Rude ascension pour une bien noble conquête.

Alors c'est comme ça Verdi ! C'est plutôt mignon, époque moderne et de jolies rues engoncées entre des bâtisses à plusieurs étages fichées dans la montagne. C'était pas trop mal pour y passer quelques jours de vacances...
C'est tout ce à quoi pensait Lys après avoir lutté un moment pour conserver son déjeuner dans son estomac. Passer du niveau de la mer à près de mille mètres d'altitude d'un coup voilà que son corps avait du mal à apprécier la plaisanterie.

Elle sourit, essayant d'oublier la vague nausée que les basses pressions faisait s'éterniser. Elle mémorisa à peine la carte de Myra, de toute manière si elle voulait retrouver son chemin, elle aurait la sienne. D'ici là, elle se contentera de faire confiance à la jeune commissaire.
C'est fou comme une bonne nausée vous rend docile la plus maniérée des félines !

-Courage !

Oui elle en avait besoin.

-Je n'ai jamais fais d'escalade, dit-elle durant le trajet, mais j'ai toujours eu un bon équilibre.

Pour un chat... Il était presque certain que la varappe ne lui ferait pas plus peur que ça.

-L'altitude ne me dérange pas non plus.

Car elle adorait venir sur K'ouen. Elle aimait cet espace au milieu du ciel. Sortant une bouteille d'eau de son sac, elle en proposait à Myra, tout en reprenant la conversation :

-Si la chasse commence à durer j'ai prévu de quoi manger un morceau. On aura juste besoin de se trouver un abri.

Tout en se disant que ce serait bien que ça ne dure pas trop longtemps non plus. Même si une part d'elle espérait que le voyage serait long et palpitant. L'instinct de chasse...

Les premiers temps, Lys écoutait bien plus qu’elle ne parlait. Ses muscles étaient trop peu entrainés à une randonnée en montagne sur des pentes ascendantes au nivelé plus ou moins important… La pauvre respirait bruyamment et s’était tenue un point de côté durant toute une partie de la montée.

-Pour tout te dire, soufflait-elle avant d’inspirer et de se reprendre un tant soit peu, même si on en appâte un ou deux, les capturer ne sera pas une partie de plaisir.

Oh, elle n’avait sûrement jamais participé à une vraie chasse et encore moins à un safari pour capturer des animaux sauvages. Mais Lys avait un avantage sur nombre d’humains. Elle avait dans son sang cet instinct particulier aux chasseurs. Sa nature féline lui faisait connaitre aisément celle des créatures que toutes les deux espéraient approcher.
Plus exactement, elle était persuadée de déchiffrer convenablement les Sombrelunes, même si elle n’en avait jamais croisé.

-Si nous en obtenons un ce sera déjà beau. Mais l’idéal serait un couple. Nous devrions éviter les jeunes, si ces animaux sont si intelligents que ça, j’ai peur qu’ils nous poursuivent longtemps pour retrouver leur progéniture.

Elle, c’est-ce qu’elle ferait sans aucun doute possible.
Nul ne saurait lui ôter ses enfants sous son nez sans qu’elle lutte de toute ses forces pour les retrouver.

Qu’ils soient carnivores ne l’aidait pas du tout à être à l’aise. Elle-même du genre prédateur, elle sentait bien que l’apprentie commerçante et l’intérimaire ne feraient pas long feu devant un clan de Sombrelunes furieux.

Sur ces quelques mots, elle entreprit de faire pleinement confiance à sa postulante. De toute manière, la pente se fit rapidement plus abrupte. Il devint moins aisé de parler, ni même de respirer. Lys n’en revenait pas de se découvrir à chaque instant des muscles inconnus nouvellement douloureux.

-Par tous les Dieux !

Elle glissa sur une pente dont les graviers et éclats de roches ne soutinrent pas suffisamment son poids. Une belle éraflure couvrit son genoux et imprégna la toile de son pantalon d’une tache sombre et humide.
Assise sur un rocher le temps de panser l'égratignure qui menaçait de s'infecter, elle reprit son souffle et questionna avec un ton anodin :

-Qu'as-tu prévu pour capturer les Sombrelunes ?

Spoiler:

Lys ouvrait des yeux ronds comme des soucoupes. Deux sentiments contradictoires l’étreignait. D’abord, en apercevant le harnais elle sentie l’angoisse poindre. Une peur primitive et certainement millénaire devant l’idée d’être retenue captive. Cependant, plus elle y pensait et plus elle se sentait admirative.

-Tu as eu le temps de le concevoir en te préparant pour le voyage !

Oui, elle était impressionnée.
Myra avait clairement bien réfléchit à son affaire, ce que n’avait pas du tout fait Lys qui se serait jetée tête la première dans la fosse en se disant qu’elle improviserait le moment venu… On peut vivre avec un chasseur et un père ancien sanctuari, ce n’est pas pour autant qu’on sera naturellement conçu pour une capture dans les règles.
Si elle pouvait donner son avis, elle aurait bien plus laissé libre court à ses instincts félins et fait griller l’un des lièvres pour son dîner.
C’est très bon le lièvre, avec quelques herbes et un bon vin chaud !

