Il était une fois...

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Après avoir galéré j'avais enfin réussit à négocier un trajet dans une charrette de marchand jusque la ville d'Entre-Monde. Nous étions au milieu de fruits et légumes à l'arrière, moi adossé sur une caisse mangeant une pomme discrètement piqué au vendeur qui conduisait la carriole.

- D'où viens-tu Thäni ?. J'avais abandonné le tutoiement dès que nous étions sortis de l'épicerie. Tu me sembles jeune, es-tu née ici ? A Entre-Monde ?
Pour ma part je viens d'un monde nommait Ark, où les peuples vivent sainement et paisiblement. Une sorte d'entraide grandeur mondial.

La route risquait de durer quelques heures, surtout vue l'allure de notre transport.
La jeune fille semblait avide de connaître les histoires qu'il m'était arrivé, préparant mon rôle d'orateur je comptais bien combler mon auditoire.
Mais avant j'espérais en apprendre aussi davantage sur cette damoiselle qui me semblait quelque peu naïve. Dans le sens littéral du terme et non péjorativement, elle semblait à la fois réservée, joviale et dénuée de toute méchanceté. Sans arrière pensée, juste curieuse et innocente. Peut-être me trompai-je, en ce cas je le saurais rapidement.

Il avait commencé à me tutoyer et je pensais donc qu'il n'était plus nécessaire de l'appeler Monsieur, comme je le faisais à l'épicerie.

"Pour répondre à ta question, je viens de Duguay ! Je suis née là-bas, et en effet, je n'ai connu qu'Entre-Monde. Pendant plusieurs années, j'ai servi mon père dans un bar. En fait non, depuis ma naissance je n'ai été que l'outil de mon père pour son bar, j'étais une serveuse ... Mais tout ceci a changé il y a quelques mois, lorsque j'ai rencontré une femme capable de se transformer en dragon nommée Ayvis, elle m'a en partie appris à voler, bien que nos manières soient très différentes. Elle était remarquablement gentille et a accepté de m'héberger, c'est ainsi que j'ai pu fuir la joute de mon père, et l'île aussi. Je ne sais pas ce qu'elle est devenue à l'heure actuelle, j'espère la revoir un jour, c'était une excellente amie et un excellent mentor.
Et toi, tu disais que je ressemblais à quelqu'un que tu connaissais, que s'est il passé dans ton monde pour que tu arrives subitement ici ?"

C'était réellement étrange, c'est la première fois qu'en racontant mon histoire, je n'avais pas des sueurs froides, des flashbacks terrifiants et des moments de gèle. Tout ceci fut un grand pas pour vaincre mes peurs.
Le voyage commençait bien, le charriot était lent mais qu'importe, on avait de la nourriture à volonté, tant que l'on ne se faisait pas remarquer par le conducteur, et j'avais ses histoires à écouter, tout ceci se promettait d'être intéressant !

- Duguay Duguay ... Songeai-je. Mh oui je y ai mis les pieds une fois ...Une ville assez riche.

Oh oui les jolies bourgeoises de Duguay ... Quels doux souvenirs ... Leurs courbes délicatement dessinées, et leur caractère si ... farouche !
Revenons en à nos moutons !

La jeune Ange me contais son enfance sur Entre-Monde, pas très joyeux ... Et pourtant elle respirait la joie de vivre.
- Ayvis, je ne connais pas. Mais si tu souhaites vraiment la retrouver je suis sûr que c'est possible. Surtout si elle est dragon, cette race ne doit pas courir les rues. Il faut poser la questions aux fouines d'Entre-Monde et être armé de patience lui dis-je accompagné d'un clin d’œil.

- Et toi, tu disais que je ressemblais à quelqu'un que tu connaissais, que s'est il passé dans ton monde pour que tu arrives subitement ici ?
Je n'aimais pas trop aborder le sujet. Je répondais un peu évasif.
- Oh tu sais j'adore les peuples de mon monde, mais pour faire court nous avons été colonisés par des gens pas très corrects. Une guerre a éclaté et comme dans toutes batailles il y a des victimes. Je me raclais la gorge avant de reprendre. Une adolescente que je connaissais y a laissé la vie. Elle s'appelait Thania, et c'est à elle que tu me fais penser.

