Cœur brisé et main en pièce

Qu’est-ce qui a bien pu me prendre de frapper Hazuki… Je sais bien qu’elle a la tête dure pourtant ! Enfermée dans mon bureau, dans le noir, je me laisse choir contre le mur. Qu’est-ce que j’ai fait… Kaname est en prison à cause de moi… Je l’ai laissée tomber, je l’ai trahie… Le bout de mes doigts me brûle, j’ai envie de la prendre dans mes bras, de sentir son odeur et sa chaleur contre moi.

Notre relation a commencée bien après que j’ai appris ce qu’elle a fait… Je savais très bien ce qui l’attendait… Au début, je me suis rapprochée d’elle espérant découvrir qu’elle était vraiment une meurtrière et décharger ma culpabilité. Je n’avais pas prévu de découvrir une femme douce, attentionnée et respectable. Pas en connaissant ses relations. Je n’avais encore moins prévu de tomber amoureuse d’elle et qu’elle aussi… J’ai négligé une régles primordiale : “ne t’accroches pas émotionnellement à ta cible”. Est-ce que cela aurait été moins douloureux si je l’avais arrêter dès mon enquête bouclée ? On se connaissait assez pour se dire amies quand même… Recroquevillé en position foetal, je pleure sans bruit. J’ai fait du mal à celle que j’aime.

Ma main me fait de plus en plus mal. A travers mes larmes, je voit qu’elle a gonflé et commence à bleuir. Je me suis bien fait mal en tapant sur Hazuki… Il faudrait certainement que j’aille voir Moana pour qu’elle inspecte ça avant que cela s’aggrave mais je n’ai pas la force d’affronter son regard compatissant. Je n’ai pas envie qu’on essaye de me réconforter…

Il n’a pas fallu longtemps avant que cela s’agite derrière la porte. On toque vaillamment à la porte. Je laisse sans réponse, peut-être que si je ne répond pas, ils s’en iront en pensant que je suis partie… J'aurais peut-être dû m’éclipser mais l’idée de m’éloigner encore plus de Kaname me répugne. La lumière inonde mon bureau lorsque la porte s’ouvre. Je n’essaye même pas de voir qui est à la porte, je veux juste rester seule… La porte refermée, on s’approche de moi. Dans la pénombre et derrière mes larmes, je reconnais Moana. Hazuki a dû aller la chercher… Aussi méchante que j’ai pu être avec elle, elle est quand même aller chercher mon amie. Je n’aurai pas dû m’emporter et la frapper…

En silence, Moana s’occupe de ma main. Un grognement m’échappe lorsqu’elle pose un truc froid dessus. Le poids me fait mal… Elle s’essaye à un trait d’humour que je met un temps fou à intégrer. J’ai juste oublié qu’Hazuki est trop solide pour que je la tape à mains nues… Il faut que je l’attaque avec une batte pour avoir une chance de lui faire un peu mal. Tenant son objet froid sur ma main, Moana reste silencieuse. Depuis que je me suis enfermée dans mon bureau, mes larmes n’ont pas cessées de couler. A travers mes larmes, je fixe Moana. Elle est là à attendre que je daigne lui parler, me confier à elle. Je change de position, m’asseyant dos contre le mur. Finalement, je me jette dans les bras de mon amie pour pleurer contre son épaule. Après plusieurs minutes, je lui murmure.

Je l’ai trahi… Je l’ai abandonnée… Je ne voulais pas qu’elle aille en prison mais je l’ai trahi… Je n’ai même pas pu lui dire au revoir !

Après quelques instants, je me remet dos au mur. Je tend ma main blessée à Moana, fuyant son regard, elle ne partira pas tant qu’elle ne l’aura pas au moins soigné.

Plus qu’un médecin, Moana est là pour moi, pour me rassurer. Je comprends ce qu’elle veut dire mais cela ne change pas grand au chose au fait que j’ai envoyé celle que j’aime au fond du trou. Ses caresses sur mes cheveux m’apaisent un peu, si je ne la connaissait pas aussi bien, je pourrai presque dire qu’elle essaye de se poser en maman de substitution pour l’occasion.

Libérée, elle se met à inspecter ma main. Bien qu’elle essaye de me manipuler avec douceur, cela me fait très mal. Je suis certaine de m’être cassé un truc… ça ne gonfle pas comme ça pour un simple bleu… Je suis bonne pour une radio et sûrement un plâtre. Elle essaye une plaisanterie pour me faire changer de sujet.

Je ne les aurait pas eu avec moi…

Ce n’était pas spécialement prévu qu’Hazuki m’empêche d’accompagner Kaname. Je suis sûr qu’elle va me surveiller pour éviter que j’aille la voir même sans entrer… Reprenant sa posture maternelle en m’ébouriffant, elle me rappelle qu’il faudra que je m’excuse auprès d’Hazuki. Je sais bien que cela partait d’une bonne intention, que j’ai réagis de façon un peu trop brutale… Mais bizarrement, je n’arrive pas à m’en sentir coupable. Toutes émotions sont tournées vers Kaname, le reste ne compte pas…

Je le ferai. Ne t'inquiètes pas, je dois me remettre en état avant… Hazuki va me tabasser si je fond en larme dans ses bras…

