Coupable ? [PV Fafnir]

J'en avais assez de devoir discuter pour quelque chose qui de toute façons nous était profitable à tous les deux, lui, sa tranquillité et moi la protection de ma Res Publica. J'étais peut-être une novice mais je n'en restais pas moins un maitre et une combattante, même si des fois ma façon de faire laissait quelque peu à désirer... Je ne risquais pas de me rabaisser à me laisser marcher sur les pieds par un dingue psychopathe, tout aussi intelligent qu'il soit. Quitte à devoir me mettre à dos le meilleur assassin de Souen. Je commençais à être sacrément remonté maintenant. Cet abruti de malade me poussait à faire ce que je détestais le plus: négocier. Et qui plus est avec un assassin. Je comptais bien lui en faire baver...

- Le mien n'est pas discutable non plus. Je commence à en avoir ras le bol de voir cet emmerdeur venir me faire chier dans mon palais. Je veux sa tête ! Et je veux être là quand elle tombera !

Ca devait faire bizarre de voir autant d'insultes sortir de ma bouche, en général je me débrouillais toujours pour rester le plus poli possible, déjà parce que ça faisait étrange de voir des insanités pareilles sortir de la bouche d'une enfant. Mais là, j'avais atteint la dernière limite de mon self-control. Et il fallait reconnaitre que Fafnir ne m'aidait pas dans ce sens. Il voulait quoi ? Que je lui livre un de mes amis et que je le laisse partir tranquillement à la recherche d'un tueur que personne n'avait jamais vu, même si j'étais persuadé de l'innocence du blond, je n'étais pas sûre que le corps que l'on retrouverait serait effectivement celui de ma Némésis personnelle.
Je grognais avant de reprendre d'une voix froide.

- Arrêtez de me prendre pour une sale gamine incompétente ! Je n'ai pas vécu plus de 20 ans dans la nature sans avoir appris à me défendre ! Non, je ne connais pas ton milieu et entre nous soit dit, je ne compte pas chercher à comprendre ! Mais n'oublie pas une chose ! Dans toute l'île je suis la seule à être assez folle pour croire en ton innocence ! Tu crois vraiment que tu vas pouvoir te balader comme ça, tranquillement ? Ils sont tous à ta recherche et ils ne chercheront pas plus loin jusqu'à ce que ce soit TA tête qui tombe !

Je pris une profonde inspiration avant de reprendre d'une voix un peu plus calme.

- Pour ton prix, dis toi que je suis celle qui est la mieux placée pour te dire où est Wergeld, mais même avec mes informations, plus tu attends, et plus il sera loin et mes renseignements te seront aussi inutiles que si tu les cherche par toi-même. On est donc dans une impasse. Toi, ta proie s'éloigne et moi je reste avec mes abrutis et mon dingue. Mais avec de la chance, il fera le ménage dans les abrutis en question à ma place, ce qui est un prix non négligeable. Même si j'ai sûrement plus à perdre que toi...

Je fis une nouvelle pause.

- Ou alors il reste une autre solution. Je te promet de ne pas te gêner si tu m'emmènes avec toi et je suis même prête à servir d'appât pour attirer le tueur sur moi. Si comme tu le penses, c'est quelqu'un que j'ai viré récemment, il ne résistera certainement pas à se venger si je me retrouve seule. Je ne te demande pas de me protéger, je sais bien que tu ne le feras pas et je peux me protéger seule. Je veux juste que tu le tues... Ça ne me mènera à rien de mettre Souen à l'envers si c'est comme tu dis pour trouver des indices qui me ramèneraient jusqu'à toi.

Retour à la case départ, on avait pas avancé d'un centième. Aucun ne voulait abandonner sa position...

- Il est bien évident que ce serait un énorme service que tu me rendrais en me débarrassant de lui, je ne me contenterais donc pas de te donner des informations sur Wergeld. Je sais me montrer généreuse mine de rien...

J'avais abattu mes dernières cartes, s'il refusait je me retrouvais dans une impasse. Il fallait vraiment que j' apprenne la diplomatie et la négociation...

