L'antre des fous

[j'ai une commande pour le Technomage]

Flippant, avec mes couleurs ternes je colle au paysage, sauf que les arbres morts et tout ces trucs me donne l'air verdâtre. C'est le peu de le dire, le portail tordu et grinçant m'avait filer une trouille d'enfer en arrivant, j'en serrais mon planeur contre moi comme un bouclier face à l'inconnu. Mon doudou métallique faisait peu d'effet aux ombres qui bougeaient au rythme de cette baraque hantée.

Devant la porte, n'ayant jamais vu de heurtoir de ma vie, je porte mes mains sur le bois et je fais "toc toc". Dingue comme je suis polie et bien élevée quand j'ai les miquettes.

-Y a quelqu'un ! ? C'est bien chez le technomage, ici ? !

Un truc colle sous ma botte, j'ai marché sur quelques chose de visqueux et vert/marron. Je secoue la jambe frénétiquement pour le déloger de ma semelle et quand la chose s'échappe elle part se recoller sur le sol un peu plus loin. J'aurais juré avoir marché sur une oreille en décomposition.
Mon teint vert s'accentue et je ne souhaite qu'une chose, c'est d'en finir avec mes courses.

Môssieur le Technomage venait de sortir de sa petite cave à vin avec un sandwich dans la main, devant bien manger un bout après sa grosse prise de sang du jour ! Il avait besoin d'alimenter sa cuve avec, s'il voulait le transformer en fluide noir par la suite. Enchanter des objets à longueur de temps, c'est vraiment amusant, mais lorsqu'on a besoin de sacrifier son propre sang pour le faire, c'est tout de suite moins drôle ! Il se dirigea vers le salon, bien décidé à y engloutir son sandwich au poulet pendant que cette chère Helen Letableau lui ferait la morale à cause des miettes qu'il laisserait trainer partout... mais des toc-tocs soudains résonnèrent dans le hall. Rainer se précipita vers la porte en silence, histoire de vérifier s'il s'agissait d'un client ou de l'un de ses amis du coin ! Dans le premier cas, ce serait assez problématique...

A l'extérieur, un certain heurtoir nommé Murray était on ne peut plus content : pour la première fois, une personne était assez gentille pour éviter de se servir de lui ! Enfin ! Enfin ! Quelqu'un se souciait de sa santé ! S'il avait eut des yeux, ceux-ci auraient été plein d'étoiles ! Enchanté par cette rencontre, il décida de répondre à la charmante demoiselle qui se tenait devant lui.

- Vous êtes bien chez lui, mademoiselle ! Vous avez de la chance, il est dans le manoir en ce moment ! Ha, vous ne savez pas combien je suis heureux d'enfin rencontrer quelqu'un qui se soucie de nous, pauvres heurtoirs ! Le bois de cette porte est si dur et les gens passent leur temps à me claquer contre lui ! Vous ne vous imaginez pas les maux de têtes terribles que ça me donne ! En parlant de ça, d'ailleurs...

Et le voilà partit dans un interminable monologue sur sa solitude quotidienne et la violence avec laquelle tous ces salauds de sacs à viande esclavagistes se servaient de lui ! Bon, d'accord, voir une tête de mort parler n'est jamais très rassurant. De l'autre côté de la porte, notre cher ami Rainer en était devenu tout pâlot ! Il n'avait aucune envie de recevoir de clients et le heurtoir l'avait trahit en révélant à l'inconnue qu'il était bien dans le manoir ! Pire : vu son enthousiasme, il n'hésiterait pas une seconde à la laisser entrer ! Saleté de Murray ! Heureusement, le dit heurtoir la retiendrait suffisamment longtemps à l'extérieur, le temps de mettre un plan machiavélique à exécution ! Brave Murray !
Réfléchit, réfléchit... le sandwich au poulet se dessina dans l'esprit du scientifique... cerveau en éruption ! Il se précipita dans la salle de bain où il changea rapidement de sexe, devenant ainsi miss Rain, et enfila une robe blanche et légère. Il (enfin, elle) s'élança ensuite dans sa cave et piqua un sprint jusqu'à son laboratoire top secret, où elle ouvrit sa cuve à sang... avant d'y plonger les mains. Il était temps de faire fuir le client !

