Le rôle d'un père

Il m'étaient tombés dessus. Encore une fois. Avec plus de rage que jamais. Les coups pleuvaient, je n'avais pas réussi à me défendre. Mon pouvoir avait été esquivé grâce à une bonne préparation de leur embuscade, mes dagues, offertes à Noël par Hiryu m'avaient été arrachées facilement. Yülina n'était pas là car je ne l'emmenais pas au travail. Je serrais les dents, ayant décidé de ne pas leur donner le plaisir de montrer ma douleur, ou pire, laisser des larmes m'échapper. Dans ces moments là, la seule chose à faire était d'attendre qu'ils se lassent. Le temps sembler être suspendu, les secondes semblaient être des minutes. Jusqu'à ce que :

-Oh mince, voilà Gabriel, on se casse !

-Depuis quand t'as peur de lui Charly ?

-Depuis qu'il est pote avec le bijoutier ! Pas envie de me faire bouffer par ses animaux moi !

Avant d'avoir pu dire ouf, ils avaient tous disparu me laissant à terre, le corps endolori et dans l'incompréhension la plus totale. Il avait peur ? Comment... Je décidais finalement que cela n'avait pas d'importance quand un élancement soudain me tira une plainte. Je soupirais puis me redressais, serrant les dents pour ne pas laisser échapper ma douleur. Quelqu'un s'approcha rapidement et je finis par effectivement reconnaître mon père qui tendis une main vers moi :

-Ne me touches pas !

Je le repoussais, me recroquevillant sur moi-même. Je ne voulais pas qu'il me voit dans cet état de faiblesse, je ne voulais pas de son aide, je ne voulais pas de lui tout simplement...

Rappel : Dans ce RP, il ne s'agit pas de Kénan mais de Gabriel Argette, le père de Lylla

L'homme réfléchissait depuis plusieurs jours, voire plusieurs semaines au moyen de se rapprocher de sa fille. Il la connaissait trop bien pour savoir que peu importe la façon de l'aborder elle allait le repousser, ils étaient dans l'impasse depuis bien trop longtemps pour qu'elle accepte de lui parler aussi simplement.

Il descendait la rue, toujours en réfléchissant quand il entendis des cris et des exclamations. Intrigué, il s'approcha et le spectacle qui s'offrit à lui lui fit mal au cœur. Là, recroquevillée contre un mur, se trouvait sa fille, les vêtements sales d'avoir frotté par terre dans la poussière, les cheveux défaits. Pas besoin d'être devin pour reconstituer les derniers évènements. Son premier réflexe fût d'aller la relever mais elle le repoussa avec force. Sans se démonter, et sans ajouter un mot, il se releva et tranquillement ramassa les deux dagues qui traînaient au sol pour les ramener à Lylla.

-C'est à toi ça... Je me trompe ?

Elle les lui arracha des mains en le défiant du regard. Il n'insista pas, s'éloignant de nouveau légèrement, attendant que sa fille se relève. A son regard assassin, il répondit :

-Je ne partirais pas si c'est ce que tu souhaite. Contrairement à ce que tu sembles penser, tu es importante, surtout pour moi, je suis ton père, au cas où tu l'aurais oublié...

Je l'observais sans mot en le fusillant du regard tandis qu'il faisait ses aller-retours. Pourquoi restait-il près de moi ? J'en avais pas besoin de lui ! En comprenant qu'il ne lâcherait pas l'affaire je me relevais en levant les yeux au ciel, mais dû me rattraper bien vite à un mur à cause de la douleur présente dans mon ventre. Ils n'y étaient pas allés de main morte ces enf*rés ! Aussitôt il fût à côté de moi, prêt à me rattraper :

-C'est pas ton rôle, dég*ge. T'en a rien à faire en vrai. Ta femme à déteint sur toi, tu fais pas attention à ton image d'habitude...

Il se mit à rire et je le fixais, les yeux écarquillés. Il savait rire lui ? Il reprit son sérieux aussi vite, me fixant avec ce regard si sérieux que je connaissais si bien :

-Alors c'est quoi mon rôle de père si ce n'est pas de prendre soin de ma fille ?

Alors que j'allais répliquer qu'il n'était rien pour moi et que je ne voulais pas de lui dans ma vie, il se retourna :

-Grimpe. Tu n'es pas capable de marcher, et encore moins de voler actuellement. Je te ramène à la maison. Et tu n'as pas le choix. Même si ça me désole, tu peux me détester, c'est ton droit, mais ça n'empêche pas que je reste ton père et je ne peux pas te laisser dans cet état

Je fis la grimace, il avait raison à mon plus grand déplaisir. Et je savais aussi de qui je tenais mon entêtement. Je m’exécutais, et montais tant bien que mal sur son dos, nouant mes bras autour de son cou étouffant de nouveau un gémissement et il se mit en route sans un mot. Nous nous dirigeâmes en silence vers chez nous, à travers ces rues que nous connaissions tous deux par cœur. Arrivés devant la grande maison qui était notre lieu de vie je voulu descendre, mais le démon ne l'entendit pas de cette oreille, refermant sa prise sur mes jambes pour ouvrir la première porte et commencer à grimper les escaliers.

