Une soirée musicale d'enfer

William attendait sa collègue. Il lui avait donné rendez-vous à l’intersection de deux rues, tout près de l’endroit où aurait lieu la représentation. Il était en avance et attendait sagement, réfléchissant et se repassant mentalement ce qui s’était passé ces derniers jours.

Il devait toujours plusieurs contrats à ses « amis » du monde souterrain qui lui avaient livré le violeur d’Elliot. Le blond les exécutait quand on le contactait pour cela, avec son détachement, pour ne pas dire son ennui, habituel. Autrefois, il recherchait dans ses meurtres au hasard un pic d’excitation, mais depuis que les choses allaient mieux entre l’ondin et lui, l’ange ne ressentait plus ce besoin. Ce n’était pas qu’il répugnait à effectuer les contrats – il les abordait à la manière des énigmes à résoudre publiés quotidiennement dans les journaux – mais il s’était promis de sortir de ce milieu une fois que sa dette serait payée.
Et puis ça ferait sans doute plaisir à Elliot.

Cette fois-ci, il s’agissait d’un barde. William avait déjà oublié la raison pour laquelle un contrat avait été mis sur sa tête.

L’ange avait passé les deux derniers mois à l’espionner et à observer sa routine, cherchant à repérer des habitudes qui pourraient lui servir. Le barde était assez populaire, suffisamment pour se produire lors de spectacles assez courus. Il fuyait néanmoins le contact avec la foule et préférait généralement s’éclipser une fois ses chants faits, profitant d’une porte de service pour sortir par une ruelle peu fréquentée.
Tout cela se faisait d’une manière bien régulière, presque comme un métronome. Un plan commença à se dessiner dans la tête de William. Il avait néanmoins besoin d’une personne pour l’aider dans l’accomplissement de son plan. Il n’était pas du genre à se reposer sur des complices, notamment parce qu’il n’aimait pas tout ce qu’il ne contrôlait pas à 100%, et les complices représentaient un risque de ce point de vue. C’était toujours chronophage d’avoir deux assassinats au lieu d’un.

William releva la tête et commença à sourire à sa collègue qu’il vit de loin. Il fit un signe pour attirer son attention et la saluer.

« Bonjour, tu vas bien ? Merci encore de m’accompagner à cette représentation. Tiens, voilà ton ticket… »

Disant cela, l’ange sortit de sa poche un ticket pour la représentation que s’apprêtait à donner le barde.

Une soirée inédite pour la jeune femme-papillon. Sortir pour un concert aux côtés d'un autre homme que K'ien en personne ? Ce n'était pas dans les habitudes de la nymphe. En réalité, il lui arrivait rarement de sortir "entre copines". Encore moins "entre collègues."

William était l'un de ces Guérisseurs avec qui elle n'avait que de très courtes interactions qui se résumait généralement à des formules de politesses. Quelqu'un de calme, réfléchi et très discret selon elle. Mais pas moins appréciable pour autant.

À peine il l'eut invité que Nabi trépigna d'impatience à l'idée de rencontrer l'une de ses idoles. Davenys, pour son nom de scène, Dave pour les intimes. Ce faune écrivait tout type de chanson, allant d'histoire à l'eau de rose comme certaines à l'humour décalé, toujours avec ce même entrain et ses mélodies entêtante. Elle écoutait certaines de ses musiques sur son téléphone.

Habillée sur son trente-et-un dans une magnifique et longue robe blanche, petit veston assortit, la nymphe quitta sa maison aussitôt qu'elle fut prête. Excité, elle s'envola directement à partir du balcon de chez elle, observant du ciel le quartier de Northrives.

Elle eut bien du mal à trouver l'intersection où elle avait rendez-vous, elle et son sens de l'orientation inexistant qui lui fit faire tourner en rond maintes et maintes fois aux dessus des maisons. Ayant prévu le coup, elle arriva juste à temps dans l'un des deux quartiers qui se jouxtaient et reconnu au loin son camarade qui lui fit signe. Elle se rapprocha de lui, un grand sourire sur le visage, la saluant d'un geste de la main.

- Bonjour William ! Merci à toi surtout de m'avoir invité !

Elle récupéra son ticket et le duo se dirigea vers le bâtiment où eut lieu le concert. La foule abondait déjà l'entrée. Des créatures de toutes origines étaient venue assister au spectacle et l'ambiance chaleureuse était palpable. Tout en se joignant à eux, Nabi fit la moue.