A l'extérieur, Murray continuait son monologue, complètement enfermé dans son petit monde, se fichant pas mal de tout ce que son interlocutrice forcée pouvait bien lui dire ! Un vrai moulin à parole, celui-là !

- ... mais vous verrez, un jour ce seront les heurtoirs qui dirigeront le monde ! Et là, on leur montrera !

D'un seul coup, un grand cri se fit entendre à leurs oreilles, bien que le heurtoir n'en ait pas. Le cri d'une jeune demoiselle en danger de mort ! Rain mettait son petit plan à exécution, hé hé hé... bien qu'elle se soit fait un peu mal à la gorge en s'époumonant de la sorte. Murray en avait profité pour crier comme une fillette effrayée, tout froussard qu'il était, et se risqua à un c'était quoi, ça ? pas très rassuré (et rassurant) en s'imaginant sérieusement que l'inconnue le saurait mieux que lui.

La porte s'ouvrit, lentement... et c'est une jeune fille vêtue d'une robe déchirée et autrefois blanche qui apparut aux yeux de la fée. Robe autrefois blanche mais désormais maculée de sang... tout comme le visage (pas assez) livide de la demoiselle. Du sang, oui, oui ! Elle en était recouverte des pieds (nus) à la tête (pleine de cheveux) ! Rain, dans un geste lent, sans un mot, tendit sa main ensanglantée vers la fée.

Si elle ne prenait pas ses jambes à son cou après ça, il faudrait bien prendre sa commande...

...

Et oui, notre stupide Technomage venait de bousiller l'une de ses robes ainsi qu'une partie de sa réserve juste pour ça...

[Désolé, c'était juste pour faire mon petit show habituel, mais je compte bien prendre tes sous te donner ce que tu veux ]

Spoiler:

On m'avait prévenu que le technomage vivait dans une baraque loufoque. Alors un heurtoir qui parle... Rien de bien étonnant. Même si lorsqu'il se mit à parler je sursautais le coeur battant trop vite dans ma poitrine. Après les marais et le reste de jardin flippant, je subissais la piplettattitude d'un heurtoir de mauvais goût... Je soupirais avec lassitude quand il se dit que me raconter sa vie était une bonne idée.

*Et si tu m'ouvrais la porte, vieux machin ?
Dité... Du calme, la maison est louche, mais y doit pas y avoir de monstre dans le coin. Respire, t'es toute pâle ma fille ! *

Beh, non. Il n'avait pas l'air motivé pour, par contre il continuait de parler, débitant ses petits tracas plus vite que mémé Gertrude de la conciergerie. Même Näevi en fut assez exaspéré pour préférer se gratter le ventre plutôt que de prêter attention à la chose qui parle.

Mais soudain...
Le renard bondit dans mes bras le poils hérissé de toute part. Et si lui ne pouvait pas crier, moi, si. Alors en réponse au hurlement strident, je hurlais à mon tour, bondissant sur mes pieds mieux que sur un ressort. La porte s'ouvrit et un fantôme couvert de sang tendit le bras vers moi (je dis fantômes parce bon, avec du recul elle y ressemble, sang, cheveux clairs, peau clair, robe blanche déchirée : ceci est la dame blanche des contes qui font peur qu'on raconte aux petites fées pour qu'elles fassent des cauchemars). Renonçant à tout sens commun, je lâchais le renard dégainais le revolver tout neuf qui me démangeais depuis un bout de temps -totalement inutile sur un fantôme, je sais- et le pointais sur le front de la jeune fille "spectrale".

Quand le canon frôla le bras bien solide de la créature et se couvrit de sang, il y eu un "tilt" retentissant dans ma tête. Un revolver n'aurait aucune utilité face à un fantôme, mais... Je l'ai touché. Le canon a touché quelque chose de dur quand je l'ai sorti et ce n'était pas le saint esprit. (ça rime !)
De la peur à la colère, chez moi il ne faut qu'une seconde. Même Näevi s'éloigna ayant apprit à connaitre mes sautes d'humeur plus retentissantes que le gros calibre pointé sur la tête du faux-fantômes.

-Me touche pas, tu vas me tâcher !

