Les indispensables de l'aventurier

J'avais depuis peu décidé de faire certains achats qui me semblaient de plus en plus importantes et indispensables. J'avais d'ailleurs entendu que ces achats sont disponibles à un certain commerce : le Vandavel. Un grand vaisseau volant, on y faisait de la "technomagie". Tout ça était assez obscur, mais de ce que j'avais compris, on y trouvait des enchantements et des articles enchantés.

Mon titre perçant activé, j'arrivais sur la plateforme du Vandavel, les cheveux dans le vent et l'air déjà bien plus frais qu'il y avait quelques minutes quand j'étais encore dans une ville de la zone extérieure. Le rafiot était incroyable : grand et surtout dans les airs. Ce n'était effectivement pas un ragot, mais bien la vérité. Je me penchai sur les bords du navire, regardant en bas et ne voyant le sol que bien plus bas. Un grand sourire aux lèvres, totalement émerveillée par le véhicule, je me retournais sur le pont pour la raison de ma venue. Je hurlais pour que quelqu'un vienne me prendre en charge :

Salut ! Je veux acheter un...

Je pris un temps pour trouver le nom de l'article que je voulais, après tout les noms étaient très spécifiques, même s'ils se rapprochaient de ce que je voulais. Le temps profitait aussi aux habitants du navire qui pourrait sûrement arriver en cours, et entendre ce que je voulais.

Je veux acheter un "sac profond" et une "tente à bidule dimensionnel", ou un truc du genre. Ah, et j'aimerais que mes objets dans le sac viennent dans mes mains quand je les veux, ouais comme ça, par magie.

Un sans-faute, pour une fois que j'avais de la mémoire pour des choses que je ne comprenais pas.

-Cessez de hurler je vous prie, jeune hooligan! Il y a une porte d'entrée à ce bâtiment. Et j'en suis son heurtoir, alors vous allez me faire un plaisir de baisser d'un ton et de respecter les règles bienséantes de la politesse !

Murray ronchonnait comme à son habitude. Il tenait à son calme relatif sur cette ménagerie volante qu'était le Vandavel. Alors qu'un jeune homme se pointe en hurlant à qui voulait l'entendre, cela lui faisait pousser des pointes de courage qu'il aurait été bien incapable d'avoir en situation normale.
Toujours fut-il qu'il regretta immédiatement ses paroles et s’emmura dans un silence de mort au moment où le regard d'Hiryu finit par croiser le sien.

Courageux, mais pas à ce point.

C'est les yeux dans le vague, réveillé pendant une sieste après avoir travaillé une grosse partie de la nuit sur une grosse commande pour un client, que j'ouvrais la porte, les cheveux en bataille, des cernes sous les yeux et une tasse de café remplie à raz-bord.

- B'jour-'vnue auVandavel-quessquej'peux faire pour vous ?

Mal réveille, j'avais tendance à mâcher mes mots. Et comme mon cerveau endormi n'arrivait pas encore à lire les signaux que m'envoyaient mes yeux – un client ! UN CLIENT !! Position commerciale demandée, ceci n'est pas un exercice !- je présentais à mon futur client une pose bien peu professionnelle.

La porte a parlé. Hein ? La porte a parlé ! Alors c'est ça la Technomagie, les portes parlent, et elles sont chiantes. Je comprends pourquoi les objets sont pas vivants, en fait. Qu'est-ce qu'ils parlent, et qu'est-ce qu'ils gueulent ! Et lui, il parle d'une manière bien trop soutenue, il n'y a que les gens chiants qui parlent comme ça. Je lui lançais un regard noir, quelque chose qu'on pourrait traduire par un "tais toi ou meurs", l'accompagnant d'une réponse contrastant totalement. Je jouais avec lui.

Et c'est comme ça qu'on parle à une femme ?

Je retins un rire, personne ne me traitait comme ça - chez les vivants - et ils avaient bien raison. Je n'avais rien d'une femme ordinaire, enfin pourrait-on dire que je le suis ? Une allure de guerrière, de vagabond, et puis... J'suis une lame avant tout !

Un homme arriva ensuite, visiblement réveillé par mes cris. À en juger par sa manière de se présenter, il ne devait pas être du genre très formel. On allait s'entendre ! Il me parla, j'en déduisis que c'était le propriétaire ou un employé, même si je n'avais rien compris à ce qu'il me racontait, répondant par une simple répétition de ma demande.