Fin prête, Lys jeta un dernier coup d’œil à son genoux. Une croûte se formait déjà sur la peau et le picotement s’estompait à mesure qu’elle l’oubliait. Elle pourrait parfaitement marcher, il n’y aurait aucun problème de ce côté-là.
Aussitôt se remirent-elles en marche vers le territoire des Sombrelunes. Tout en silence, elles gravirent les mètres de gravier puis de roche plus abruptes. De moins en moins d’arbres bordaient les aspérités du sol, celui-ci se changeait en granit dur et rêche au touché.
La pierre scintilla au crépuscule. Le spectacle la poussa à s’arrêter quelques seconde. Le soleil nimbait d’or la montagne qui ruisselait littéralement de lumière là où la pierre brillante emprisonnait les derniers rayons rosés de l’astre couchant.

-C’est l’heure.

La Lune déjà pointait son nez avec les premières étoiles du soir.
Il ne leur restait quelques centaines de mètres à parcourir pour retrouver un pan plus touffus de la montagne. Une pinède impressionnante s’étendait alors gagnant l’autre versant du pic et se déversant jusqu’à son pied mille mètres en contrebas.

-Trouvons un endroit sûr où déposer les lièvres et où nous éviter d’autres prédateurs…

Attirer les Sombrelunes n’était pas du tout une mauvaise idée, mais le destin pourrait choisir de mettre sur leur chemin d’autres genres de créatures bien moins intéressante et tout aussi peu commodes !

La soirée serait mouvementée et fraiche ! Lys enfila un épais pull de laine près du corps. Elle aurait au moins chaud sur le haut du corps… Depuis le début du voyage elle avait apprit beaucoup de choses : entre autre, que les préparatifs sont primordiaux. Elle comprenait bien mieux pourquoi Ayame se chargeait toujours avec un sérieux inébranlable à la constitution des bagages.
Pourtant, elle m’avait toujours vu partir les mains dans les poches. Combien de fois s’était-elle représenter un K’ouen habillé d’une jupe de fourrure et armé d’une lance à la pointe d’os, le reste du mandibule fiché dans le nez, en plein hurlement bestiale dans une forêt d’un autre âge ? Si souvent que j’en étais navré à chaque fois qu’elle gloussait sans raison !

Actuellement, Lys prenait le temps de vérifier la direction du vent. C’était une petite coulée allant vers l’est, rien d’alarmant bien qu’elle songea :

-Il faudrait placer les carcasse de sorte que l’odeur aille droit sur les sombrelunes. Je ne tiens vraiment pas à attirer des ours ou des wyvern au beau milieu de la nuit.

Dans les grandes largeurs Lys était d’accord.

-Quand nous les aurons séparés, le mieux serait de se disperser nous aussi. L’une de nous pourrait faire diversion pendant que l’autre s’attèlera à capturer la créature.

C’était dangereux, mais la féline avait confiance en ses bons réflexes.

-Si tu l’accepte, je pourrais le faire, je n’ai pas peur des coups.

Mordant allègrement dans un morceau de pain bienvenu, Lys se concentra sur chaque bouchée pour ne pas s’étouffer. Puis, quand la lune s’éleva bien haut au dessus de l’horizon, elle sentit qu’il était temps d’aller chercher les Sombrelunes.

Spoiler:

La lune faisait son chemin dans le ciel indigo et trois créatures s'enfonçaient entre les arbres. Sans réponse mais pas si incompétente, Lys s'éloignait de son côté.
Elle aurait pu se contenter de capturer le Sombrelune qui approchait derrière son compagnon, mais le premier était déjà trop aveuglant pour cela. Elle eut bien du mal à détacher ses yeux du puissant animal.

Harnais ? Ah ! Oui !
Elle se saisit de la construction et s'approcha à pas de loup (ou de chat en l’occurrence) vers le couple étrange que formait la jolie blonde et l'immense créature docile entre ses mains. le cuir s'accrochait aux aspérités de la corne et finit par se laisser faire. Le sombrelune fut réellement inoffensif lorsque la dernière boucle fut terminée.

-Et de un, chuchota-t-elle.

L'autre se déplaçait avec prudence. Il était intéressé et affamé. Mais loin de ne pas avoir compris le danger qu'il courrait à se laisser aller sans crainte alors que son compagnon ne répondait plus.
Assurant une distance entre elles et lui, il allait et venait entre les arbres. Apercevant sa moitié harnachée, lorgnant les appâts, la fée, les humanoïdes si atypiques à ces hauteurs.

Il s'ébroua. Nous jaugea entre deux branches.
Il fallait l'attirer. Le pousser à rejoindre cet espace plutôt que de le pourchasser.

-Reculons derrière les arbres, le premier ne s'enfuira pas de toute manière.