Je laissais filer quelques secondes, le bras tendu tremblant de devoir pointer une arme sans rien en faire.

Oups ! Le coup du fusil n'était pas prévu ! Évidemment, elle ne tombait sur des clients téméraires que quand elle avait vraiment envie de glandouiller en paix ! Galère ! Du coup, si l'autre femme tirait, ce serait assez embêtant... il fallait trouver une ruse absolument imparable pour éviter de s'attirer les foudres armées de la terrifiante dame qui était venue frapper à sa porte. N'écoutant que son courage, elle... leva les bras en l'air et débita à une vitesse incroyable :

- C'pas moi j'ai rien fait z'avez aucune preuve c'est Murray qui m'a obligée !

Ce qui ne manqua pas de faire pâlir notre crâne-heurtoir (d'accord, il faut avoir beaucoup d'imagination pour avaler ça), qui manqua d'en laisser tomber sa mâchoire ! Du Rain tout craché, ça ! Faire porter le chapeau aux autres ! Fort heureusement, le heurtoir savait bien que cette accusation était infondée et irrecevable, c'est pourquoi il ne gémit qu'un peu et réussit à se retenir de se mettre à pleurer comme un bébé. La "dame blanche", quant à elle, restait figée comme une statue, bras en l'air, en essayant de savoir laquelle de ces deux solutions était la meilleure : rester là ou ramasser un caillou pour le lancer à la figure de la dame armée avant de fuir dans le manoir ? Avec un peu de recul, elle se trouva fort tentée par la seconde mais... non. Il valait mieux se tenir tranquille et donner à la cliente ce qu'elle voulait !
N'empêche, c'était une drôle de scène qui se jouait là : un vrai faux-fantôme effrayé par une femme elle-même morte de trouille !

- Hum... j'veux dire... c'est pour quoi ? J'peux vous aider ?

Voilà ! On se calme, on respire, et on fait mine de rien... porter ce genre de vêtements est tout à fait normal, il n'y a aucun mal à être recouvert de sang de partout... je vais bien, tout va bien ♫ Rain se força même à sourire, un peu faussement vu la menace pistolée qui pointait son canon droit sur elle !

Ne jamais sous-estimer le pouvoir d'une arme à feu. C'est peut-être pour ça qu'on me déconseillait d'en acheter, parce que je pourrais faire des grosses bêtises avec. Tant mieux ! Si ça m'évite la crise cardiaque.
à force de tendre le bras, j'ai une crampe au coude et l'épaule engourdie. Ce fut la seule chose qui me força à lâcher du leste. Je rangeais soigneusement l'arme avec la maladresse de celle qui vient d'apprendre à se servir d'un joujou et je me détournais faisant comme si j'appelais le renard à revenir vers ici.

-Le danger est passé, tu peux revenir, trouillard.

De lui ou de moi, celui qui a fait le bond le plus haut c'est lui, mais j'ai crié le plus fort. J'armais un sourire à peine rassuré avant de lancer un regard au heurtoir qui parle. L'air de dire "si y a encore un truc louche là dedans c'est toi que je plombe". Le renard vint se coller contre mon mollet. Comme s'il sentait d'avance les aventures que nous subirions en passant cette porte.

-Je viens voir le technomage, on me l'a conseillé pour faire enchanter mon planeur. Et j'ai une connaissance qui m'a dit qu'il vend des sacs dans lesquels on peut tout ranger sans souci de taille ou de poids.

Je rivais mon regard sur la jeune fille et j'attendais... Elle pouvait bien me guider après m'avoir fait une frousse pareille ! Sans compter que je dois m'assurer qu'elle ira pas révéler au monde que Dité a peur des fantômes.

Pfeuuuuuh ! Le danger semblait passé, l'autre venait de ranger son arme et ce n'était pas plus mal... renaître dans un œuf, ce n'est pas toujours très amusant, alors autant éviter d'en abuser ! Rain baissa enfin les bras, résignée à prendre la commande de cette cliente qu'il valait mieux satisfaire si on ne voulait pas finir en omelette. Enchanter un planeur, rien que ça ! Il lui fallait l'un de ces vieux sacs sans fond qui trainaient au grenier, aussi... bah, au moins, ça libèrerait un peu de place. Bref ! L'adolescente se retourna, présentant son dos à la cliente, avant de lui lancer :

- Le seul, l'unique, le grand Technomage...

