Une innocente livraison

The Habits Aside the Demon

Il était huit heures du matin. Je commençais mon travail comme tous les matins à l'Hemisphere Coffee de la ville de Northrives par la gestion des stocks. Il nous restait encore beaucoup d’ingrédients et de thés. Tout allait bien et l’ouverture était prévue pour dix heures, comme tous les matins.

Nous étions environs quatre ou cinq à travailler dans le café ce jour-là. Il y avait moi, Alice, Espada et Rémy. On avait reçu une commande assez spéciale venant de la Bibliothèque où on devait livrer un set de thé et des biscuits secs. Chose assez peu commune, puisque la plupart du temps, on ne faisait que des livraisons dans les environs de Northrives. D’habitude, c’était Findley qui devait y aller mais …

- … Pardon ? Pourquoi je dois aller à la Tour du Savoir ? demanda Nouvan, énervé par l’absence de Findley.
- Bah … Tu sais, Findley et les machines … répondit Rémy, gêné.

Je n’ai pas voulu à en savoir plus. Je préparais mes affaires et partit en direction de la fameuse tour du quartier de Cerclon. Je venais assez souvent à cette tour, pour étudier, apprendre et récolter des nouvelles. C’est d’ailleurs ici que j’avais pu trouver mon travail de gérant à Hemisphere Coffee.

Je me sentais un peu mal à chaque fois que je passe à Cerclon : j’avais peur que quelqu’un de ce quartier se mettre à pirater mon modern-artefact. C’était le seul souvenir que j’ai gardé de mon monde. D’ailleurs, je venais une fois par semaine à la tour pour récolter un maximum d’information, mais je reconnais qu’en quinze ans, mes recherches n’ont jamais vraiment portés leur fruits … Tout ce que j’ai pu faire, c’est récupérer cinq sorts de classe « Soutien » de mon application qui me permet d’utiliser la magie.

Après quelques temps, j’étais enfin arrivé à destination et j’entrais dans la tour, accompagné de mon gros sac qui contenait beaucoup de surprise. Une fois passé la porte d’entrée, je fixais le panneau des missions. A chaque fois que je le regardais, je pensais à ma vie, avant que je ne sois enfermé dans le monde des miroirs. Je m’étais posé devant le panneau, en espérant que cette fois-ci, quelqu’un voudrait bien l’aider à gagner un peu plus d’argent …

*J'ai vraiment envie de me refaire la main sur quelques monstres ... Mais avec mes pouvoirs actuels, il me sera trop difficile de réaliser des missions dangereuses ...*

Le travail, c'est du travail, on ne crache pas dessus. Ce serait indécent dans ma situation. Depuis mon établissement à Providence mon but dans la vie était de m'intégrer à ce drôle de monde.
Quoi de mieux qu'une réputation du gars qui fait plein de petits boulots sans se plaindre de la difficulté ? C'est grâce à ça que j'ai entendu parler de ce Nouvan. Il travaillait à son compte et il était facilement reconnaissable.

En l'apercevant ici, je saisi l'occasion d'aller lui parler. C'est ce qu'ils appellent : construire son réseau, à Tern.

Ces gens de l'Entre-Monde ont des idées bizarres. Des comportements bizarres. Qui plus est ils ont perdu la notion des réalités. Au point que j'en suis triste pour eux.
A ce stade, venir de loin et les intégrer est facile et sans risque.

-Nouvan ? Nouvan Sodak ?

J'approchais l'inconnu devant le panneau d'affichage d'un pas rapide. Mon éclat de voix avait fait relever la tête des quelques occupants du Hall de la bibliothèque.

Ils ne s'appellent pas tous Nouvan, tout de même ?

Arrivé près de l'intéressé, je cherchais en hâte un moyen d'expliquer que je le connaissais et pas lui.

-On s'est croisé dans ton café !

Facile.

Je lui tendis la main.

Le problème quand on gère un café ou un autre commerce, c’est qu’il est difficile de se souvenir des milles cinq cent quarante quatre clients qui passent dans l’année. Généralement, je passe dans le café pour aider mes employés à tenir le café, ou tout simplement écouter les rumeurs et les nouvelles.

Alors que j’étais en train de regarder le tableau des missions, je sortais mon vieux tarot de magie, maintenant inactif. Je commençais à mélanger un peu et je tirais les deux premières cartes du jeu. « The Aries » et « The Comrade ». La combinaison des deux cartes disait « Je suis là, et j’existe parmi mes camarades ». Je faisais souvent ce rituel avant de commencer un job et pour la première fois depuis quinze ans, j’étais tombé sur la carte du Camarade.

Je me disais « Je vais encore me faire des camarades éphémères ou cette fois ils vont pouvoir résister un peu plus ? ». J’étais sceptique.