Je la laissais parler, longuement puisque les longs discours sont l'appanage des politiciens. Levé je me dirigeais vers la fenêtre, m'appuyais sur le chambranle à attendre qu'elle en finisse avec son tueur et ses bonnes idées... L'emmener avec moi était la pire idée qu'on puisse avoir. Mais elle avait raison, enquêter des jours donnerait à ce maître de pacotille le temps de filer à l'anglaise. Le pire serait qu'il sache que je l'ai en visé.

-Donc... Si je résume soit je vous emmène soit je finis avec vos chiens aux fesses ? Et ?

Je riais, combien de fois avais-je réussi à éviter cette bande de faux-jetons incapables de sécuriser un palais. Rien qu'aujourd'hui j'aurais pu assassiner ce petit maître sans qu'aucun d'entre eux ne le remarque. Ils étaient tout bonnement incapable de prendre en chasse quelqu'un. Et tout le monde le sait, rien ne vaut un tueur pour traquer un autre tueur. Nous avions l'art du meutre dans la peau, un frisson de nos semblables et nous le sentions à des kilomètres.

-Ils sont pas fichus de chopper un assassin aussi visible et vous espérez qu'ils m'attrapent ?

Bras croisés sur ma poitrine, je baissais la tête en riant dans un quasi-silence. Elle avait de quoi être drôle cette petite.

-Vous êtes aussi mal informée que vos sbires. Si je vous emmène votre tête sera la première à tomber. Vous pensez sincèrement que je vais vous laisser découvrir ma façon de chasser, ma façon de tuer et vous laisser vivre ensuite ? Je refuse. Et si vous n'êtes pas décidé à m'indiquer où est ma proie je la traquerais seul. J'ai tout mon temps, Wergeld est un homme facilement décelable lorsque l'on sait où chercher. Après tout c'est un maitre.

Une pareille traque nécessitait d'anticiper les avancées de la proie, c'est comme le tireur qui vise un point vide en attendant que l'oiseau passe dans son champs de tire. L'autre solution consisterait à traquer l'elfe qui l'accompagne. Un certain Ayame dont j'ai entendu parlé, plutôt en bien. Discrêt même s'il n'était pas connu pour sa grande utilité en combat. C'était pratique.

-Je réitère ma proposition. Je vous débarrasse cette nuit de votre tueur et vous me parlez de Wergeld. C'est à prendre ou à laisser.

Même avec une bourse vide je préférai conserver mes habitudes. Emmener une enfant, cette enfant, c'était comme envoyer mon gagne pain aux ordures. Elle allait finir empalé sur mon épée avant que je ne m'en rende compte...

Le vent soufflait dans mon dos, un faible courant d'air qui rappelait à ma mémoire qu'au moindres mauvais mouvement je n'aurais qu'à sauter de la terrasse. Personne ne saurais m'attraper en plein vol. Il n'y a pas beaucoup d'individus ailés dans l'entourage du maître. Même si j'avais déjà risqué ma liberté en chassant dans les différents quartiers. Ici bas il était plus difficile de m'attraper.

Le pire dans tout ça, c'était qu'il avait raison, avec les abrutis autour de moi, nous n'avions aucune chance de le rattraper... Et Wergeld aurait des ennuis de toutes manières, je ne pouvais rien faire pour le protéger, sauf peut-être lui cacher une partie de la vérité espérant que l'autre maitre ait fini ce qu'il avait à faire à Atlantis pour qu'il puisse l'éviter. Je n'arriverais jamais à garder Fafnir dans Souen assez longtemps pour ça de toutes manières, mais je refusais de baisser les bras maintenant, j'avais besoin de l'assassin, il le savait et en jouait, c'était frustrant. Je savais Wu parfaitement capable de se défendre, surtout si Ayame était dans le coin, mais j'avais aussi entendu beaucoup de rumeurs sur Fafnir, et pas des très engageantes pour ses proies malheureusement...

