Le miroir Tchen (2) [rp test suite - Wu]

Le dossier en main, Ayame continuait de le feuilleté depuis des heures, nous avions quitter Tern pour rejoindre les Fumeroles, et on avait beau avoir parcouru un sacré chemin en peu de temps il râlait encore et toujours inlassablement. Il n'avait de cesse de répéter que ce n'était pas à nous de bosser dessus qu'on avait mille fois mieux à faire que d'aller chaperonner une apprentie maitre. Surtout qu'il n'avait pas aimé non plus être jeté comme un mal propre hors du bâtiment. Nous n'avions pas passer les portes d'entrée que des gorilles nous suivaient à trois mètres derrière et ce jusqu'à ce que la voiture soit sortie du territoire.
Un moment j'ai eu l'envie d'aller leur montrer mon épée toute neuve, mais une guerre inter-quartier en ce moment n'aiderait en rien. Je me suis caler dans mon siège, bras croisés en espérant ne pas trop entendre les jérémiades de l'archer qui tentait de me convaincre de ne pas me rendre... ici. Où ? Dans les souterrains.

Quand nous avons emprunté la plateforme pour rejoindre la ville souterraine, Ayame grimaça rien qu'à l'idée de descendre au dessous du niveau habituellement du goudron qu'il foulait jour après jour. Sa nature d'elfe peut-être ou simplement une phobie des endroit fermés... J'ignorais ses commentaires nombreux sur le dossiers quand nous arrivâmes enfin au bon endroit. La ville taillée dans le roc, dessinée dans la pierre et peuplée de milliers de créatures différente n'avait rien à envier à la surface ou aux majestueuses îles de Ciel. Cette ville illuminée par les diamants luisant sur les mur du dome de pierre ressemblait à une fête perpétuelle. Nous étions comme au nouvel an chinois mais tout les jours qu'il fasse nuit ou plein soleil, les innombrables lampes et lucioles clignotaient à des rythmes différentes offrant comme un feu d'artifice à mes yeux. J'aimais cet endroit.

J'avançais dans la ruelle et croisant un salon de thé tenue par une vieille femme, j'allais m'installer à une table. Ayame resta debout, il comprit bien vite ce que je lui demandais.

-Ok, je m'y colle. Je serais de retour dans une demi-heure, si elle ne fait aucun scandale évidemment.

-Je compte sur toi pour la ramener en un seul morceau, ne la blesse pas, ne la force pas, peu m'importe qu'elle vienne à moi, l'un dans l'autre, si je ne peux pas faire mon boulot j'abandonnerai.

Il s'inclina une main repliée sur son cœur, j'acquiesçais et le regardais partir en direction des tunnels menant aux résidences.
La gérante du café m'apporte une théière d'eau bouillante et deux tasses accompagnées de petits sabliers, de cuillères et d'une coupole de sucre roux. Elle me tendit aussi un large coffret de sélection de thé, je choisis un thé fort, enrichit d'agrumes et de lotus au gout prononcé. elle me proposa alors la boule à thé remplit des feuilles à infuser avant de disparaitre dans son antre. Je n'avais qu'à attendre que ce cher Ayame revienne avec mon invité.


L'elfe mit quelques minutes à remonter les marches menant au tunnel indiqué, il se faufila parmi une foule dense de voyageurs et résidents avant d'avoir le champs libre pour gagner la maison au pas de course. Enfin arrivé devant la porte, il grinça des dents, prenant le temps de respirer et de se refaire une façade naturelle avant de cogner contre le bois.
La porte s'ouvrit l'instant d'après le laissant observer ce que la photo du dossier ne montrait pas : une jeune femme séduisante qui était à ses yeux encore trop jeune pour régner.

-Mademoiselle Lucinferno Sélène je présume ?

Il s'inclina, ôta un gant et tendit une main amicale à Sélène.

