Quand un piano vous tombe sur la tête.

Les informations données par le maitre de K'en étaient minces. Juste assez pour m'ammener à retourner chez moi. Caël s'amusa de me voir courir d'une res publica à une autre avec un Pan invivable. D'ailleurs, le forgeron et le singe s'étaient pris d'affection l'un pour l'autre, tellement que le premier était toujours affublé de l'autre quand je revenais à Ordae. Mon récit le fit bien rire car après avoir voyagé un bon moment hors de la ville et dans la ville j'avais trouvé décevant de n'avoir pas pu étrenner le magnifique sabre qu'il m'avait offert lors du concours de Northrives. Mais comme il me le fit remarquer : "Tu ne sais pas t'en servir, il vaut mieux qu'il reste dans son fourreau".

Certes, mais j'ai bien l'intention de m'inscrire au stage de l'arène de ciel. Car en partant de la forge pour vaquer à mes recherches dans le quartier j'étais tombé sur l'affichette du Nix Nivis. Des stages pour débutants afin qu'ils apprennent à manier une arme. C'était exactement ce dont j'avais besoin, ça et d'un lance flamme pour menacer Pan quand il fait sa tête de macaque.

En parlant de Pan. Ma lecture de l'affiche m'avait fait totalement oublier le singe en papier et il s'était bien gardé de me le dire puisqu'il s'était tout simplement enfuit. Quand, où et comment étaient d'excellentes questions. Figée au beau milieu de la rue, bloquant le passage à je ne sais quelle diligence, je regardais à droite, à gauche... Pas de hurlement outrés, pas de beuglement ivres et plein de rage ? Pan n'était donc pas dans le coin. Mais où était-il donc passé celui là !?

Ignorant les injures du coché qui fit claquer les rênes de ses étalons dès que je me fus écarté de la voie, je me retrouvais les pieds dans les détritus humides dignes de ce quartier où l'hygiène n'est pas la première priorité à réfléchir, ou plutôt à tendre l'oreille, dans l'espoir d'entendre les hurlements signes que Pan a encore fait le mariole quelque part.
De l'agacement sur mon visage ? Probable. De la peur ? Pas le moins du monde, si ce singe est capable de rendre dingue un centaure il peut bien survivre un jour ou deux dans Ordae. Et puis, le bougre sait où se trouve la forge, il y a des chances pour qu'en y retournant je l'aperçoive sur l'épaule de Caël à l'imiter taper du marteau sur son enclume.

Je vais transformer ce singe en cocote en papier...

ÉTAPE 3 : LE JOUEUR DE FLÛTE
Si le joueur arrive ici après avoir résolu la troisième énigme, il remporte 60 PIMs.

Sur ce qui ressemble vaguement à un trottoir et confortablement installé sur une paillasse colorée, à même le sol, un homme épie Virgile. Quelques porcs s'amusent à lui tourner autour et à lui chatouiller les orteils en grognant d'un air mutin... mutin ? Passons... Les doigts de ce pauvre erre effleurent un hautbois tandis que ses lèvres délicatement posées sur le bec semblent lui insuffler la vie. Il joue, sans susciter plus de réaction que les regards embarassés de ceux qui croisent sa paillasse. Parfois, quelques PIMs atterrissent dans le petit chapeau retourné qu'il a posé devant lui. Des passants pressés que la musique ne laisse pas indifférents, mais qui n'ont pas le temps pour une halte. D'autres se sont arrêtés et l'observe, le regard brillant d'admiration à l'écoute de ce morceau envoûtant. Lorsqu'il s'interrompt, quelques applaudissements retentissent, puis la foule se disperce.

« Vous, vous venez pour la boîte, je parie ! s'exclame l'homme avec un accent allemand si prononcé qu'il n'est pas dit que Virgile comprendra la suite... Le Maître de Ken me l'a refilée un jour que j'allais à la Tour du Savoir faire le plein de missions. Tu parles d'un cadeau ! J'ai à peine eu le temps de me rendre sur les lieux de ma première quête que je ne me souvenais déjà plus ce que je devais y faire ! J'ai eu beau réfléchir, rien à faire, ça ne me revenait pas ! J'vous dis pas l'angoisse. Du coup je suis allé noyé mon chagrin dans un bar, et voilà t'y pas que j'y ai rencontré un type sympa comme tout. Un ex-époux déprimé et complètement ivre. Il m'a avoué me jalouser mon amnésie. À ce qu'il disait, il avait plein de choses à oublier lui, comme par exemple le fait qu'il avait une pension alimentaire effrayante à payer à son chien, ou je ne sais plus trop quoi... Enfin bref... Nous avons échangé quelques pintes de bières et voilà qu'au moment de rouler sous la table il remarque la boîte. Celle que vous cherchez là. Oui oui, celle-là. Et bien vous ne devinerez jamais quoi !? À peine qu'il l'a eue dans ses mains que la raison de mon voyage jusque dans ce trou perdu me revenait en mémoire ! Pour une coïncidence, hein ? Ben moi je l'ai arrangé, l'autre type. Je lui ai donné la boîte. Il la trouvait jolie il disait, et moi je la trouvait bizarre. C'est quand même pas banal une boîte qui vous fait perdre la boule ! »

Son regard vitreux détailla Virgile de bas en haut, faute à sa position assise. Il n'a pas pris la peine de se lever, à croire qu'il aime la compagnie des cochons et le contact froid des pavés sous ses fesses. Mais l'alcool suiinte par chaque pore de sa peau, expliquant plus sûrement le pourquoi du comment il préfère rester sur son séant. Au moins là il ne risque pas de tituber.

