Un androïde dans la ville [libre]

Bande de péquenots... Tous ces regards qui mâtent ma carrosserie, ça me donne la gerbe. Dommage que j'ai rien dans l'estomac, et pas d'estomac, et que je sais pas ce qu'est que l'envie de vomir. Bref, c'est juste une expression. Revenons à nos vaches qui me mâtent mieux qu'un train qui passe. Ça grouille de partout, j'aime pas forcément Tern, y a vraiment beaucoup de monde. Conséquence directe des bâtiments sur-élevés, de l'entassement. Donc, ici ça grouille mieux que dans Ordae ou Ciel, c'est invraisemblablement plus peuplé que ces deux quartiers réunis. Et le pire c'est l'heure de pointe.
Il est 18h, ils sortent tous du boulot, et bon, j'ai pas à me plaindre je dépasse la moitié de ce monde d'une tête et comme je suis très large et tout en métal -tout neuf, le garagiste a tout nettoyé, adieu les grains de sables dans le slip- un ovale de sécurité s'est formé autour de moi. Même le cadre moyen m'évite instinctivement. Je tente un pas sur le côté, la foule s'écarte d'un pas de côté aussi. C'est magique !

Je pensais sincèrement y a trois secondes que le pire c'est le grouillement incessant dans les rues principales. Mais non... Le pire ce sont eux. Mon oeil analyse une bande de morveux, âgés de 10 à 14 ans environ, tee-shirt débraillés, rires vissés sur les lèvres, écouteurs aux oreilles, portables en main. Ces mômes de la génération des geeks me voient de loin et courent droit vers moi. Et merde, je suis encerclé.

-Han monsieur c'est vrai que t'es pas humain ?
-Quoi ça se voit pas ?

Je souris, il voit mes dents blanches en haut et métalliques en bas.

-Ouah !

Ils sursautent en coeur. L'un d'entre eux appuit sur ma carrosserie au niveau du bras. Je tourne les yeux vers lui.

-C'est en métal, c'est pas douloureux et je sens quand tu me touches.

Mon regard noir le laisse de marbre. Les parents savent plus éduquer les gosses de nos jours !

-Hey, m'sieur, t'étais humain avant ?
-Non, j'ai été créé de toute pièce.

Ils captent même pas mon jeu de mots, quelle bande d'incultes.

-Ca veut dire que t'as pas de coeur et que t'as jamais mangé de chocolat ?
-J'ai un tas de trucs équivalent à un coeur et non je mange pas de chocolat, mon garagiste me nourrit à l'énergie atomique et à l'huile pour mes freins.

Ça les fait se marrer. Ils sont vachement plus mignons quand ils rient.

-T'es comme Iron man ? T'as des propulseurs dans les mains, et tu peux voler, hé !
-Iron man ? Je sais pas c'est qui ce type je l'ai pas dans mes fichiers.

Ils pouffent de rire. L'un d'entre eux se marre et s'étouffe à moitié quand il me dit que je parle comme un ordinateur. Sérieux, ils ont peut-être pas remarqué que je suis un ordinateur à taille humaine ? Sauf que moi je fais aussi le café : y a pas mieux comme assistant.
Mon regard balaye la foule qui passe autour, je cherche quelqu'un qui me sauverait de ces morveux. Ayez pitié d'un androïde dans la ville !

Je glissai de l'ombre d'un immeuble à une autre. Tantôt je traversai la rue dans l'ombre d'un passant, tantôt grâce à la fine ombre d'un fil électrique. Il y avait toutes sortes de ces créatures qui me fascinaient, j'étais en extase. Aerith, une petite fée qui m'accompagne toujours me sortit de ma fascination en me rappelant que je devais suivre les ombres mouvantes pour ne pas périr sous les rayons, quoique faibles, du soleil couchant.

Hop, dans une ruelle sombre, je sortis de l'ombre dans une forme humaine à faire peur au plus simplet des humains. Aerith m'observa étrangement.

-Ombre ?!
-Hm ?
-T'es humaine en fait ?
-Non.
-Oh...