-Je suis Ayame, second du maitre de K'ouen, Wergeld, il vous invite à le rejoindre aussitôt, acceptez-vous de me suivre ?

Il avait fait exprès de mettre les formes les plus étonnantes à son propos. Quiconque serait dans sa situation aurait été plus délicat, parlant simplement et préparant sa victime à l'annonce qu'il lui ferait l'instant plus tard. Or, il était tellement atterré par ce projet qui ne concernait pas K'ouen et ses quartiers qu'il ne chercha pas à faire d'efforts, et plus qu'il ne le pensait, jamais personne ne protestera contre son manque actuel d'objectivité. Tout ceci n'était qu'une nouvelle occupation pour moi, dans une ville que j'étais pressé de quitter. Loin de moi l'idée d'aller à l'encontre de l'elfe, si tout ceci ne fonctionnait pas, d'autres s'en chargeront à notre place.

Ayame l'entraina à sa suite dans le dédale de rues semblables, où comme sur la surface, ici, le ciel de pierre était partout le même. L'expression incrédule de la jeune avait le mérite de le consoler. Il avait vraiment espéré qu'elle ne lui réponde qu'un "allez... vous faire mettre" bien senti et pourtant à moitié polie.
Elle débita alors ses questions... Si les elfes ont bonne mémoire, il feint de ne pas en avoir et éluda quelques unes des questions auxquelles il ne souhaitait pas répondre.

-Mon maitre souhaite vous rencontrer, ça ne vous suffit pas ? Rassurez-vous il est joli garçon.

Un clin d'oeil moqueur il sourit de sa plaisanterie... La situation était presque comique, il avait bien du mal à ne pas pester contre cette idée qui lui était incompréhensible. Les maitres ne nomment pas d'autres maitres c'est comme allier le loup et le lion face à un troupeau de moutons...

Il se justifiait aussi que moins il en disait mieux ça irait. Je ne lui aurait certainement pas pardonné de contrecarrer mes plans. Dans un autre sens, il lui était plus facile de la contrôler le temps du voyage si elle ne savait rien... Il préférait de loin qu'elle tape un scandale quand je serais en vue... Car, moi, j'avais le pouvoir de la faire taire sans passer pour un voyou.

Lorsque le tunnel-avenue débouche sur le centre-ville souterrain il en eut presque le sourire. Ici tout était déjà plus lumineux une faible consolation pour lui. Il lui fit traverser quelques dédales d'échoppes et voilà que le semi-elfe débarquait à l'angle de mon champs de vision accompagnée de la jolie jeune femme.

S'approchant du café, il s'inclina à ma hauteur et s'annonça à sa façon en grimaçant ouvertement :

-Auriez-vous oublié que les elfes n'aiment pas les sous-sols ?

-J'y penserai quand nous irons dans les mines.

Ma réponse incisive eut l'avantage de le faire taire, d'un mouvement de la main j'invitais la jeune Sélène à s'assoir en face de moi alors qu'Ayame prit d'un élan de galanterie lui tirait sa chaise.

Sélène ne chercha pas à en savoir plus pour le moment. Elle se doutait bien que si la totalité de ses questions avait été éludée, c'était bien parce que l'envie ou le droit d'y répondre n'y était pas. Elle se contenta donc de suivre l'elfe jusqu'à un salon de thé qu'elle n'avait jamais remarqué. L'endroit était agréable, il faisait bon et de délicates effluves de patisseries emplissaient les lieux. La jeune femme s'assit bien sagement face à celui qui devait être le maître du miroir K'ouen. Au moins l'elfe n'avait pas mentis: il était beau garçon. Sélène n'allait pas se plaindre, elle s'attendait à voir un vieux crouton ridé et désseché. Au moins elle avait la preuve vivante de l'on pouvait être beau et jeune et être au sommet de la hiérarchie. Ce qui ne changeait pas grand chose à la situation présente mais bon.
La démone ne savait pas si elle devait prendre la parole la première. Elle ne savait pas non plus comment elle devait s'adresser à un maître. Surement pas en lui disant "Salut mon pote, comment ça va ? T'aimes bien les Fumeroles ? C'est un coin sympa non ?". Les questions qui tourbillonnaient dans sa tête ne la lâchaient pas. Elle finit quand même par ouvrir la bouche, trop intriguée par la situation:

-Je l'ai déjà dit à votre second mais...Je vois mal ce que vous me voulez. Je ne crois pas avoir enfreint aucune règle et qu'un maître veille s'adresser à moi me semble...étrange. Si la situation pouvait être plus nette, je dois dire que ça ne me déplairait pas.-

Sélène s'était exprimée sur un ton ferme et poli. Elle avait horreur de se la jouer petite chose fragile et était d'accord sur le fait qu'avec des paroles polies et claires, elle n'avait aucune craintes à avoir de qui que ce soit. Elle n'aimait pas tourner autour du pot et voulait savoir très exactement de quoi il retournait. La chose n'était pas banale surtout que si sa mémoire était bonne, sa race n'était pas du tout sous la juridiction de K'ouen.
Tout avait donc caractère à l'intriguer. Elle s'était assise bien droite, les mains jointes sur la table et comme elle ne supportait pas d'avoir les jambes bien comme il faut, elle les avait automatiquement croisées. Cette attitude n'était pas ce qu'il y avait de plus effarouché mais l'on pouvait sentir une tension dans tout son corps. Si elle ne paraissait pas intimidée, elle n'en était pas moins vigilante et attentive. Le maître du miroir ne lui parraissait pas hostile elle se doutait que ce genre de personne avait l'habitude de cacher tout ce qu'elles pensaient.

[désolé, c'est très court et je n'ai pas vérifié l'orthographe. Je fais ça dès que mon traitement de texte est de retour sur mon bureau.]

Ayame repoussa la chaise de la jeune femme alors qu'elle s'asseyait et disparaissait quasi-immédiatement dans la salle du salon de thé pour y chercher de quoi orner la belle table que j'avais gardé jusque là. Pendant ce temps j'avais consciencieusement observé l'apparence de cette jeune femme, je savais d'après le dossier que je tenais sur mes genoux à peu près tout ce qu'il y avait à savoir sur elle jusqu'à aujourd'hui, je crois même que je pourrais trouver quelle est sa marque de dentifrice préférée...

Je détournais le regard l'écoutant parler sans faire mine d'intérêt, mes yeux se perdaient dans les rayons de lumières filtrées par un lampion, une boutique de jouets en bois attirait les regards curieux de quelques mômes qui bavaient d'envie devant la vitrine.
Quand mes yeux se posèrent à nouveau sur Sélène, je la considérais sérieusement, et progressivement un sourire orna mes lèvres, je riais doucement ne pouvant retenir plus longtemps l'amusement que me procurait cette drôle de situation. Ayame revint alors un plateau de viennoiseries et diverses pâtisserie dans les mains. Il les déposa non loin de la tasse servit de la démone, il déposa aussi une boite remplit de diverses boites de thé. C'est alors que je remarquais la théière d'eau bouillante qui accompagnait son plateau. Le tout installé il tira une chaise et s'installa légèrement en retrait, l'air moins souriant que moi.

Mon attention revint à cette jeune femme, adolescente à peine femme. Je l'invitais d'un geste de la main à se servir.

-Ceci n'est pas une rencontre officielle, détends-toi. Je ne suis pas ici pour te mener en prison ou te proposer une mission suicide.

Je levais la tête et libérais un soupir sonore avant de reprendre.

-Toi et Ayame en avez mis du temps à venir, il ne t'a pas trop raconter d'horreurs sur moi ?

