De retour à l'école

Pour la énième fois, j'ouvrai les portes de la bibliothèque. Pour quelle mission, hein ? Aucune. J'étais là pour lire et écrire ! Je ne sais pas vraiment si c'est une nécessité, mais j'imagine que c'est un pas pour devenir plus humaine... Et puis, je peux ouvrir des portes, mais pas celle du monde des livres et du savoir. Elles sont trop lourdes, hors de ma portée. Mais ce jour était le grand jour, le jour où je commencerais à tourner la clé ! Idée ! Je devais réviser. Au moins pour montrer de quoi j'étais capable à Eva. Les enseignements de la pleurnicharde étaient bien ancrés dans ma tête, alors il fallait au moins que je puisse les montrer, que je puisse me vanter de cette incroyable compétence à réciter l'alphabet. Bon d'accord, pas si incroyable que ça, elle ne m'avait servie à rien jusqu'à maintenant à part me faire réfléchir devant des lettres qui avait autant de sens pour moi que si on me disait qu'Ayren ne criait pas.

Je pris un fauteuil, sortis de ma veste le livre qu'Eva m'avait prêté lors de ma première mission, recouvert d'un vieux linge. Quelque chose comme "P.L.A.I.R.E E.N S.O.C.I.E.T.E". Super bouquin, un chef d'œuvre de littérature ! Mon passage préféré, c'est quand il y a "P. 100", ça veut dire 100 pims, je pense. C'est beaucoup ! Avec ça, je peux m'acheter au moins deux Seitoshi chez Ayren ! Bref, continuons ! Je relisais donc trois-quatre pages, récitant à voix basse les lettres pour m'exercer. Une moyenne de cinq minutes par page.

Finissant ma "lecture", je fonçais vers le comptoir de la bibliothèque, livre et épée sous le bras, prête à en découdre avec les créatures nommées "mots" et "phrases" (elles sont les plus dangereuses).

Evaaaaa ? Ou boite de conserve qui fait des bruits bizarres sinon ? J'veux apprendre à lire et à écrire, et j'ai ramené, euh... "Revient et... sans trous, griffures, coup de crocs, ni boue ou sang sur les pages" ! Je crois que c'est ça ! Ah et il y a Seitoshi aussi.

Je montrai le livre, il avait un drôle de nom quand même, j'ai vraiment eu du mal à m'en souvenir vu comme il est à rallonge. D'ailleurs, les livres ont tous des noms aussi longs ? Enfin bref, je ne suis pas là pour discuter nom, mais lecture d'abord. Je rajoutai alors un court "S'teuplait" après un court silence, une formule de politesse qu'on m'a appris tout récemment.

On m'appelait. Coincée sous une montagne de boites à ranger dans le vestibule derrière mon bureau, je ne reconnu que tardivement la voix d'Hiryu. Elle m'arracha un sourire lorsque, après avoir vaincu un paquetage plus volumineux que lourd, je compris pourquoi elle était à la bibliothèque. Je quittais mon placard de stockage juste après, ce sourire amusé toujours aux lèvres.

-Bonjour Hiryu.

J'observais le livre qui, semble-t-il, n'avait pas souffert.

-Lire et écrire, hein. Kip !

Le petit robot somnolent sur sa station de recharge quitta son petit chez lui pour approcher à toute vitesse dans le hall. Bien sûr qu'il reconnu Hiryu, il était même heureux de la revoir. Si bien qu'il oublia que mon bureau était entre lui et la jeune femme. Son cube ajouta un éclat supplémentaire aux nombreuses autres marques tapissant mon comptoir.
Je suis comme un barman qui désespère de voir son bar abîmé par les habitués de jour en jour...

-Pour commencer, Kip va t'aider à apprendre les lettres et les sons. Tu n'apprendras pas en une seule journée alors, je te propose que vous travailliez une heure ou deux selon ton courage et tu pourras revenir demain pour une autre séance.

C'est fou, je suis bien plus aimable avec ceux qui viennent lire à la bibliothèque. Les aventuriers venant uniquement salir mon hall avec leurs bottes et leurs égos, méritaient à peine mon mauvais caractère.