Cette nuit ? Ça me laissait le temps de réfléchir à ce que j'allais pouvoir lui dire sur Wergeld et lui faire perdre encore un peu de temps. C'était pas joué mais au moins ça laissait une marge de manœuvre à l'autre maitre. Le temps que je revienne du village et que mes problèmes commencent, un peu moins d'une semaine s'était écoulée, il aurait sûrement terminé ses affaires, mais je n'étais sûre de rien, et malheureusement dans ce cas là je ne pouvais pas me permettre d'extrapoler. Il me fallait prendre une décision et vite...

Wergeld avait beau être un ami, la sécurité de Souen passait malheureusement avant tout... Je soupirais, furieuse.

- Très bien... Mais je veux une preuve... Demain je te dirais ce que tu veux savoir...

J'avais perdu... J'avais vraiment de gros progrès à faire en négociation, c'était un fait avéré... Ça ne faisait que cinq ans que j'étais à la tête de Souen, je n'avais pas beaucoup de chances de gagner une joute de ce genre contre une personne qui faisait ça depuis des années... Ma seule consolation ici était que mis à part Rin qui était dans les montagnes et ne reviendrait pas avant la fin du mois et moi, personne dans Souen ne savait où était Wergeld, même si l'assassin décidait de se renseigner auprès de quelqu'un d'autre, personne ne pourrait lui dire ce qu'il voulait savoir, nous n'en avions pas reparlé avec Rin depuis notre retour. J'étais donc la seule capable de le renseigner, ce qu'il ne savait pas, c'était que je ne comptais pas lui faciliter la tâche...

- Un conseil toutefois... Évite de venir me réveiller au milieu de la nuit... Je ne suis pas très agréable au réveil...

Je me doutais bien qu'il serait capable de venir me tirer du lit au milieu de la nuit, pour me soutirer les informations sur Wergeld... Et la seule chose qu'il trouvera sera une plante carnivore sous son nez. Certaines personnes du palais ayant déjà expérimenté se battaient pour ne plus avoir à venir me réveiller en plein milieu de la nuit, pour autre chose que quelque chose de TRES urgent... Et puis ça me laissait jusqu'au matin pour réfléchir à une stratégie...

Une preuve ? Au temps des Tsar et des rois ont apportait la tête du mort à son seigneur, mais l'époque médiévale n'a survécu qu'en Ordae aussi j'haussais clairement un sourcil à l'idée de lui apporter la tête sanglante de son assassin.
J'ignorais l'interrogation que je souhaitais formuler, elle ne m'apprendra rien de plus avant demain dans tous les cas. Je n'avais plus qu'à m'occuper du chien qui pissait sur mes bornes. Je reculai sur la terrasse à découvert et m'inclinai un sourire narquois aux lèvres.

-À demain alors maitre Caliope.

Elle était vraiment jeune pour jouer les maitre, mais elle s'en sortait pas si mal. Ma réputation me considérait comme un chien fou, dans le genre à n'obéir qu'à celui capable de me maitriser, de m'enchainer, mais rien que de voir cette petite reine je m'avouais que je n'étais pas si difficile à amadouer. Loin de moi l'idée de prendre parti, la politique n'avait pas assez de goût pour ça, mais plutôt que de disparaitre et d'aller servir le plus offrant je continuais d'accepter les ordres tel un employé banal. Si seulement elle savait, un jour je m'amuserai à lui montrer que je ne suis pas un fonctionnaire mais bien un assassin... Nous verrons cela un autre jour, quand l'idée d'être sympathique pour la première fois de ma vie me sera passée.
Tout ça pour finir par grimper sur le bord de la terrasse et de rire à gorge déployée sur sa dernière farce. Sincèrement, j'avais déjà connu mieux comme diplomate.
Je me suis envolé tout simplement, j'ai sauté du balcon pour rejoindre la corniche un peu plus haut, j'ai crapahuté sur le toit jusqu'à un coin de bâtisse pas trop ouvert aux regards indiscrêt et j'ai plongé dans le chaos qu'était la Res publica en pleine effervescence.