Je levai les yeux au ciel, elle m'énervait cette petite fée à la voix criarde, à chaque fois elle posait des questions sur ma nature, car, étant silencieuse, je ne lui en dévoilais guère. Attendez, si on savait d'où je venais, je serais dans de beaux draps !
Hop, traversée la ruelle. Voilà plus de trente années que je glissai dans ce monde, j'en avais appris les coutumes, les informations nécessaires sur les Miroirs et les mondes vers lesquels ils dirigeaient, mais j'avais aussi appris à tenir ma langue dans ces endroits qu'on appelle ville, où les murs ont des oreilles et où les chenapans que je m'amuse à effrayer galopent à foison.
Tiens, d'ailleurs en voilà tout un groupe qui semble s'intéresser de près à ce grand être. Leurs yeux trahissaient la curiosité et le sans-gène. Pauvre être.
Mais, il faisait partie de ceux que je ne devais côtoyer, même si j'avais réussi à pénétrer ce monde sans jamais m'être dévoilée au grand jour, j'évitais tout contact pour ne pas ma trahir. Il y avait juste Aerith et sa langue déliée qui me renseignait sur ce que je voulais savoir, sans se poser de questions.

Je m'avançai donc sous l'ombre d'un grand immeuble, où je pu garder ma forme humaine, arrivée non loin de l'androïde et de la bande de morveux admiratifs, je scrutai l'ombre du grand être et je la changeai, tout d'abord, elle vibra, forma des vagues et l'ombre d'un loup-garou apparut derrière la machine à silhouette humaine. Appuyée sur mes deux jambes, les bras ballants pour garder un certain équilibre qui ne tenait d'aucune logique à part la mienne, je m'avançai appuyée sur la pointe des pieds, mais les genoux frôlant le sol, m'aidant de mes mains, Aerith voletait autour de moi, veillant à ne pas m'éclairer. Puis, arrivée au bout de l'ombre, je plongeai à l'intérieur et grâce aux ombres des enfants, je parvins jusque dans celle de l'androïde. J'attendis patiemment que les enfants remarquent la forme insolite de l'être, pour m'assurer qu'ils la remarquent, je fis claquer les crocs de l'ombre -bien sûr aucun bruit n'en sorti, mais le mouvement était là-, puis j'arquais le dos de l'ombre et lui fis tendre un bras griffu en direction des enfants. Dommage que les ombres ne soient pas en trois dimensions, ce serait encore plus drôle ! Mais, c'était déjà si bien que l'androïde soit grand, son ombre me permettait de telles choses ! Autant qu'une ombre d'une telle taille me le permettait, bien sûr, il manquait des éléments, d'une ombre on ne voit que le contour, mais il y a tellement de possibilités.

Un enfant cria et tendit le doigt vers l'ombre, la panique se lisait dans ses yeux. Il tapa l'épaule d'un de ses amis en lui montrant. Lui aussi sursauta, tandis que j'animais l'ombre, alors que la boîte de conserve restait immobile.
Les gamins se mirent à reculer, bégayant, effrayés par l'ombre. Un téméraire dit que c'était le robot qui parvenait à créer des formes avec sa propre ombre, mais je changeai la forme à nouveau, en créant la forme d'une tête de loup, aux yeux creux, qu'on puisse deviner au mieux l'identité de l'animal représenté, au maximum que me permettait l'ombre. Je fis passer la langue de l'ombre sur ses crocs.
L'enfant rit, d'un rire légèrement forcé et recula déstabilisé par le changement de forme.

Aerith s'approcha du groupe d'enfants, par sa petite taille, elle se glissa entre eux, sans qu'ils la virent. Elle se roula en boule, et en s'étirant, elle cria un grand "BOUH".
Les enfants firent tous un bond de côté et s'empressèrent de partir :

-Bon, bah, au... au... revoir... Hein !

Aerith était pliée en deux, elle riait, riait aux éclats, heureuse de son coup final. Je vous paries que demain, elle s'en vantera encore...

