Une rosevive en provenance du Grand Marché

Le Grand Marché était lui aussi accessible pendant les fêtes. Plein à craquer car il profitait de l'affluence que générait le Marché de Noël. Je mis du temps à trouver la fleuriste aperçue dans mes souvenirs.

Cette démarche allaot clôturer ma soirée "cadeaux de Noël". Il ne me restait qu'une seule personne à qui offrir un cadeau. Meliel. Sûrement le seul Maitre que je connaissais peu, pas du tout, juste de nom et pour l'avoir vaguement aperçu lors de quelques instances. Un mec immense qui manque visiblement d'oxygène là-haut. Cela dit, son caractère original en faisait une personne compliquée à cerner. Quoi lui offrir était alors une question aux solutions insolubles.

Jusqu'à ce qu'Atrya me parle de Rivetiel, de son fleuriste et des essences uniques qu'on y trouvait. J'y allais par curiosité, espérant trouver le saint-Graal me permettant de retrouver ma cheminée, un fauteuil et un verre de Torrent pour terminer convenablement cette soirée.
Ou bien Xénon. C'est clairement mieux, non ?

-Bonjour.

J'entrais dans la boutique, l'air de quelqu'un qui n'achète pas souvent des fleurs...

La fleuriste avait la peau gris clair, des longues oreilles pointues tombaient de part et d'autre de sa tête ronde un peu écrasée, lui donnant l'air d'une souris aux yeux immenses. Elle les avait vert comme l'eau d'un lac, brillant d'intelligence.
La fleuriste approcha de Wergeld Ulsarys en personne.

-Bonjour monsieur.

Elle ne souriait pas inutilement. Le client ne venait pas chercher un sourire mais quelque chose de précis. Lisible sur son visage et clair comme de l'eau de roche. Le Marché de Noël n'avait pas satisfait ses besoins, il avait trouvé refuge dans sa boutique.

-Que cherchez-vous ?

Une fleuriste et me voilà à ne plus trop savoir ce que je fais ici. Elle avait le regard inquisiteur de celui qui sait déjà ce que je vais demander.

Je glissais mes mains dans mes poches, me renfrognais un peu. Héritage de dizaines d'années à vivre en zone sauvage, mes réflexes sociaux étaient, sûrement, irrécupérables.
Le fait de savoir que Ayame lui-même désespère sur mon cas me gratifie d'une forme de fierté et de honte.

-J'ai besoin de faire un cadeau à une personne qui est... Un peu spéciale. Bizarre. Un peu timbrée. Mais foncièrement gentille. Bref, un cadeau original. Vous auriez un truc à me conseiller ?

Une personne bizarre. Spéciale.
C'est quoi ce descriptif qui ne veut rien dire ? Il essaye de lui faire deviner qu'il connait le Santa en personne ? D'un soupir bref, une main désignant un bouquet de rosevive sur le comptoir à sa droite, la fleuriste répondit dans un sursaut d'agacement :

-Ce sont des roses, oui, elles chantent, quand elles sont dans l'eau. Vous pouvez les offrir à n'importe qui, même à quelqu'un que vous n'aimez pas. Elles fânent lentement pour maximiser le boucan... heu, le murmure...

Puis elle retourna à ses pots de fleurs à arranger avant de perdre tout sens commun à cause des clients qui ne savent pas expliquer leur besoin.

Je n'étais pas souvent reçu comme ça dans les commerces. Le compte en banque rempli à ses avantages chez la plupart des commerçants, même les moins aimables. Celle là avait la palme et moi je me rendais compte que j'avais pris de mauvaises habitudes à force de vivre en ville.
Par exemple, celle qui consiste à être bien reçu chez n'importe qui.
En forêt, c'est l'inverse, on s'habitue à ne jamais être reçu nulle part... Sauf à coup d'épée.

-Va pour le rosier alors.

Je lui donnais mon badge pims. Je n'allais pas sourire, pour une fois que je ne suis pas obligé de faire des efforts, autant en profiter.
Je repartais avec une plante sous le bras qu'un livreur accepta de faire livrer sur K'ien avec un message de fêtes.