'Lut ! J'veux une tente magique et un sac sans fond, avec un enchantement qui me permet de faire sortir les objets que je veux directement dans ma main, rien qu'en y pensant ! Enfin, si on peut. On peut ?

Je m'approchai de lui, s'il devait continuer à me répondre comme ça, fallait que je puisse l'entendre.

Agression auditive ! Agression auditive ! Je levais mes mains en l'air sous la surprise et l’enthousiasme de ma cliente clignant des yeux sous le soudain ne arrivé de nombreuses informations nerveuses -couleur/son/lumière/visage trop proche/température/ou est Sash-.

Mon mug tomba comme une pierre sur le bois du pont. La totalité de ma vaisselle étant enchantée pour ne pas se briser et ne pas reverser le contenu, je me baissais pour ramasser ma tasse de café fumante avec l'anse, sans réfléchir à aucun moment que la tenir à l'envers était nettement moins pratique pour boire. Après quelques secondes a souffler sur le fond de ma tasse, puis la retournant pour boire -enfin- une gorgée de café, j'invitais la boule de nerf à entrer dans le navire.

Chassant de la main les chauves-souris de papier plié qui se baladaient dans le couloir, je guidais l'arrivante dans le salon et ouvrait mon coffre-inventaire du magasin pour lui sortir une TARDIS et tirait mon « arbre à sac », véritable porte-manteau géant couverts de modèles de Sacs sans fond.

- Pour vot' enchant'ment, c'possible, mais faudra payer un sus - 'justement et coût de production, tout ça. C'va pas êt' gratuit, est-ce que heaaannnn....

Je restais là quelques secondes, bouche ouverte et yeux dans le vague, avec que mes réflexes nerveux se mettent en branle, envoient des signaux aux muscles du bras dans une série d'ordre – Monter bras, plier coude, tourner poignet, verser café, avaler café, réveiller reste du corps. Ne surtout pas oublier de baisser bras -, ce qui mit fin à mon absence des derniers instants.

- 40 pour la tente, plus 20 pour le sac, plus 20 pour le rajout d'enchantement, total de 80 pims. Si ça vous va, j'vais avoir besoin d'une mèche de cheveux pour que l'enchantement ne marche qu'avec vous. Es'que ça vous va ?

Meme les gorgées de cafs n'avaient pas pu relancer les protocoles de clientèle. Je décidais d'abandonner l'idée de me fatiguer à paraître aimable et avenant. J'étais trop endormi pour ça.

Spoiler:

Ce navire commençait à révéler sa vraie nature, vrai musée d'objets enchantés. Le heurtoir que j'avais déjà vu, maintenant, la tasse du propriétaire, puis, une fois entrée à l'intérieur, des chauves souris de papiers. Je ne sais pas comment quelqu'un de normal réagirait, mais, pour ma part, j'avais juste les étoiles pleins les yeux. On voyait que la loque humaine qu'était le technomage ne trahissait pas sa renommée. Le Vandavel était la preuve tangible de ses enchantements.

J'essayai d'attraper les bestioles de papiers qui volaient au dessus de ma tête, regardant bien tous les recoins du navire pour ne rien manquer de l'extraordinaire de ces enchantements. Nous arrivions enfin au salon où le Technomage me sortait mes achats: ma future maison qu'était la tente, car oui, de mes 18 ans en Entre-Monde, je n'avais fais que vagabonder d'auberge en auberge. Il était temps de vagabonder de villes en villes, mais avec ma maison à moi.

Puis, les sacs sans fonds, présentés par dizaines. J'en choisis un de bonne taille, en bandoulière, le pointant du doigt avec un sourire niais.

Lui, et pas de soucis pour les c-.

Je fronçais les sourcils, essayant de comprendre ce qu'il se passait dans la tête de l'homme en face de moi lorsqu'il s'arrêta. C'était vraiment lui qui avait crée tout ça ?..

M'sieur, t'es là ?

Il reprit machinalement ce qu'il faisait en calculant le prix. ça au moins, il savait le faire même dans cet état... Il les veut ses pims !

Ouais, par contre, l'enchantement fonctionnera comment exactement ? Les objets sortiront d'eux même pour atterrir dans ma main ? Ou ils apparaîtront comme par magie dans ma main ? Et puis, la tente, elle se monte toute seule ou pas, hein ?