Personne n'apprend jamais aux enfants à tenir leur langue, sans quoi, on les entends piailler à longueur de journée, à se raconter tout et n'importe quoi. Le n'importe quoi ayant une grande part du temps consacré à la parole et j'en faisais les frais... Véritable moulin à paroles les mômes furent d'un coup moins bruyant. J'en était fou de joie une faible seconde avant de froncer les sourcils et le nez.
Si moi et mes dents métalliques je ne les avais pas fait taire, qui en était responsable... Les gosses, effrayés prirent littéralement la fuite allons bon, je me retourne et que vois-je, mon ombre (bah oui le soleil ne change pas de place avec moi, alors cette fois j'étais face à elle et non de dos)... Bordel ! Que cette ombre est bizarre !

-Le garagiste à menti, il m'avait dit qu'il m'avait juste nettoyé les circuits... Je vais devoir engager un mécanicien à ce rythme.

Une petite chose lumineuse riait aux éclats et ce n'est qu'à cet instant que je compris qu'on venait de me sauver de la horde de morveux. Je ne parlerais pas à mon ombre : hors de question, je suis un androïde et techniquement les androïdes ne peuvent pas devenir barge, par contre, y en a qui deviennent associable à force d'user leurs circuits... ah ça... Les effets du temps, même nous on y peut rien... La plupart de temps ça signifie bon pour la casse, mais pas dans l'Entre-Monde. Ici, les gens aiment bien voir des robots devenir acariâtre et moi, j'trouve que c'est la honte.
Bref, revenons à nos moutons. La petit fée s'amuse bien, je tends un doigts. Je lui aurais bien dit "serre m'en cinq" mais sa petite main fait pâle figure à côté de mes paluches de maçon (je suis design... noir métallisé, y parait que c'est classe... ).

-Merci. Je te dois la toutou aussi ?

-Le garagiste à menti, il m'avait dit qu'il m'avait
juste nettoyé les circuits... Je vais devoir engager un mécanicien à ce
rythme.

Aerith continuait de rire, moi je restais cachée dans l'ombre de l'androïde, celui-ci semblait ne pas avoir remarqué la présence dans sa zone de ténèbres. Il croyait même que c'était Aerith qui l'avait sauvé !
Il lui tendit un doigt, auquel elle donna un léger coup de poing, j'avais vu certains êtres faire de même, poing contre poing, une sorte de salut, je crois. Elle pouffa à nouveau de rire à la question de l'être humanoïde:

-Merci. Je te dois le toutou aussi ?
-Ah, non, ça c'est pas de moi !

Elle regarda par-dessus son l'épaule de son interlocuteur, les yeux rivés sur l'ombre, à qui elle fit un clin d'œil. Puis, elle comprit et plaqua ses mains sur sa bouche. Cette créature casse-pied était certes amusante avec ses manières d'enfant assez mignonnes. Elle rit à nouveau, puis, tournoya dans les airs, ensuite, elle vint se rapprocher de la tête de l'androïde, puis lui attrapa le nez et lui fit tourner la tête, vers derrière lui.
Je pris cela pour un signal et je m'extirpai de son ombre, à la manière de quelqu'un qui sort de l'eau. Malheureusement, l'ombre n'étant pas assez grande, j'avais une forme un peu jeune, d'une jeune fille d'une quinzaine d'années, je me regardais et soupirais, toutes mes proportions étaient réduites, à part la longueur des cheveux, non, ceux-là étaient toujours aussi longs et traînaient par terre.
Aerith s'était assise sur l'épaule de la machine à apparence humaine et pointa son doigt sur moi, quoique légèrement surprise de ma forme.

-C'est elle qui t'as aidé. Moi j'ai fais que 'Bouh'.

Je levai mon visage vers lui, mince, ma taille réduite, j'étais beaucoup plus petite que lui, de plus, vu comment je me tenais, je perdais quelques centimètres. Mais mon aspect sombre, garantissait l'effet que cela faisait à chaque fois que l'on me voyait, bon, je pourrais garder cette forme tant qu'il ne bougeait pas, car si le soleil venait à me frapper, j'aurais les yeux brûlés et je devrais me réfugier dans l'ombre.