Je faisais tourner une nouvelle pomme dans ma main songeur. Je repris mes esprits et croquais dans le fruit.
- Tu veux une pomme ? Regarde on a tout un stock à nos côtés, chuchotai-je pour ne pas que le marchand ne m'entende. Pour ne pas donner un trop mauvais exemple je rajoutais :
- Ne t'amuse pas trop à faire comme moi, tu pourrais mal finir. J'ai quelques histoires comme ça. Veux-tu en entendre une ?

Et hop changement de conversation, prêt à raconter une histoire abracadabrante ... Mais réelle !

Son air penseur, lorsqu'il était en train de s'imaginer les temps qu'il avait passé à Duguay, me faisait rire, avec ce petit sourire en coin qui voulait dire beaucoup de choses et ce regard farouche.

"Je partirais un jour à sa recherche, mais pas pour l'instant !"

Lorsqu'il racontât assez vaguement son histoire, je compris qu'il n'était pas très à l'aise avec son passé et je n'insista pas, il ne fallait surtout pas le contrarier, sinon le voyage allait être long ... très long.

"Je suis désolé pour votre amie, et j'espère que votre monde se porte bien maintenant ! Mais est ce qu'il ne vous manque pas trop ? C'est une question que je me pose toujours, étant donné que je n'ai pas vécu dans le monde extérieur, je n'ai jamais senti cette sensation de manque du 'chez soi' "

J'acceptais la pomme et je la croquais à pleine dents, elle était bonne, ça faisait longtemps que je n'en avais pas mangé d'ailleurs, si longtemps que j'en avais oublié le goût

"Mer...chi" finis-je par prononcer au milieu d'une bouchée

Après avoir avalé ma pomme et jeté les pépins en dehors du chariot afin de cacher les preuves de notre délit, j'étais fin prête à l'écouter.

"Vous êtes quelqu'un de bien vous savez, ne dites pas que vous avez mal fini. Oh oui ! Racontez moi une histoire, s'il vous plait, monsieur !"

Si Ark me manquait ? Terriblement et aucunement en même temps. Ma 2ème vie commence, pour moi, depuis que je suis sur Entre-Monde, je ne suis plus l'homme que j'ai pu être. Je me joue de la vie comme elle a pu se jouer de moi.
J'ai toujours été quelqu'un de téméraire et qui profite de chaque jour, mais sur Ark je respectais mes comparses et nos ententes. Ici je marche sur le fil de l'illégalité, souvent à la limite du droit chemin. Surtout lorsqu'on a connu les débuts d'Entre-Monde, avant que les Sanctuaris
ne sévissent.
- Oui mon Monde me manque, la vie paisible que nous y avions avant l'invasion. Je ne saurais dire si les peuples de mon Monde sont de nouveaux en paix, la guerre a laissé des marques. Mais avec les miroirs qui ne fonctionnent plus, je sais au moins qu'aucun autre peuple ne viendra les déranger. Je regardais Thäni et lui souris.Toujours est-il que ma vie est bien plus trépidante ici.

Ce que je ne dis pas est que mon statut de "presque" Dieu sur Ark me manquais un peu tout de même. La jeune Ange n'avait pas besoin de savoir ça, il aurait fallu que je lui explique mes dons et sincèrement ... J'avais la flemme. Je préférais lui raconter une bonne péripétie Entre-Mondienne.

- Vous êtes quelqu'un de bien vous savez, ne dites pas que vous avez mal fini. Oh oui ! Racontez moi une histoire, s'il vous plait, monsieur !

- Appelle-moi Ayr'. Cette jeune fille était vraiment adorable.

