Un café avec Puzz

Une journée de travail au laboratoire a été faite, j’y retournais pour une nouvelle en passant par l’allée centrale de Tern, une rue commerçante où boite de nuit, café et tout autre festivité s’y côtoient, on reconnait le quartier vivant d’Entre-Monde, sauf qu’il était tôt, on pouvait voir les gens qui partaient au travail ou ceux à l’inverse qui décuvaient. C’était tout un monde ici

Habillée comme d’habitude, sans mon chapeau car mise à part pour les cérémonies, il me servait à rien. Je ne voulais pas quitter cet uniforme qui me rappelait tant mon passé et de tout façon il avait son charme et son prestige. On pourrait croire que j’étais Sanctuari, Milicien ou tout autre poste de justicier, aucun sourire n’apparaissait sur mon visage et encore moins quand je vois ce gros lard de chien qui comme à son habitude quémendait de la nourriture à un homme. Bel homme d’ailleurs, quelque chose émanait de lui, une sorte de noblesse, ses traits fins et cette longue chevelure me fait penser à une présence divine comme un ange comme moi, peut-être un assimilé qui sait…

Mais ce qui m’attira néanmoins c’est ce chien qui me donnait que des envies meurtrières à son égard. Je n’avais pas de Glyph comme hier mais cette fois-ci, je le ferai peur et je crois qu’il va battre son record de vitesse et ça fera du bien à son gras traînant par terre. M’approchant vers la table de l’homme qui en prime abord ne semblait pas dans le meilleur de sa forme, les gémissements du chien me tiraillait la tête. Je grognais intérieurement, il ne pouvait pas se taire… définitivement, non…

Mais alors que la créature demandait son dû, le regard brillant de l’homme à la chevelure blanche suppliait les gens du regard qu’on le vienne à son aide, il ne supportait pas lui non plus le gros fardeau de l’Entre-Monde qu’on a connu ? J’arrive alors à “ son secours “, déterminée, ne prenant pas la peine de sourire, de toute façon.. Sourire, ce n’est pas forcément de mon vocabulaire, mais faire des regards menaçant, ça oui, ça l’était !

- Je pense que ce chien mérite une bonne leçon, bientôt il finira par nous poursuivre partout si on ne lui apprends pas les bonnes manières.

Maintenant juste à côté de chien, lui infligeant un regard assassin quand il osa me regarder avec cette truffe humide et ses yeux doux qui n’avaient aucun pouvoir sur moi. Je continuais à soutenir mon regard menaçant.

- Si tu veux vivre le chien, tu devrais courir le plus vite possible et sinon on va faire la comme dernière fois, sauf que cette fois-ci je n'hésiterai pas… Comprends-tu ?

Le chien sentit que je mettrais ma menace à exécution même si j’avais aucune arme sur moi, ni même mes épées. Par réflexe, je pose mes mains sur mes hanches où d’habitude, dépasse les gardes de mes armes, mais il n’y avait rien mais ce n’était une question de temps avant que je m’en refasse d’autres. Pour le faire fuir, je posa violemment mon pied sur le sol près de sa truffe, il jappait et part en courant vers d’autres lieux, loin de moi de préférence… Enfin la paix…

Je regarde l’homme et entame la discussion.

- Vous ne devriez pas céder à cet animal même s'il appartient à Dame Témari, il est mal élevé et méritait une liposuccion ou un truc du genre.

Las de toute cette pression, je m’assois sur la chaise en face de l’homme, je passe une jambe par dessus l’autre et attendit qu’un serveur me prenne ma commande. Un thé ne me fera pas de mal et puis la boutique n’ouvrait pas avant longtemps, je pense que discuter ne me fera pas de mal pour une fois.

Jouer avec lui ? Témari devait obliger tout la ville de prendre soin de son petit chien car elle n’avait pas le temps de s’occuper de lui, tout le monde n’avait pas du temps à perdre avec ces foutaises et surtout pas moi, ce chien qui avait des kilos en trop et qui quémendait à qui veut l’entendre des croquettes ne m’avait pas du tout charmé alors pourquoi je ferai l’effort de lui tenir compagnie alors que j’avais horreur de ça….

