[Event] Course de Chars !

Une ! Deux ! Une ! Deux !
Des créatures énormes avançaient à leur rythme sur le sable tassé de la belle et immense plage de Trinity. Des parcours avaient été dessinés à l'encre magique et devait normalement formé les couloirs pour chaque coureur... La foule s’amassait déjà aux abords des pistes, on voyait des fanions, des banderoles et des visages peinturlurés aux couleurs d'un miroir ou de l'autre.
L'esprit de compétition faisait des ravages sur la santé mentale des visiteurs. Les touristes s'en donnaient à coeur joie à coup de flash photographiques... Quant aux gens qui organisaient l'évènement, il semble que les fonctionnaires soient pris de nausées : il faut avouer une chose : un Bernard l'Ermite ça ne sent pas bon. Alors un Bernard l'Ermite qui fait trois mètres de haut, ça sent encore moins bon.
Des vendeurs de pinces à linges et quelques petits malins essayaient d'écouler leurs stocks d'artéfacts et technologie anti-odeur... Il y avait aussi des vendeurs de boissons et des colporteurs de friandises plein la foule qui ne cessaient de crier "Qui veut ma terrine de scarabée !" "Ils sont chauds mes chichis !"... "Un peu de sang de nymphe pour enivrer cette après-midi !". Pour tous les goûts et toutes les couleurs, comme toujours.

Une ! Deux ! Une ! Deux !
La téméraire Temari ne cessait de gigoter autour des paguroidés, les animaux fins prêts, les participants n'avaient que l'embarras du choix. Et c'est sous l'oeil de notre invitée qu'ils eurent le plaisir d'aller s'installer sur les selles surmontées d'un haut de tente.
Empoignant un haut parleur elle entreprit de leur donner quelques consignes, le minimum syndicale selon elle :

-Restez au maximum dans vos couloirs durant l'épreuve ! Votre objectif se trouve à dix sept kilomètres d'ici. Le parcours peut être semés d'obstacles prévus ou imprévus. (hrp : à vous de voir faites-nous rêver ! )

Vous n'avez jamais vu des Crabes de la taille d'un éléphant s'allonger sur la plage au beau milieu de la journée ? Elle, si. Et il est si difficile de déplacer les crustacés à la carapace minérale que les coureurs devront bien s'y faire !

-Lorsque vous approcherez de la fin d'une étape vous aurez dix minutes de repos pour laisser respirer vos montures. Profitez-en pour boire. Il fait chaud à Trinity alors hydratez-vous...

Son regard noir et son poing en l'air suffisait à la rendre (presque) menaçante... Autant les prévenir que si l'un d'eux s'évanouit elle se fera un plaisir de l'envoyer se faire soigner sur la lune. Généreuse et bienveillante Témari...
Et avant qu'elle ne commence une plaidoirie sur "comment bien traité vos montures et sur l'importance d'aimer les tartes" un jeune homme bougon lui ôta le haut parleur des mains. Il parait que l'individu est maitre...

-On sonnera le départ dès que vous êtes prêts. Arnachez-vous et que le meilleur gagne !

Ceci fait, il s'assura que le haut parleur soit protégé des mains du Maitre du jeu (c'est un comble !) et gagna l'estrade où l'attendait quelques autres personnalité.
Il leva un révolver à bouchon au dessus de sa tête, et quand les participants lui eurent signifié que tout était bon...

On entendit un "Pan!" étouffé et la foule prise de liesse au départ des immenses créatures.

C'est parti !
Un petit rappel s'impose :
Vous devez poster UNE fois par semaine. Chaque post vous offre le droit de participer au quizz du dimanche.
Le quizz qui sert d'épreuve à chaque fin d'étape ouvre le dimanche vers 20h dans la CB (pas avant, mais parfois un peu plus tard selon la disponibilité de chacun. N'hésitez pas à aller en discuter dans le sujet de l'évènement si vous souhaitez qu'on vous attende un petit peu).