*Hum ? … Quelqu’un … m’appelle ? …*

Je retournais ma tête et vit un homme d’âge moyen. Il avait l’air de vouloir commencer une relation entre professionnel, avec son faux sourire et son air illusoirement désintéressé. Ouai, ils étaient souvent comme ça déjà dans mon monde, et le fait que je sois un démon n’avait jamais vraiment arrangé les choses.

Je lui serrais quand même la main, par simple respect entre entités humanoïdes.

- Hoh ? … Désolé je ne m’en rappelle pas. Vous savez, mon café marche assez bien et puis avec tous les clients qui passent, pas trop de moyens de reconnaître tous les visages, répondis-je avec mon air de serveur professionnel et mon sourire façon coldgate.

Je sentais que ma prochaine aventure allait être longue et … marrante.

Tant mieux s'il ne se souvient pas de moi. Le contraire aurait été étonnant, puisque je l'ai observé quand j'en ai eu l'occasion mais je ne l'ai jamais vraiment approché.
Je me sens comme un espion dans cette grande ville.

Cela me rend euphorique de me cacher parmi eux.

-Pas de problème, je comprends.

Je devais lier tout ça à une bonne excuse. Quelque chose qui tienne la route.
Quelque chose qui tienne la route...
J'avais pris l'habitude de ne dire que des mensonges. Ici, c'est plus prudent. Un mécanisme de survie devenue une manie avec le temps passer de ce côté du monde.
Il faut dire que les gens sont biens crédules.

Donc, mentir.
Je jetais un oeil alentours. Cherchant mes mots pour continuer cette conversation.

-J'étais venu chercher du travail et je t'ai reconnu. Comme t'étais devant le panneau... Si t'as besoin d'un équipier, je n'ai pas constitué de groupe.

Bon ce n'est pas un vrai mensonge. C'était presque la vérité.
En fait, puisque j'avais entendu parler de lui par quelques langues déliées à Providence et ailleurs, je m'étais demandé s'il serait le genre de personne à connaitre pour s'aventurer en terrain inconnu sans attirer l'attention.

Si je voulais le savoir, je devais bien lui parler.

La vie parait simple dans l'Entre-Monde. Il y a toujours du travail pour ceux qui n'en trouvent pas. Le territoire est remplis des horreurs que les miroirs ont vomis sur nos terres pendant des millénaires.
Ces mêmes choses anormales que des chasseurs vont tailler en pièce pour de l'argent ou la gloire.

Y penser me secouait à l'intérieur.
Je me rends compte que si un jour nous retrouvions nos anciennes demeures, rien ne serait jamais comme les premiers des nôtres l'ont connu. On a dénaturer la terre qui nous a vu naitre. Cela me rend triste et amer.

Mon visage avait changé d'expression. Pour le dissimuler je commençais à parcourir le panneau.

-Y a du travail pour tous les goûts en ce moment.

Il en faut quand même dans les bras pour la plupart d'entre-elles... Si je connaissais un frère Donjion je l'aurai bien emmené avec moi. Avec mes frères je sais que je peux avoir confiance.

Quand je lui avais serré la main, j’avais pu sentir une légère tension, un peu comme s’il avait tenté de me serrer fort la main pour me faire mal. Il avait réussi à se retenir. J’arrivais à ressentir de genre de choses, étant donné que je suis un vieux démon. Mais, je me disais qu’on était pareil, on cherche chacun son moyen de survivre.

- Donc comme ça, tu m’as reconnu … Très intéressant comme manière de sociabilisation à peine voilée.

Je commençais à le regarder attentivement … Et … plus je le regardais, plus je me disais qu’il paraissait un peu … faiblard ? Il n’avait pas la carrure d’un aventurier. Bon, moi non plus, mais plus que lui.

Ce qui m’a surpris, c’était sa méthode de recrutement furtif. Un bon sourire, le tout emballé dans quelques petites phrases bien rapide et le tour avait l’air d’être joué. Malheureusement pour lui, j’en ai connu qui m’ont fait le coup et qui sont mort, poignardé par l’une de mes anciennes invocations.
En plus, plus je le regardais, plus il avait l’air dégouté. Ses pensées avaient l’air figé sur autre chose que notre conversation. Mais quoi exactement ?

Et puis, il est venu chercher du travail en groupe, mais mon cul oui ! Je suis sür que c’est le genre à Kill Steal dès qu’il le pourra. Mais bon, je n’allais pas refuser deux mains en plus. Mais au premier faux mouvement qu’il me fait : je le descends.

Mais je n’allais pas l’accepter dans mon groupe aussi facilement. Il me fallait être sûr qu’il serait apte à au moins me servir de soutien.

