Kaïl contre l'épicerie ?

A l'Epicerie, j'étais connu comme le loup blanc. Mais c'est bizarre de le dire comme ça. En réalité, je suis connu dans toute la capitale comme terreur n°1. La liste énonce ainsi trois noms : Moi, Nij'aku et Pwyll. Je ne sais pas qui est ce Pwyll mais il parait qu'il n'est pas très aimé... Nij'aku a du talent mais il n'a pas mon charme. Non, la perfection du sale gosse intersidérale, ce ne peut être que moi.
Sauf que le sale môme, il a une idée en tête qui ferait passer Gozilla pour un bisounours.

Primo, je connais ma marquise, elle doit déjà être en train d'accourir au Pic d'Arcturus pour se faire conter des histoires avant d'aller dormir dans un lit douillet. Le tout avec Higor dans les bras et Titou sur l'épaule. Donc, si je veux lui éviter les soucis de santé qu'on peut avoir quand on dort peu ou pas assez. Me voilà à fureter dans l'épicerie tout en glissant une brosse à dent téléscopique dans une poche et un réveil matin rose dans un repli de mon pull trop grand, trop large, bref trop de 'j'ai rajeunis y a pas longtemps'.

Puis je me dirigeais vers le comptoir mine de rien et en sifflotant !

-Y a quelqu'un ici ? Faut vous appelez avec des formules magiques : Client ! Argent ! Pims !

Autant dire que le ou la vendeuse pouvait être à moins d'un mètre ça ne m'aurait pas dérangé de hurler à tue-tête juste pour le plaisir de l'embarrasser... J'adore être affreux.

-Moi et mes pims on attend !

Ma journée était longue et monotone, les clients qui passaient la porte du bout de leurs nez étaient tous les mêmes, pressés, ne me parlant que très peu, comme si je n'étais rien pour eux, qu'une simple vendeuse, peut-être qu'il n'avait pas tort après tout ? Mais il fallait quelque chose pour me sortir de cette monotonie, un évènement déclencheur comme on dit, qui me permettrait de vivre un peu plus cette journée, et de finir sur une touche heureuse.

Mais avant même que je n'ai pu bouger mon petit doigt pour réaliser mes rêves, la clochette sonna, et me voilà replongée dans cette routine infernale. Toujours assise derrière mon comptoir, j'attendais que le client se dirige vers moi pour demander des informations, ou alors, il allait faire ses achats tout seul et venir seulement pour me payer. La porte se ferma dans un léger bruit sourd et le silence revint, pour très peu de temps, puisque ce cher client prit la parole sans même que je le vois.

Dès ses premiers mots, je compris directement que j'allais avoir à faire avec quelqu'un de très sûr de lui, qui n'avait peur de rien et que le respect était une notion complètement abstraite et inconnue pour lui, l'échange allait être amusant, voilà qui allait briser la monotonie de cette longue journée. Mais même si je voulais m'amuser, il fallait toujours que je rentre dans la peau de la vendeuse, en restant polie, qui que ce soit en face, même la pire des ordures.

Bonjour Monsieur, en quoi puis-je vous être utile ?

Je jure qu'elle va craquer. J'estime son taux de résistance à trois minutes.

- T'es sûre d'être la vendeuse ? Elle est où ta maman ? Tu ne devrais pas être à la crèche ?

Ceci dit par un sale môme de 18 ans qui en paraît 13. La vraie vlasse. Vraie de vraie. Mes bonnes vieilles habitudes me reviennent vite. Je l'ai à peine regarder en parlant et d'une main sournoise j'inspectais quelques produits sur le comptoir que je reposais aussitôt de la manière la plus périlleuse qui soit. Objets en métal aussi près que possible du bord afin de rencontrer prochainement les orteils d'un client pressé.

-Bon... Je vais parler lentement, hein. Parce qu'en plus de ne pas être très bien faite par la nature t'as aussi l'air d'avoir été privée de cerveau.

Sourire espiègle, clin d'oeil sournois. Je decompte... Encore deux minutes pour la faire craquer.
Il faut que je respecte mes délais. C'est primordial que je m'entraîne régulièrement à être infecte. Pour rattraper les jours où Lilou m'oblige à être gentil.
Ah ! Gentil... Si on m'avait dit que je tomberai si bas un jour. Je me serais entraîné plus fort encore.

-je veuuuuux... Deux chats-koala. Tu sais, ces machins minuscules pour mieux dormir.

Spoiler:

Parler de ma mère comme ça, sans aucune pitié, la moindre, il n'avait vraiment aucune gêne. Il ne savait surtout pas ce qui lui était arrivé, et il se moquait de moi, comme si j'allais encore à la crèche, je savais déjà que ce dialogue ne mènerait à rien, mais en plus, je ne tiendrais pas jusqu'à la fin, mon moral ne supportera pas tout ça. Mais quand il surenchéri sur le fait que je n'avais pas été bien faite physiquement et mentalement, je reçus comme un coup de marteau, comme si c'était la faute de mes parents. Et puis juste après, il sourit comme si rien ne s'était passé, comme si c'était un enfant innocent, et il prit sa commande de la même façon, si je pouvais avoir la force de répondre, mais il avait raison après tout, mon moral ne tenait même pas deux minutes face à ce sale gosse.

Va te ... servir tout seul

Tout en parlant, enfin en essayant de parler, puisque j'avais bafoué sur les mots, mal-prononcés, et que les larmes jaillirent de mes yeux à une vitesse inouïe, je m'enfuis vers l'arrière boutique en cachant mon visage dans mes mains, je ne voulais plus rester un seul instant avec ce monstre sans cœur, il payera tout seul, sinon j'irais appeler un Sanctuari, je ne ressortirais pas avant qu'il soit parti, sinon, mon cœur lâcherai au moindre regard, et je me retrouverais étalée sur le sol, le pire, serait qu'il ne m'aiderait pas mais qu'il se moquerait, enfin c'est ce que je pense.

Mais alors que j'étais dans l'arrière boutique, je me pris un étalage de plein fouet, et je me retrouva étalée par terre, par ma seule faute, et je continuais à pleurer, allongée sur le sol, attendant son départ signant la fin de mon supplice.

-Quoi ? Hey !

Elle s'enfuit si vite que j'étais presque déçu d'avoir aussi bien réussi mon sale tour.
Un haussement d'épaules plus tard, j'allais chercher mes deux mini-koalas. J'étais bien décidé à partir sans demander mon reste, piochant allègrement dans les étalages. Les poches pleines je me dirigeais vers la sortie.
Sauf qu'un sanctuari, bizarrement, était présent dans la boutique. Il avait attendu sagement que j'approche de la porte où il était fermement posté. Les mains sur les hanches, il me fit les gros yeux en tapotant son insigne.

Au final, il m'avait délesté des pims des deux Karamel et j'avais été bon pour une fouille complète visant à restituer à la vendeuse tout les trésors chipés dans la boutique. Il me laissa partir même lorsque je lui tirais la langue et le traita de Gorce mal léché...