Ce n’était qu’à moitié une plaisanterie, autant elle est adorable en temps normal, autant elle peut devenir un véritable monstre quand elle le pense nécessaire. “On ne devient pas assistante du prétorien en collant des gommettes” qu’elle m’a dit lors de ma prise de fonction. Cela a tout de suite collé entre nous. Enfin jusqu’à ce qu’elle dépose la première pile de documents à lire, signer… Elle reprend en m’annonçant qu’Hazuki s’est occupée de me fournir du temps pour me remettre en état. C’est vraiment un amour alors que je l’ai frappée sans vergogne…

Merci Moana mais j’ai envie de rester seule un peu…

Dormir, pleurer, oublier… Un bon programme en perspective… M’attrapant par le menton, elle m’oblige à la regarder malgré la pénombre. Ses paroles sont comme autant de pic en fer qu’on m’enfonce dans le coeur, un rappel de l’avenir que j’ai peut-être réduit à néant… Je me remet à sangloter et à pleurer à torrent. Et si malgré nos promesses, elle n’arrivait plus à m’aimer ? Si j'avais irrémédiablement casser un truc entre nous… Détruit ce lien de confiance qu’on avait…

Mais… et si… et si…

Prise de panique, je perds mon souffle et n’arrive plus à respirer. De plus en plus paniquée, je suffoque rapidement. J’agrippe la blouse de Moana alors que des étoiles commencent à danser devant mes yeux.

Prise de panique, je n’arrive plus à inspirer de l’air. Mes poumons restent éperdument vide et mon champ de vision se brouille. Agrippée à la blouse de Moana, je commence à vaciller. Je ressent à peine la compression habituelle du transport employant un titre.

Moana m’installe de force dans un fauteuil et m’oblige à la regarder dans les yeux. Je me concentre sur ses yeux flous. J’essaye de caler ma respiration sur la sienne. Lentement mais sûrement, j’arrive à respirer par toute petite bouffée d’air d’abord. Elle essaye de me rassurer, de me convaincre que tout va bien se passer pour Kaname… Pour l’instant oui… En cellule temporaire, elle sera pas trop mal installée et traité humainement. Mais si elle est condamnée définitivement… Ce sera une autre histoire. Après quelques minutes, le monde redevient plus net. Je pose une main sur l’épaule de Moana pour la rassurer, je suis encore en vie… Je caresse doucement son animal de compagnie qui s’incruste. C’est amusant de voir sa queue qui brille.

ça va aller… Tu peux me donner la bouteille sur mon bureau ? C’est une boisson énergisante qu’on utilise durant les missions de longue durées.

Je ne devrais pas boire ce genre de chose mais c’est uniquement grâce à ça qu’on arrive à tenir debout après 24 heures à courir après les criminels. Mon cerveau de nouveau presque opérationnel m’envoi comme un signal d’alarme. Quelque chose cloche. La main posée sur la tête de l’animal, je lève les yeux. Je ne suis plus dans mon bureau là ! Je bondis sur mes pieds. Immédiatement, la tête commence à me tourner. Trop vite… Je me rattrape au premier truc venu pour me stabiliser le temps que cela cesse. Je balaye du regard la pièce. Elle m’a amener chez elle… Loin de Kaname… Je me tourne vers elle les larmes aux yeux.

Ramènes-moi tout de suite ! Je ne peux pas l’abandonner toute seule là-bas…

A nouveau en pleurs, je me rassoit sur le canapé. Elle est toute seule là-bas… Je farfouille avec précipitation dans mes poches. Où est ce fichu miroir ?! Impossible de mettre la main dessus… Hazuki n’aurait quand même pas jouée les pickpockets pour me le subtiliser ? Je me relève et me dirige vers la porte.

Je dois y retourner… Je ne peux pas la laisser seule là-bas !

Ma tête tourne encore, je n’ai pas encore bien récupérer de ma crise de panique mais je ne peux pas la laisser là-bas… Je dois rester au plus près d’elle.

J’entend Moana qui m’ordonne de rester chez elle alors que je me dirige vers la porte arguant que cela ne change rien pour Kaname que je soit ici ou à la Caserne. Pour Kaname peut-être, mais pas pour moi… Elle est toute seule enfermée dans une cellule… Comment je pourrais me prélasser dans un lit en sachant cela… J’ai l’impression de l’abandonner. Peut être qu’elle ne saura pas que je suis là mais moi, je saurai que je suis au plus près d’elle.

Elle m’attrape sur le seuil de la porte. Je me débat violemment, tout ce que je veux, c’est rester prés de ma succube. J’essaye de lui donner des coups de coudes, de lui écraser les pieds mais rien n’y fait. Elle se contente de me serrer plus fort contre elle. Je n’ai pas la force de me battre contre elle…

Lâches-moi ! Je veux y retourner ! Kaname…. Elle est toute seule là-bas…

Mes larmes coulent le long de mon visage. C’est moi qui lui fait tant de mal, je suis celle qui la fait souffrir… C’est moi qui devrait être en cellule pas elle. Je me débat encore alors qu’elle me demande d’avoir confiance en elle. Voilà qu’elle commence à parler d’utiliser la force pour me faire rester… Débridée par la mise en garde, je libère ma voix et essaye d’influencer Moana pour qu’elle me ramène à la Caserne.

Moana ! Tu as envie de me ramener à la Caserne. Tout de suite !

A bout de force, je cesse de lutter. A quoi bon ? Kaname ne m’aimera plus jamais après ça… Est-ce que j’ai envie de voir la haine ou l’indifférence dans son regard ? Je voudrai juste me rouler en boule et disparaître, ne plus être celle qui fait souffrir celle qu’elle aime… Mes jambes cessent de me porter. Je m’effondre seulement retenue par Moana.