« Le type dont je vous parle a fini par se débarrasser de ce machin à son tour. Comment je le sais ? Parce qu'il m'a envoyé un message par Hi-bou voyageur. Que même qu'il écrit tellement comme un cochon que j'ai à peine compris la moitié. Bref, me demandez pas pourquoi, il donné la boîte. Vous la voulez vraiment ? Parce que si y'a que ça, je veux bien vous dire où elle est... mais ce ne sera pas gratuit ! Il faut bien que je gagne ma vie moi aussi. » assure-t-il en levant un sourcil.

Si la mimique est sensée convaincre le saltimbanque, c'est raté. Mais le bonhomme ne se démonte pas. Il lève l'une des couvertures colorées qui l'entoure et présente un joyeux florilège d'objets. Aucun n'est emballé, mais tous portent un gros ruban rouge. Ça semble être des cadeaux... des cadeaux qu'il n'a pas eu le temps ou l'argent d'envoyer... à moins qu'il ne s'agisse d'une mauvaise volonté affligeante.

« Ce sont des cadeaux d'anniversaire pour mes frères. Des quintuplés, rien que ça. J'vous dis pas l'argent que je dois déboursser chaque fois que c'est leur anniversaire... Enfin... Faudra que vous m'en livriez au moins un. Si vous choisissez le bon, vous trouverez votre boîte. Sinon, bah... Vous ne trouverez rien à part l'un de mes cinq frères... Alors, je vous explique : il y a une gâche moelleuse à livrer à ce goinfre de Bernie qui viit à Trinity. Il y a une hache à livrer à Théophile, qui collectionne tout et n'importe quoi à Duguay. Il y a une bâche à livrer au pauvre Sam dont la toiture s'est envolée, à Termer. Il y a un chèche à livrer à Mipou, qui est allé s'exiler à Sun. Et puis enfin il y a un cache pour l'une des nombreuses machines bizarres que fabrique Pierrick, à Cerclon. Vous y êtes ? Alors maintenant, pour choisir le bon, ben z'avez qu'à m'écouter jouer. »

À ces mots, l'homme porte l'instrument à sa bouche et n'adressa plus gère la parole à personne autrement qu'en répétant ces quelques notes :2010/09/30/

Outre la musique qu'il répète en boucle (en inspirant de temps en temps tout de même) l'odeur me monte au nez, et le reste me casse les... hein. J'ai envie de me boucher les écoutilles et de hurler "lalalalala" pendant des heures. D'ailleurs Pan le fait lui...
Pan ?
Quand est-il revenu cet idiot de macaque ? Il bondit sur le sol et dans la boue danse du hip-hop un peu remastérisé par ses soins. C'est drôle et presque hypnotique, la musique ne cesse de se répéter et le flûtiste va finir avec son instrument où je pense s'il rejoue encore une fois ce satané morceau. Très court. Je note les temps, 5 petites notes. C'est censé m'aider peut-être ?

Je suis acteur pas musicien, chacun son boulot. Je montre ma frimousse sur les planches, les musiciens se contentent de se faire oublier au profit de leur instrument. Et pourtant je les aime bien, assez pour avoir une furieuse envie qu'il y en ai un autre dans le coin pour jouer à la place du flûtiste.
Pendant mes douloureuses pensées et la migraine naissante, Pan continuait de dessiner des arabesques dans la boue avec ses paluches. Il s'en foutait partout et bien entendu je serais la prochain à m'en prendre plein la chemise.

C'est marrant quand il dessine sur le sol j'ai l'impression qu'il écrit un livre à sa manière. En dessinant les mots les uns sur les autres. Ce singe est en réalité la réincarnation d'un grand compositeur, lequel ce n'est pas utile de le savoir, mais il a du flair. J'aurais du me faire un lévrier plutôt qu'un singe, allez savoir pourquoi j'ai trouvé que cette bestiole mignonne et plus pratique à trimballer... Et même si 10 fois par jour j'ai envie de le jeter dans le foyer de la forge, le reste du temps ce singe devient le meilleur allié du monde.

-Ok, donne moi donc ce truc là. Je vais aller faire la livraison. Et si je me suis trompé ton frère me renverra chez toi je suppose. D'ici là tâche de ne pas te noyer dans une bouteille !

Je me penche et empoigne Pan. Il se débat mais ne peut rien faire. Et moi j'ai de la boue plein les doigts mais pas ailleurs... Tentons de protéger la chemise propre.

L'allemand s'interrompit, pour le plus grand bonheur de toutes les oreilles réunies de l'Entre-Monde et d'ailleurs. Il sourit à Virgile avec une pointe d'ironie et de sadisme accrochées au coin des lèvres.

« Et ben vous aurez mis l'temps... vous faites le bon choix, souhaitez un très heureux anniversaire à mon frère de ma part... »

Et sans ajouter un seul mot, il tendit le paquet que Virgile lui réclamait.

Je lui tourne le dos et m'en vais Pan dans une main qui se fait les dents et dans l'autre le paquet à livrer... Direction... Je dois aller où déjà ?
D'abord passage chez Caël, j'ai besoin de me décrasser les narines. Il faut que je lui parle d'une question très importante. S'il veut qu'on continue tous les deux, il va songer à déménager dans un quartier à l'hygiène irréprochable... Par exemple Cerclon. C'est sûr que pour une forge c'est moins poétique mais je n'aurais plus d'odeur affreuse dans le nez.

*Pan cesse donc de me mordre la main, ça chatouille !*

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