- Mince ! Nous n'aurons pas les meilleures places pour le concert …

Mais cela ne gâcha certainement pas sa bonne humeur. Elle allait enfin rencontrer Davenys pour de vrai ! Excitée comme une puce, elle ne put s'empêcher d'envoyer un message à son dieu préfère pour lui annoncer la nouvelle, d'un petit message par téléphone.

Nabi a écrit:Je suis au concert avec mon collègue ! Je vais enfin voir Davenys ! J'espère que toi ça va.

- Mais dis moi William. Personne d'autre ne voulait t'accompagner à ce concert ?

Vu le temps d'attente qu'il y aurait avant d'entrer se placer dans la salle, la nymphe jugea plus sympa d'engager la conversation avec son camarade Guérisseur. Surtout du peu de choses qu'ils connaissaient de l'un comme de l'autre.

« Malheureusement, mon mari est trop occupé ces derniers temps. Il aurait pu m’accompagner un autre jour mais pas ce soir. »

Il était extrêmement rare que William évoquât Elliot à des étrangers. L’ange se montrait absolument discret sur sa vie privée, sans pour autant éviter de répondre quand on le questionnait à ce sujet. De toute manière, avec ce qui était arrivé à l’ondin et la manière qu’avait eue le blond de réagir, sa relation avec Elliot devait être plus ou moins connue de tout le sanctuaire. Cependant, avec ce qui s’était justement passé, les collègues de William hésitaient à se montrer trop inquisiteurs, craignant peut-être de remuer certains souvenirs.

« Enfin bref, je me rappelais t’avoir entendue parler de ce barde une fois dans la salle de repos et donc, je me suis dit que cela te ferait sûrement plaisir. »

Attendant dans la queue, l’ange jeta un nouveau coup d’œil à son ticket, comme s’il cherchait à avoir d’autres informations sur le barde.

« Peut-être que tu pourras m’en dire d’ailleurs un peu plus sur lui car je t’avouerai que si j’ai obtenu ces billets un peu par hasard, je ne connais pas du tout ses œuvres. »

Bon, visiblement, une de ses œuvres avait suffisamment énervé quelqu’un pour qu’on fasse appel à William mais l’ange ne s’était pas renseigné plus que cela sur les vraies raisons qui avaient fait que le barde était déjà un homme mort – mais qu’il fallait encore l’en informer.

« Cela dit, ne sois pas trop déçu par tout ce monde. Je connais quelque chose que les autres ne savent pas mais qui te fera sûrement plaisir. » dit-il dans un sourire. « Mais je te dirai cela une fois que l’on sera installés... »

Nabi fit un peu la moue à sa réponse. Elle eut presque le triste sentiment de prendre la place de son amant à ce concert. Elle espérait au moins le consoler avec ses paroles.

- Oh, c'est dommage … peut-être qu'il y aura une autre date où ton mari sera disponible !

Toujours voir le positif, tel est son credo. Elle continua d'observer le public qui les accompagnera pendant leur concert. Elle espérait presque en profiter pour faire des rencontres de fans, voire se faire nouveaux amis. Rien de mieux qu'un événement pareil pour rassembler les gens. Un petit groupe chantait déjà l'une des chansons phare de "Dave" au milieu de la foule lorsque William lui demanda un peu plus de précision sur le répertoire musical du barde.

- E-et bien … Il a fait beaucoup de chanson en réalité. C'est un artiste connu pour faire des musiques entraînantes avec sa guitare, en y ajoutant des paroles rigolotes ! Elles reflètent notre société jusqu'à parfois la caricaturer sans pour autant entrer dans le vulgaire. Contrairement à beaucoup d'autres artistes de nous jours …

Nabi avait dans l'horreur les chansons qui misait majoritairement sur le grivois et le langage grossier pour se faire aimer des populations. Malheureusement, l'évolution fit de ces textes sont les plus appréciés de la génération actuelle. Quel gâchis.

William voulut rassurer la femme-papillon grâce à un détail qui lui "fera certainement plaisir". Elle releva une main à ses lèvres, confuse.

- A-Ah bon ?

Résultat : il avait beaucoup trop titillé la curiosité de la nymphe qui passa le plus clair de son temps de la fil d'attente à chercher où voulait t-il en venir. Elle n'attendit plus qu'une chose : d'être installée pour connaître son petit secret.

Les voilà à l'intérieur. Pour la décoration, les organisateurs avaient mis les petits plats dans les grands. Sièges dignes d'une salle de cinéma Ternoise et pourtant, ambiance boisée aux lumières colorées comme dans les bars de Northrives. Décalée, comme l'interprète. La scène tout au bout ne présenta qu'une guitare accrochées à son socle. LA guitare de Maître Davenys comme aiment l'appeler les fans.