Heureusement, même géant, un Bernard l'Ermite ça n'a pas un cerveau énorme. En tout cas, celui d'Uriel n'avait pas l'air d'être une lumière; il avait suffi du coup de feu de départ pour effrayer l'immense bestiole, qui, affolée, se jeta en avant en cliquetant de toutes ses pincettes. Uriel tourna aussitôt au vert de gris comme son estomac se mettait à tanguer sous la force du roulis. L'odeur de sa monture n'arrangeait rien, malgré la pince à linge juchée sur son nez (il aurait bien acheté quelque chose de plus distingué, mais au moins, les pinces à linge c'était pas cher).

Faisant abstraction de son épouvantable mal de mer, il encouragea la bête à accélérer à l'aide du bâton qu'on lui avait fourni. Il ne pouvait guère que lui tapoter la carapace, les parties plus molles du corps de l'animal étant bien à l'abri sous sa coquille, mais apparemment ça suffisait; les crustacés ne devaient pas beaucoup apprécier les vibrations.

Uriel jeta un oeil alentour et se vit en bonne position grâce au départ fulgurant de son partenaire au modeste cerveau.

"Wouhou, allez Bernard !" exulta-t-il d'une voix nasillarde, faisant preuve d'une extraordinaire imagination pour donner un petit nom à sa monture.

Deux kilomètres plus loin, l'excitation du départ était retombée et la nausée d'Uriel était pire que jamais. Il commençait à avoir chaud et soif, mais la simple perspective de boire lui donnait envie de vomir. Il savait pourtant très bien qu'il avait le mal de mer, il avait passé toute sa vie à se déplacer en volant ! S'il n'y avait pas eu les spectateurs, ça aurait pu valoir le coup d'investir dans le titre Sarkina. Il aurait embarqué Bernard dans le parchemin, et hop ! à tire d'aile jusqu'à la ligne d'arrivée. Ce n'était de la triche que si ça ne marchait pas, après tout.

Pendant qu'il fixait nostalgiquement le ciel parfaitement bleu de Trinity, un concurrent avait commencé à gagner du terrain sur lui. Pas content du tout, Uriel se reprit et se remit à donner des coups de bâton à Bernard. Pourtant, sa monture semblait avoir décidé de l'ignorer. Ce qui lui servait de tête était tourné vers son voisin, et il se mit à produire toute une série de cliquetis. L'autre Bernard l'Ermite répondit de la même manière, et bientôt il s'arrêtèrent tous les deux pour se tourner autour, à la grande consternation de leurs cavaliers.

"Hé dites donc, vous pourriez maîtrizer votre bessstiole !" s'indigna la femme-lézard qui montait l'autre crustacé.
"Moi ? Vous ne manquez pas de culot !" râla Uriel. "Commencez donc par balayer devant chez vous avant d'aller prêcher la bonne parole ailleurs !"

Sous peu ils s'engueulaient comme des poissonniers, pendant que leurs montures se montraient de plus en plus affectueuses. Ils durent interrompre leur dispute quand Bernard fit mine d'escalader son - sa ? - condisciple. Uriel ne savait pas comment les Bernard l'Ermite se reproduisaient avec cette énorme coquille, mais il ne tenait pas à le savoir. Il repassa du rouge de la colère au vert très pâle en une seconde chrono, et de sa paume jaillit une salve de foudre qui alla s'abattre dans le sable près des deux créatures.

Terrifiées, elles se jetèrent aussitôt dans deux directions différentes. Uriel aurait poussé un soupir de soulagement, s'il ne s'était rendu compte que Bernard fonçait maintenant dans la direction inverse de la course. Il croisa quelques autres concurrents qui le pointèrent joyeusement du doigt, hilares, avant de réussir à reprendre le contrôle de sa bête et à lui faire faire demi-tour.

Lorsqu'ils atteignirent la fin de la première étape, Bernard s'effondra dans le sable et Uriel se précipita à bas de sa monture pour aller vider le contenu de son estomac dans le seau que lui présentait un androïde serviable.