Une nuit pour tuer. Une nuit pour respirer l'odeur du sang jusqu'à dénicher celui qui se faisait passer pour moi. La soirée avancée, les badauds se trimballaient parfois en couple et parfois seuls, d'autre fois en groupes entiers pour vivre les festivités nocturnes que promettait la ville. Et dans tout ceci, je continuais de marcher sur les pavés le nez levé vers les lampions. Si j'avais l'air d'un limier en chasse, rien n'était si facile que de sentir l'odeur du crime. Je suivais mon instinct jusqu'à la demeure du seul ancien fonctionnaire qui m'avait paru assez louche pour croupir dans cette affaire... En fait, j'ai suivi instinctivement le seul qui portait sur lui, plus qu'un caractère instable, un filet de chair fraiche dissimulé sous ses ongles.

Il marchait le dos voûté à quelques mètres devant, ne se doutant même pas d'être suivi, il bifurqua dans le hall d'un petit bâtiment à deux étages et s'engouffra dans la cage d'escalier. Je soupirais, les appartement sont problématiques. Je ne pouvais pas suivre ce type dans ce genre de bordel sans me faire repéré directement dans l'escalier, alors d'un bond je fis le tour de la bâtisse qui ne présentait des fenêtres que sur deux façades, l'une les fenêtres étaient déjà toutes allumées, je comptais donc sur l'autre pour en voir une autre s'allumer approximativement à l'instant supposé où mon assassin serait chez lui.

Je n'avais même pas conscience que je pouvais me tromper de cible, cela était impossible à mes yeux parce qu'une petite vieille m'avait confirmé mes soupçons en m'indiquant que ce type qui avant était si jovial était devenu une véritable plaie pour le quartier en quelques semaines. La petite vieille je l'avais déjà vu quelque part et en fait je m'en foutais comme de ma première chemise, elle avait confirmé ce que je pensais être le type le plus bête de ce pays ce soir... Il avait osé s'en prendre à la seule île où il risquait sérieusement de finir avec un assassin aux fesses. Je ne pouvais pas me tromper et si c'était le cas... Le timbré qui à le culot de se pointer pour bourdonner à mes oreilles se calmera sûrement quand il apprendra que Fafnir lui même est à ses trousses. J'aurais réglé deux problèmes : ce type qui semble terrifier le voisinage et l'assassin qui piétine mon territoire.

Au premier étage une lumière s'alluma une minute à peine après que l'individu ait pénétré le bâtiment. J'entrais dans le hall, un coup d'oeil aux boite aux lettres, aucun nom n'étaient notés dessus, du moins aucun qui ait de l'importance ce soir. Les pièces de mon puzzle s'emboitaient assez rapidement, même s'il me manquait encore des éléments de réponse.

Premier étage, la porte d'appartement était entrebâillée, je poussai le battant et pénétrai mains dans les poches dans la pièce. Une chaise alla voler non loin de ma joue quand elle se stoppa nette dans son vol, elle se déplaça lentement quand l'homme qui continuait de faire pression dessus lâcha prise et couru dans la pièce principale à la recherche d'une nouvelle arme. Il n'avait pas atteint la table que la chaise que je soulevais sans la toucher alla se reposer délicatement face au meuble. L'homme récupéra une machette sur un comptoir de cuisine avant de se précipiter sur moi.

Son visage ne me disait rien, jamais personne ne me dit rien, à part quelques uns d'entre eux, cette femme qui souriait tristement n'ayant de mémoire que les dernières années de solitudes qu'elle avait vécu, la photographie d'un garçon et ce petit maître qui m'agaçait tout en me faisant rire... Les autres n'ont aucune importance.