-Kip ! Lâcha le petit robo. Kip accompagne Hiryu étage huit pour lecture. Kip !

Le petit robot glissa son bras mécanique sous celui d'Hiryu et l'emporta de force dans les étages. Ils prirent les escaliers et le petit robot ne pouvait imaginer quelle torture c'était pour un être organique de grimper aussi vite huit étages d'un coup.
Ils furent à peine installés à une table, dans une salle vide sinon peuplée d'ouvrages, que Kip posa un lourd volume d'apprentissage de la lecture devant la jeune femme.

-Kip ! Kip est désolé, Kip doit charger ses archives sonores pour les lettres. Kip sera immobiles deux minutes et trente-et-une secondes. Kip !

Le chargement commença et le smiley-visage de Kip s'effaça pour laisser apparaitre des lignes de codes.

Pas de vannes ? Eva est malade ? Je l'observai d'un œil suspicieux, était-ce vraiment elle d'ailleurs ? Je restai totalement immobile pendant une petite seconde avant de bouger à nouveau, comme une machine reprendrait son travail. Je ne savais pas si je devrais lui demander si c'était bien elle, enfin, au moins elle voulait bien m'aider. Je hochai donc la tête, remerciant "Eva" (ou son gentil clone). Kip ne me laissa pas plus de temps, me traînant alors à l'étage voulu. Je n'avais visiblement pas mon mot à dire, voilà le côté de la bibliothèque que je connais mieux, plus "brutale".

L'air me manquait. Je m'assis péniblement à la table que me désignait le petit robot, reprenant mon souffle de cette étrange et rapide montée.

C'est bon?.. On est arri-

BAM ! Un énorme livre s'écrasa contre la table. Je commençais à me demander si j'avais vraiment fait le bon choix entre apprendre et aller faire une mission. De tous mes combats, je n'ai jamais vraiment perdu mon courage, la peur était une émotion que je ne connaissais que peu. Cependant, c'était dans un moment comme celui-ci que je me demandais si je ne devais pas simplement abandonner et filer en douce, me voyant alors noyée dans les pages des livres, dans les mots et les lettres. Kip s'arrêta ! C'était le moment, un cadeau de ma bonne étoile ! J'avais quelques minutes pour redescendre tout ça et fuir !

Enfin... Devais-je vraiment me défiler ? Moi, Hiryu, battue par des livres ? Pfff ! Jamais ! Je ne perdrai pas ! À mes yeux, l'apprentissage commençait de plus en plus à ressembler comme un énorme entraînement, ou une bataille. Hiryu versus les livres ! Le combat serait sans doute dur, je ne pouvais pas utiliser d'armes contre un livre après tout. Je n'avais que ma tête, et elle avait plus tendance à servir à cogner d'autres types.

Je soufflai un moment, essayant de me concentrer sur cette nouvelle bataille, ouvrant alors le livre et commençant à réciter à haute-voix les lettres que je pouvais reconnaître ! Prends ça ! Il ne manquait plus que la reconnexion de Kip pour lui montrer ce que je sais faire.

Spoiler:

-Kip ! Kip a tout chargé ! Kip !

Le regard de Kip tomba sur l'énorme volume. Il était maladroit, pris de hoquet kipien toutes les cinq minutes mais pour ce qui est d'apprendre les syllabes et les combinaisons de lettres, Kip était le meilleur prof disponible dans la bibliothèque. Ce n'était pas de la patience. C'était la résilience des robots qui lui donnait cette endurance si particulière. C'est bien pour ça que je laissais Kip se charger du début d'apprentissage d'Hiryu.

J'arrivais à point nommé après une heure de travail acharné... Pour au moins l'un des participants, car Kip sous mes yeux fila vers une étagère, se saisit d'un nouvel ouvrage et se faisant réussit à faire chuter avec lui deux livres qui n'avaient rien demandés.
J'apportais avec moi deux tasses de thé fumant.

-Je vois qu'il est en forme.

Je donnais une tasse à notre apprentie lectrice.

-Pour l'écriture ce sera avec moi. Kip va aller se recharger... Hein, Kip ?

-Kip !

Il posa son livre, fit un salut militaire et s'enfuit dans la seconde.

