Les fumeroles - la terre creuse

*Si tous ces gens n'avaient pas foutu leurs pattes dans les galeries, ici ça serait encore calme et tout propre, mais qu'est-ce que je peux faire contre cette invasion de gens de la surface qui viennent et s'installent dans... la ville souterraine, ce truc qu'ils appellent Fumeroles alors que les fumeroles ce sont nos galeries, nos terres, et que leur truc immense et plein de « jolies » lumières n'en représente qu'un si petit morceau que même ma femme est plus grosse.*

La pioche du vieux Westri cogna contre la paroi de la galerie, quand le couinement d'un rat vint déformer le silence à peine dérangé des coups réguliers qu'on entendait dans tous les tunnels des fumeroles. Non loin, un zélé architecte nain répondant au doux nom de Nordri hurlait à sa façon les ordres dans son patois natal. Les travailleurs habitués à cet accent prononcé ne râlaient plus depuis des années qu'ils creusaient ces tunnels, même lorsqu'ils ont creusé les mines au Nord de la ville, ni même lorsqu'ils aidèrent à la creusée des galeries résidentielles sous tout l'Est des souterrains. C'était comme ça depuis tellement longtemps que plus personne ne s'étonnait.

Une cloche résonna dans les fils qui pendaient aux murs, les nains levèrent la tête, laissèrent choir leurs outils et se dirigèrent bras dessus bras dessous dans la direction de la ville souterraine.

Là bas, dans l'immense salle circulaire illuminée d'appliques d'ivoire et autres bijoux qu'offrait le sol, le toits des étales s'étalaient d'une paroi à l'autre, alors que dans les rues éclairées des lumineux lampions, des êtres de toutes les races avançaient dans le calme de cette cité sous la terre.

Le vieux Westri qui n'avait jamais compris pourquoi, ici, alors que la ville lui paraissait confortable, bien que manquant cruellement des technologies qui l'intriguaient, il n'y avait pas plus de monde et plus de bruit à offrir à ses oreilles. Il bougonna jusqu'à la taverne et claqua la porte derrière lui alors que l'endroit laissa filer le son des verres clinquant et le brouhaha de sa communauté.


Pas d'animaux dans les rues, hormis un chat qui vient se faufiler entre les pattes de l'excentrique Nordri. Il avait oublié d'ôter de sa tête son casque et sa bougie qui avait fondue depuis bien longtemps et n'avait laissé sur sa visière qu'une plaque dur de cire coagulée.
Le nain décocha dans le fauve miniature un coup de pied magistral envoyant l'animal valser dans les airs, et ceci sans qu'il ne s'en rende compte, il s'arrêta au milieu de la rue et observa les nains qui allaient ça et là dans les nombreuses boutiques ornant le sol de cette mini-capitale.
Il aimait les Fumeroles autant que sa pioche et si son casque n'était pas vissé sur sa tête l'empêchant de lever les yeux, il aurait aimé pouvoir regarder le prisme accroché à l'arche de soutient, là haut, le diamant gigantesque reflétait avec un éclat sans pareil les rayons de lumière baignant la ville dans un halo constant qui jamais ne se tarissait.

Bien sûr, il avait déjà vu des quartiers louches dans les galerie, dans l'Ouest, certains des tunnels furent fermés aux âmes non naines pour éviter tout accident... Les parois s'effondraient sans que personne ne sache pourquoi, mais eux savaient que dans la terre vivaient des créatures dont il valait mieux taire le nom. Il frissonna un instant, et ôtant le crayon de chantier qui tenait en équilibre sur sa visière, il se dirigea d'un bon pas vers les marches opposées au promontoire qui lui offrait ce spectacle sur la ville.

Il se souvenait encore lorsqu'il avait dessiné ces immenses escaliers menant aux terrasses ouvrant sur les tunnels. Le plus dur fut de tailler le marbre de façon à conserver les plus beaux morceaux pour tapisser les rues avec les dalles.
Il était fier de sa cité... Il s'en alla d'un bon pas, décidé à rejoindre sa propre résidence, quelque part dans l'une des nombreuses galeries des fumeroles.