-Monsieur le robot, voilà Ombre !
-Bonsoir...

Cette petite fée avait des manières exécrable, on a pas idée d'attraper le nez d'un androïde ! J'en finissais pas de répéter à mes circuits que ce n'était pas un danger, sans compter que les nano-robots qui composaient ma peau voulaient fuir à toutes jambes... Après tout, ils sont mon instinct de survie.
Je fus d'accord avec le petit être "voici ombre"... On n'aurait pu la qualifier autrement sans louper l'évidence. Il me fallut un instant avant de comprendre que c'était un nom et non une simple dénomination.

-Enchanté.

Comme un photographe qui se tiens dos au soleil, je la dévisageais... Dire "cheese" ne me paraissait pas du meilleur effet. Je retins cette pulsion -ceux qui m'ont fabriqué avaient un humour corrosif, quand ils me l'ont programmé c'était comme s'ils me marquait d'une malédiction plus efficace qu'un code barre.

-Ombre. C'est pas très original.

Elle au moins ne fliperait pas à la vue de ma carrosserie intérieur alors je souris de toutes mes dents.

-Mais merci.

Elle était aussi causante que la clef anglaise du garagiste, je ne lui demanderai pas si elle est aussi attachante... Mais, je pouvais aussi demander son nom à la petite fée.

-Appelez-moi Septembre. Tu as un nom ?

-Enchanté.
Ombre. C'est pas très original.

Haha... Dis donc, la boite de conserve a de l'humour ! Hey, mais tous allaient me la sortir celle-là ? Tss, on est pas responsable de son nom, mince !

-Mais merci.

Ha, bah voilà.
Aerith avait l'air de se plaire sur son perchoir et elle balançai sa tête de droite à gauche, en faisant des ronds avec ses pieds. Elle s'arrêta et regarda l'androïde.

-Appelez-moi Septembre. Tu as un nom ?
-Hihi, moi c'est Aerith !

La petite fée semblait s'amuser, moi, je mourrais d'envie de toucher cet être, qui n'existait pas dans ma contrée d'origine. Je me redressais, tendis mes deux jambes à la peau pâles et aux côtés tatoués de bandes noires, puis j'approchais une main timide de la carrosserie. Eh oui ! J'étais aussi intriguée que ces gamins. Je ne valais pas mieux. Tant pis. Moi, j'avais pas besoin de poser toutes les questions qu'ils avaient dû lui poser. Moi je voulais juste toucher. Même si c'était interdit...

Alors que j'avançais mon bras, tenir debout relevant de l'extrême pour moi, je perdis l'équilibre, oh, pas violemment, juste que mon haut du corps basculait doucement vers le robot. Au moment où j'allais le toucher, je perdis réellement l'équilibre et... lui tombai dessus. J'écarquillais mes yeux sans pupille et je reculai vers le sol de plus en plus ombragé par le soleil qui entamait sa descente.
Aerith qui s'était arrêtée de rire, s'esclaffa à nouveau, à en tomber de l'épaule de l'androïde.
Je me remis dans une position "primitive" et j'évitais de croiser le regard du robot... Oui, un vague sentiment de honte me traversait.

L'ombre Ombre -comme c'est redondant- n'était pas vraiment faite pour tenir debout, en quelque sorte elle me paraissait faite pour glisser à la surface des choses plutôt qu'à s'en détacher. Une ombre quoi. J'eus un grand sourire quand elle trébucha.

-La curiosité est un vilain défaut...