-Dis-moi, as-tu déjà essayé de dessiner ?

Tellement de sons différents, de possibilités de combinaison... Moi qui voyais là une combinaison par son, il en existait parfois plusieurs. Tellement compliqué, retenir toutes ces choses était une vraie épreuve, un vrai combat. Néanmoins, plus le temps passait, plus je pouvais rapprocher cette formation avec celle du combat. Des difficultés, des choses à retenir, il fallait être attentif, que ce soit dans la formation ou dans la lecture en elle-même, je vous l'dis, c'est tout pareil! Enfin, c'est juste pas les mêmes muscles qu'on travaille.

Après une heure d'acharnement sur ces horribles mots, ces sons et ces lettres, les courbatu-... Une migraine, une méchante migraine était apparue. Eva arriva tandis que je marmonnai encore les sons que j'avais retenus en les découvrant dans les ouvrages, commençant donc enfin à comprendre certains mots. J'avais l'impression d'avoir passé des heures à écouter en boucle le robot tout en tentant de "lire" ces mêmes sons. Quand Eva commença à parler, j'étais même étonnée de ne pas entendre les "Kips" habituels qui s'étaient gravés dans ma tête.

Kip ! Eva ! Enfin là.. Kip..

Je me retins de la prendre dans mes bras, entendre autre chose que cette voix synthétique me faisait le plus grand bien. Je me tapai le crâne, me remettant les idées en place, puis buvant une petite gorgée de thé brûlant.

Chaud... Hum.. Oui, donc, Eva, euh...

Dessiner ? Comme l'art ? Avec un crayon et tout ? C'est ça dont elle me parlait ? J'avais plus pour habitude de "dessiner" de belles cicatrices sur mes cibles, mais était-ce vraiment du dessin ? Peut-être de la sculpture sur chair. Les seuls véritables rapprochements que je pouvais faire entre moi et le dessin était ces jolies gravures sur mon moi lame: des symboles japonais indiquant mon nom, accompagnés de multiples runes.

Ça compte en le faisant sur quelqu'un avec une épée ? Sinon, non. Mais j'aimerai bien apprendre, comme ça, je pourrais montrer à Ayren comment bien faire sur les lames.

Je pris un crayon sur la table et griffonnai sur une feuille blanche ce qui ressemblait à peu près à ce que l'on avait gravé sur moi, ajoutant :

J'ai de jolis dessins sur moi, mais ça a l'air dur... Mais pourquoi tu m'parles de ça ?

Lui expliquer la différence entre dessiner et écrire allait être compliqué. Je remisais la question à d'autres leçons, et puisqu'elle connaît les lettres et quelques syllabes, je lui proposais un bloc de papier et un crayon, sur lesquels elle pourrait s’entraîner.

-Lire c'est une chose mais écrire s'en est une autre. Les dessins sur ta lame par exemple, c'est un genre d'écriture, une autre langue avec des lettres différentes. La langue commune de l'Entre-Monde c'est celle-là que tu apprends avec Kip depuis le début. Nous avons nos propres lettres que tu commences à bien connaitre et nos propres façons de les écrire. Attend, j'ai une idée.

Je revenais quelques minutes plus tard avec des ouvrages sur les tatouages. Ils désignaient tous une technique spécifique qui consiste à tatouer des messages.

-Ce n'est pas vraiment ce que tu connais, mais rapporté à la langue d'Entre-Monde ça donnerait ça. Par exemple. Les messages varient selon les artistes.

Plus tard, nous verrons la poésie. Vraiment plus tard.

-Attrape ce crayon, on va commencer la leçon d'écriture.

Il fallait tout lui montrer, par exemple comme tenir son crayon. Une fois la prise en main de l'outil faite. Je lui montrais comment dessiner les premiers lettres.
Elle allait mettre un certain temps à comprendre comment dessiner les lettres alors, pour ce qui est des lignes et de l'allure générale de ses gribouillis, je mis ça sur le programme d'une prochaine leçon.