Par miracle, Uriel et Bernard repartirent parmi les premiers des concurrents. Uriel soupçonnait Bernard d'avoir forcé l'allure à la fin de la première étape pour essayer de rattraper sa dulcinée qui caracolait encore devant. Le gigantesque crutacé était même si fringuant après ses quelques minutes de repos qu'Uriel eut du mal à le convaincre de rester tranquille jusqu'à ce qu'on leur donne le signal du départ. Il s'était tellement agité que quand le moment vint enfin de s'élancer pour la seconde partie du parcours, le visage d'Uriel était assorti à la couleur de la mer et il regrettait sérieusement la bouteille d'eau qu'on l'avait convaincu de boire. Et sa pince à linge commençait à lui faire mal au nez.

On lui fit signe de repartir. Stoïque, Uriel relâcha les rênes et Bernard fusa en avant, les pinces levées bien haut dans son enthousiasme. Uriel aperçut la femme-lézard et sa monture qui disparaissaient derrière un coude de la plage. Bernard aussi devait les avoir vus, car il accéléra tant et si bien qu'ils doublèrent un concurrent en projetant une gerbe de sable de chaque côté.

Uriel entendit un grand beuglement et se retourna pour voir une espèce de géant tout nu avec des flammes en guise de cheveux lui adresser de grands gestes d'une massue épaisse comme le torse de l'ange. Uriel subodora que le sable avait failli lui éteindre les cheveux, ou bien qu'il lui grattait les parties innommables. Ou bien il était juste mauvais perdant. Quand on voyait le "matériel" qu'il emmenait dans une petite course amicale, ce n'était pas impossible.

"Désolé !" cria-t-il tout en sachant que c'était futile.

En effet, la brute leva son arme plus haut encore et ses hurlements de rage se changèrent en torrent d'insultes et de menaces sanglantes. Uriel se plaqua une main sur la bouche pour ne pas vomir quand il commença à évoquer ses entrailles. Heureusement, Bernard était assez rapide pour le distancer très vite.

Ils dépassèrent un autre participant, qu'Uriel s'assura de doubler très loin sur le côté, avant que Bernard ne commence à montrer des signes de fatigue.

"Et voilà !" râla Uriel. "Tu vois ce que ça donne, tes bêtises ? T'as intérêt à pas me lâcher avant la ligne d'arrivée !"

Bernard ne lui fit même pas la grâce de cliqueter des pinces en réponse. Bon, il n'avait probablement pas assez de neurones pour le comprendre, mais quand même. Ils prirent un virage autour d'un éperon rocheux et abordèrent une nouvelle section de plage.

Presque tout de suite, quelque chose fonça sur le visage d'Uriel. Il plongea à plat ventre sur son siège et sentit quelque chose de visqueux lui frôler l'épaule. Frissonnant de dégoût, il releva les yeux pour voir un véritable ballet de petites méduses flotter paresseusement dans les airs. Le spectacle aurait pu être beau. Le soleil éblouissant illuminait la chair translucide des méduses d'une lueur mauve; avec le ciel d'un bleu pur, le turquoise de la mer tranquille, le sable d'un jaune pâle parfait et le contrepoint vert sombre de la forêt non loin, il y avait de quoi trouver la scène féérique.

Sauf que les méduses faisaient vraiment le minimum syndical pour s'écarter de la course des Bernard l'Ermite qui leur fonçaient dessus, et comme tous les concurrents avant lui, Uriel fut forcé de faire de grands gestes du bras pour les convaincre de se pousser. L'une d'entre elles réussit quand même à lui rentrer en plein dedans et s'attacha affectueusement à son torse. Avant qu'il n'ait pu maîtriser son dégoût et la retirer de là, une autre profita de sa distraction pour venir s'écraser sur son visage. Elle lui chatouilla gentiment le nez et les oreilles, avant de glisser sous le vent de la course jusque dans ses cheveux où elle sembla très contente de se nicher.

Presque paralysé d'horreur, Uriel se mit à faire des moulins de bras frénétiques pour écarter le reste du banc. Quand ils parvinrent à la fin de l'étape, il était encore en train d'essayer de démêler la seconde méduse de ses cheveux en geignant :

"Aïe. Aïe. Aïe."