Je m'assis plus correctement et commençais mon récit :
- Connais-tu les sirènes d'Ancalïme ?
Je la laissais répondre avant de poursuivre :
- Et bien si j'étais toi, je ne m'y approcherais pas trop ... Il y a quelques années de cela, j'ai effectué une mission près du lac où vivent ces terribles et à la fois sublimes créatures. J'accompagnais un convoi, je devais m'assurer qu'il arrive bien à destination. Les gars que j'accompagnais étaient sympathiques. Je ne sais pas si tu connais le coin là-bas mais on ne peut pas dire que ce soit très moderne. Nous n'avons rencontré qu'un seul incident sur la route ...
Thäni buvait mes paroles, je la gardai en suspens quelques instants avant de reprendre dans un souffle :
- La roue de la diligence s'est détachée !
Je ris devant la tête éberluée de ma compagne de voyage.
- Elle fut vite réparée, j'étais avec des sortes d'ingénieurs des temps anciens.
Un autre type peu bavard tenait le même rôle de garde du corps que moi.

J'avais un peu soif, mais ne vis rien à boire autour de nous. Je continuai :
- Nous sommes donc arrivés au lieu désiré sans autre soucis. Ma mission était terminée. Les ingénieurs nous remercièrent et nous congédièrent. Mais n'ayant aucun impératif et ne connaissant pas les lieux je décidai de m'y poser pour quelques jours.

La charrette où nous étions s'arrêta brusquement, un cageot de pommes nous tomba dessus.
- Pour une fois que ce sont les pommes qui nous tombent dessus et non nous qui tombons dans les pommes, dis-je fier de ma blague.

- Déguerpissez bande de mioches ! Vociféra le marchand. Je passais la tête par le devant de la roulotte et vis une ribambelle de gosses nous entourer. Ils devaient être une dizaine et ils nous bloquer la route ...

J'écoutais son histoire avec étonnement, il avait un vrai talent de narrateur, il devrait se donner un peu plus dans cette profession, ça le réussirait. Je le poussais à continuer son histoire, afin de savoir pourquoi il m'avait demandé si je connaissais les sirènes d'Ancalïme, chose à laquelle je répondis que non, j'avais seulement entendu parler vaguement des légendes qui traînaient autour de ces sirènes.

"Qu'avez vous fait pendant ces quelques jours ?" demandai-je avant d'être interrompue par la chute de pommes sur nous et l'assaut des enfants assaillant le charriot. Je ne savais pas pas s'ils venaient pour voler quelques pommes ou pour faire une blague idiote, mais je sus en sortant la tête qu'ils étaient là pour nous voler, leurs vêtements ayant subis moultes péripéties, si bien que l'on ne pouvait plus réellement appeler cela des vêtements.

J'aurais bien voulu les aider mais si je leur jetais une pomme, le marchand allait me voir et c'était un allez simple vers la prison, chose que je redoutais. Depuis plusieurs minutes en plus, je réfléchissais au sens de la blague que venait de faire Ayr' puisqu'il avait utilisé une expression que je n'avais entendue depuis longtemps, mais lorsque je compris, un grand sourire perça mon visage et je rigola légèrement.

Thäni se mit à rire à côté de moi.
- Je ne suis pas sûr que ce soit le bon moment lui soufflai-je, voyant la veine du marchand tapé sa tempe.

Je m'adressais à l'homme :
- Ne voulez-vous pas leur donner un petit cageot ? Regardez leurs accoutrements, ils doivent avoir faim. Et je pense que vous seriez moins perdant à vous délester d'une cagette que de leur tenir tête, finis-je par chuchoter à son intention.

Il grogna en guise de réponse :
- Ah oui vous les croyez inoffensifs ? Regardez les bien !

Chose que je fis ... Les gamins se mirent à sourire, un sourire pas très très rassurant laissant apparaître plein de petites dents pointues.
- Oh je vois ...
Ce n'étaient pas des enfants, et ils étaient loin, bien loin d'être tout mignon tout gentil. Nous avions devant nous des Pygmées, petit peuple connu pour leur cannibalisme ... Ce n'étaient pas les fruits et légumes du chariot qui les intéressaient.

- Mais que font-ils sur cette route ?, soufflai-je.

"Pour répondre à ta question, la chose qu'ils font sur cette route est très simple, ils sont en train d'encercler leur déjeuner, c'est à dire: nous" disais-je en essayant de ne pas laisser paraître le tremblement présent dans ma voix.