Et là, elle se retourna vers la cliente, une paire de lunette de soleil sur le nez (magie, magie), mains sur les hanches, dans une position qui aurait pu être très classe... sans tout ce sang et cette robe soudainement transformée en haillons.

- ... est juste devant vous !

Rain rajouta un sourire colgate, histoire d'augmenter son capital classe et de faire bonne impression devant la cliente... même si après le petit coup du fantôme hémoglobinaire, ce serait difficile. L'adolescente, après avoir prit la pose, entra dans son manoir, invitant son invitée à en faire autant. Murray ferma la porte une fois tout ce beau monde à l'intérieur.

- Il me reste des sacs sans fond au grenier, j'irai en chercher un après ! Pour ce qui est du planeur, on verra plus tard... pour le moment, je crois que j'ai besoin d'une bonne douche. Vous pouvez toujours m'attendre dans le salon. dit-elle en indiquant la direction du dit salon du bout du doigt.

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Nous allons ici marquer une ellipse temporelle... durant laquelle cette chère Helen Letableau, magnifique chef d'œuvre d'un certain Reblanc, dut probablement faire un monologue interminable à la cliente, bien plus difficile à supporter que celui de Murray. Le tout avec un air condescendant, blâmant sûrement Dité sur son manque d'éducation et ses manières peu élégantes. Peu importe ce que la cliente aurait pu lui dire, ce brave tableau pouvait lui répondre du tac au tac... et les répliques de notre brave Helen sont toujours cinglantes ! Une vraie langue de vipère, celle-là !
Rain, quant à elle, une fois propre et correctement vêtue d'un jeans et d'un t-shirt surmonté d'une blouse de chimiste (sans oublier une paire de lunettes, normales cette fois, qui ne lui étaient d'aucune utilité étant donné qu'elle n'avait aucun problème de vue) ; décida d'aller chercher le sac sans fond. Sans se presser. Laisser quelqu'un avec Helen était une belle punition en soi, alors autant prendre tout son temps avant de revenir au salon !
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Rain, après de très, très, très longues minutes, revint enfin au salon avec un sac dans les mains.

- Donc, pour le planeur... je suis censée en faire quoi, exactement ?

Autant aller dans le vif du sujet sans tourner autour du pot, ça ne ferait que retarder les moments de glandouille intense.

le grand ?
Je l'aurais bien contre-dite, elle fait aussi petite que moi, et ce n'est jamais très sérieux de se targuer d'être grand dans un cas comme celui là. Je levais un sourcil et croisait les bras à l'écouter.
Attends une minute fillette... C'est elle le technomage ? On m'avait dit un homme ! Je pensais tomber sur un vieux barbu grincheux pas une môme plus jeune que moi qui est couverte de sang et habillée dans une relique récupérée dans les usines de retraitement des déchets de Tern ! Non mais, elle est boucher aussi pour arrondir les fins de mois ?

Et j'ai même pas le temps de lui dire deux mots qu'on me colle devant un portrait infernal qui parle plus que le heurtoir. En fait, ici, les choses parlent toutes, j'ai même peur de m'assoir en considérant le risque de me faire bouffer le mini-short par une paire de dents assoifé de popotins. Le pire n'est pas qu'elles parlent, ces choses, mais qu'elles profitent que je sois là pour épuiser leur stock de salive avant que je ne sois partie. Il doit pas parler beaucoup avec eux le technomage, la technomage, magicienne, bref... la blondinette. Et v'là que le tableau ose critiquer mon style vestimentaire.

-Je t'ai demandé si t'avais des cochons dans le pantalon, moi ? Tu devrais mâter ton décolleté, il est encore plus plongeant que le miens. Même si moi, j'ai de quoi mettre dedans vieille harpie. Au fait, t'as peut-être envie d'un ou deux trous d'aération supplémentaire ?

Et elle continue de déblatérer et de trouver des reproches et des remontrances à faire. Surtout que je suis une vilaine insolente sans aucune éducation qui s'habille comme une souillon.