Uriel était fatigué. C'était vraiment n'importe quoi, cette course, et il n'avait qu'une envie, passer la ligne d'arrivée et aller prendre un bain ! Son épuisement n'était cependant pas tel qu'il envisage de renoncer à la première place... par contre la fatigue de Bernard, elle, risquait de poser problème. Quand il fut l'heure de repartir et que le crustacé géant n'y mit pas beaucoup d'enthousiasme, Uriel fut contraint de l'encourager malgré la nausée que cela lui inspirait :

"Allez, qu'est-ce que t'as, p'tit vieux ? Tu n'as plus envie de retrouver Bernadette ? Elle ne risque pas de s'intéresser à un mollasson pareil !" le houspilla-t-il sans cesser de le harceler de coups de bâton. Puis, luttant contre l'envie de vomir : "... Je suis sûr qu'on peut même vous trouver un petit coin discret à la fin de la course. Allez quoi, accélère !"

Il n'arrivait pas à croire qu'il en était réduit à donner des conseils de drague à un fruit de mer géant. Qui n'en avait rien à faire, d'ailleurs.

Un grand braiment lui fit tourner la tête, pour voir le géant tout nu de tout à l'heure se rapprocher dangereusement sur une monture encore fringante. La brute brandissait toujours son arme et avait déjà repéré Uriel, le fixant avec un grand sourire mauvais. Uriel pâlit et accéléra encore le rythme de ses coups de bâton.

"Dis donc, je sais qu'on n'a pas toujours été les meilleurs amis du monde," dit-il à un Bernard indifférent, "mais c'est plutôt cool, non, de faire cette course ensemble ? Ok, t'as pas la meilleure conversation qui soit, et tu pues un peu... beaucoup ; mais t'as... d'autres qualités... sûrement. Alors s'il te plaît, aide-moi à ne pas me faire écrabouiller ?"

L'allure de Bernard ne changea pas d'un pouce. Il eut même plutôt l'impression qu'il ralentissait. Uriel jura, jeta un coup d’œil par-dessus son épaule pour s'apercevoir qu'il pouvait déjà compter les dents pointues du géant ricanant, et en désespoir de cause, balança un éclair à la monture de son adversaire. Le crustacé s'arrêta net, apparemment paralysé - de peur ou de surprise, Uriel ne savait pas trop - et miraculeusement, Bernard n'apprécia pas du tout non plus. Il accéléra sensiblement tout en, bien entendu, bifurquant pour se jeter droit vers la falaise qui séparait la plage des terres.

Saisi d'un vif sentiment de déjà-vu, Uriel se pendit de tout son poids aux rênes, ce qui ne sembla faire aucune différence.

"Pas par là ! Sale bête, j'ai dit... Aaaah !"

La falaise se rapprochait dangereusement. Affolé, Uriel lança une nouvelle salve de foudre dans le sable à côté de Bernard. La bête tourna aussitôt pour reprendre à fond de train la direction correcte de la course, tandis qu'Uriel versait hors de son siège et se cramponnait de toutes ses forces à son rebord, victime d'un bref vertige dû à l'utilisation de son pouvoir.

Il se hissa à nouveau à bord, épuisé et haletant.

"Raah, j'en peux plus... C'est bientôt la ligne d'arrivée ?"

Des cris lui répondirent. Il se hissa en position assise pour voir, plus loin vers le centre de la plage, un groupe de concurrents qui s'était englué dans ce qui semblait être des sables mouvants. La femme-lézard de tout à l'heure était dans le lot, et elle eut de grands gestes de colère en le voyant passer sans encombres près de la falaise ; Bernard continuait d'avancer à grande vitesse, sans même remarquer la présence de sa dulcinée. Estomaqué, Uriel répondit à la femme par un geste de la main lent.

"C'est vraiment n'importe quoi, cette course" décréta-t-il en reprenant les rênes.

Bernard finit par s'épuiser peu de temps avant l'arrivée, ce qui fit qu'ils parcoururent la dernière ligne droite complètement au ralenti. Uriel dut le pousser et le tirer jusque-là, pour finalement s'écrouler dans le sable à côté de lui.

"Bon" dit-il, à bout de souffle. "Ben, c'était pas si terrible !"

Tout à sa satisfaction, il ôta sa pince à linge avec un geste grandiloquent. Son estomac le regretta aussitôt.