Sélène regarda faire Ayame sans un mot. Elle commençait à se dire que ce jeu était trop compliqué pour essayer d'en fixer les règles dès le début. Mieux valait attendre de voir comment tourneraient les choses. Un sourire en coin étira ses lèvres. Bien sur que cette rencontre n'était pas officiel. Ca se voyait tout de même: une rencontre dans un salon de thé sous terre c'est tout sauf officiel. A moins que les lois de K'ouen soient différentes à ce point de ce que connaissait la jeune femme.
Elle jeta un oeil dans la boîte contenant des sachets de thé. Elle avait horreur du café mais le thé et les tisanes étaient plutôt à son goût. Elle porta son choix sur un sachet contenant quelque chose de vert sombre et qui avait une odeur sucrée. Elle posa délicatement sa verveine-miel à la surface de l'eau bouillante qui était dans sa tasse et regarda la jolie couleur dorée se rependre dans le récipient. Elle fit bouger le sachet au bout de sa ficelle un moment sans lâcher l'intérieur de sa tasse des yeux? C'était un jeu qui était devenu presque une habitude. Voir de l'eau transparente prendre une belle couleur était une chose fascinante.
Puis la démone prit la cuillère à côté de sa tasse et la plongea dans sa boisson. Elle écrasa son sachet tout au fond, faisant sortir un nouveau nuage de couleur doré. Elle finit par lever les yeux de son breuvage tout en remuant mécaniquement. Tous ses gestes étaient habituels. Elle répétait toujours la même cérémonie à chaque tasse. Elle parla d'un ton neutre presque las. Il voulait qu'elle se mette à son aise ? Elle allait le faire.

-Il ne m'a rien dit du tout à vrai dire. Je crois ne jamais avoir posé autant de question en une fois et je crois que jamais personne n'en avait éludé autant en une fois. Une vraie pierre tombale. Sans vouloir être vexante.-

Sélène avait adressé sa dernière réflexion à l'elfe en personne. Elle aimait assez peu parler de quelqu'un avec une personne quand le sujet de la discussion se trouvait juste à côté. Ne pas tenir compte de sa présence lui semblait être assez irrespectueux même si la faute n'y était pas. Elle savait pourtant que la chose arrivait fréquemment dans une discussion et pouvait très bien s'adapter mais le sentiment d'être impolie restait toujours un peu là.

-Mais pour être tout à fait franche, il m'a quand même dit quelque chose: que vous étiez beau garçon. Cette précision était sans doute destinée à me rassurer.-

La jeune femme se garda bien de donner son avis sur la question. C'était généralement un terrain épineux, plus encore si la personne était inconnue comme le maître du miroir l'était pour elle.
Sélène était habituellement beaucoup plus loquace. Elle pouvait meubler une conversation toute seule et n'avait pas besoin qu'on lui sorte de long discours pour renchérir. Elle avait la tchatche, ses répliques sortaient cinglantes comme un coup de fouet et les mots ne lui manquaient jamais ou presque. Son frère disait que si ses flammes étaient dangereuses, sa langue l'était bien plus encore. Que ce soit pour les autres ou pour elle.
Mais cette fois-ci, elle jouait la carte du silence. Elle ne savait pas sur quel terrain elle jouait, ne connaissait rien des adversaires et préférait encore observer et apprendre que tenter le coup. Le mystère autour de cette entrevue surprise la tenaillait mais il était apparemment inutile de questionner ses hôtes.

Et c'est tout ? Elle avait rien d'autre à dire si ce n'est que parait qu'Ayame se fout de moi quand j'ai le dos tourné et qu'il avait l'art de ne jamais répondre aux questions... Dur de faire la conversation avec si peu d'éléments. Je me contentais de rire, passant sur le fait qu'elle préfère les sachets aux feuilles pleines, et surtout que ça semblait bien l'amuser. Rire sur la comparaison d'Aya avec une tombe.. surtout ça me faisait rire. Moi qui connaissait si bien le personnage tout le monde pourrait être comparé à pareil édifice sauf lui.