- William, tu as une préférence pour le placement ?

Même si elle avait l'envie brûlante de se mettre "tout tout tout devant", elle composa avec son collègue, le suivant selon son souhait à lui. Après tout, c'était lui qui invitait. À peine firent t-ils placé que la nymphe se tourna vers l'ange, des étoiles pleins les mirettes.

- Alors, alors ? C'est quoi cette chose que tu connais et qui me fera plaisir ?

William se contenta de hocher la tête quand la conversation se poursuivit quelques instants sur son mari et son emploi du temps. Brièvement, il songea que tous deux n’avaient pas fait une petite sortie depuis un certain temps déjà et que quitter la ville quelques jours leur ferait sans doute du bien. L’ange se promit de vérifier son emploi du temps au sanctuaire pour voir quand il pourrait prendre quelques jours de congé et de ne pas oublier d’en parler à Elliot. Fut un temps où le blond pouvait proposer des voyages surprises à son amant lorsqu’ils vivaient dans leur monde d’origine, mais l’ondin était devenu quelqu’un de si occupé que ce n’était plus vraiment possible de partir ainsi, à l’improviste.
Enfin, William était là pour autre chose ce soir et il se concentra à nouveau. Machinalement, il nota les issues de secours une fois entré dans la salle de spectacle. Il avait poliment écouté sa collègue, ponctuant ses phrases de petits mots indiquant qu’il suivait la conversation, mais la réalité était qu’au plus profond de lui-même, l’ange n’en avait strictement rien à faire. Ce n’était pas comme si le barde allait continuer bien longtemps sa carrière, ou si ses œuvres passées ou l’amour de ses fans pouvaient le sauver.

Ils s’installèrent là où le souhaitait Nabi, William ayant indiqué que n’importe quelle place lui conviendrait.

Une fois assis, sa collègue repartit immédiatement à la charge. Les yeux de l’ange, de ce bleu glacé et inexpressif, contrastaient avec le léger sourire qu’il affichait. Il fit mine de ne pas répondre dans un premier temps, mais commença à expliquer, à voix basse et sur le ton de la confidence :

« Eh bien… la personne qui m’a donné ces billets… Un patient du sanctuaire en passant qui tenait à me remercier, m’a dit que si je voulais rencontrer en personne le barde et échanger quelques mots avec lui, je pouvais le faire. Personnellement, cela ne m’intéressait pas plus que cela, mais je crois que pour toi, ce sera différent, non ? »

William laissa quelques instants à Nabi pour profiter de la nouvelle, avant de donner quelques détails supplémentaires.

« En fait, c’est assez simple : il a un emploi du temps assez réglé et après le concert, il doit toujours quitter la salle de spectacle relativement rapidement. En général, il sort environ 10 minutes après la fin du spectacle par une porte de service. Tu te rappelles le croisement où nous nous sommes retrouvés ? Eh bien, c’est dans cette rue qui longe le bâtiment. »

Nabi écouta attentivement les paroles de l'ange qui se décida enfin à délier sa langue. Si elle ne comprit pas où il voulut en venir avec son petit secret au départ, les étoiles dans ses yeux s'intensifièrent lorsqu'elle se rendit compte enfin que William lui offrit le sésame pour pouvoir rencontrer le barde en personne et seule.

- Sérieusement ?!

La petite poignée de personnes autour pointa leurs regards en direction de la femme-papillon bien trop enthousiaste. Couverte de honte, elle se couvrit la bouche de ses deux mains, se mit à rougir intensément et se replaça correctement dans son fauteuil.

- P-pardonne-moi, je me suis emportée ... Murmura t-elle. Mais c'est vrai de vrai ?

Après confirmation de son camarade, son sourire se fit plus grand encore. La salle fut comble en peu de temps qu'il ne faut pour le dire. La nymphe était tiraillée entre la hâte d'assister au concert de l'illustre Dave et la hâte que tout cela se termine afin de rencontrer son idole en chair et en os. En attendant, elle resta muette comme une carpe, trop plongée dans ses pensées - et pour éviter de se faire remarquer une fois de trop.

Le chanteur se fit attendre mais le public n'en démordit pas, se mettant parfois eux-même à continuer de chanter les plus célèbres chants de sa discographie. Jusqu'à ce que les lumières se tamisent dans la salle, provoquant le silence de l'assemblée pourtant bien échauffée.

Après un instant de silence long comme le monde, des voix se firent entendre, en provenance de derrière la scène. Commune à une dispute. Interloqués, les spectateurs se regardèrent sans comprendre ce qu'il se passa. Le sourire lumineux de Nabi s’effaça progressivement. Crescendo, les voix se firent plus audibles.