-Je sais pas qui a voulu peindre une guenon dans ton genre, mais je plains se pauvre peintre, il a dû vivre l'enfer le plus interminable. Rassures-moi on l'a bien payé au moins pour le dédommager ? Non parce que vu ta tronche, c'est même une prime de risque et un séjour en maison de repos dont il aurait eu besoin. Au passage t'as une tâche, là... Mais si là !

J'avais récupérer de la suie dans la cheminée poussiéreuse pour en appliqué sur le tableau. Pas de chance la blondinette était de retour... J'essuyais mon doigt sur un bord du cadre à peu près discrêtement en faisant mine de vouloir le replacer et je souris à la fillette.

-En fait, mon planeur est un assemblage de deux ailes métalliques et d'un harnais. Mon souci c'est qu'en terrain plat et sans précipice dans le coin je suis forcée de courir pour réussir à décoller et c'est pire quand niveau vent c'est le calme le plat. J'aurais juste besoin qu'il prenne l'air plus facilement. Histoire de courir moins, ou pas du tout si c'est possible.

Qu'en sais-je si c'est possible ou si c'est facile à faire ? En fait, en venant je m'étais dis que j'en demanderai pas trop vu que bon mon planeur je l'aime bien comme ça, c'est mon petit trésor personnel alors j'ai toujours un peu peur de l'abîmer ou de le perdre. Même si je le faisais remplacer ou que j'optais pour une monture volante, je sais que ce ne serait pas la même chose. Je suis la seule fée de mon monde à pouvoir voler avec cette aile, j'aimerai la garder.

- Boah, si c'est juste ça, ça ne va pas être bien compliqué.

Rain s'arrêta de parler un instant, intriguée par l'ambiance qui régnait dans son salon... Il y avait quelque chose de lourd, très lourd dans l'air. Mmmh... attendez une minute... la cliente à côté du tableau, et les yeux du portrait qui venaient de virer au rouge... ho shi- ! La bourde ! La femme au super décolleté bien rempli venait d'énerver cette brave Helen et ça allait chauffer très, très rapidement ! Il fallait vite évacuer les lieux !

- Heu... on verra plus tard pour le planeur, pour le moment, on s'en va !

Rapide comme l'éclair, la jeune fille attrapa la main de sa cliente et la tira vers la sortie sans douceur, avec la ferme intention de l'emmener loin du salon. Helen en colère, c'est pire qu'une catastrophe nucléaire ! Le tableau était l'un des meilleurs gardiens de la maison et son arme la plus terrible n'était pas la parole ! Pire que le tableau maudit de Chadarnook. Le tableau commença à... "changer". Les couleurs se firent plus ternes et le buste de femme qui y était peint se transforma rapidement en une... créature effrayante verdâtre rayée de noir, avec des crocs et griffes qui feraient pâlir plus d'un chasseur de monstre ! Folle de rage, Helen commença à sortir un bras "hors de son tableau", dans la réalité... Un peu paniquée, Rain ferma la porte du salon et c'est un cri saurien qui l'averti que sa chère et tendre garniture avait l'intention de gober la cliente toute entière avant de revenir à son état normal. Pfiou, heureusement qu'elle était liée à son cadre et qu'elle ne pouvait pas sortir hors de cette pièce... d'autant plus qu'une fois dans la réalité, Helen était... une bonne dizaine de fois plus grande que dans son tableau, si pas plus !

- Bon... la prochaine fois, évitez de me la mettre en colère comme ça, après c'est moi qui doit m'y coller pour la calmer !

La jeune fille emmena la cliente dans la salle à manger, là où on pouvait trouver la boule disco, et lui refila le sac sans fond pour qu'elle l'examine à sa guise. Ensuite, et sans se gêner, elle prit le planeur des mains de la cliente et lui dit :

- J'vais m'occuper de ça tout de suite, ça ne devrait pas prendre longtemps, j'vous demande juste de rester ici et d'éviter d'embêter les autres résidents de la maison... ils ne sont pas tous aussi gentils que notre brave Helen.

C'est ainsi que le technomage disparut avec l'appareil dans sa mystérieuse cave à vin...

Cinq minutes passèrent...
Dix minutes...
Un quart d'heure...