Lui qui parlait sans arrêt dès qu'on lui donnait le feu vert, qui souriait constamment à défaut de se mettre en colère souvent. Il était rigide dans sa façon de faire et pourtant il s'adaptait à une vitesse hallucinante. Je l'appréciais pour toutes ces qualités, toutes ces choses qui le rendait complètement différemment de moi. Moi qui souriait pas si souvent, qui aimait les éléments sûrs, fixes. Chacun son élément en quelque sorte, il était l'eau en constant mouvement et j'étais la terre, droite à n'en plus finir... Sérieuse quand son ami aquatique aimait joué de formes et couleurs.

-Et ça t'as rassuré de te dire que je n'étais pas un vieux croûton plein de pustules ?

Drôle de comparaison, je sais. Mais détendre l'atmosphère était quand même la première chose à faire si je souhaitais lui parler avec facilité, et dans le même mouvement, en apprendre un maximum sur elle. J'avais besoin qu'elle parle pour découvrir tout ceci, je laissais l'observation de son attitude et de ses gestes à Aya dont l'oeil était bien plus affûté que les miens.

-Désolé. Blague à part, je suis venu parce que récemment un de mes confrère m'a parlé de toi. Pas en mal, n'aie crainte, juste il a mentionné ton nom dans un projet assez important pour que j'accepte d'y mettre mon grain. Et comme tu le vois, je voulais te rencontrer. Quoi de mieux pour se faire une idée de qui tu es, non ?

Aya aurait pu faire grincer ses ongles sur un tableau que ça n'aurait pas été aussi remarquable que ses dents confirmant toute sa désapprobation. Il était contre et me voir perdre mon temps l'insupportait. Vivement qu'elle parle qu'il arrête de me regarder de façon aussi louche. S'il avait la force de me tuer sans remord ni peine il le ferait sans aucun doute. J'avais la chance d'être plus fort que lui, et d'être assez proche pour que le crime le hante toute sa vie. Et ça... Il refuse d'être asservi par des regrets et des douleurs qu'il ne saurait contrôler.

Je levais ma propre tasse et la portais à mes lèvres, l'odeur fleuris du thé était bien une des rares choses que j'appréciais dans ce genre de moment de détente. Même au beau milieu d'une forêt je n'étais jamais contre une tasse de thé odorante. C'était comme un petit bout de confort dans le pire enfer que la vie a inventé sur cette planète. Et dieu sait que j'en ai vu beaucoup des enfers...

Sélène écouta parler le maître, un semblant de sourire aux lèvres. Visiblement il n'aimait pas spécialement bavarder de tout et de rien. Elle lui trouvait un côté taciturne et sombre qui lui faisait penser à un ours. Il dégageait une aura non pas froide mais assez dure. Surtout en comparaison avec l'elfe qui semblait vibrer d'une toute autre énergie. Ca n'aidait pas vraiment la démone à cerner les deux personnages mais elle aimait se faire ce genre de remarques quand elle rencontrait des gens. Elle sourit franchement quand le maître lui demanda si elle avait été rassurée de savoir qu'il n'était pas un vieillard.

-Disons que ça m'a étonné de voir quelqu'un d'aussi jeune. Dans l'esprit de tout le monde, les maîtres sont des sages et l'image typique c'est le vieux monsieur avec sa barbe blanche dans une grande toge et qui réside quelque part dans les nuages. Mais la surprise est agréable. Si vous aviez été un vieux crouton comme vous le dite, ça ne m'aurait pas fait grand chose de plus que ce que vous êtes. J'aurais peut être eu l'appréhension de voir votre dentier tomber dans le thé mais sans plus.-