- Mec, tu n'es clairement pas en état de chanter !

- M'si j'peux ! J'ai chanté dans des z'états bien plus pire avant !

La conversation houleuse continua sous le regard médusés de la foule.

- Justement ! Si tu pouvais évit-

- Maintenant casse toi, ché l'heure pour moi de briller !

Et Dave apparut enfin aux yeux du grand public, levant les bras pour l'inciter à l'acclamer.

- Et chalu-

Le barde tituba et se cogna contre le socle de sa guitare, lâchant un juron de tous les diables. Il reprit son équilibre et leva de nouveau les mains haut vers le ciel.

- Cha-salut à tous ! Est ce que z'êtes chaud ce souare ?!

Mais le public ne sut comment agir face au chanteur ivre. La nymphe observa horrifié le triste spectacle que l'on lui avait offert. Jamais Dave n'avait fait parler de lui pour un fait similaire. Elle qui le voyait, l'admirait comme une grande figure, un mythe se brisa sous ses yeux.

Voyant que personne ne fut aussi enthousiaste que lui, le conteur fit la moue.

- Roh, z'êtes pas drôle ce soir !

Il accrocha maladroitement le sangle de sa guitare, se mettant en position pour entamer enfin le vrai spectacle.

- Commençons aloooooors !

Il n'eut le temps de faire que quelques notes qu'il s'arrêta net, une main sur sa bouche. Précipitamment, il se dirigea vers la sortie de la scène, mais il était trop tard. Ses précédentes consommations eurent raison de lui et tout l'alcool ingurgité fut aussitôt remonté à l'extérieur, décorant le sol de la scène et laissant Dave dans un piteux état.

Des bruits écoeurés se firent entendre dans les gradins, certaines personnes quittèrent même le concert sans demander leurs restes. La femme-papillon ne put pas croire ce qui arriva sous ses yeux innocents. Dave était tout, sauf ça … elle se frotta le visage, cachant son minois à qui voulait le voir, priant pour que tout ceci s'arrête.

- Mec, je t'avais dit que tu n'étais pas en état !

L'elfe prononçant ces mots tira le chanteur hors de la scène, prenant sa place en évitant la "peinture" laissée par son camarade. Son visage était grave, rongé par la gêne.

- Nous sommes sincèrement désolé pour ce qu'il vient de se passer. Nous allons tenter du mieux que nous pouvons pour régler ce problème. Veuillez accepter nos excuses et merci de votre compréhension.

Il repartit aussitôt qu'il fut venu, laissant le public dans l’incompréhension la plus totale. C'était le final qui brisa le coeur de la pauvre fan que Nabi était.

William prit le temps d’esquisser un sourire face aux réactions de Nabi. Comme à son habitude néanmoins, il resta largement silencieux. Il continuait de se tourner de temps à autre, prétextant un bruit ou un mouvement des personnes qui continuaient à investir les lieux pour en réalité détailler au maximum la salle. Sa collègue obtenait un intérêt poli mais l’ange répondait généralement par des réponses bateaux qui ne nécessitaient guère de concentration.
Quand on se rapprocha du début du spectacle, le public enchanté précédait le barde dans ses chansons. Le blond se demanda comment un artiste apparemment si populaire et donc, au caractère si lissé, avait pu se retrouver dans la situation où un gros bonnet de la société souterraine ordonnait sa mort. Ce qui gênait William, ce n’était pas tant que le barde fut si populaire et que sa mort provoquerait donc chez tous ces gens une lourde peine, mais c’était surtout qu’un profil comme celui-là obligerait nécessairement la police et les sanctuari à fournir des résultats. Enfin, ils étaient d’une incompétence notoire et il n’y avait pas de raison pour que cela change.

L’ange s’enfonça un peu plus dans son siège, laissant Nabi joindre sa voix à celles de la foule.

Rapidement, on se rendit compte que quelque chose n’allait pas. Après les simples bruits de coulisse, le blond eut l’occasion d’assister à ce genre de moment typiquement malaisant, qui vous font détourner le regard ou souhaiter que vous fussiez partout sauf ici. La mine de William se ferma. Cela pouvait évidemment passer pour l’occasion en une profonde déception, voire une certaine condamnation du « spectacle » qui lui était offert, mais cela correspondait surtout à un agacement. Des semaines de travail pour faire un plan à en rendre jaloux la mécanique des montres suisses rendues inutiles parce qu’un benêt sans cervelle avait choisi ce jour pour boire avec la bêtise d’un jeune adolescent puceau et inconscient de ses limites.
Le blond tourna la tête vers sa collègue. Elle était censée jouer une part importante dans ce qu’il avait prévu mais avec ce qu’elle avait sous les yeux, tout était remis en question. William tourna la tête et jeta à Nabi un regard qui pouvait passer pour de la commisération.