-C'est bon, je peux me débrouiller ! Depuis quand t'as les clés toi ? Je t'interdis de rentrer chez moi !

Il fit la sourde oreille, ouvrant calmement la porte et refermant derrière lui. C'était sans compter sur la présence de ma super garde du corps Yülina qui se mit immédiatement à grogner, avec un peu en retrait ma petite Navidé un peu perdue qui ne savait pas vraiment qui elle devait défendre

L'homme évita de justesse l'animal qui tentait de le mordre au passage pour se diriger jusqu'au salon et déposer son enfant dans un fauteuil avant de l'observer avec attention

-Qu'est-ce que tu veux ? C'est bon ! T'as fait ta bonne action, tu peux partir maintenant !

Il souffla un peu. Elle ne pouvait pas comprendre qu'il n'y avait rien de calculé ? Qu'il n'agissait que par instinct ? Il ressortit de la pièce en lançant

-Je veux simplement m'assurer que tu ailles bien. Et ça irait plus vite si ce dragon n'essayait pas de me mordre à la moindre occasion. Et après je te laisse, promit

Il entendit Lylla continuer de râler quelque peu avant de rappeler ses animaux et leur réclamer un câlin. Il sourit un peu puis se dirigea vers la salle de bain pour prendre du désinfectant et une boite de mouchoirs puis vers la cuisine pour remplir deux verres d'eau. Il emporta le tout au salon où sa fille le fixa avec un regard circonspect :

-Tu fais quoi là ? Je suis assez grande pour m'occuper de moi-même ! Yülina calme-toi c'est rien, il va vite partir...

Il admira quelques instants l'apparente complicité entre Lylla et la Linéore quand cette dernière se désintéressa de lui pour apporter du réconfort à sa maitresse non sans lui jeter de temps à autres des regards méfiants tandis qu'il s'approchait doucement pour nettoyer le visage de son enfant dont la lèvre avait éclaté. Puis, il procéda de même avec les petites griffures de ses bras, appliquant ensuite un peu de désinfectant sur chacune. Il procéda avec délicatesse pour ne pas lui faire trop mal. Puis il se releva, récupérant les mouchoirs l'eau sale et le désinfectant se retenant de l'embrasser sur le front, sachant pertinemment qu'elle allait le repousser.

-J'ai finis, je te laisse tranquille, je range juste tout ça avant...

-Attends juste un truc : Depuis quand tu connais Elliot ?

Le démon se mordis les lèvres, dos à sa fille avant de répondre

-Je repasse demain pour vérifier que tout vas bien. Tu me reposeras ta question à ce moment là OK ? D'ici là repose toi bien. Et ... Yülina c'est ça ? Veille bien sur ta maîtresse d'accord ? Vous deux d'ailleurs. Elle a de la chance de vous avoir comme protectrices...

Et l'homme sorti de la pièce sans un mot de plus. Après avoir rangé ce qu'il avait dans les mains, il partit, refermant la porte à clé derrière lui puis rentra dans sa propre demeure, sans parler de ces derniers évènements à sa femme.

Dès que j'entendis la clé tourner dans la serrure je soupirais de soulagement. Malgré la gentillesse de mon père, je n'arrivais pas à lui pardonner, et sa présence chez moi me mettais mal à l'aise. Je refusais de m'avouer que j'avais vraiment eut besoin d'aide, besoin de lui surtout. Ses gestes m'avaient fait penser à ceux d'Elliot il y a quelques mois, et cela faisait naître beaucoup d’interrogations dans mon esprit. Malgré les fenêtres fermées. Je commençais à avoir froid. Mais je ne voulais pas bouger de mon fauteuil, j'étais bien là, blottie contre ma Navidé et ma Linéore. Malheureusement, cette dernière en décida autrement en s'écartant pour me ramener mon pyjama. Le message était plus que clair.

-Non ma grande j'ai pas envie de bouger, prends pas la mission qu'il t'as donné si sérieusement. Allez revient me faire un câlin ! Yülina viens là ! Steuplé !

Finalement je cédais et me traînais tant bien que mal jusqu'à la salle de bains pour me changer puis allais jusqu'à la cuisine pour attraper la tasse alchimique offerte par Morgan, pas décidée à aller dormir. Je retournais ensuite m'affaler douloureusement dans le fauteuil avec ma tasse, roulée en boule. Je m'étonnais de ne pas trouver la Linéore à mes côtés, mais elle revint rapidement près de moi, traînant avec elle un plaid qu'elle abandonna plus ou moins sur mes genoux

-T'es trop mignonne ! Allez, j'ai le droit à un câlin maintenant ?