Je l'abandonnais quelques instants pour aller quérir un ouvrage supplémentaire. Il n'était pas difficile à trouver et sa couverture colorée le rendait immanquable. Dedans, Hiryu y trouverait des astuces et des techniques pour écrire les lettres en respectant des repères invisibles.
Une gymnastique mentale qui allait lui changer la vie... Si elle persistait à apprendre.

L'oreille tendue, les yeux bien ouverts et un léger sourire aux lèvres, j'écoutai Eva et le savoir qu'elle m'apportait. Apprendre par exemple que les choses inscrites sur mon moi en lame était des messages, était surprenant. Peut-être était-il inscrit comment je fonctionnais ? "Brandissez la lame et tapez correctement la cible". Ou encore quelque chose comme mon nom, et des infos sur moi, voir même le pourquoi je me suis retrouvée en lame, ou comment. La curiosité montait, j'avais finalement bien fait de m'infliger cette torture mentale.

Eva me montrait ensuite des informations sur les tatouages, m'expliquant donc comment faire pour inscrire des messages sur soi. Elle en connaissait un rayon, je me demandai même si elle connaissait sa bibliothèque par cœur pour se souvenir de ce qu'elle contient si vite. Elle était incroyable... À sa manière. Enfin, Eva m'indiqua que la leçon débutait.

Ok, tout ça m'a l'air super à savoir ! C'est parti !

Accompagnant mes paroles d'un joli sourire, je pris le crayon comme l'on prend une épée, bien en main, mine vers le haut... Je me rendis d'ailleurs rapidement compte que ce n'était pas la bonne manière, ne voyant pas comment écrire comme ça. Eva m'aidait et me montrait les bonnes manières de faire les choses, puis comment tracer les premières lettres de l'alphabet.

Après de longs essais et de belles-lettres écrites en tremblotant, ma main fatiguait. La prise en main initiale laissait souvent place à d'autres... Techniques ? Tenir quasiment à la mine, mettre toute la paume, tous les doigts, etc. Eva, qui m'avait laissée, revenait un ouvrage à la main.

Urgh... C'est dur, et c'est pas aussi beau que les tiens. On fait comment ? Il y a une technique secrète ? Un pouvoir p't'être ?

Il était vrai que pour moi, apprendre était un concept assez nouveau, je n'avais jamais eu besoin de beaucoup de choses pour savoir agir et vivre, et ce peu de chose était comme respirer. Je regardais le nouveau livre, lisant tout doucement le titre à haute-voix.

En lisant ça, je vais savoir, c'est ça ?

C’est vrai qu’elle avait besoin de temps pour apprendre, surtout pour quelqu’un qui n’avait pas utilisé ses mains pour des travaux minutieux depuis longtemps, voire jamais. Au moins, elle s’entrainait… Je lui donnais le livre à couverture colorée. Les exercices dans l’ouvrage lui donnerait matière à continuer son entrainement.

-Je te le prête, mais attention, interdit d’écrire dedans. Pour t’entrainer il te faudra acheter du papier ou un cahier auprès d’une papeterie. Il te faudra du temps, beaucoup de temps, pour écrire avec aisance. Il faut te faire les muscles des bras et habitué ton poignet.

Une idée supplémentaire me vint subitement.

-Si tu connais des chansons, tu peux t’entrainer à les écrire. Tu as un rayonnage avec de la poésie et des textes de paroliers. Peut-être trouveras-tu ton bonheur.

Avant de l’abandonner, j’entassais les ouvrages de Kip et je les déposais sur le chariot de rangement du petit robot. Kip saura où les retrouver lorsque :

-Reviens demain, je laisserai Kip te faire une seconde leçon de lecture. Lorsque tu reconnaitras la plupart des syllabes on pourra faire la lecture ensemble.

La sonnette du rez-de-chaussée tinta dans l’air. Une brève et minuscule sonnerie qui grimpait dans les étages par un savant mélange de micro et de haut-parleurs cachés dans les gaines des plafonds.

-Je dois te laisser. Tu as assez travaillé pour aujourd’hui. Ah ! Une dernière chose. Lorsque tu trouveras ton cahier ou ton papier, profites-en pour acheter un stylo ou une plume qui te convient. Prends quelque chose qui dure dans le temps et qui te permettra d’apprendre à écrire convenablement.

