous imposait et que remplir mon estomac était alors bien plus important que respecter les règles élémentaires de politesse.

Ma besogne terminée, je posais ma main sur son épaule et entrepris de la secouer vigoureusement jusqu'à ce qu'elle veuille bien se réveiller.

- Mademoiselle ? Je suis désolé de vous déranger... Mademoiselle ?

Décidément, elle avait le sommeil lourd ! Mais il fallait absolument que je lui parle si je voulais avoir une chance de revoir un jour Northrives...

Sélène était en plein rêve. Elle aurait été bien incapable de dire de quoi elle rêvait au juste mais c'était très agréable. Et puis elle émergea dans un demi-sommeil où la sensation d'être secouée comme un prunier apparut. Le temps qu'elle tilt il s'écoula deux bonnes secondes. Mais la réaction fut immédiate: elle se redressa d'un bond et à peine eut elle aperçut quelqu'un à côté d'elle qu'elle s'écarta vivement. Sa vue était encore flou et elle prit le temps de battre des cils pour s'accoutumer au soleil et chasser pour de bon Morphée de son esprit.
Ses yeux la renseignèrent alors sur l'individu qui l'avait tiré de son sommeil aussi brutalement. Il semblait mal en point. Les yeux de la démone se posèrent alors sur son sac qui visiblement avait été fouillé. Elle déduit, grâce aux dernières miettes sur le visage de l'inconnu, qu'elle devrait rentrer chez elle pour déjeuner. Et la première remarque qui lui vint à l'esprit fut:

-J'espère que c'était à votre goût.-

Elle détailla alors plus en profondeur son sonneur de cloche: grand et mince, la peau mate, les cheveux noir, elle ne ressentait aucun malaise en sa présence. Il ne devait donc pas être humain. Ou pas un humain normal en tout cas.

- J'imagine que vous aviez une bonne raison de me réveiller de façon si cavalière.- dit-elle d'un air mécontent.

La jeune femme se mit à genoux, enleva le sable dont elle était couverte et passa une main dans ses cheveux pour les recoiffer un minimum. Elle ne voulait pas passer pour un épouvantail. Elle ne tenait pas plus que ça à se rapprocher du jeune homme tant qu'il n'avait pas exposé les raisons de ses actes. Bouloter le déjeuner des autres avant de les secouer pour leur faire ouvrir les yeux c'était des manières très étranges pour ne pas dire carrement grossières. La première réaction de la démone était plutôt de s'en étonner que de se fâcher. Si c'était juste pour lui faire un blague, là par contre elle risquait de voir rouge et d'enflammer la plage tout entière. Mais si on l'avait réveillé pour la prévenir que l'île coulait, elle pardonnerait le vol du pique-nique.