J'avais entendu des dizaines de légendes sur eux, plus terrifiantes les unes que les autres, certaines disaient que presque tous les voyageurs traversant ces contrées se faisaient avoir. En même temps, qui s'attendait à cette réaction quand on voyait un groupe d'enfants qui semblait affamé. Plusieurs s'approchaient et leur donnait de la nourriture, mais au lieu de leur mâchoire se dirige vers ce qui était dans la main, elle se dirigeait vers la jugulaire de l'homme en face d'eux, et ça se transformait en effusion de sang.

Je me disais bien qu'il y avait quelque chose d'étrange depuis que nous avions passé un certain cap, on voyait souvent une charrette "abandonnée" sur le bas-coté de la route, maintenant je sais pourquoi elles étaient là...

"On a trois options, soit on essaye de les raisonner, soit on les affronte mais je n'ai aucun équipement et je ne sais pas me battre, soit on fuit. Je pense pouvoir te porter assez loin pour te mettre hors de danger avec mes ailes mais je reviendrais pour aller chercher le marchand qui nous a aidé"

- Certes certes Thäni j'ai rarement entendu parler de leurs agissements dans cette région là.

- Ils sont de plus en plus nombreux pourtant ... grogna encore le marchand.

La jeune Ange se proposa de nous porter à tour de rôle loin de cette embuscade :
- J'ai bien peur que si nous laissons notre cher charretier seul il ne fasse pas long feu fasse à cette mini armée ...
Et ce n'est pas avec les équipements que je venais d'acquérir que je risquais de faire grand chose ... D'où mes achats nécessaires à la forge, rien qu'un couteau pouvait changer la donne.

- Te sens-tu vraiment capable de voler avec l'un de nous ?
Non pas que je remettais en cause son don, mais son corps me semblait si frêle pour réussir à nous transporter, il fallait avoir la force de nous soulever, notamment le marchand qui était un peu plus enrobé que moi.
Puis me vint une idée ...
- Thäni, Monsieur le marchand ... Veuillez bien vous cramponner s'il-vous-plaît.
Je posais mes mains sur les croupes des deux chevaux qui tiraient l'attelage et envoya une décharge de feu. Ce qui eu comme résultat un affolement des pauvres bêtes qui se mirent au galop directement, m'envoyant valdinguer à l'arrière du convoi.

Le chariot tressaillait sous la route inégale, les chevaux hors de contrôle, et avec nous trois Pygmées qui avaient réussi à s'agripper sur les bords de la roulotte ...

Comme il l'avait demandé, je partis m'accrocher à un bout de métal qui maintenant la toile du chariot en place, sans comprendre ce qu'il comptait faire. Je le regardais s'approcher des chevaux, il les toucha et d'un coup, ils partirent au grand galop, et lui il fonça sous le choc vers l'ouverture arrière du charriot, essayant de le rattraper avant qu'il ne se retrouve dehors, mais je ne réussis pas à amortir le coup.

Il ne restait plus que trois Pygmées accrochés comme il le pouvait à notre charriot, il y en avait un qui était suspendu à l'arrière, traîné par les chevaux. Il paraissait gentil et je dirigeais ma main vers sa tête pour voir sa réaction, peut-être qu'il n'était pas si méchant après tout.
Je lui caressais la tête quand je perçus un mouvement au niveau de ses yeux et de sa bouche et d'instinct, je retira ma main rapidement. J'avais pris la bonne décision, une seconde plus tard, ma main était agrippée par les bras de ce Pygmée et je me faisais mordre jusqu'à l'os, ses dents entaillées plantées dans mon bras, quelle horreur.

Sauf que j'avais retiré mon bras à temps ... Et que ce Pygmée avait retiré ses deux bras pour m'attraper, quel dommage, il venait de chuter sur le sol. La vitesse le propulsant à une vitesse inimaginable, il s'arrêta après plusieurs roulades, complètement cabossé, peut-être mort même.

"Désolé" chuchotais-je "Plus que deux !"