Je la saluais d’un sourire et repartais avec nos deux tasses vides.

Ma professeur me prêtait un livre bien plus attirant que tous les autres, avec de jolies couleurs sur la reliure et la couverture. Il faisait moins peur que les autres avec leurs couleurs mornes et leurs couvertures pauvres en dessin. Je le pris, l'oreille toujours attentive, ou au moins à moitié attentive, cherchant dans une de mes poches une sorte de long tissu que je posais sur la table.

D'accord, je m'entraînerai avec ça et les chansons, si j'en trouve.

Je me frottais la tête, creusant dans ma cervelle si je pouvais me souvenir d'une chanson. La plupart des chansons me restaient sous forme d'airs, rarement sous forme de paroles... Et écrire un air, c'était impossible. Ou alors avec des "tudutu"... Mais je ne vais pas beaucoup m'entraîner. Enfin, je ressortais de mes pensées, après tout, je trouverai bien plus tard, ça ne pressait pas.

D'accord Prof' Eva ! Ricanais-je. À demain !

Je lui renvoyai le sourire, puis emballai le livre dans le tissu que j'avais préalablement sorti, lui servant donc d'armure contre la saleté. Et hop, le livre était dans mon manteau, Seitoshi, attachée dans mon dos, puis je partis de la bibliothèque, non sans regarder le tableau des missions. J'avais hâte de finir de passer ma journée, cloîtrée dans des murs à étudier des livres, aussi intéressant soient-ils. J'voulais m'amuser aussi.

Je m'arrêtai dans une boutique de matériel scolaire pour m'acheter un cahier et de quoi écrire, puis pris le reste de la journée à alterner entre écriture et lecture, et quelques exercices physiques, fallait garder la forme après tout. Le lendemain, je venais tôt à la bibliothèque. Je n'étais pas partie bien loin pour la nuit, et l'envie de passer experte dans la lecture et l'écriture était bien présente, très forte même. Je me voyais déjà crâner devant les autres aventuriers. Un tour rapide au panneau des missions pour voir si je pouvais réussir à en lire, ou à en trouver une pour dans quelques jours, puis je me dirigeai vers le fameux comptoir d'Eva.

Me revoilà ! Hurlais-je, posant mon cahier sur la table.

Depuis plusieurs heures déjà, je demandais à Kip de revoir une procédure de sécurisation de documents digitaux sensibles. La tour de cryptage intégrée au quatorzième étage était à la fois neuve et spécialement complexe. Etant un robot, j'espérais que Kip comprenne mieux que moi son fonctionnement et soit plus efficace à gérer les procédures spécifiques qu'elle imposaient.
La conscience de Kip étant limitée à la fois par sa bêtise congénitale et par l'étroitesse de ses composants, il ne cessait de s'énerver contre la machine car elle refusait les protocoles. Et après étude, je remarquais pour la énième fois que Kip sautait les étapes.
Au bord de la crise de nerf, je fichais le robot hors du quatorzième en le menaçant de le transformer en presse papier inerte et il s'enfuit au rez-de-chaussé non sans avoir entendu un "et appelle Cerclon...". Sans surprise, le robot avait déjà dévalé assez d'escaliers pour ne pas entendre la suite de la consigne. J'allais donc m'atteler à recruter du personnel supplémentaire pour les archives sécurisées de Cerclon et de Ken. Le fameux quatorzième.

Le petit robot arriva au rez-de-chaussé la mine déconfite. Il bouscula Hiryu en passant et avec un faciès triste dépeint sur ses pixels lumineux il la questionna :

-Kip... On fait une leçon de lecture aujourd'hui? Kip ... Kip ne sait pas. Kip ! Kip doit appeler Cerclon ! Kip !

Kip lança le numéro sur le combiné et tout à sa réflexion sur quel ouvrage tenter aujourd'hui et sur quelles syllabes Hiryu allait devoir travailler, il laissa l'appareil sonner dans le vide et l'androïde qui décrocha à l'autre bout de la ligne eu le plaisir d'entendre le vent.

-Kip ! On va au quatrième ? Kip !

Kip s'éloignait vers les escaliers son entrain retrouvé.