J'empoignai mon épée et fichai la pointe sous la gorge de l'idiot, le regard vide de toute émotion, mon visage inexpressif, il lâcha son arme à présent inutile devant la longueur de la mienne. Le criminel recula et bien qu'il ne su parler je compris qu'il n'était pas un de ces fonctionnaires qu'il disait être. Ce n'était qu'un fou qui avait volé la place d'un homme. Cet homme disparu dont personne ne se souciait parce que tout le monde le croyait en vie. J'avais devant moi un voleur de corps, qui s'était substitué à un fonctionnaire dont on avait peut-être retrouvé le corps dans une rivière de Northrives...
Ses lèvres s'ouvrirent pour bégayer des supplications sans aucun sens. Je rengainais mon épée, il cru la partie sauvée esquissa un mouvement pour se relever quand mon poing s'abattit sur sa tempe, l'homme ainsi assommée je continuais de le rouer de coups jusqu'à ce que sa respiration disparaisse du bourdonnement qui me rendait sourd et ivre de rage. Je le frappais jusqu'à ne plus entendre le souffle ni les battements de son coeur. Les tambours qui me vrillait les tympans s'estompèrent avec la vie de l'assassin, quand moi-même, mon corps se calmait de cette nouvelle tuerie.

Assassina accompli je trouvais une enveloppe dans une boite perdue dans un coin de la pièce et y glissai la machette ayant servit à chacun des meurtres. Je laissais le corps au beau milieu du salon ; demain les autorités de l'île viendront voir le carnage et comme j'aurais donné l'adresse et la preuve que demandait le maitre tous sauront que ce type était un criminel tué par Fafnir... Parce que ici, il n'y avait aucune trace, rien ne m'appartenant juste les coups qu'il avait reçu, aucune véritable lutte n'avait déranger le mobilier... Ma signature.

Je revins à l'aube au palais, me faufilant dans les quartiers privés avec le risque d'y croiser un ou deux gardes... Bizarrement je n'en croisais qu'un qui avait pris le pli de se lever plus tôt que prévu, il finit avec un beau vase écrasé sur la tête sans même m'avoir vu arriver... J'entrais royalement dans la chambre de la jeune femme (jeunne fille ? Dur de se souvenir que ce n'est qu'une enfant) en claquant la porte avec révérence ...

-Bien dormi ?

Bon sang, ce que ce sourire pouvait m'énerver... Je le lui aurais volontiers fait avaler mais je n'oubliais pas que j'avais devant moi le meilleur assassin de Souen. Je tenais encore un minimum à ma peau mine de rien... Je voulais bien être tête brûlée, mais je n'étais pas encore complètement suicidaire, et je savais que c'était l'état d'esprit qu'il fallait avoir quand on décidait de provoquer Fafnir. Même si jusqu'à maintenant j'avais eu beaucoup de chance. Je savais que j'avais risqué gros en passant un bon moment seule avec lui, il n'était pas le genre de personne avec qui on avait envie de boire le thé en grignotant des gâteaux... Mais plutôt le genre de personne à qui on a envie d'enfoncer ledit gâteau au fond de la gorge en souhaitant qu'il s'étouffe avec... J'oserai jamais... Quoi que... Je pouvais lui proposer de boire un thé en ma compagnie un de ces jours... Non ? Non hein... En attendant je savais très bien que le jour où un abruti déciderait de mettre un contrat sur ma tête, j'allais le voir débarquer et ce serait certainement pas pour boire un thé... J'avais intérêt de faire attention, j'avais risqué ma peau une fois, ça me suffisait, la prochaine fois, je n'aurais surement pas autant de chance...

Une fois ma Némésis personnelle numéro deux, ma première étant Rin, partie on ne sait où, le plus loin possible de moi pour le reste de la journée c'était bien, je retournais à ma paperasse, que j'avais la subite envie de balayer par la fenêtre, et de faire mon air le plus innocent possible, "les dossiers ? quels dossiers ? pas vu...", mais ils seraient fichus d'aller les chercher dans le jardin en dessous et en plus de les traiter je devrai les trier... Sont pas très malins ici, mais quand il s'agit de me casser les pieds, ils rivalisent d'ingéniosité tous... J'avais envie de dire que quelque chose me gonflait pour être sûre qu'ils allaient se mettre à bosser et le faire, juste pour avoir le plaisir de me voir râler. J'arriverai à les faire bosser comme je voulais un jour... Mais si seulement ça pouvait marcher avec tout le monde... Je lançais un regard noir par la fenêtre par laquelle Fafnir avait disparu quelques instants plutôt même si je me doutais qu'il devait être loin et ne se sentirait pas du tout concerné par la chose...