- Dit moi, pourquoi veux-tu te mettre avec un inconnu dont tu ne connais même pas les capacités ?

J'étais percé à jour. Plus exactement, il avait compris que mon sourire avait d'autres ambitions que de devenir l'ami de tous.

-C'est pas comme ça que ça marche ici ? On trouve une quête, on embauche des volontaires et on tente de l'accomplir avant que ça ne devienne un problème.

Je souris avec toute la sincérité dont j'étais capable. En ce moment mon capital n'était pas très élevé.
Je retrouvais mon sérieux en notant les missions plutôt bien payées et assez sûres pour que j'en revienne.

-C'est comme ça que j'ai vu faire ici.

Je croisais les bras et cette fois je fis face uniquement au mur des affiches. Avec un peu de volonté et de patience, l'autre se ferait à l'idée qu'il n'y avait pas beaucoup d'aventuriers présents dans le hall, alors le choix était limité.
C'était moi ou il devra chercher ailleurs des amis temporaires.

-Si ça peut te rassurer, j'ai soutenu la mission dans l'Eutopos.

Je n'allais pas dire qu'il y avait une histoire de dieux là dessous. Je pourrais voir mes dents tomber sous le choc.
En tout cas, le Maitre du Miroir Ken, alias Xénon, y avait participé. Sa célébrité, toute nouvelle, pouvait me servir si Nouvan en avait entendu parler. C'était une belle mission, même si... Non, je ne peux pas le dire. J'ai encore trop honte.

-Je ne veux pas te forcer la main.

J'y ajoutais une touche de sourire supplémentaire.

-Si tu as besoin de moi, je vais rester dans le coin pour trouver un groupe.

Comme je n'étais qu'un acolyte, choisir une quête à l'avance sera inutile. Je soutiendrais un groupe dans la quête qu'il aura choisi.

Avec le peu de phrases que qu’il m’a cité depuis tout à l’heure, j’avais déjà pu me faire ma petite analyse de sa personne. C’était surtout le « C’est comme ça que j’ai vu faire ici » qui m’avait interpelé. Je me disais qu’il ne devait pas être quelqu’un de la région, pas comme moi qui suit enfermé ici depuis des années.

Mais j’avais quand même aimé son esprit critique et son avis sur le fonctionnement simple et complexe des missions de l’entre-monde.
Et puis en plus, c’était vrai que quand je regardais les personnes présentes dans le hall d’entrée, ils n’avaient l’air qu’être que des passants du dimanche, n’ayant que d’intérêt pour les ouvrages de la bibliothèque. Et puis, je me disais *Pourquoi pas*. Les cartes m’avaient prédit un bon augure.

-Attend deux secondes, le retint-je dans la plus grande sympathie.

La mission dans l’Eutopos … Cette mission lui disait quelque chose. Il lui semblait qu’il avait effectivement déjà vu de loin les personnes qui participaient à cette mission. S’il était revenu vivant, c’était un début de preuve de sa fiabilité.

-… Bon, toi et moi, on est dans le même genre situation, je pense qu'on pourra collaborer. Comme tu le sais déjà, je m’appelle Nouvan Sodak, enchanté. Et toi ?

J’avais décidé de lui faire l’un de mes tests. Je commençais à sortir mon tarot aux 163 cartes de magie et commençait à le mélanger. Je lui tendis en le regardant fermement.

- Il y a 163 cartes. Parmi la moitié d’entre-elles renferment un démon qui pourra peut-être te dévorer, mais tu ne sauras pas lequel. Cependant, l’autre moitié t’apportera l’aide d’un nouveau compagnon. Quel choix veux-tu faire face à ce jeu de carte maudit ?

HRP : Si tu veux avoir le résultat d’une carte, choisis un nombre en 1 et 163 !

Une patte griffue se pose plus ou moins gentiment sur l’épaule gauche d’Azurée.

°Le destin lui apporte les deux en même temps. Salut, le bleu.°

Le Sanctuari s’est approché avec toute la discrétion dont il est capable. A savoir, bousculer les gens et marcher lourdement. Son rire guttural résonne dans le hall.

Morok n’a pas pour habitude de retravailler avec des bons à rien, mais d’après ce qu’il avait suivi de la conversation entre les deux humains, c’était le bon moment pour se faire voir.
L’imposant crocodile est ici pour du boulot. Chasseur de prime, garde du corps, même entraineur dans l’arène lui irait. Tout sauf un boulot de la caserne. Les habitants de se mondes sont bien trop respectueux de la loi pour faire n’importe quoi.
Et c’en est déprimant aux yeux du Charan. A part le tueur de maître N qui était toujours en liberté, aucune tête mise à prix n’a retenu l’attention. Alors pour tuer le temps –et si possible autre chose- Morok a décidé de travailler pour la communauté.