- Si vous avez du temps, faites-le… Je passe volontiers mon tour.

Je n’avais pas dis le fond de ma pensée, il n’avait pas besoin de le savoir, qu’il le fasse si il n’avait que ça à faire. Malgré mes propos, l’homme en face de moi, gardait son sourire, son calme, il pense que je suis de bonne compagnie ? Il s'ennuie peut-être de si bon matin, je ne voyais pas quelle excuse il avait pour avoir un tel comportement mais je le laissais faire, faire la brute froide à la longueur de journée était peut-être une façade, une manière que les gens ne t’approchent pas, pas d’attache, pas de déception. Enfin pour mon vis-à-vis, pour lui, c’était une superbe distraction pour ce Puzz, il voit du monde, il se promène, des beaux souvenirs, je me demandais qui se souciait de ça, ce n’était qu’un chien… Mais l’homme ne démordait pas avec son sourire charmant, il essaye de m'appâter lui aussi ?

Puis il commençait à divaguer en parlant de “ nous “, comment ça nous, il n’y a pas de nous, je m’étais assise à cette table pour prendre un café mais en y repensant il y avait plein de tables libres… mon subconscient me joue des tours maintenant, je m’étais mise dans cette galère toute seule, j’aurai pu passer ma route, pas gronder ce chien qui faisait ce qu’il voulait, j’aurai pu aller embaucher à mon travail sans rien demander mais non, mon corps avait trouvé ça drôle d’aller voir l’homme charmant qui m’invitait maintenant….

Je pourrai l’envoyer bouler mais ce matin, je n’en avais pas la force, je devais assumer le fait que je me suis assise ici et continuer cette discussion dont je ne sais pas même pas où ça me mènera. Je me présenterai néanmoins d’un ton las.

- Haru Nobunaga et je tenais à vous dire que je payerai ma part, je ne pourrai accepter qu’un inconnu m’invite comme ça à déjeuner. Partageons donc notre matinée ensemble déjà si vous le voulez bien.

Le serveur arrivait à ce moment-là pour prendre nos commandes. Je prends un thé noir avec une viennoiserie et laisse l’homme en face de moi choisir pour ensuite le serveur part nous préparer notre commande.

- Et vous, vous êtes ? Vous êtes souvent ici de bon matin à donner de l’attention à toutes les animaux abandonnés du coin ?

L’homme à la longue chevelure blanche semblait m’analyser et de décrypter le sens caché de mes phrases, il ne se débinait pas en tout cas en me dévoilant mon impolitesse au final. Je me suis assise ici sans demander aucune autorisation de sa part et je lui montre une pâle image de moi-même.

- Vu de cette manière effectivement, j’ai été impolie et je m’en excuse… Si je n’ai accepté ce café en prime abord, c’est que je ne veux pas devoir quelque chose à un total inconnu.

Le petit chien essayait de grappiller du terrain, je n’osais plus lui lancer de regard noir ou quelconque remarque, il avait pris l’homme en affection et celui-ci lui donnait toutes les attentions qu’il quémendait. Je perçus aussi dans son discours un pointe de reproche, il respectait les faibles, est-ce que je ne le faisais pas ? Il considère ce chien comme faible ? Pour moi, c’était une catégorie à part, la veuve, l’orphelin sont les “ faibles “ de notre société, enfin c’est un fait que tout le monde semble dire mais un chien… c’est juste un être avec une certaine sensibilité c’est sûr, mais de là à dire faible !

- Je ne prends pas tant de plaisir que ça, c’est juste que je le trouve sur mon chemin trop souvent ces derniers jours. Il demande des choses que je ne sais pas faire ou je ne sais plus faire pour être exact, ce chien m'exaspère peut-être je devrais consacrer plus de temps, même si je ne vois pas en quoi ça changerait pour lui, nous sommes des milliers dans Entre-Monde…

Qu’est-ce que c’est une personne qui ne s’occupe pas de lui sur tant d’autres ? En quoi mes choix sont si décisifs, je suis une simple habitante qui peut-être s’est défoulé un peu trop sur ce pauvre animal mais je ne l’ai pas maltraité, juste fait peur, c’est lui qui est fou d’aller vers moi après ces plusieurs avertissements !