La jeune femme continuait de sourire. C'était assez peu respectueux des personnes âgées comme discours mais peu lui importait. Elle savait que si les vieux voulaient se moquer des gens, ils le pouvaient tout autant qu'elle le faisait d'eux. La cuillère tournait toujours dans la tasse mais très mollement. Le sachet et sa ficelle c'était enroulés autour mais ça ne semblait pas perturber Sélène. Elle écouta ce qu'on avait à lui dire.
Il était venu pour la rencontrer ? Simplement ? Ca semblait un peu gros à avaler. Et cette affaire importante où son nom avait été évoqué ? Qu'est ce que cela pouvait être ? Les questions fusaient les unes après les autres dans l'esprit de la jeune femme mais ses interrogations ne pouvaient se voir sur son visage que par un léger foncement des sourcils quand elle sut que son om avait été cité dans les hautes sphères.
Elle prenait bien garde de rester neutre et impassible. Ce n'était pas bien dur, elle avait toujours été exellente comédienne. Un détail lui revint alors en mémoire. Un nouveau sourire en coin éclaira son visage.

-J'aurais pourtant juré que vous saviez tout sur moi vu la taille du dossier que vous avez. Mais peut être que j'entre dans un délire paranoïaque et que c'est simplement le plan en 3D des Fumeroles...-

Elle porta son regard au dehors et finit par lever sa tasse jusqu'à sa bouche. En s'asseyant elle avait entrevu le fameux dossier, bien posé sur les genoux du maître. Elle ne doutait pas que toutes les informations la concernant pouvaient être recueillies par une personne de son importance.
Mais elle ne comprenait toujours pas ce qu'on lui voulait.
Quand elle reposa la tasse sur la table, ses yeux se posèrent cette fois sur le dénommé Ayame. Peut être était-ce l'air des sous-sols mais il ne semblait pas très heureux d'être ici. La démone reporta son attention sur le maître. De toute évidence, elle était ici pour parler et eux, pour en apprendre plus. Sur ce point, il avait été très clair. Le seul problème, c'était qu'elle n'avait pas franchement envie de parler à tord et à travers devant des inconnus qui en plus étaient au courant d'un projet où son nom avait été mentionné. Et elle même ne connaissait rien de ce projet. C'était rageant.

-Je dois avouer que je n'aime pas l'idée d'être mêlée à une affaire dont j'ignore tout. C'est comme se faire manipuler comme une poupée. Je n'ai pas à être dans le secret des dieux, ça me semble normal mais je trouve naturel de ressentir ma frustration. Je vois mal ce que vous voulez savoir de moi. Je n'ai pas pour habitude de hurler ma vie sur tous les toits, je ne vois pas en quoi cela me serait bénéfique de vous raconter qui je suis. J'aime parler en terme de jeu aussi je vais le faire: ça reviendrait à abattre tout mon jeu sur la table sans rien connaître de vous ni de ce que vous avez en main, ni de votre stratégie. Ca revient à s'exposer complètement. Je trouve ça...dangereux pour moi. Et je n'en vois pas l'intérêt surtout.-

Sélène avait parlé d'une voix neutre, sans ton particulier ni accents. Elle n'avait pas à se mettre en colère, ça ne la mènerait à rien. Elle préférait être franche et voir ce que ça lui rapporterait.

-Mais si vous me donnez une raison suffisante de me présenter, je le ferais.-

Encore cet esprit de jeu, de gagner ou perdre quelque chose, d'échanger...C'était plus fort qu'elle, elle n'arrivait pas à donner sans y trouver un avantage et refusait de prendre sans voir tous les enjeux de l'échange.

Elle avait de l'humour, mais elle était trop sérieuse. Coincée -tendue ?- et un peu trop immature. Je prenais des notes, mentalement, sur chacune de ses réponses. Sa façon de boire le thé, jusqu'à son choix du sachet me fit dire qu'elle était encore bien jeune, un peu trop pour ce job. Ses épaules n'étaient pas encore assez solide pour ce rôle. Ayame semblait confirmer d'un regard mes soupçons. Lui aussi la trouvait trop jeune. Elle n'était pas encore sûre de sa propre identité, elle pouvait s'emporter au moinde coup de vent, elle était instable. Pour moi, c'était clair, elle n'avait pas la volonté nécessaire pour diriger un quartier, encore moins celui de Tern.