Puis, d'un doigt, utilisant mes projections tranchantes à une échelle ridiculement petite, je coupai un de mes cheveux, lui tendant entre deux doigts.

Enchanter un mannequin pour servir de boite vocale quand je voulais dormir était la prochaine étape de cette journée. Ou alors, inventer un genre de coffre à l'extérieur du hall où les gens pourraient prendre du matos en l'échange de PIMs. Un genre de Mimic comme décrit dans les bouquins de fantasy de la bibliothèque...

Tout pour dormir un peu plus.

Bon un peu d'explications s'imposaient quand même, sinon elle allait revenir avec une clé à molette ou quoi que ce soit qu'elle rangerait dans son sac, planté au travers de la main.

- Quand vous voudrez récupérer une de vos possessions depuis le sac, il se matérialisera en prenant en compte votre position actuelle et la... Vous savez quoi – j'agitais les mains en l'air devant moi. J'avais la flemme d'entrer dans un explication complexe – c'est magique : Vous voulez votre objet, boum, il est soudain dans votre main. Par contre, faut le ranger dans votre sac pour que l'enchantement marche. Ca veut dire aussi que votre objet doit pouvoir entrer par l'ouverture.

Je vidais ma tasse – qui bien entendu se remplit à nouveau. Ça faisait 1 an que cette tasse se remplissait non-stop – un raté de l'enchantement Valhala.

- Et non, la tente ne se monte pas toute seule. Mais y'a un schéma de montage. Si vous l'voulez bien, j'vais aller bosser.

Laissant la tasse de café sur le bureau – à l'envers, bien évidemment, je quittais la zone en traînant les pieds.
Mon travail prit une bonne heure. 10 minutes de travail et juste une petite sieste - qui s’avéra être un bon somme de 45 minutes, je remontais au rez-de-chaussée avec un sac fraîchement enchanté, une autre tasse de café et des cernes profondément creusées. Je m'affalais dans mon fauteuil, avec la ferme intention de ne plus y bouger.

- 'llez s'y, testez donc. Pensez à votre nouvelle tente et elle se matérialisera. Faites gaffe à vos pieds si vous n'arrivez pas à la rattraper : c'est pas léger, léger, les TARDIS...

Mes yeux papillonnaient – je sortais encore de mon rattrapage de sommeil involontaire. Une nouvelle gorgée de café me réveillerait suffisamment longtemps pour valider la commande et conduire mon client à la sorti, mais je préférais attendre qu'il me dise que tout était ok...

Le Technomage m'expliquait comment l'enchantement fonctionnait. Je l'observais en hochant légèrement la tête, les yeux pleins d'étoiles. Sa technique me semblait définitivement incroyable. De la téléportation d'objet !

C'est magique... Dis-je à mi-voix, comme me parlant à moi-même.

Pour ce qu'il m'indiquait sur la tente, j'étais un peu déçue. À vrai dire, tout me semblait si merveilleux, que je pensais que la tente pourrait même m'éviter ce moment de montage : le moment que je redoutais en quelque sorte. Il quitta ensuite la pièce pour travailler, me laissant seule.

Pendant la première demi-heure, j'examinai la pièce, espérant trouver des outils enchantés amusants : comme la tasse dont je m'amusais à faire tomber et à replacer sur le bureau. Pas de casse, magique. Le reste du temps, je le passai sur un fauteuil à jongler avec mes dagues, ou à jouer à envoyer mes shurikens en l'air comme une pièce dans un "pile ou face".

L'homme rentrait enfin, me surprenant en train de lancer une dague qui se plantait dans le parquet. Je la récupérai en m'excusant. Je l'aurais rattrapé s'il n'était pas entré de suite ! 'Sa faute... Enfin, c'est son parquet aussi, donc on est quitte ? Bref, il m'indiquait de faire le test, c'était le moment de vérité.

D'accord.

Je tendais les bras en avant, paumes vers le ciel. "Tente, tente, tente", pensais-je. Pouf ! Elle apparaissait dans mes bras alors que je manquai de me faire emporter par terre par le poids de la tente.

Oula ! Mes yeux s'illuminaient comme ceux d'une gamine qui découvre un nouveau jouet. C'est parfait, merci m'sieur magique !

Je lui passai mon badge PIMS, encaissant le tout et repartant aussi vite que j'étais venu avec mes nouveaux joujoux.