- Sinon enchantée Or, je vais tâcher d’être de nature un peu plus agréable même si ce n’est pas dans mes habitudes… Je pense que chacun ce matin, change un peu ces routines.

Je ne supportais pas de partir sur un mauvais pied avec une personne surtout qu’elle n’avait rien demandé au début, il s’est juste trouvé au mauvais moment au mauvais endroit. Ce chien avait le don de me sortir de mes gonds. Je continuais à regarder l’animal, la bave dégoulinant partout, c’était… rebutant, je détourne aussitôt le regard pour me concentrer à Or, c’était un joli prénom en y pensant, le métal le plus précieux, le plus convoité dans de nombreux monde, c’était le plus pur. L’or c’est les trésors des pirates, les statues d’hommes célèbres qui ornent les palais car posséder de l’or est quelque chose de rare. On lui avait donc donner un prénom singulier et il fallait pouvoir le porter.

- Puis-je vous posez une question ?

J’attendis l’affirmative avant de continuer.

- Pourquoi vos parents ont choisi le prénom Or, c’est plutôt inaccoutumé, enfin du moins dans mon monde…

Or dégustait son café avec grâce, observer cet homme avec autant était un jeu quelque peu déroutant pour ma part, je ne connaissais peu d’hommes de son acabit, la plupart de mon entourage était des guerriers et ne connaissait pas autant les bonnes manières mais Or était de loin bien différent, posé, calme, il était à l’écoute du désir de l’autre malgré mon comportement quelque peu déplacé au début de notre conversation. Je me demandais quel métier il pouvait faire avec des compétences pareilles mais on n’était pas encore à ce stade de proximité pour poser une question de ce genre enfin en y repensant, lui demander pourquoi on l'appelle Or était en soi une question très personnelle, il fit l’effort néanmoins d’y répondre.

La réponse était simple, il ne le savait pas précisément ou du moins il n’a jamais voulu en savoir plus a en y croire mais à ma question, il rebondit pour me demander pourquoi je m'appelais Haru et c’était une longue histoire… Buvant une dernière gorgée de mon chocolat, j’allais raconter à un parfait inconnu une partie de ma vie, exercice dont je n’avais point l’habitude mais j’avais promis de faire un effort pour être agréable, en tant normal, je l’aurai envoyé bouler ou pire, je ne me serai jamais assise à cette table pour prendre un petit déjeuner avec un bel homme comme lui. Posant délicatement ma tasse, je le regarde droit dans les yeux et commence la longue histoire de ma vie… elle était longue pour moi du moins…

- Je suis née en plein mois de décembre lors d’un hiver particulièrement vigoureux, la neige avait sévi cette année-là, par endroit, il y avait plus d’un mètre de neige, l’accouchement a été très difficile pour ma mère et elle a été heureuse de voir qu’elle ait eu une petite fille alors que le médecin lui avait annoncé quelques semaines plus tôt que ça allait être encore un garçon au désespoir de mes parents. Haru, dans mon monde signifie printemps, le printemps chez moi, représente le renouveau, la floraison des fleurs, la joie. Ma naissance a été tout ça pour mes parents et n’ont pas arrêté de me le répéter toute mon enfance. Il faut l’avouer avoir un prénom si fleuri pour une guerrière comme moi n’a pas toujours été facile malgré mon statut d’officier mais on s’y fait et je serai toujours fière de porter un nom comme celui-là et ne le changerai pour rien au monde.

Jouant maintenant avec ma cuillère, je commence alors à rêvasser, me souvenant lors de mes dix ans quand mon frère aîné m’avait un tas de fleur de cerisiers au début du printemps, je l’avais beau lui répéter mille fois que je n’étais pas née en avril mais en décembre, chaque année ensuite il m’offrait toujours ses fleurs pour honorer mon prénom disait-il, enfin maintenant plus personne ne m’avait offert de fleurs et en y pensant j’avais beau dire que je détestais ça, j’avais fini par apprécier et les converser chez moi en les déposant dans un vase.

Je me concentre de nouveau vers mon compagnon du matin.

- Si on me donnait le choix de changer de prénom, je ne sais pas comment je pourrai m’appeler… et vous si on vous donne la possibilité vous le feriez ?