Une fois ma dure journée finie, deux séances de cavalcades dans les couloirs et un lancé de bibelots plus tard, je pus enfin aller prendre un bon bain et me coucher. Je me doutais que ce cher Fafnir allait débarquer dans la chambre aussi je déposais des graines de ronces sur la table de chevet du côté de la fenêtre pour l'accueillir à ma façon si l'envie lui prenait de venir me tirer du lit de bonne heure, ce qui vu le peu que j'avais pu voir de lui, me semblait plus qu'évident... C'est donc prête à être tirée du lit que je me couchais, j'avais trouvé comment laissé un peu de temps à Wergeld pour gagner du temps et partir avant que Fafnir ne le trouve.

Par contre je ne m'attendais pas à être réveillée en sursaut par la porte qui claque, je levais vers lui un regard à moitié endormi et une tête de déterrée dont j'avais le secret, brevet déposé, et lui balançais la première chose que j'avais sous la main à la tête, à savoir mon oreiller, pour me retourner et me recoucher en grognant sur son manque de politesse et le besoin de sommeil des gens et finir étalée sur le matelas... Finalement, l'oreiller c'était pas une bonne idée... Ok... Tant pis pour la grasse matinée...

Je me levais à moitié dans le pâté et récupérant des habits, je partais m'enfermer dans ma salle de bain, histoire d'être un peu plus présentable qu'en pyjama et les cheveux encore plus en bataille que d'habitude. Une fois une toilette rapide faite et habillée correctement, je ressortais et le contournais pour rejoindre mon bureau ne prenant même pas la peine de vérifier s'il me suivait, je jetais un œil en passant au garde par terre et aux débris de se qui semblait être un vase à ses côtés. Je poussais un soupire désespéré.

- Que tu esquintes mes gardes, ok... Ils servent à rien... Mais ma déco t'a rien fait que je sache...

Une fois dans mon bureau, je sautais sur ma chaise, fixant mon regard sur l'homme en face de moi.

- Wergeld donc... Je pourrais te dire que je n'en sait rien, mais je suppose que tu n'apprécierais pas ce genre de réponse...

Je m'installais confortablement contre le dossier de ma chaise.

- Quand je lui ai demandé ce qu'il comptait faire après il m'a dit qu'il avait un ami à voir dans un petit village au nord du village où nous avons combattus les lions. Il devait le voir pour un problème à régler. Mais je ne connais ni le nom du village ni où il se rendait ensuite... Son territoire est vaste, s'il avait l'intention de régler tous les problèmes de la côte, il doit encore être dans les environs... Quitte à faire le boulot, autant éviter de faire un détour... Du moins c'est mon avis...

Je brûlais d'envie de lui demander qui avait lancé un contrat sur la tête du maitre de K'ouen. Ça ne pouvait être que ça à mes yeux, un membre de Souen ne pouvait pas en vouloir au maitre d'un autre miroir sans avoir une bonne raison. Et vu les rumeurs qui circulaient sur le compte de l'assassin, je me doutais que cela devait être un assez gros contrat... Mais ma curiosité n'était peut-être pas la meilleure chose à montrer à l'homme. Comme on dit, la curiosité tue le chat, mais là c'est le renard qu'elle risque de tuer... Je préférais donc me taire.

- Tu veux savoir autre chose ou c'était tout ?

J'espérais juste qu'il soit satisfait par ma réponse.