Ayame interrompis ma réflexion, il m'empêcha de répondre à la jeune femme et tourna sur moi un oeil sévère.

-À quoi bon continuer Wergeld, ce titre ne lui apporterait rien de bon. Elle devra supporter plus que vivre la situation. Crois-moi, il vaut mieux qu'elle reste libre de choisir sa vie et plus encore de rester loin des politiques.

Je l'aurais entendu si je pouvais écouter ses pensées. Et il pensait fort, très fort. Tout le monde n'a pas la même force que moi. Elle avait raison les maitres étaient souvent de vieux croûtons qui avaient su apprendre à vivre leur vie et à assumer leur choix. Elle, même épaulée, ne saurait s'en sortir. Je ne dis pas ça pour les quelques atrocités qui risques de lui tomber dessus à tout moment mais aussi pour cette immense équipe qu'il lui faudra apprendre à mener, à gérer avec autorité et pourtant générosité. La différence entre elle et ce qui à mes yeux fait un bon maître c'est la volonté d'assumer ses choix, et lorsqu'on est encore incapable de rester calme dans une discussion hautement politique, elle le sera encore moins lorsqu'il faudra user de diplomatie.

-Ayame a raison. Vois-tu Sélène, je t'ai fais venir ici parce qu'un vieux maître m'a demandé de l'aider dans une tâche compliquée. Il souhaite que trouver un remplaçant pour son quartier. Il m'a donné ton dossier et dans un sens espérait que je l'aide à te former.

Je fis une simple pause. Je ne voulais pas qu'elle se sente vexer, selon moi, ce n'était pas qu'elle était trop nulle pour ce métier, mais qu'elle y abandonnerait beaucoup trop. Et pour être maitre il faut avoir les épaules assez solide pour ne pas s'y consumer.

-Mais tu es trop jeune. Tu as besoin de pouvoir avancer librement sans que les obligations ne t'achèvent avant que tu n'apprennes réellement qui tu es. Ce maître t'as choisi, mais il a fait une erreur, crois-moi, il vaut mieux pour toi de continuer à vivre ta vie sans te soucier des désordres politiques, tu seras bien plus heureuse ainsi. Et surtout, toi qui n'acceptes pas que je sache tout de toi, comment feras-tu pour gérer ta vie alors que tout le pays sauras qui tu es et ce que tu fais à chaque seconde de ta vie. Être à découvert c'est le sacrifice que l'ont fait lorsqu'on se met au service des autres, tu ne mérites pas de vivre ainsi, pas pour le moment.

Je me levais de ma chaise et y laissais sur la table le dossier. Ayame dépose de quoi payer les consommations et sûrement plus. Je souriais encore quand je m'inclinais légèrement pour la saluer comme il se doit.

-Je suis heureux de t'avoir rencontré Sélène, si un jour vient où tu as besoin d'un maître à tes côtés ou même d'un compagnon n'hésites pas à me contacter.

Je remis ma lourde épée sur mon dos et enfilant mes lunettes j'observais Ayame se pencher lui aussi sur la jeune femme, il lui chuchota quelques mots alors que je quittais les lieux.

-Ne pensez pas que vous n'êtes pas à la hauteur, vous le serez sûrement un jour, mais aujourd'hui c'est encore trop tôt.

Il s'inclina avec respect et tout sourire s'éloigna du salon de thé pour me rattraper en quelques longues enjambées. Il ne dit rien sur le chemin du retour, il ne chercha même pas à savoir ce qui m'avait fait si brusquement changer d'avis. Mais au moins cette histoire était terminée.



(on en a discuté avec le staff et pour le moment nous ne pensons pas que tu puisses adhérer au rôle de maitre du miroir. Si dans quelques temps tu penses pouvoir postuler de nouveau n'hésites surtout pas je serais ravi de te faire passer un nouveau test ! )