Elle ne se fit pas prier pour s'installer près de moi, et je me blottis de nouveau contre elle après avoir finit ma boisson chaude et m'endormis ainsi, apaisée pour un petit moment par la présence des deux animaux.

Le démon se releva, n'arrivant pas à dormir, l'esprit encore préoccupé par l'état de sa fille et par sa dernière question. Comment allait-il lui expliquer qu'il avait été quémander de l'aide à la sirène ? Il ne lui en avait manifestement pas parlé au vu de sa question et le démon ne souhaitait pas que sa fille et l'ondin soient en froid par sa faute. Il préférait encore que toute la colère de sa fille se déporte sur lui, quelque part, il en avait l'habitude. En soupirant, il se releva, décidant d’essayer de voir comment sa fille se portait. Il se rhabilla puis grimpa à l'étage pour ouvrir la porte dont il avait toujours un double des clés sur lui. Il pénétra ensuite dans l'appartement sombre et silencieux. Seule la lumière de la cuisine était allumé à première vue, mais personne dans cette pièce. Il jeta par acquis de conscience un regard dans l'atelier, personne non plus, ce qui le rassura. Elle n'était quand même pas si bornée que ça ! Il la découvrit finalement dans le salon, emmitouflée dans un plaid, les bras enroulés autour de ses animaux, la tête contre eux. Elle dormait profondément bien que de petits sursauts l'agitaient régulièrement montrant que ce sommeil n'était pas si calme que ça.

Le démon s'approcha notant la tasse vide non loin. Il tenta de soulever sa fille mais dû esquiver la dragonne qui était restée vigilante et qui venait de tenter de le mordre. Il murmura :

-Chuuuut. Je repars vite, je veux juste la mettre au lit OK ?

Après avoir négocié pendant quelques minutes avec l'animal qui semblait ne pas pouvoir le supporter il obtint enfin l'autorisation de prendre son enfant dans ses bras pour la déposer dans son lit où il la borda avant de l'embrasser sur le front puis il sortit, souriant en voyant la Linéore se rapprocher de sa maîtresse et cette dernière la serrer instinctivement dans ses bras. Et la Navidé qui suivait juste derrière. Elles s'étaient bien trouvées celles-là. Il rinça la tasse et la posa sur le bord de l'évier avant de redescendre se coucher l'esprit un peu plus en paix.

Je me réveillais doucement avec les rayons du soleil. Curieusement, je me sentais reposée. En ouvrant les yeux, je me découvris dans ma chambre alors que j'étais sûre de m'être endormie dans le salon. C'était à se demander si j'étais somnambule... Yülina sentit mes mouvements et se retourna pour frotter sa tête dans mon cou et me saluer à sa manière. Dans mon dos, je sentais Blitzen remuer également.

-Arrête ça ! Ça chatouille !

Au moins, je savais pourquoi j'avais bien dormi entre le super oreiller de Leiline et les deux miss. Le combo gagnant ! Je tentais de fermer de nouveau les yeux, mais c'était peine perdue, j'avais réveillé les ventres sur patte, et celles-cis me firent bien comprendre que ma nuit était terminé à grand renfort de coups de tête et de petits grognements. Elles en vinrent même en m'enlever ma couette en tirant dessus.

-C'est bon, j'ai comprit, j'arrive...

Je me relevais, grimaçant quelque peu tout de même. La nuit avait été profitable mais n'avait tout de même pas guérit les bleus et autres coupures. Je servis leurs gamelles aux affaméEs avant de me diriger vers la salle de bain. Une douche plus tard, je ressortis, les cheveux attachés en une haute queue de cheval, vêtue d'un jean noir et d'un sweat à capuche bordeaux bien confortable. Je ne devais aller à la boutique que cet après-midi, je pouvais prendre mon temps ce matin. Je sortis, après avoir enfilé mes baskets et attrapé un sac. La dragonne s'engouffra par la porte sitôt celle-ci ouverte préssée de faire sa ballade matinale. Je m'envolais au dessus de l'Arcos suivie de près par l'animal, ignorant les signaux douloureux que m'envoyaient mon corps. Je rejoins finalement la boulangerie la plus proche pour m'acheter à manger. Une fois mes petites courses faites, je rentrais à la maison pour enfin me prendre mon petit déjeuner. Je commençais sérieusement à avoir faim. Je finissais mon repas quand j'entendis toquer à la porte...