Et elle revint enfin, bien harnachée au planeur de la cliente. Il était fort possible que la dame n'apprécie pas de voir quelqu'un d'autre utiliser son précieux objet, mais c'était nécessaire pour les tests. Enchanter un objet demande beaucoup de doigté et une batterie de tests, rapides dans un cas comme celui-ci, bien plus longs pour des enchantements plus complexes.

- Mission accomplie, plus besoin de s'embêter pour décoller : il suffit de le vouloir !

En guise de démonstration, le planeur se mit à battre de ses ailes métalliques comme l'aurait fait un oiseau -ne vous demandez pas comment... c'est magique- et Rain prit son envol dans les airs, avant de retomber rapidement sur le sol.

- Il vous fera monter aussi haut que vous voudrez, vous propulsera dans la direction que vous voudrez et il ne vous restera plus qu'à planer comme avant.

L'adolescente se débarrassa des harnais et rendit le planeur à sa propriétaire, avant de déclarer :

- Pour le paiement... z'avez le choix entre 75 PIMs ou bien un prix moins élevé et de petits avantages en nature ! Ho... Rain observa à nouveau la dégaine de la cliente, avec son mini-short, la poitrine qu'elle mettait en évidence, et tout le tralala... Pas ce genre de nature là, hein ! Dit-elle en désignant du doigt le décolleté on ne peut plus plongeant de la dame. Par exemple... 40 PIMs et vous me rapportez une certaine plante qui ne pousse qu'au sommet des montagnes de Grâce pas loin d'ici et qui me sera fort utile ! Ou alors... 30 PIMs et vous sortez avec moi ce soir ! N'importe où... cinéma, discothèque, restaurant, chasse au vampire, ce que vous voulez... tant que c'est vous qui payez tout ce dont je pourrais avoir envie !

A vous de choisir l'option que vous préférez.

Gentils ? Parce que Helen est gentille ? Elle m'a insulté -et moi aussi c'est vrai- tu parles d'un comité d'accueil pour les clients. Il/Elle a de la chance d'être la plus réputée des technomage de cette ville, elle aurait peu de clients sinon. J'étais d'accord pour attendre dans le couloir, ça ne me fera aucun mal.
...
Je paye ou je me fais embarquer dans quelques chose de dur ? De très dur même. J'ai penché la tête à la voir avec mon planeur, ça valait le coup de l'emmener avec moi en sortie tant que j'ai mon planeur ? Son retour avec mon planeur m'avait laissé sans voix, autant que la proposition.

-Je paye plein tarif. T'as l'air gentille et je pourrais t'emmener en sortie, mais j'ai peur de ne pas en être capable.

Elle a un tableau monstrueux dans son salon ! Elle a un heurtoir qui ouvre même aux voleurs pour peu qu'on soit gentil avec lui -en plus il est plus trouillard que moi- et elle accueille ses clients avec une robe déchirée couverte de sang ! Non, je suis sûre que si je l'invitais en soirée je serais morte le lendemain matin. Je voudrais profiter de mon planeur avant de mourir.

-Donc je te dois 75 pims.

Et je pourrais partir en chasse aux monstres dans pas longtemps. Quoique, ce serait bien que je passe à l'arène aussi... Je tendis les bras pour récupérer mon engin avec le plus beau sourire qu'une fée puisse offrir.

-"Soit, soit, ce sera 75 PIMs, donc !"

Bon, ben... elle se débrouillerait pour la plante et irait se coucher tôt ce soir, alors, tant pis ! Les clients refusaient toujours de l'emmener avec eux pour faire la fête et refusaient toute proposition de petite mission, préférant payer le prix plein... pourquoi ? Bah, ils devaient sans doute être bizarrophobes, voilà tout ! Enfin soit, elle rendit donc l'engin à sa propriétaire et fit un grand sourire à moitié psychopathe en remontant ses lunettes, ajoutant en même temps :

-"Et n'hésitez surtout pas à revenir si vous avez besoin d'autre chose !"

Niark niark. La seule raison pour laquelle un retour serait bienvenu était qu'elle se fasse manger en chemin et que ça lui fasse une cliente de moins ! ... même si ce serait mauvais pour les affaires. Hé galère.

Bref, plus qu'à attendre le paiement ! Et, accessoirement, raccompagner la cliente jusqu'à la sortie.