°Je suis sur que je t’ai manqué, maigrichon.°

Morok s’est « attaché » à ce petit bout d’humain. C’est idiot, il n’est ni puissant, ni doué avec les armes. Mais la présence de l’homme agit comme un remonte-moral pour le Charan.
Un ami ? Non, bien sur que non. Plutôt un animal de compagnie, ou un souffre-douleur.

C’est à cet instant que Morok fait enfin attention à l’humain en face. Drôle de gueule. Deux yeux différents. Et il n’a pas non plus d’arme, apparemment. Ces morceaux de viande fraîche vont-ils vraiment partir en mission les mains dans les poches ?

°Vous aurez besoin de muscles, vu ce que vous avez sur la peau. J’ai rien a faire en ce moment, je vous accompagne.°

Pas même un « s’il vous plait », ou « si vous voulez ». La politesse est un concept abstrait chez Morok. Et puis… Qu’ils essaient de refuser, pour voir.

Spoiler:

-Azurée.

J'allais me saisir d'une carte quand Morok arriva.
Être dans son équipe c'était rassurant, on pouvait en cacher deux comme moi derrière lui. Juste avant le moment où il s'intègre au groupe, il n'est pas encore dans l'équipe. A ce moment là, pas besoin de s'excuser d'avoir peur.
Des dents, des écailles. Il a toute la panoplie pour provoquer cet effet là.

-Manqué n'est pas le mot, salut Morok !.

J'ajoutais des précisions pour Nouvan.

-Morok, il faisait parti de la mission dont je t'ai parlé.

Ensuite il s'est greffé à l'équipe. Je pouvais sourire à nouveau et piocher la carte que l'autre me tendait.
J'hésitais en m'en saisissant. Les malédictions c'est un peu la marque de fabrique de la Silnà.

Les siennes ne pouvaient pas dépasser celles que les miens ont souffert. Ce n'est qu'en me confortant dans cette idée que je pus tirer la carte de son paquet.

-Si je tombe sur un démon, je te l'offre.

Morok n'est-il pas là pour s'occuper des problèmes ?
En plus, il me remerciera de lui donner l'occasion de se faire les dents sur quelque chose pour s'échauffer. J'en suis certain !
Je ne regardais pas la carte et la donnait à Nouvan en continuant ce que nous faisions tous ici.

-Alors, on se charge de quelle mission ?

Le charan ne saura jamais à quel point il m'avait facilité les choses en venant nous saluer.

Je vis un crocodile humanoïde venir. Je pensais me mettre en posture de combat mais il semblait être un allié d’Azurée. Ce n’était pas la première fois que je voyais un Anima, j’en côtoyais souvent, même dans mon ancien monde. C’était généralement des êtres capables des plus belles prouesses physiques.

Tout comme son premier « compagnon », l’animal ne semblait qu’être motivé que par l’argent et le profit. Finalement, on était tous pareil, nous avions besoin d’argent pour survivre.

Finalement, le jeune homme s'était décidé à prendre une carte. Je m'attendais à quelque chose de plus classe genre "Je n'ai pas besoin d'aide", "Je ne fais pas confiance à tes démons", ou quelque chose dans ce goût. Maintenant, je savais que c'était comme moi, une personne qui avait besoin de l'aide de ses compagnons pour survivre. J'imagine qu'il avait les mêmes pouvoirs que les miens, ou presque. M'enfin, j'allais quand même lui énoncer le résultat du tirage.

« The Aquarius … Le onzième zodiaque. Tous comme un. Je suis solidaire et identique à mes frères. »

C’était … marrant. Je ne comprenais pas pourquoi c’était tombé sur cette carte là en particulier, puisqu'il avait l'air un chouillat désolidarisé de contact "humain".

D’ailleurs, l’invocation qui allait avec la carte était un genre d’armure maudite, enchainé dans un château. Il me semblait que son but dans la vie était de garder le château des envahisseur ou un truc comme ça, juqu’à ce que son royaume finisse par disparaître … Le Verseau. Une armure parmi tant d'autres, mais il avait travaillé jusqu'au bout.

M’enfin bref, nous avions maintenant un nouvel allié de taille, et le choix allait être plus facile. Cependant, il n’y a pas beaucoup de mission qui m’inspirent confiance. Il y avait bien la mission des Arcturus, mais … Non.

Je m’approcha du panneau en prenant mon sac de livraison, et je commençais à scruter des possibilités de mission. Il y en avait une qui m’avait intéressé : les Valraven. Cependant, on nous pouvait choisir de mission sans la présence de la fameuse bibliothécaire.

« … Au fait, vous savez où se trouve la bibliothécaire ? Je dois lui livrer quelque chose mais je ne l’ai pas croisée depuis … »

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