Blue screen et Androïde !

Sitôt que l’organique est sorti de la pièce, 49821 s’est installée derrière l’ordinateur et s’y est branchée pour transférer les données ainsi récoltées. Elle avait même pris soin d’enregistrer dans ses propres fichiers la photo que celui-ci lui avait montré, annotant à côté de celle-ci de qui il s’agissait. Le patriarche Devalle, Leiline Devalle en version alpha et l’organique Van Derel, également présenté dans une version antérieure à celle qu’elle a pu rencontrer un peu plus tôt. Puis, lorsque le transfert s’est effectué, elle a vérifié l’heure et a vaqué à ses occupations, se familiarisant avec son environnement et avec ses collègues. Puis, peu à peu, ceux-ci ont fini par rentrer chez eux, leur journée étant terminée. Celle de 49821, non. On lui a précisé qu’elle devait rester d’astreinte, ce qui ne l’embête pas plus que ça. Par contre, c’est sa batterie qui râle, l’amovible s’est éteinte un peu plus tôt dans la journée et celle intégrée commence à lui dire qu’il est temps de faire quelque chose. Alors, elle se pose dans un coin et se branche à une prise, afin de charger le tout en un seul coup. Puis, pour plus d’efficacité et histoire d’être rechargée plus vite, elle se met en veille. Ainsi, elle saurait être réactive en cas de pépin, tout en ne puisant pas du tout dans ses ressources.
Dans la Caserne, pas un bruit. Pas de téléphone qui sonne, pas d’organique hystérique ou affolé à passer les portes à la recherche d’assistance, non. Juste une soirée calme et sans encombre. Pas mal, pour une première. Du moins, c’était sans compter sur une de ses collègues qui s’est approchée et qui a tenté une manière peu commune de sortir la gynoïde de sa torpeur : en lui enfonçant son index dans la manière synthétique molle lui faisant office de joue.

« - Hey, AuroRa. On ne dort pas pendant son astreinte !  »

Par réflexe, de survie et surtout militaire, la synthétique réagit au quart de tour, saisissant vivement le poignet de l’organique avant de la retourner et de la bloquer en lui faisant une clé de bras, dans un ballet coloré de LEDs s’allumant et clignotant partout sous sa carrosserie. Elle la relâche aussitôt que ses capteurs lui annoncent joyeusement qu’il s’agit juste de l’organique Roben.

« - Veuillez nous excusez, Organique Roben. Il est peu recommandé d’effectuer ce genre d’action. Nous sommes programmée pour l’auto-défense. » Elle marque une pause, son visage n’ayant absolument trahit aucun mouvement, prisonnier de son éternelle neutralité. « Et nous ne dormions pas. Nous n’en sommes pas capable. Nous étions en veille et parfaitement capable de répondre aux sollicitations verbales. »

Elle hausse un sourcil et se relâche, ses lumières ayant viré au rouge se calment et deviennent bleues avant de cesser de clignoter.

« - Peut-être aviez-vous besoin de notre assistance ? »

La gynoïde baisse la tête et ferme les yeux un instant, une expression presque désolée sur le visage. Les organiques sont fragiles, du moins plus que les synthétiques comme elle, leur épiderme a tendance à changer de couleur en cas de choc ou de manipulation trop brusque et, vue la force dont peut faire preuve 49821, il est fort probable qu’elle lui laisse un souvenir bleuté. Il serait dommage d’abîmer ses collègues dès son premier jour.
« - Nous nous excusons pour cette réaction, Organique Roben. »

Mais celle-ci ne semble pas lui en tenir trop rigueur pour le moment, enchaînant directement sur la raison de sa présence. D’ailleurs, lorsqu’elle évoque les ennuis avec son ordinateur, une petite note survient sur l’écran interne de la droïde, renseignant cette dernière sur l’espérance de vie désespérément courte du matériel informatique lorsque celui-ci tombe entre les mains de l’humaine. 49821 y ajoute une autre annotation, où elle inscrit « IMPORTANT : Éviter toute situation de contact physique avec l’organique Roben. ». L’enregistrement de cette note provoque un faisceau lumineux bleu qui parcourt les interstices entre les plaques constituant sa carrosserie.
Mais pour en revenir à la requête de l’humaine aux cheveux blancs. Celle-ci a besoin des facultés électroniques de sa collègue pour extraire un dossier, chose somme toute assez logique vu le désastre que l’Organique Roben semble être dès qu’il est question d’ordinateur. De plus, son regard de version alpha de canidé larmoyant en viendrait presque à provoquer un léger sourire au coin des lèvres de celle qui ne trahit que peu d’expressions faciales. Puis, ce n’est pas comme si elle avait autre chose à faire pour le moment.

« - Bien sûr que nous pouvons vous aider. A quel dossier voulez-vous accéder ? »

Elle jette un regard en direction de la prise murale où elle est branchée et check son niveau de recharge : celui-ci fera l’affaire pour le moment. Elle débranche la fiche et rembobine le cordon dans un bruit sec et chuintant. Puis, elle tourne à nouveau la tête vers Lin Roben.

« - Nous aurons sûrement une interrogation à votre égard lorsque nous en aurons terminé. Serez-vous à disposition pour y répondre ? »

Le manque de données concernant les personnes sans dossier dans les archives de la Caserne est un facteur qui s’est avéré handicapant lors de son entrevue avec l’organique hybride, plus tôt dans la journée. S’il y a quelque chose à savoir sur certaines créatures, des noms à connaître ou autres éléments nécessaires pour pouvoir effectuer sa tâche de Sanctuari avec efficacité, le modèle A.u.r.o.R.a se dit qu’il est préférable de poser la question à quelqu’un qui a vécu plus longtemps qu’elle sur ce monde qui lui est majoritairement inconnu. Et ce n’est pas l’ermite Ambre, cloîtrée dans son atelier, qui a pu lui en fournir suffisamment. Elle connaît les noms des ingénieurs et autres mécaniciens qu’elle admire… Le reste ne sont qu’inconnues.