« Je suis désolé… »

L’ange attendit un peu et regarda autour de lui. Il n’y avait pour le moment plus d’annonce mais un nombre croissant de spectateurs se levait et se dirigeait vers la sortie. Quelques « remboursez ! » se firent entendre, d’abord épars. Petit à petit, les voix se joignirent les unes aux autres. Ceux qui avaient commencé à partir s’arrêtèrent puis se retournèrent vers la scène. Bientôt, c’est tout le public qui criait « Remboursez ! Remboursez ! » dans un vacarme assourdissant, entrecoupé de sifflets, puis de projectiles divers – bouteille d’eau, verre de soda en carton, paquets de pop-corn – qui venaient s’écraser sur la scène.
Que faire, que faire ? Autant continuer à évaluer la situation pour le moment. L’état du barde ne remettrait peut-être pas en cause la suite de ses plans. Quelque chose se fit entendre dans les haut-parleurs mais le public faisait désormais trop de bruit pour que William pût comprendre ce qui se disait.

« Nabi…, commença William en essayant de faire en sorte que sa voix couvrît les récriminations du public, je suis désolé. Est-ce que tu veux malgré tout le rencontrer ? »

L'ambiance pourtant si chaleureuse de la salle se transforma en un torrent de colère, les spectateurs hurlant à qui voulait l'entendre que ce concert était une honte et la requête du remboursement de leurs places. Nabi ne sut que faire. Ses mains couvrirent sa tête, son esprit perdu entre le malaise et la tristesse, embrouillé par le brouhaha perpétuel des autres personnes encore présentes.

Ils ne chantèrent plus pour le barde, mais pour recevoir gain de cause suite à cette ignominie.

La nymphe fut sortie de ses tourmentes par la voix apaisante de l'ange. Ce dernier sembla culpabiliser du triste spectacle qu'il lui avait offert bien malgré lui. Elle savait pertinemment qu'il n'y était pour rien, mais le seul mot qui pût sortir fut un "Je ...". Et pourtant, la proposition de William tint encore. De quoi un minimum étonner la femme-papillon. Si c'était son rêve de rencontrer Dave un jour, autant dire que ce n'était clairement pas dans ce contexte qu'elle l'espérait. Son visage était caché sous sa fine chevelure, elle dû parler plus fort pour se faire entendre.

- Non.

Sa respiration tremblante trahit son émotion. Elle releva la tête et tenta un sourire, affichant désormais les larmes qui coulèrent le long de ses joues.

- C'est très gentil William mais ... je ne peux décemment pas accepter de le rencontrer ...

Coup de théâtre lorsque l'elfe de tout à l'heure revint sur scène, se protégeant du mieux qu'il put des cannettes et autres "missiles" de ses deux bras devant son visage.

- Veuil- oh m**de ! Veuillez vous calmer s'il vous plaît !! Nous avons une annonce à vous faire !

Malgré la tension et quelques réticents extrémistes, le calme revint progressivement dans la salle. Ce ne fut que lorsqu'il eut le silence complet que le manager du chanteur fit une contre proposition au fiasco que fut cette soirée.

- Avec Dave, nous vous proposons une nouvelle date pour une concert. Il sera décalé à la semaine prochaine !

Des voix se firent entendre légèrement dans le public, prirent progressivement en intensité jusqu'à ce qu'un énergumène se leva et éleva la voix bien plus que de raison pour dévoiler son opinion à toute l'assemblée.

- On s'en bat les c**illes de vot' chanteur ! On veut être remboursé !

Le public acclama la déclaration de ce dernier, reprenant de plus bel "l'hymne du remboursement". Nabi se tourna vers la scène souillée par la stupidité de la célébrité qu'elle admirait tant et désormais par ses anciens fans qui n'hésitèrent pas à continuer d'y jeter tout ce qu'il leur passait sous la main. Elle ne voulait ni assister, ni participer à cela. Le cœur arraché, elle se leva de son siège et balbutia quelques mots à son accompagnateur.

- J-Je veux rentrer chez moi ...

À voir s'il allait être du même avis. Peut-être proposerait t-il d'aller boire un thé quelque part pour se détendre avant d'aller se coucher et oublier cette horrible soirée. À lui de voir.

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