Je lui tendis la main. Si elle voulait toucher du métal et voir si j'étais vivant là dessous qu'elle en profite. De toute manière je n'étais pas chaud et vivant, j'étais une machine. Quand une humaine frôle mon blindage et ne ressent que le frottement froid de l'air qui glisse sur les plaques de métal, son regard est triste, compatissant. Je n'avais pas de coeur qui bat et mes yeux n'avait pas la profondeur de celui des êtres humains -quand on est constitué de diodes et de circuits imprimés... Faut pas s'étonner si on a le sex appeal d'une pomme. Et puis, il y a ceux qui veulent juste voir. Ils se disent que c'est pas possible, ça peut pas être tout dur. Bah si et je ne fais pas de musculation moi... C'est naturellement musclé et ma carrosserie n'est pas souple, loin de là. Je suis aussi rigide qu'un balais.

-C'est du métal, c'est froid, dur, et tu ne sentiras pas l'énergie atomique qui me fait fonctionner rien qu'en le touchant de l'extérieur, pour ça il faudrait être dessous.

Les deux personnages offraient un contraste fulgurant. L'une était aussi bavarde qu'une carpe et l'autre s'esclaffait à tout va. Quelques regards de passant s'était tourné vers nous. Évidemment, ils ne s'inquiétaient pas vraiment de notre présence, certains étaient curieux mais partaient avant que je ne leur demande avec mon charme naturelle (et grinçant). Une ombre, c'était pas courant ; une ombre avec un androïde en plein milieu de Tern, c'était encore moins courant.

-T'as pas de mal à te mouvoir dans la lumière ?

Après avoir vu ma chute déplorable, il sourit... Mais me tendit une main, comme s'il m'autorisait à le toucher. Je soulevais un sourcil étonné.

-C'est du métal, c'est froid, dur, et tu ne sentiras pas l'énergie atomique qui me fait fonctionner rien qu'en le touchant de l'extérieur, pour ça il faudrait être dessous.

Métal, y'en a pas chez moi, sa consistance est telle que cela m'intriguait, non, je n'étais pas comme ces humains, j'étais pire. Puisque je ne connaissais rien, rien de ce côté du monde, rien de ce que je connaissais n'étais ici, comme si, comme si ces montagnes séparaient deux mondes d'une différence presque effrayante.

-T'as pas de mal à te mouvoir dans la lumière ?
-Je ne peux pas me mouvoir dans la lumière, je glisse d'ombre à ombre, sans me risquer dans les zones lumineuses.
-Sinon, elle meurt !

L'intervention de trop d'Aerith... Selon moi, il ne fallait pas le dire, il ne fallait pas dire ça, pas dire que je risquais de mourir au soleil, en pleine lumière, mais après tout, je suis une ombre... N'importe qui qui posséderait un cerveau et/ou la capacité de réfléchir aurait trouvé. Mais quand même.

Le soleil descendait au fur et à mesure que nous parlions, les ombres s'allongeaient, prenaient de l'ampleur et moi, moi je grandissais en même temps que l'ombre de Septembre. À présent, j'avais pris un, voire deux ans de plus, physiquement. Allez, on restait plus longtemps et je serais au paradis, en pleine nuit.
Je me redressais lentement, de façon à lui faire face sans perdre l'équilibre, puis, sans regarder, je fis bouger les ombres aux alentours afin de me former un chemin vers l'ombre gigantesque d'un immeuble.
Là, je me tournais dans la direction de cet immeuble que j'avais choisi, puis je plongeai dans l'ombre et glissai jusque celle-là, qui était si grande, oh, elle n'était pas très loin, juste à deux mètres, tout au plus. Raison de plus pour faire bouger le tas de ferraille.
Aerith, elle tira une mèche du robot et de son doigt indiqua à Septembre que c'était mieux là où j'avais glissé, plus d'ombre.

J'avais vu juste : un ombre pure et dure... Enfin, pure si on veut, dure beaucoup moins. Je pouvais sentir mes cheveux me démanger quand la petite fée m'indiqua à sa façon de suivre Ombre à l'ombre...
Durant toutes ces années je n'avais pas pris l'habitude qu'on touche mon visage et mes cheveux. Pour les autres ce n'était que peau et tifs, pour moi c'était un moyen de survie. Et quand il est difficile de prouver à vos circuits qu'il n'y a pas de danger et qu'ils peuvent rester en place, il est encore plus difficile d'oublier le contact quand personne n'ose vous toucher... Ah bien sûr y avait mon carrosse ! Tout en métal, de quoi vous faire des grillades pendant des siècles sous le capot et j'avais même fais changer les pneus récemment -sans oublier le passage obligatoire au nettoyage. Bref, j'étais prêt pour la vente, sauf qu'aucun concessionnaire ne veut de moi.