Elle était charmante au réveil... Je riais gentiment alors que nous passions devant le garde à peine en train de sortir d'une douloureuse sieste forcée et du vase qui l'y avait si généreusement conduit. Deux choses pouvaient être déduites de ce court instant entre la chambre et le bureau.
La première était simple je m'étais honteusement laissé attendrir par un maitre haut comme trois pommes. Une enfant qui, bien qu'elle prenne beaucoup de risques, ne méritait pas à mes yeux une correction que d'autres auraient ...supporté un peu avant d'en mourir.
La seconde, avec un assassin dans ces murs, elle aurait la chance de pouvoir refaire sa déco autant de fois que je la visiterai... Elle pourra assouvir ses lubies sans peine pour les anciens modèles de décorations qui subiront, eux, mon manque de politesses.

Il n'y avait pas un seul homme sur Souen qui oserait espérer pouvoir se conduire comme elle le fait avec moi. Les hommes ne servant plus vraiment à rien, j'en déduis que ce monde finirait par embaucher des enfants bûcherons et des chasseurs à 8 hivers.
Le visage neutre, un brin songeur avec mon paquet sous le bras, je refermais la porte du bureau derrière moi en reculant et en m'adossant dessus. Je croisais les bras, signe explicite de mon manque d'assiduité quand j'imaginais bien des situations comiques sans prendre la peine d'écouter grand chose... Nous y viendrons à ce que je souhaite entre, dans quelques secondes, en attendant mon regard avait balayé la salle, y cherchant de possibles gardes cachés.

Déduction tout aussi simple que les autres. Si elle ne m'empêcherait pas de partir pour trouver son ami et frère d'arme, c'est qu'elle avait un autre plan en tête. J'aurais parié qu'elle m'aurait empêché de partir. Mais il semblerait que l'autre option envisageable soit de mise. J'aurais perdu le pari, heureux que je n'ai pas mis d'argent en jeu.
J'acquiesçais machinalement à une formule qui me laissa de marbre. Quelque chose comme l'idée qu'elle puisse m'entuber... Impossible, j'avais le bras trop long et elle la cou trop court pour ça. Enfin nous y arrivions et mon regard focalisé sur elle, je tentais de suivre ce qu'elle disait sans perdre le peu de concentration qu'il m'était possible de rassembler.

-Alors c'est tout ? Il est juste parti vers le Nord ?

La révélation eu le mérite de me sortir de mes divagations intérieur. La raison d'un tel manque de concentration était le vol de nuit, la lutte et le manque de sommeil. J'étais encore plus distrait qu'à mon habitude, la situation cocasse accentuant encore cet attitude négligée. Qui pouvais-je si rien ne m'intéressait si ce n'est quelques âmes ?

-Il y a au Nord du village aux lions un armateur que Wergeld connait depuis déjà un certain temps. Armateur possédant quelques navires qui filent vers Atlantis tous les jours. Je crois en savoir suffisamment.

J'y songeais, au jour où Wergeld découvrirai l'atroce vérité sur sa mère et ce qu'elle devint pour s'être occupé d'un malheureux assassin... Notre rencontre risquait d'être sulfureuse et j'attendais ce moment avec impatience. Si la petite Caliope décidait de filer prévenir son ami, ceci étant la seconde option, car elle n'avait que deux possibilités pour protéger son compagnon, m'empêcher de partir ou me doubler, je devrais lui laisser assez d'avance pour que le jeune maitre soit au courant avant que je n'arrive. Il aurait été beaucoup trop facile de débarquer avec l'effet de surprise. Alors que s'il savait que j'arrivais, il s'armerait, se préparerait à se défendre.

Approchant du bureau, je déposais l'enveloppe tâchée sur le bois, et récupérant de quoi écrire j'y griffonnais l'adresse du corps du meurtrier ayant déjà commencé à pourir. Un large sourire fendait mon visage. Je continuais jusqu'à la porte-fenêtre et quand je fus sur la terrasse je lançais mes au-revoir si singulier.

-Quand vous verrez Wergeld, dites-lui que Fafnir est sur sa trace.

Elle avait le temps, je le lui laisserai. J'aurais le temps de dormir et de me préparer moi aussi.