Le démon toqua à la porte en fin de matinée. Il aurait pût entrer sans qu'on lui ouvre, mais il préférait ne pas s'attirer plus les foudres de sa fille. Il risquait déjà de se faire claquer la porte au nez alors autant ne pas aggraver son cas... Elle lui ouvrit la porte et il évita son regard, mal à l'aise. Il savait qu'il devrait lui parler, s'excuser, s'assurer qu'elle allait bien, répondre de suite à ses interrogations de la veille, mais les mots ne franchissaient pas ses lèvres. Ce fût elle qui brisa le silence d'une voix glaciale

-Salut, Gabriel. Tu veux quoi ?

Il déglutit pesant ses mots et raffermissant sa voix pour ne pas laisser paraître son trouble

-Voir comment tu vas. Et répondre à la question que tu m'as posé hier...

Elle fronça les sourcils puis s'effaça en soupirant pour le laisser entrer ce qu'il fit sans se faire prier. Elle le laissa planté dans l'entrée, vaquant à ses occupations comme s'il n'était pas là, rangeant sa table de petit déjeuner, suivi de près par une Linéore qui ne la lâchait pas d'une semelle jetant de temps à autre au démon un regard méfiant. Gabriel finit par aller s'asseoir autour de la table observant toujours les faits et gestes de son enfant, accordant un caresse au renne qui venait le renifler avec curiosité. Une tasse de café atterrit bien vite devant lui. Il n'eut pas le temps de dire quoi que ce soit que l'ailée lui montra le couloir d'un mouvement de tête, la tasse alchimique dans les mains

-Le salon est plus confortable

Il acquiesça, se levant à sa suite pour se rendre dans l'autre pièce. Là, chacun choisit sa place et Lylla s'installa dans un grand fauteuil où immédiatement son dragon la rejoignit alors que le Navidé se semblait pas vraiment savoir où aller

-Comme tu vois, je vais très bien...

Je me blottis confortablement dans le fauteuil, le regard fixé sur le démon, sur la défensive. Je n'avais pas oublié mes questions de la veille, mais il s'était introduit chez moi presque de force, cet appartement était mon refuge, mon havre de paix, même si je le trouvais parfois bien vide. Il semblait chercher ses mots, il évitait mon regard, ce n'était pas bon signe. Qu'avait-il fait ? Je finis par forcer les choses d'un brutal :

-J'ai pas toute la journée !

Il s’éclaircit la gorge, cherchant toujours ses mots :

-Je ne voulais pas... Mais je n'avais pas le choix tu ne nous écoute jamais. Je ne pouvais pas te laisser partir...

-De quoi tu parles ?

-L'idée de ton emménagement ici... Elle vient d'Elliot... Je lui ai demandé de l'aide, il t'encourageait à partir, en pensant bien faire, mais... Enfin, je vais pas te faire un dessin ! Tu n'aurais jamais été tranquille avec... avec tout ceux...

-J'ai compris c'est bon arrête.

Ma voix était froide, je n'en croyais pas mes oreilles. Tout ce cirque pour quelque chose que je savais déjà en plus ? Il me prenait pour qui en fait ? Je décidais d'en jouer un peu, mimant la suspicion :

-Tu lui as fait quoi ?

-Mais rien voyons ! On a parlé, confronté notre vision des choses. Et le moins que je puisse dire c'est qu'il ne mâche pas ses mots !

Cette dernière phrase me tira un petit sourire. C'était du Elliot tout craché ça ! L'ondin était adorable, mais plutôt franc :

-Et c'est tout ?

-Comment ça ?

-Been c'est rien. Tu parles avec qui tu veux après tout. Même si j'aurais aimé que tu me le dise de suite, au lieu de t'approprier les idées de génie d'Elliot ! Tu as autre chose à avouer ?

Je ris légèrement, un peu plus détendue, même si je n'étais pas prête à devenir de nouveau proche de lui, il me semblait désormais mieux comprendre sa vision des choses, et peut-être se souciait-il plus de moi que je ne l'imaginais. C'était ce que pensait la sirène après tout, et il avait souvent raison

Lui qui s'attendait à une explosion de colère le voilà bien étonné. Un sourire malicieux étirait les lèvre de sa fille quand elle ironisa sur le ridicule de son hésitation. Elle avait tant changé en si peu de temps. Il s'autorisa un léger sourire en respirant plus librement.

-Non, rien d'autre. Juste... m'excuser de ne pas réussir à être là pour toi comme je le devrais

-Les chiens font pas des chats. Et les démons font pas des an... euh non attends j'ai rien dit ! Bref. Je dois me préparer pour cet après-midi.

Il voyait son regard fuyant et ses joues rougissantes et comprit le message. Son départ était souhaité. Il déposa les tasses dans l'évier avant de sortir, se retenant d'embrasser son enfant sur le front pour la saluer avec l'impression d'avoir fait un grand pas en avant. En glissant la main dans sa poche, il sentit une barrette sous ses doigts

-Ah oui, j'allais oublier. J'ai retrouvé ça dans l'entrée tout à l'heure, je crois que tu y tiens...