Je fis quelques pas nonchalant pour la rejoindre, et je remarquais que plus l'ombre était grande et plus elle pouvait l'être physiquement. Si bien sûr, elle a un corps. Je ne suis pas porté sur les questions méta-physiques mais ça... C'était assez évident pour que ça me demande un minimum d'attention. Toujours un peu plus que le scintillement de la fée. Tant qu'elle me colle pas de la poussière de fée sur le métal tout ira bien : non mais sérieux, si la carrosserie est mât c'est pas pour la faire scintiller avec du dorée, ma tenue de soirée je la vois quand même moins rutilante. On va me prendre pour un travelo ensuite... (Même les robots sont des machos d'nos jours, mais où va le monde !).

-ça n'aurait pas été plus facile d'aller vivre dans les fumeroles ?

*mêles-toi de tes oignons Sept...*

-je veux dire, la surface est pas vraiment recommander 16h par jour -en moyenne- pour une ombre mais les fumeroles, il y a plein de galeries souterraines qui n'attendent que toi.

-Ça n'aurait pas été plus facile d'aller vivre dans les fumeroles ? Je veux dire, la surface est pas vraiment recommander 16h par jour -en moyenne- pour une ombre mais les fumeroles, il y a plein de galeries souterraines qui n'attendent que toi.

La boîte de conserve veut se débarrasser de moi ? Alors on est pas près de la lâcher celui-là ! Aerith semble s'y être attachée en plus, raison de plus pour ne pas le lâcher, si je pouvais me débarrasser d'elle ce serait avec grand plaisir, ce n'est pas que je ne l'aimais pas, mais elle était trop bruyante et lumineuse pour moi, aussi mignonne que fut cette créature.

-Je vais de temps en temps dans les fumeroles, mais c'est pas intéressant. Je préfères côtoyer les êtres de cette partie de la ville.

-Ombre elle aime la beauté de la lumière c'est elle qui l'a dit \o/

Je levai mes yeux au ciel, Aerith était pro dans le genre 'je lâche tout sur toi', mais elle avait raison, chez moi, il faisait noir tout le temps, notre nyctalopie ne nécessitait pas de lumière et nous nous étions développés ainsi, alors je trouvais cette lumière particulièrement belle. Elle qui changeait de couleur au cours de la journée, j'aimais regarder les teintes du ciel à ces heures où le soleil les peint en rose-orangé. Des fumerolles on ne voyait pas cela, de plus, la plupart des créatures qui y vivent se cachent dès qu'elles sentent que l'on approche, même moi dans mon ombre j'avais du mal à les approcher. Bien sûr, il y avait toutes sortes de créatures, mais celles qui se montraient était toujours les mêmes, je m'en étais lassée.

-Dis Septembre, toi qu'es un robot, tu fais quoi ? Je veux dire tes fonctions, c'est quoi ?

Aerith posait les questions que je voulais poser sans oser les poser, pour ne pas passer pour une curieuse créature curieuse... Il fallait que je sache tout de même. Je suis curieuse, mais je savais me taire quand il le fallait, moi. Par contre, Aerith, bavarde comme elle est...

-Quand il fera nuit, on ira marcher, si tu veux, j'aime pas rester immobile. Mais pour le moment, ça va être dur, il y a encore trop de lumière.

Je me redressai et appuyai mon dos contre un mur, mes cheveux glissèrent et dévoilèrent ma poitrine habillée seulement de deux bandes verticales. D'un geste pudique devant un modèle masculin, je ramenai mes cheveux noirs d'encre devant mon corps et mon visage, puis je regardai l'androïde se tenant debout devant moi.

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